Dans le cadre de la psychologie analytique, l'éducation commence par celle de l'éducateur, en particulier au travers d'un apprentissage de soi, une connaissance de soi. Le présupposé étant que si l'on se connaît mieux, on peut mieux agir envers les autres, en particulier envers les enfants.
Les travaux jungiens de l'éducation sont en général, mal connus du grand public et mal diffusé.
C’est l'écriture de l'ouvrage Carl Gustav Jung, Psychologie et éducation (suite d'articles, de 1916 à 1942), qui le premier aborda psychologie analytique et éducation. Cet ouvrage donna lieu par la suite à la création d'une pensée jungienne de l'éducation.
Carl Gustav Jung, puis quelques auteurs issues du monde de l'éducation (Educateur, pédagogue, chercheur en sciences de l'éducation) mais aussi mais aussi de psychologue jungien travaillant sur le thème de l'éducation, ont alors développés « une pensée et une pédagogie » spécifiques.
« … L’œuvre de Carl Gustav Jung conduit à considérer que la relation pédagogique ne met pas seulement en jeu des contenus ou des consignes rationnelles, mais aussi une influence tenant à la sensibilité et à la personnalité du pédagogue. L’éducation n’est alors plus de l’ordre du seul discours, mais tient également aux dispositions psychiques de l’adulte. Or ces dispositions échappent largement aux méthodes pédagogiques programmées d’avance, et dépendent au contraire de ce que l’éducateur est dans le plus intime de sa psychologie. Cette attention portée à l’équation personnelle de l’adulte constitue une véritable révolution copernicienne de la pédagogie, car si l’être de l’éducateur devient la principale détermination de l’influence qu’il exerce sur l’enfance, ce sera tout d’abord lui qui devra être éduqué… »
Dans la préface à l’édition hébraïque de « Psychologie et éducation » de Jung, (1958) on souligne que l'importance des apports de la psychologie analytique en ce qu'il y a d'original et de centrale : la place faite à l'éducateur qui doit apprendre à se connaître.
« … la psychologie analytique a contribué à la connaissance : a) des adultes qui souffrent encore d’infantilisme perturbant ; b) des relations complexes entre parents et enfants ; c) des enfants eux-mêmes. Les désordres psychiques des enfants sont généralement liés à la psychologie et aux attitudes des parents et des éducateurs et on propose que la plus importante question après l’éducation de l’enfant soit celle de l’éducation même de l’éducateur… »
C’est l'écriture de l'ouvrage Carl Gustav Jung, « Psychologie et éducation », qui le premier aborda psychologie analytique et éducation. Cet ouvrage donna lieu par la suite à la création d'une pensée jungienne de l'éducation.
En plus de son ouvrage sur « Psychologie et éducation », Carl Gustav Jung donna un cycle en trois conférences sur l'éducation. Ce cycle servit aussi de matière de réflexion aux auteurs de l'éducation soucieux de cette approche.
L'ouvrage de C.G.Jung aborde plusieurs questions, on y trouvera :
« On connaît trop les lourds dommages, qui durent souvent la vie entière, et qui résultent d’une stupide éducation à la maison ou à l’école, et l’on sait la pressante nécessité de méthodes pédagogiques rationnelles.Mais, pour saisir vraiment ce mal à la racine, il faut se poser avec le plus grand sérieux la question de savoir comment il s’est fait et comment il se fait que des méthodes éducatives sottes et bornées sont toujours employées. C’est, sans aucun doute, purement et simplement qu’il y a des éducateurs incompréhensifs qui ne sont pas des hommes, mais des automates méthodiques personnifiés.
