On distingue habituellement 3 types de léwisites :
À température ordinaire la Lewisite pure est incolore, mais elle est rarement pure. On la trouve de couleur ambrée à brun ou vert foncé.
Elle reste à l'état liquide dans l'eau froide en raison de sa température de fusion qui est très basse (-18 °C) ce qui en fait un toxique plus "efficace" dans les pays froids en hiver que l'ypérite (inactive en dessous de 6 °C). Elle est également toxicologiquement plus "efficace" dans les pays chauds (où il est mieux vaporisé dans l'air). Mélangée avec l'ypérite, elle prend la consistance du miel.
Pure, la léwisite est presque inodore, mais les impuretés qu'elle contient habituellement dues à ses modes de fabrication ou d'utilisation lui confèrent une odeur d’essence de géranium (en réalité : pélargonium, souvent confondu avec le géranium), qui durant la guerre devait alerter les soldats (port du masque à gaz et d'une tenue de protection).
C'est dans la thèse universitaire d'un jeune chimiste Julius Arthur Nieuwland du Maloney Hall, un laboratoire de chimie de l'Université catholique d'Amérique (Washington DC) que Winford Lee Lewis, chimiste de l'armée américaine, a trouvé (début 1918 ?) la formule nécessaire à la synthèse de ce produit toxique (nécessitant la présence d'acide chlorhydrique et de mercure). L'armée américaine l'a développé comme arme secrète au Nilo Park (centre situé à Cleveland, Ohio) en l'appelant d'abord « the new G-34 » pour confondre son développement avec celui de l'hypérite (ou Gaz moutarde). Secrètement, le capitaine James Bryant Conant a reçu l'ordre d'en préparer la production industrielle à grande échelle. Cet ancien professeur de chimie de l'université Harvard avait été nommé directeur de l'Unité de recherche « Organic Research Unit No. 1 ».
La lewisite ne semble pas avoir été utilisé lors de la "grande guerre" par les USA, mais elle a au moins été expérimentée dans les années 1920 sous le nom de Dew of Death (« rosée de la mort »).. Les américains s'y seraient spécialement intéressé car ininflammable et active en milieu froid. Il a été alors désigné par le sigle M1 lors de la Seconde Guerre mondiale avant d'être nommée « L » par l'OTAN.
Usages militaires : Les léwisites ont été utilisées à partir de 1918, seules ou en mélanges avec de l’ypérite au soufre (mélange parfois dit « HD ») pour en abaisser le point de fusion, afin de "mieux" la vaporiser le produit à température ambiante. C'est un produit qui a été fabriqué dans les grands pays industriels en grande quantité, au moins jusqu'en 1943. Les États-Unis en auraient produit au moins environ 20.000 tonnes, qui ont été conservées en raison de la possibilité de l'utiiser comme antigel pour le gaz moutarde ou pour mieux faire pénétrer ce dernier au travers des vêtements de protection dans certaines situations particulières. Il a été remplacé par la variante dite « HT » du gaz moutarde ; un mélange 60/40 de gaz moutarde soufré et de O-moutarde(T)), déclaré obsolète dans les années 1950. Certains stocks de Lewisite ont été neutralisés à l'eau de javel et jetés dans le Golfe du Mexique. Selon les usines, pays et époques de fabrication ou modes de stockage, elle contient diverses impuretés et aussi des additifs chargés de le stabiliser et/ou d'en renforcer la toxicité ou le pouvoir vulnérant.
Effets psychologiques : les impacts des gaz ont fortement impressionné les belligérants qui les ont subi et ceux qui en ont entendu parler, au point qu'ils ont ensuite été peu utilisés alors que d'énormes stocks en avaient été accumulés. Après la grande guerre, de nombreux journaux ont publié des articles exagérant même les impacts de la lewisite, ainsi Le Cleveland Plain Dealer le 15 juin 1919, citait la lewisite comme étant soixante-deux fois plus puissant que l'ypérite, et susceptible de tuer un adulte à raison d'une seule goutte sur la main. Le 26 février 1923, un article du Journal de San-Francisco estimait que la lewisite pourrait stériliser un terrain au point que rien ne pourrait y pousser au moins deux ans et peut-être plus longtemps, ce qui semble a posteriori vérifié sur certains sites de séquelles de guerre, mais où les doses ont été extrêmes (démantèlement d'obus chimiques), sur la place à gaz de Verdun par exemple.
Après des essais en milieu naturel, cette arme a ensuite été abandonnée par les USA, probablement en raison d'une dégradation trop rapide en condition humide (pluie, brume..), d'une odeur trop repérable, mais aussi peut-être en raison d'une rémanence trop importante du produit en condition sèche; (dans un environnement bâti par exemple) et du fait que comme de nombreuses armes chimiques, il puisse se retourner contre celui qui l'utilise, ainsi peut-être qu'une toxicité environnementale importante et des conséquences éthiquement inacceptables ont fait que les stocks importants ont peu été utilisés après 1918.