De l'ellipsoïde au géoïde - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs de cet article est disponible ici.

Déviations de la verticale et isostasie

A cette époque, l'étude des déviations de la verticale était de nouveau à l'ordre du jour, et ces investigations allaient mener à la théorie de l'isostasie, théorie qui a joué et qui continue de jouer un rôle très important en géodésie et en géophysique. Le terme isostasie signifie équilibre des états. Il fut forgé en 1899 par le géologue américain Clarence E. Dutton (1841–1912). Mais rappelons tout d'abord que le premier à avoir remarqué que l'attraction des montagnes est plus faible que celle que l'on peut calculer en tenant compte uniquement de leur masse apparente a été Pierre Bouguer. En effet, dans son livre La Figure de la Terre paru en 1749, il écrit ce qui suit à propos d'une analyse des mesures faites au voisinage de la montagne Chimborazo : « ... Pour revenir aux observations faites sur le Chimborazo, il paraît assez qu'on peut dire en se refermant sur le fait simple, que les montagnes agissent en distance, mais que leur action est bien moins considérable que le promet la grandeur de leur volume ».

George Biddell Airy (1801–1892)

Un siècle plus tard, en 1849, l'astronome français Petit calcula l'influence de la chaîne des Pyrénées sur la direction du fil à plomb à Toulouse et trouva que la valeur observée en est très inférieure à la valeur théorique. A la même époque, le géodésien britannique Sir George Everest fit la même observation en analysant ses mesures obtenus dans le nord de l'Inde, au pied de l'Himalaya. Les développements modernes de la théorie de l'isostasie — notion dont les racines plongent dans des écrits de Leonardo da Vinci datant du XVe siècle — commençaient en 1854 avec un article dans lequel John Henry Pratt, archidiacre anglais à Calcutta, discutait les déviations de la verticale observées par Sir George Everest aux Indes. Everest, dont le nom est immortalisé par le plus haut sommet du globe et qui fut à l'époque géodésien en chef pour l'Inde (Surveyor General of India), avait trouvé des différences entre les inclinaisons mesurées des verticales en divers endroits et les inclinaisons calculées en se fondant sur les distances connues entre les divers endroits. Il les attribua à des déflexions du fil à plomb causées par la chaîne des Himalayas. Toutefois, Pratt trouva que l'effet ne représentait qu'environ un tiers de l'effet attractif auquel on devait s'attendre si l'on traitait les montagnes comme de simples masses additionnelles. Dans l'ouvrage cité, Pratt pose le principe de la compensation isostatique selon un schéma pressenti par da Vinci et en 1750 par le Père Roger Joseph Boscovich (1711–1787). A la page 475 de son ouvrage « De litteraria expeditione per pontificiam ditionem », Boscovich (ou Bošcović) écrit en effet : « Les montagnes, je pense, doivent essentiellement être expliquées comme étant dues à l'expansion thermique du matériau en profondeur, processus dans lequel les couches rocheuses au voisinage de la surface sont soulevées. Ce soulèvement ne signifie pas qu'il y ait injection ou addition de matériau en profondeur ; le vide à l'intérieur des montagnes compense la masse qui se situe au-dessus ». Le terme « compenser » apparaît pour la première fois, et l'explication de Boscovich s'approche de fort près de l'hypothèse d'isostasie formulée un siècle plus tard par Pratt.

Par une curieuse coïncidence, l'astronome George Biddell Airy (1801–1892), à l'époque Astronomer Royal britannique, publia la même année que Pratt un article tout aussi fondamental sur le même sujet. Tout comme Pratt, Sir George Airy se rendit compte que l'attraction des masses montagneuses devait être bien plus importante que celle déduite des observations. Toutefois, Airy soutint que loin d'être une surprise, un tel état des choses était tout à fait prévisible. Autrement dit, au lieu de s'attendre qu'une masse montagneuse importante produise à une distance considérable un effet d'attraction, on doit plutôt s'attendre à ce qu'elle ne produise aucun effet voire, dans certains cas, un faible effet de répulsion. Airy arriva à la conclusion que des montagnes aussi élevées que les Himalayas sont, dans un certain sens, impossibles. En effet, le poids d'une masse si importante devrait casser l'écorce terrestre et s'enfoncer partiellement dans la lave sous-jacente, de manière à ce que la chaîne de montagnes flotte en quelque sorte sur le substratum à la manière d'un iceberg ou d'un radeau de bois flottant sur l'eau, en vertu du principe d'Archimède.

Page générée en 0.107 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise