Château de Beauregard (Loir-et-Cher) - Définition

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Description

Le bâtiment central présente deux étages de galerie: au rez-de-chaussée une galerie couverte en portique comptant sept arcades et au premier étage une galerie couverte. Au XVIe siècle, les galeries furent conçues pour relier les deux bâtiments d'habitation. Au sud, en retour d'équerre, avance une aile à deux étage qui présente sur ses toits, des cheminées à l'italienne, hautes et étroites, décorées d'inclusions d'ardoise.Il faut imaginer, de l'autre côté de la cour, une autre aile, probablement le corps de logis primitif du XVe siècle, inclus par Jean du Thier lors de la construction du château. Cette aile, visible sur les plans d'Androuet du Cerceau, fut détruite au XVIIe siècle pour laisser la place à un bâtiment plus moderne qui a définitivement disparu au XIXe siècle. La façade arrière, donnant sur le parc, fut modifiée au XIXe siècle. On supprima la cour du jeu de paume afin de doubler le bâtiment central. Ainsi, les ailes d'habitation ne font plus avant-corps et la façade arrière est résolument plus massive.

La "galerie des Illustres"

Paul Ardier, propriétaire de Beauregard en 1617, réalisa dans la galerie principale du château son rêve d'historien : conter à travers une collection de portraits 315 ans d'histoire de France.

Trois générations de sa famille se sont relayées, pendant 60 ans, pour concevoir cette pièce d'exception.

Présentation

Située à « l'étage noble », la galerie mesure 26 mètres de long par 6 mètres de large. La collection, qui fait le tour complet de la pièce, comporte 327 portraits répartis sur trois niveaux, en douze panneaux.

Chaque portrait peint sur toile mesure en moyenne 55 cm par 45 cm. Les personnages sont représentés en buste sauf deux exceptions : Henri IV de France et Louis XIII de France. Le grand portrait équestre d'Henri IV est placé sur la cheminée datée du XVIe siècle.

Les portraits des 14 personnages qui l'entourent sont nettement plus petits que l'ensemble de la collection.

Le portrait d'apparat de Louis XIII couvre les trois niveaux de portraits.

Le nombre de portraits est variable en fonction du roi auquel ils sont associés. Par exemple, le règne de Philippe IV compte six portraits, celui de Charles VII, 21 portraits, Louis XIII, 40 portraits.

Les dates des règnes concernés ainsi que l'emblème et la devise du roi sont peints sur les boiseries situées entre le sol et les portraits.

Les galeries de portraits, une inspiration italienne

Les premières collections de portraits historiques apparurent en Italie au XVIIe siècle. À travers le courant de pensée de l'Humanisme renaquit l'intérêt antique pour les hommes ayant joué un rôle dominant sur le cours de l'histoire. On était fasciné par la vie, les actions mais aussi par les traits de ces Illustres que l'on s'efforçait de représenter le plus fidèlement possible.

La plus célèbre des collections italiennes était celle de que Paul Jove, évêque de Nocera, rassemble dans sa villa du lac de Côme, ensemble constitué de 240 tableaux de personnalités politiques et artistiques qui connut un retentissement considérable en Europe. Une copie de cette collection, commandée par les Médicis, est aujourd'hui visible à la Galerie des Offices à Florence.

À la fin du XVIe siècle, le goût pour les galeries de portraits se diffusa en France. Ces collections ne nous sont pas parvenues, dispersées ou définitivement perdues telles les galeries que commandèrent Henri IV au Louvre ou Richelieu en son Palais-Cardinal (Palais-Royal). Ces deux collections rassemblaient des personnages politiques et annonçaient le thème qui fut retenu pour la galerie des Illustres de Beauregard.

A la fin du XIXème siècle cette appellation fut choisie pour désigner la célèbre galerie de l'hôtel de ville de Toulouse. Celle de Beauregard n'est en rien une initiative isolée, elle doit être comprise au sein d'une mode.

Cependant dès le XVIIe siècle, cette collection fut distinguée par ses contemporains. On en trouve une mention admirative dans les mémoires de la Grande Mademoiselle lors de sa venue au château en 1655. La démesure du projet et le soin apporté à la réalisation de l'ouvrage rendirent la galerie célèbre dès sa création. Elle reste encore aujourd'hui la plus importante collection de portraits de personnages historiques connue en Europe.