»
« Qui veut éduquer, doit être lui-même éduqué. Or, l’étude par cœur, qui est toujours pratiquée, et l’utilisation mécanique de méthodes, ce n’est pas de l’éducation, ni pour l’enfant, ni pour l’éducateur. On dit continuellement qu’il faut développer la personnalité de l’enfant. J’admire bien entendu ce haut idéal d’éducation. Mais qui éduque en vue de la personnalité ? »
« La première place, la plus importante, est occupée par des parents d’ordinaire incompétents qui bien souvent restent toute leur vie à moitié ou même tout à fait des enfants. Et qui donc finalement, pourrait attendre de tous les parents ordinaires qu’ils soient des « personnalités », et qui donc a jamais pensé à imaginer des méthodes pour donner aux parents de la « personnalité » ? C’est pour cette raison que l’on attend tout naturellement davantage du pédagogue, spécialiste formé à qui l’on a tant bien que mal enseigné la psychologie, c’est-à-dire les points de vue de celui-ci ou de celui-là, le plus souvent d’opinions fondamentalement différentes, à qui l’on a appris comment l’enfant est présumé être constitué et comment il faut le traiter. Des jeunes gens qui ont choisi la pédagogie pour profession ont posé à priori qu’ils ont été eux-mêmes éduqués. Sont-ils tous, tant qu’ils sont, des « personnalités » ? Personne sans doute, ne voudrait l’affirmer. Ils ont, l’un dans l’autre, reçu la même éducation défectueuse que les enfants qu’ils doivent éduquer et ne sont en général pas davantage des personnalités que ne le sont ceux-là. »
« Notre problème éducatif souffre en somme de ne viser unilatéralement que l’enfant qu’il faut élever et de négliger aussi unilatéralement le fait que les éducateurs adultes n’ont pas été eux-mêmes éduqués. Après avoir terminé le cycle de ses études, chacun a l’impression d’en avoir fini avec l’éducation, d’être, en un mot, un adulte. Il ne peut certes en être autrement ; il faut qu’il soit fermement persuadé de sa compétence pour pouvoir affronter la lutte pour l’existence. Le doute et le sentiment d’incertitude le paralyseraient et l’entraveraient, ils enfouiraient la foi si nécessaire en sa propre autorité et le rendraient inapte à l’exercice de sa profession. On veut l’entendre dire qu’il connaît son affaire et qu’il en est sûr, et non qu’il doute de lui-même et de sa compétence. Le spécialiste est condamné de façon absolue à la compétence. »
« Personne ne peut développer la « personnalité » qui n’en a pas lui-même. Et ce n’est pas l’enfant, c’est uniquement l’adulte qui peut atteindre à la personnalité comme fruit mûr d’une activité de vie orientée vers ce but. Car dans l’accès à la personnalité, il n’y a rien moins que le déploiement le meilleur possible de la totalité d’un être unique et particulier. On ne saurait prévoir le nombre infini de conditions qu’il faut remplir pour cela. Toute une vie humaine avec ses aspects biologique, social et psychique y est nécessaire. La personnalité, c’est la suprême réalisation des caractéristiques innées de l’être vivant particulier. La personnalité, c’est l’action du plus grand courage de vivre, de l’affirmation absolue de l’existant individuel et de l’adaptation la plus parfaite au donné universel avec la plus grande liberté possible de décision personnelle. Élever quelqu’un en vue de cela me semble n’être pas une petite affaire. C’est sans doute la tâche la plus haute que se soit donnée le monde moderne de l’esprit. »
Les travaux jungiens de l'éducation sont en général, mal connus du grand public et mal diffusés. Toutefois, on pourra trouver quelques auteurs francophones ou bien traduits:
Première conférence en 1926. Résumé in Jung, Collected Works (p. 63-80)., (§127-155), & Jung, PSYCHOLOGIE ET EDUCATION, Buchet Chastel, Paris 1963, (p. 11-34)
