On peut remonter aux racines des CMPP via trois préoccupations qui apparaissent au début du XX eme siécle:
- la première est le soucis déségrégatif à l'égard de l'enfance taxée "d'anormale" par les aliénistes du siécle précédent. Ainsi dans la lignée de Binet, opposé aux théories aliénistes, se développe, au sein de l'instruction publique un mouvement psycho pédagogique prémisse de l'enseignement spécialisé. Parallèlement le ministère de la santé ouvre quelque instituts medico éducatifs au sein des asiles tandis que certaines œuvres privées de bienfaisance en font de même.
Il apparait rapidement que c'est par le rapprochement des différents secteurs en charge de l'enfance (médical et éducatif, public et caritatif) que l'on pourra avancer.
Ainsi l'éducation alliée aux soins notamment psychologiques doit permettre de sortir ces enfants des ghettos dans lesquels les enfermaient des théories constitutionnelles (issues de la "dégénérescence" de Morel) Il convient cependant de mentionner, auparavant, le mouvement des "médecins pédagogues" avec Jean Itard ( l'enfant sauvage de l'Aveyron), Ferrus, Seguin qui ouvrirent les prmiéres classes pour "arriérés et défivient éducables" à Bicetre et à La Salpetriére dés la fin du XVIIIeme siécle.
On citera ainsi les expérience du Dr R Lafon à Montpellier ou la première tentative de coordination entre pouvoirs publics et initiative privée confiée à Henri Wallon par Léon Blum et malheureusement avortée.
Et paradoxalement c'est le régime de Vichy qui fera substantiellement avancer La nécessaire coordination. Mu par son soucis d'ordre et de morale Vichy créé les ARSEA (Associations Régionales de Sauvegarde de l'Enfance et de l'Adolescence), les premiéres écoles d'éducateurs et le terme d'inadaptation!
Dans l'immédiate aprés guerre se sont les ARSEA qui favoriseront en articulant subsides publics et dons privés la création de nombre d'établissements en direction de l'enfance inadaptée.
Dans le même chapitre il convient de mentionner l'école de la Salpetrière avec Georges Heuyer qui allie un cadre medico psychologique à un soucis rééducatif.
- La seconde contrainte apparu bien vite : la déségrégation était inséparable d'une desalienation. C'est la question de la cure ambulatoire, préservant l'insertion de l'enfant dans son milieu naturel, voir son inscription dans une scolarité "ordinaire". Or, contrairement à bien d'autres pays, la France se trouvait quasi dépourvue de structures ambulatoires (une petite exception parisienne: la consultation de neuro psychiatrie pour enfants, au dispensaire de la Caisse de Compensation de la Métallurgie, future CAF, rue Viala, et de très rares consultations hospitaliéres). L'idée de soins psychiatriques ambulatoires pour enfant ne s'était réalisé qu'aux USA avec Adolphe Meyer (guidance de l'enfant) puis Clifford Beers (hygiène mentale / création en 1903 de la premiére "outdoor patient clinic for mental health" in New Haven). En 1939 ont comptait tout de même 776 lieux de soins ambulatoires sur l'ensemble des Etats Unis. De même on connait les efforts d'Anna Freud pour organiser de tels structures à Vienne (avec des échos à Budapest et Berlin), efforts qu'elle poursuivra à Londres ( Hampstead Clinic);
- Enfin et surtout, en cette première moitié du XXe siècle, la psychanalyse était en plein essor.
Elle commençait de plus à s'intéresser aux enfants.
Le projet de tels lieux ouverts était des plus propice pour étendre une pratique, confinée, voire rendue impossible, dans les institutions entièrement fermées de la période antérieure.
Les CMPP sont nés après la Seconde Guerre Mondiale, de deux projets distincts :
- les centres psycho-pédagogiques: (CPP) Le premier fut le centre Claude Bernard à Paris, fondé en 1946, dans les locaux du lycée éponyme, fruit de la collaboration de l’Éducation nationale et de psychologues d'orientation psychanalytique. C'est Georges Mauco, personnage pourtant peu exemplaire dans la periode précédente, qui obtiendra du Général De Gaulle sa création et en prendra la direction administrative et pedagogique, le Pr André Berge en assumant la direction médicale. Le CMPP Claude Bernard comptera parmi ses intervenants plusieurs grands noms de la psychanalyse d'enfants et de la pedo psychiatrie parmi lesquels : Françoise Dolto, Maud Mannoni,Serge Lebovici, René Diatkine et beaucoup d'autres .. D'autres CPP seront créés dans la foulée, notamment celui de Strasbourg ( J Faviez Boutonnier); en 1954 il existera ainsi 3 CPP en France.
Les CMPP issus de ce courant disposent généralement de personnels issus de l'éducation nationale, d'une double direction (médecin directeur et directeur administratif et pédagogique (DAP). Ils ont longtemps étaient regroupés au sein de l'Association Française des CMPP voir du groupe des CMPP de l'ANCE (Association Nationale des Communautés Éducatives).
- les centres médico-psychologiques (CMP, sigle repris, plus tard par les anciens "dispensaires d'hyghiéne mentale" du secteur public) d'orientation médicale et psychanalytique dont le précurseur fut l'institut Claparède fondé en 1949 sous l'égide de la Sauvegarde de Paris, le futur CREAI, implanté d'abord rue du Ranelagh à la place de l'actuelle maison de la radio puis à Neuilly sur Seine ( Henri Sauguet, Simone Decobert, Genevieve Haag, Joyce McDougall etc ...). Ces CMPP sont le plus souvent animés par une double direction médicale et administrative et étaient représentés par l'Association Nationale des CMPP.
C'est le Décret n° 63-146 du 18 février 1963 qui viendra fusionner les deux courants et donnera naissance aux CMPP, tels que nous les connaissons actuellement.
Les CMPP furent ainsi les pionniers de l'intervention auprès d'enfants et d'adolescents en difficulté, préfigurant les dispositifs ambulatoires extra hospitaliers de la psychiatrie publique, nés postérieurement, à partir des années 60, avec la sectorisation psychiatriques (intersecteurs de psychiatrie infanto-juvénile).
Ils sont au nombre de 305 en France (470 en prenant en compte leurs "antennes") et sont présents dans pratiquement chaque département français.
La plupart d'entre eux ont été fondés dans les années 65 à 80.
La région parisienne regroupe cependant un petit tiers des CMPP.
En 2001 l'ensemble des CMPP avaient dispensé quelques 2 640 000 consultations et seances de traitement tandis que l'ANCMPP estimait à environ 150 000 le nombre d'enfants suivis par ces centres sur l'ensemble du territoire.
Par ailleurs, les CMPP qui étaient représentés par quatre associations (AFCMPP, ANCMPP, GRAMES, ANCMPP territoriaux)sont maintenant (2010) regroupés au sein de la FD CMPP, actuellement présidée par le Dr Richard Horowitz.
Cette unité nouvelle (et inédite) du "mouvement CMPP" illustre bien sûr l'inanité de différences historiques perçues comme peu pertinentes dans un contexte transformé, mais aussi la volonté des professionnels de défendre ensemble leurs valeurs de travail