Une autre collection de portraits est visible en France, mais son thème et son ampleur sont bien différents; elle fut rassemblée, durant le XVIIe siècle,au château de Bussy-Rabutin en Bourgogne. Au XIXème siècle les marquis de Biencourt en constituèrent une autre dans leur château d'Azay-Le-Rideau (Indre-et-Loire), dont une partie fit acquise lors de sa vente aux enchères par une descendante et léguée par elle au musée condé de Chantilly (Oise).

La réalisation des portraits

Entre 1620 et 1638, Paul Ardier passa commande des 327 portraits auprès d'une école de peinture parisienne. Certains groupes de portraits présentent une unité de style laissant à penser qu'ils sont l'œuvre d'un même artiste. Mais aucun tableau ne porte de signature ou de marque permettant d'identifier le peintre ou l'école de peinture en charge de la commande. Suivant la tradition des collections de portraits de la Renaissance italienne, le portrait est conçu comme un véritable document historique. La recherche des sources iconographiques les plus sûres était un aspect primordial du travail de Paul Ardier et de ses peintres.

Les toiles sont en majorité des copies réalisées dans d'autres galeries françaises et européennes. Les copistes de Paul Ardier travaillèrent dans les différentes collections existantes comme, par exemple, celle du château de Selles-sur-Cher, non loin de Beauregard où Philippe de Béthune avait rassemblé une collection de portraits historiques.

Ce fut dans la galerie de Richelieu au Palais Cardinal, en 1635, que le tableau représentant Louis XIII fut copié d'après la toile de Philippe de Champaigne. On reconnaît des œuvres célèbres, tel Charles VII par Jean Fouquet, Marie de Médicis par Van Dyck ou encore le comte d'Olivarès par Vélasquez.

Concernant les personnages des règnes les plus anciens, lorsque les représentations picturales n'existaient pas, les élèves de l'école de peinture travaillèrent d'après des médailles, des dessins mais aussi en observant, dans les églises, les gisants mortuaires et les vitraux.

Ce souci de la fidélité à la ressemblance physique fut complété par une identification soigneuse des personnages. Dans la partie supérieure de chaque portrait figure le nom et la fonction de l'illustre.

Le choix de la chronologie et des personnages

Paul Ardier constitua sa collection suivant une logique rigoureuse. En homme d'État, il axa son travail sur l'histoire politique. Les "Illustres de Beauregard" sont les personnages qui, par leurs actions, ont influé sur l'histoire politique du royaume de France.

Les limites temporelles furent strictement fixées : la chronologie débute lors de l'accession au trône de Philippe VI de Valois en 1328 et s'achève à la mort de Louis XIII en 1643.

Géographiquement, ce projet ne se limita pas à la politique intérieure, la France est systématiquement remplacée au sein de sa politique européenne.

Le choix des personnages représentés fut le fruit d'une longue réflexion pour Paul Ardier. Il s'agissait d'illustrer la vie politique de la façon la plus exhaustive et représentative possible. la dimension européenne qu'il donna à sa galerie ne facilita pas sa tâche.

Politique française et européenne

Philippe VI de France débute cette histoire de France en 1328 quand il monta sur le trône à la suite des rois dits maudits, marquant l'avènement des Valois et le début de la guerre de Cent Ans. Quatorze rois de France lui succèdent, entourés des personnalités politiques influentes de leur règne. Louis XIII termine la collection. Il fut le dernier roi que connut Paul Ardier.

Au cours de ce parcours unique, on reconnaît les grands conseillers et ministres des rois de France. Dans le panneau consacré à Louis XIII, Jules Mazarin succède à Richelieu. Les grands chefs de guerre, comme Bertrand du Guesclin et Jeanne d'Arc, apparaissent entourés de leurs compagnons d'armes.

Au gré des alliances et des guerres, toute l'histoire européenne se déroule. Rois et reines, empereurs, papes, généraux et ministres d'Europe jalonnent la galerie. 26 pays se trouvent ainsi représentés au détour de ces 327 portraits. Édouard III d'Angleterre est le premier des sept souverains d'Angleterre présents. Pour faits d'armes, leurs généraux, tels le Prince Noir et Talbot, prennent place dans la galerie. À la guerre de Cent Ans succédèrent les campagnes italiennes. Ce sont alors les rois et ducs de Naples, de Milan et de Florence qui font leur apparition près de Charles VIII, Louis XII et de François Ier. Les souverains d'Europe dessinent trois siècles d'histoire diplomatique française : l'Espagne, l'Autriche, la Hongrie, la Suède… Jusqu'aux sultans turcs qui, de Mourad Ier à Soliman le Magnifique, témoignent de la puissance ottomane.

