Le premier chemin de fer transcontinental a été construit aux États-Unis entre Sacramento (Californie) et Omaha (Nebraska), entre 1863 et 1869. La construction s'est officiellement terminée le 10 mai 1869, à Promontory Summit (Utah). Les 3 000 km de voies ferrées permettent de relier le réseau ferré de l'est du pays à la côte Pacifique. Elles révolutionnent la situation économique et démographique de la puissance américaine.
Autorisée par le Pacific Railway Act de 1862 et fortement soutenu par le gouvernement fédéral, le projet existe depuis plusieurs années et Abraham Lincoln lui donne une impulsion majeure. Sa construction est une œuvre de longue haleine, qui demanda un effort humain considérable pour traverser les montagnes, les canyons et les Grandes Plaines. Les deux compagnies qui la créèrent furent l'Union Pacific Railroad et la Central Pacific Railroad.
Depuis l'expédition Lewis et Clark au début du XIXe siècle, les Américains cherchent à pénétrer vers l'ouest du continent. L'idée d'une liaison ferroviaire s'impose à partir des années 1830, mais les moyens techniques et financiers font défaut.
Le marchand Asa Whitney (1797-1872) est le premier à enquêter sur la faisabilité d'un transcontinental aux États-Unis. En juin 1845, en compagnie de huit hommes, il recense les ressources disponibles (pierre, bois), évalue le nombre de ponts et de tunnels nécessaires. Il fait la promotion du projet auprès de financiers potentiels et des hommes politiques. Il présente des cartes et des rapports au Congrès. Mais ses efforts sont remis en cause par le début de la guerre américano-mexicaine.
C'est l'ingénieur Theodore Judah qui reprend à son compte le projet. Il travaille pour le compte de la « Sacramento Valley Railroad » et il est convaincu qu'une ligne de chemin de fer doit pouvoir franchir la Sierra Nevada vers l'est. En 1856, il se rend à Washington DC et tente de convaincre les responsables politiques du bienfondé de son projet. Il est choisi pour présider la Pacific Railroad Convention qui se tient à San Francisco en septembre 1859. Il retourne dans la capitale fédérale peu de temps après ; il obtient un bureau et se trouve entendu par le président James Buchanan. Un projet de loi est proposé par Samuel Curtis en février 1860 : il prévoit les modalités de financement et l'attribution des terrains nécessaires. Mais la décision est reportée lorsque la guerre civile éclate.
De retour en Californie, Judah passe son temps à chercher une route pour traverser la montagne. Il reçoit une lettre d'un mineur, Daniel Strong, qui décrit une voie d'accès possible pour le chemin de fer. Les deux hommes s'associent pour chercher un financement auprès des hommes d'affaires californiens. Un marchand prospère de Sacramento, Collis Huntington, entend sa proposition et décide de se lancer dans l'aventure, en partenariat avec trois autres entrepreneurs de la région.
Au printemps 1862, la loi sur le Pacific Railroad est adoptée par le Congrès. Le président Abraham Lincoln la promulgue le 1er juillet. Elle attribue la construction du chemin de fer à deux compagnies ferroviaires : la Central Pacific pour le tronçon occidental depuis Sacramento et l'Union Pacific pour le tronçon oriental depuis Omaha. Ce dernier doit suivre la vallée de la Platte River, un affluent du Missouri. Elle oblige chaque compagnie à poser 60 km chaque année. Chaque voie est subventionnée à hauteur de 9,94 dollars par mètre (16 000 dollars par mile) sur terrain plat, 29,83 dollars par mètre (48 000 dollars par mile) dans la montagne.
En 1863, Sacramento compte environ 13 000 habitants et l'ouest est dépourvu de tous moyens industriels de grande ampleur. Tout le matériel nécessaire vient de l'est par bateau. Mais les quatre hommes (Mark Hopkins, Collis P. Huntington, Leland Stanford et Charles Crocker) sont décidés à désenclaver leur région. Le chantier débute le 8 janvier 1863 par le premier coup de pelle de Leland Stanford. Charles Crocker (1822-1888) est choisi comme chef des travaux. Il doit construire 60 kilomètres de voies pour obtenir un financement fédéral. Mais la tâche est ardue car il faut traverser la chaîne de la Sierra Nevada qui culmine à plus de 4 000 mètres d'altitude. D'autre part, la guerre de Sécession a des conséquences sur l'avancement des travaux. Les bateaux sudistes attaquent les navires qui approvisionnent le chantier.
Les quatre entrepreneurs confient à l'ingénieur en chemin de fer Theodore Judah le soin de trouver une voie à travers la montagne. Celui-ci étudie pour cela les relevés topographiques et propose un tracé qui nécessite des ponts, des tonnes de dynamite et une main-d’œuvre nombreuse. Le contremaître James Harvey Strobridge doit diriger les équipes d'ouvriers. Ce dernier, qui a perdu un œil, tient une solide réputation d'autoritarisme.
Dans les premiers temps, les travailleurs embauchés sur le chantier ne rêvent que de chercher de l'or et de faire fortune. La construction du chemin de fer n'est pour eux qu'un moyen d'accumuler un pécule afin d'acheter du matériel pour prospecter. Une fois cet objectif atteint, ils quittent le chantier, si bien que l'entreprise est au bord de la faillite et les 60 premiers kilomètres sont loin d'être atteints. Les registres de l'année 1864 comptabilisent 600 ouvriers sur le chantier, alors qu'il en faudrait 5000.
Le printemps 1864 voit l'arrivée à San Francisco de milliers de Chinois qui fuient la famine. Charles Crocker décide de les employer malgré l'opposition de Strobridge. Crocker estime que les Chinois ont toutes les qualités et l'expérience requises pour les travaux. Ces coolies se révèlent être une excellente main-d’œuvre plus efficace et meilleure marché que les Européens ou les Américains. En 1868, ils représentent 2/3 de la main-d’œuvre. Ils recevaient un salaires inférieur à 35 dollars par mois et devaient construire leur propre abri.
À l'été 1865, les 60 kilomètres exigés par Washington sont posés et les capitaux fédéraux affluent pour soutenir la progression du transcontinental.
À 3000 kilomètres de Sacramento, la compagnie de l'Union Pacific décide de prendre part au transcontinental à partir du moment où la guerre de Sécession est terminée. Le projet est en partie soutenu par les frères Ames de Boston qui firent fortune en vendant des canons pendant la guerre de Sécession.
En 1866, des milliers de vétérans suivent le jeune général Grenville Dodge qui devient le superviseur de l'aménagement du chemin de fer pour le tronçon oriental. Ce dernier est connu pour sa participation à la bataille d'Atlanta et ses expéditions punitives contre les Sioux, les Cheyennes et les Arapahos. Il est choisi par le principal investisseur du projet Thomas Clark Durant, qui a fait fortune dans le commerce de contrebande de coton pendant la guerre de Sécession. Durant engage aussi un certain Jack Casement comme chef de chantier.
Pour attirer d'autres ouvriers, le congrès multiplie les avantages : des lots de terre sont accordés aux travailleurs. Des immigrés irlandais ainsi que des mormons constituent le reste de la main-d’œuvre. La ligne part d'Omaha dans le Nebraska. Elle progresse vers l'ouest plus rapidement que dans la Sierra Nevada ; mais l'avancement des travaux se heurte à la violence du Far West. De nombreux ouvriers dépensent leur paye dans les saloons ou avec les prostituées. Beaucoup meurent dans les affrontements qui secouent la Frontière. Grenville Dodge décide de mettre fin à cette anarchie en faisant appel à des méthodes expéditives et au lynchage.