« … Une brève description des grandes lignes du développement de la psychologie est présentée et énumération de ses principales réalisations – analyse des rêves, découverte de l’inconscient et rôle de l’inconscient dans les désordres mentaux–. Une connaissance de la psychologie analytique et de l’analyse des rêves est recommandée aux éducateurs qui souhaitent comprendre leurs élèves. Puisque les découvertes de la psychologie anormale éclaire le comportement normal, cinq études de cas d’enfants perturbés sont utilisées pour illustrer les cinq groupes principaux de troubles psychiques : enfants arriérés, enfants psychopathes, enfants épileptiques, et les différentes sortes d’enfants névrotiques et psychotiques. De plus, parce que l’analyse des enfants est difficile, les éducateurs sont vivement incités à considérer de façon symbolique et non littérale des élaborations telles que le complexe d’Œdipe et à rejeter la théorie freudienne disant que la relation entre parents et enfants est principalement de nature sexuelle. Au lieu de considérer l’attirance sexuelle de l’enfant pour ses parents comme un facteur causal primaire de névrose, on pense que le matériel refoulé dans l’inconscient des parents provoque chez ceux-ci des névroses qui à leur tour se propagent dans l’inconscient de l’enfant. Les états névrotiques passent donc de génération en génération par contagion. Il est proposé qu’on remédie à cette situation en faisant en sorte que les parents se confrontent volontairement au matériel refoulé dans leur propre inconscient… »
Deuxième conférence. Résumé in Jung, Collected Works (p. 81-107), (§156-198), & Jung, PSYCHOLOGIE ET EDUCATION, Buchet Chastel, Paris 1963, (p. 35-77)
« … Les hypothèses psychologiques de Freud et d’Adler sont analysées et comparées avec les méthodes, buts et motivations de la psychologie analytique. La théorie de Freud, basée sur les ramifications de l’instinct sexuel dans la psyché humaine et les concepts d’Adler de préservation de soi sont toutes les deux rejetées en tant qu’explication des causes dernières du comportement humain, car de telles hypothèses unilatérales ignorent les complexités. Les différences entre les concepts jungiens et freudiens du développement psychique sont illustrées par la référence à la religion et aux relations parents/enfants. La psychologie scientifique est alors examinée et considérée comme étant à la fois une science de l’homme et de la nature en raison de son objet et de sa méthodologie. Son rôle parmi les sciences est d’explorer l’outil même de l’investigation. En réponse aux critiques qui soutiennent qu’à cause de la nature arbitraire du moi, le sujet, matière de la psychologie est au-delà de l’étude scientifique, on objecte que la psyché, liée au conscient, est préexistante et transcendante. L’attention est portée sur le but de la psychologie analytique : comprendre la vie telle qu’elle apparaît dans l’âme humaine, pour pouvoir aider l’individu à adapter son comportement aux demandes de la vie extérieure et à celles de son être propre. Pour atteindre ce but, les méthodes d’investigation que sont l’association, l’analyse du symptôme, l’anamnèse analytique et l’analyse de l’inconscient, sont proposées comme des moyens de sonder l’inconnu du patient. Les deux premières méthodes sont seulement brièvement décrites, tandis que les deux suivantes sont présentées en détail et illustrées de plusieurs exemples.… »
« … Les théories concernant les causes de névroses sont examinées en faisant la distinction entre répression et refoulement. La tendance à expliquer chaque névrose en termes de refoulement de la sexualité enfantine est rejetée parce qu’elle néglige la volonté de l’individu de réprimer un savoir et des expériences discordantes et qu’elle interprète la névrose en fonction de causes antérieures ou de conditions culturelles présentes. En conséquence, au lieu d’une approche freudienne doctrinale de la psychothérapie, il est proposé que chaque cas soit traité en accord avec ses particularités propres. Pour justifier cette dernière approche, présentation de quatre cas, dont deux s’opposent en miroir. Des éclaircissements supplémentaires sur les causes de la névrose sont tirées d’une analyse de la structure de l’inconscient. On soutient la théorie selon laquelle l’inconscient est formé de deux parties : le personnel et le collectif, le contenu de l’inconscient personnel étant formé de tout ce qui a été oublié ou réprimé par l’individu, consciemment ou inconsciemment. Celui de l’inconscient collectif consiste dans les traces mnésiques des activités psychiques qui furent répétées d’innombrables fois dans l’esprit de nos ancêtres. Bien que ni le conscient, ni l’inconscient personnel ne sont habituellement au fait de l’existence de l’inconscient collectif, des contenus de cet inconscient collectif surgiront occasionnellement dans l’inconscient personnel à travers un rêve dont le contenu et la signification mythologiques dépassent l’horizon intellectuel de l’individu… »