Vingt-et-une femmes sont présentes au sein de la collection. Des reines d'Angleterre ou d'Espagne, pays dans lesquels les femmes pouvaient exercer le pouvoir, six reines de France seulement. Très peu d'entre elles purent s'extraire de leur rôle de génitrice pour exercer un réel pouvoir politique. Elles apparaissent dans la galerie dans leur rôle de reines régentes, seule fonction politique officielle accessible aux femmes en France. On peut croiser Isabeau de Bavière qui gouverna pendant la folie de Charles VI, Catherine de Médicis, Marie de Médicis et Anne d'Autriche. Marie Stuart apparaît auprès de son jeune mari François II. Elle est identifiée comme « reine de France et d'Écosse ».

Le décor de la pièce

La collection de portraits est enchâssée dans un véritable écrin décoratif; le décor de la pièce fut à la mesure de la collection.

La faïence de Delft

Paul Ardier fils supervisa la pose de quelques 5500 carreaux de faïence qui ornent le sol de la galerie. Commandés auprès des prestigieuses faïenceries hollandaises de Delft, les 150 mètres carré représentent une armée entière en ordre de marche. 17 corps de régiments, en costume Louis XIII, constituent à ce jour la seule galerie pavée de Delft connue en Europe.

Le décor peint

Pour la réalisation du décor peint, Marie Ardier et son mari Gaspard de Fieubet, petits enfants de Paul Ardier, s'adressèrent à la famille Mosnier, dont on peut admirer les œuvres au palais du Luxembourg et au château de Cheverny. Pierre, fils de Jean Mosnier représenta les devises et les emblèmes des rois de France sur les boiseries situées sous les portraits. La couleur dominante du plafond à la française, le bleu, fut obtenue avec de la poudre de lapis-lazuli, une des pierres les plus précieuses de l'Ancien Régime. On estimait alors son prix à sept fois celui de l'or.

La collection à travers les siècles

Paul Ardier fils poursuivit l'œuvre entamée dans la galerie en décorant une pièce attenante de tableaux correspondant au règne de Louis XIV, mais de cette collection, il ne reste rien; seul l'entablement du plafond porte encore le nom et les dates du Roi Soleil.

La vigilance des différents propriétaires du château ainsi que la célébrité de la galerie ont empêché la dispersion et l'altération de la collection principale.

En 1834, Louis-Philippe Ier créa à Versailles un musée historique "dédié à toutes les gloires de la France". Sur son ordre, 89 tableaux furent copiés dans la galerie de Beauregard pour enrichir les collections du musée aux Gloires de la France.

La restauration de la totalité des tableaux a débuté en 1986 et se poursuit à ce jour.

Le cabinet des Grelots

Cette petite pièce, entièrement coffrée de boiseries de chêne, s'inscrit dans la tradition du studiolo italien. À l'origine, le cabinet de travail était relié à la galerie par une petite porte sacrifiée au XVIIe siècle au moment de la mise en place de la collection de portraits.

Jean du Thier commanda les lambris de son cabinet de travail à l'ébéniste Francisque Scibec de Carpi. L'artiste italien travailla pour François Ier au château de Fontainebleau, pour Henri II au Louvre et pour Diane de Poitiers au château d'Anet. La commande date de 1554, le prix reste inconnu. La réalisation des boiseries nécessita six mois de travail seulement.

Le plafond à caissons, chevillé, passe pour l'un des plus beaux de France. Il est composé d'un grand octogone entouré de huit petits hexagones finement sculptés. En son centre, le plafond porte les armoiries de Jean du Thier : « d'azur à trois grelots posés deux sur un » (trois grelots d'or sur un fond azur).

Jean du Thier commanda en effet un décor très personnel. Les éléments de son blason constituent les éléments décoratifs majeurs de la pièce. Les frises de grelots qui ornent tous les murs donnèrent son surnom au cabinet.

Dans la partie supérieure des boiseries sont enchâssées des toiles réalisées par des artistes locaux à partir de cartons de Nicolò dell'Abbate. Jean du Thier s'est entouré, dans son cabinet de travail, de ses activités préférées : les arts (la peinture, la sculpture, la littérature, la musique et l'orfèvrerie) et des disciplines plus physiques (l'art de la guerre, la chasse et le jeu de paume).

Au XVIIe siècle, Paul Ardier fit coffrer la cheminée d'origine. Les blasons de sa famille ornent les montants.

Une toile représentant Louis XIII à cheval ornait la cheminée jusqu'au début du XXe siècle. Pour pallier sa disparition en 1925, la famille de Gosselin commanda, au musée du Louvre, une copie de la Diane chasseresse de François Clouet.

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