Ces transuraniens stables peuvent-ils réellement exister ? Ici, le terme "stable" a pour corollaire que ces duodécimates ne devraient pas émettre un niveau de radioactivité tel qu'il tue les mineurs Darsh ou les rendent stériles. Le terme de "transuraniens", lui, désigne tous les éléments dont la densité est supérieure à celle de l'uranium (élément 92 dans le tableau périodique des éléments de Mendeleïev ), qui sont tous radioactifs. Pour mémoire, l'uranium, comme tous les éléments lourds, fut initialement synthétisés par nucléosynthèse au sein d'une étoile massive qui explosa en supernova. Ces éléments furent ensuite disséminés dans la Galaxie, où ils intégrèrent finalement le nuage moléculaire constitué de gaz et de particules qui, en se contractant par gravité, devait former le système solaire.
Sur la Terre, qui est la planète tellurique la plus dense de notre système, l'uranium est un élément relativement abondant (autant que l'argent), avec une demi-vie d'environ 4,5 milliards d'années pour l'isotope U238 et de 700 millions d'années pour l'isotope U235. Sa désintégration dégage une chaleur importante, qui maintient en fusion le manteau terrestre. Aucun élément plus lourd que l'uranium n'y existe à l'état naturel. En conséquence, tous les transuraniens qui ont été produits à ce jour ont été synthétisés artificiellement, généralement en petites quantités dans des réacteurs nucléaires. En gros, leur demi-vie devient de plus en plus courte au fur et à mesure que l'on s'élève dans la classification. La demi-vie de l'isotope d'ununquadium (élément 114), le plus stable produit à ce jour, n'excèderait pas 2,6 secondes.
Alors, des transuraniens réellement stables existent-ils ? On le pensait parfois dans les années 70, et c'est peut-être ce qui a motivé Jack Vance à imaginer ses duodécimates. Il est vrai qu'autour de l'élément 126 unbihexium (déjà nommé mais non synthétisé), existerait un îlot de stabilité. Mais cela signifie que la demi-vie de ces exceptions pourrait être de l'ordre de la seconde au lieu de la milliseconde. Il ne s'agit donc nullement de transuraniens stables ! En clair, et sans pousser plus loin cette analyse, si de tels éléments hypothétiques étaient effectivement tombés sur la planète Dar Sai dans le passé, non seulement leur radioactivité aurait été léthale pour toute forme de vie connue, mais surtout les Darsh n'en trouveraient actuellement plus aucune trace… car ces transuraniens auraient disparu depuis longtemps ! Un autre îlot de stabilité pourrait-il exister plus haut encore dans la classification ? En principe non, car le théorique élément 218 biunoctium est actuellement considéré comme étant physiquement impossible.
Dans l'état présent de nos connaissances, les duodécimates et les éléments transuraniens stables semblent donc devoir rester du domaine de la fiction. Les duodécimates sont à rapprocher de l'unobtainium, un terme initialement utilisé par les Anglos-saxons pour désigner un matériau hypothétique ayant des propriétés impossibles. Devenu usuel pour les fans de science-fiction, ce terme a été repris comme une sorte de clin d'oeil aux connaisseurs par le réalisateur James Cameron, pour désigner dans son film Avatar le minerai que les humains extraient de la planète Pandora.