Norme - Définition

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Droit

Constitution et lois

Les normes dans un système juridique sont les règles obligatoires qu'elles proviennent de lois, des codes, d'une coutume voire du droit naturel. Les codes sont de deux types : les codes adoptés comme tels, et modifiés, par les organes délibérants, ou bien les codes rassemblés par les éditeurs (Dalloz et Litec en France).

Le terme « lois » désigne au sens large l'ensemble des règles obligatoires édictées par les autorités publiques : la constitution, la législation, les ordonnances, décrets, règlements et arrêtés (ministériels, préfectoraux, ou communaux).

Les situations normatives sont assez différentes entre les États-Unis (système juridique de common law) et l'Europe continentale (système juridique de droit civil), qui représentent l'essentiel des systèmes juridiques des États dans le monde.

Dans les deux systèmes juridiques, la Constitution se trouve au plus haut niveau.

Dans l'Union européenne, depuis les années 1990, le droit communautaire modifie en profondeur les droits nationaux des différents États-membres, les directives et règlements ainsi que les traités internationaux s'interposant entre les constitutions et les lois (ou codes), avec la hiérarchie des normes.

Hiérarchie des normes

En droit positif, une hiérarchie ordonne les normes (voir hiérarchie des normes). Par exemple :

  • La constitution est au plus haut niveau de la hiérarchie.
  • Au-dessous, on trouve les lois organiques, les traités internationaux et les directives européennes.
  • Encore au-dessous, on trouve les lois, qui peuvent être regroupées dans des codes : en France par exemple, on trouve à ce niveau le code civil français, le code pénal, le code de commerce, le code général des collectivités territoriales, le code de l'environnement, etc.

Le principe de hiérarchie des normes est beaucoup plus développé en Europe continentale, et particulièrement en France, qu'aux États-Unis, qui disposent d'une souplesse jugée quelquefois excessive en Europe continentale grâce à la soft law (droit mou).

La question de l'écologie se trouve au plus haut niveau en France, la charte de l'environnement étant dans le préambule de la constitution de 1958 depuis 2005.

Mathématiques et sciences physiques

Mathématiques

En mathématiques, les normes correspondent à une manière de traduire une information d'un élément d'une structure plus ou moins complexe vers une structure plus simple. Un exemple est celui qui à un segment associe sa longueur. En topologie, une norme associe à un vecteur un nombre réel comparable à une longueur. Cette norme généralise la valeur absolue ou encore le module d'un nombres complexes.

Dans le cadre de l'arithmétique ou de la théorie de Galois la norme associe à un élément d'un corps ou d'un anneau un élément d'un corps ou d'un anneau plus petit. Par exemple, à un nombre de la forme a - b.1/2(1 + √5), où a et b sont des entiers, on associe le nombre a2 + a.b - b2 qui est un entier. Cet exemple est développé dans l'article entier de Dirichlet.

Sciences physiques

Dans les sciences physiques les normes sont définies par le système international.

Relations internationales

Norme et hégémonie, un enjeu des relations internationales?

Dans le domaine industriel et technologique, mais également dans celui des concepts, dresser la liste des normes existantes permettrait probablement de montrer l’extrême richesse de leurs domaines d’application; la multiplicité de leurs niveaux de mise en œuvre – national, transnational (on pense à l’Union européenne), international (le Protocole de Kyoto de mars 1998, par exemple) -; la diversité de leur présence au quotidien. Pour ces raisons, vouloir établir un lien entre normes et hégémonie n’est pas a priori irrecevable, y compris dans le domaine des concepts: prenant l'exemple du droit international issu de la Renaissance européenne, Bertrand Badie montrait en 1992 dans "L’État importé" que le régime des capitulations accordées à la France par l’Empire ottoman eut pour conséquence "l’unification du système international et sa construction autour d’un centre que le monde occidental pouvait d’autant mieux prétendre incarner qu’il en était le producteur de norme". En 2004, l'ancien secrétaire d'État américain Zbigniew Brzezinski observait, à l'occasion d'un débat au Carnegie Hall ("The Choice: Global Domination or Global Leadership"), que "notre société (...) est capable de transformer le monde. De ce fait, elle a un effet déstabilisant parce que nous sommes économiquement intrusifs et culturellement attractifs. Elle est une source d’envie, de ressentiment et d’hostilité que, pour beaucoup, la mondialisation ne fait qu’exacerber. Car en proposant cette mondialisation au reste du monde, en la véhiculant et en la projetant avec force comme modèle de société au niveau international, les États-Unis ont (...) jeté les bases de quelque chose de totalement nouveau".

Une définition de l'hégémonie

L'apparition du mot hégémonie dans le langage de la science politique est attesté au milieu du XIXe siècle en France (1840), mais ce n'est qu'après la défaite de 1870 que l'usage s'en répand, essentiellement dans un sens alors politique et militaire. Au début du XXe siècle, le philosophe italien Antonio Gramsci revisite le terme dans une acception plus proche de la sociologie politique inspirée du marxisme. L’hégémonie peut donc se définir comme la domination d’un État par sa puissance politique, militaire, économique et culturelle sur d’autres États. Encore cette domination n’est-elle pas absolue : en 1990, dans "Bound to Lead, The Changing Nature of American Power", Joseph Nye remarquait que l’hégémonie correspond à des situations où le pouvoir est distribué de manière « inégale » entre les différents pays. On pourrait donc tout aussi bien employer les termes de prééminence ou de suprématie, lesquels conviennent également pour évoquer la notion de puissance et de son exercice.

Évidemment, lorsqu'on parle aujourd'hui d'"hégémonie" dans les relations internationales, les regards se tournent le plus souvent vers les États-Unis. Or ceux-ci, réfutant les termes d'"empire" et d'"impérialisme" qui leur sont souvent accolés, préfèrent ceux de "leader" et de "leadership", qui appartiennent à la rhétorique de l’administration américaine depuis plusieurs années. Quelques textes en témoignent: le discours sur l’état de l’Union prononcé par le président Clinton le 3 février 1998 ou celui du président Bush le 31 janvier 2006: "La seule voie pour protéger notre peuple, la seule pour assurer la paix, la seule pour maîtriser notre destin, c’est d’exercer notre leadership. C’est pourquoi, les États-Unis continueront de diriger [lead] le monde"). Plus récemment, Barack Obama, le soir de son élection disait, au Parc Grant de Chicago le 5 novembre 2008 en s'adressant aux peuples du monde: "Nous avons chacun nos histoires mais nous partageons le même destin, et voici qu'une aube nouvelle est en train de se lever sur le leadership américain" [Our stories are singular, but our destiny is shared, and a new dawn of American leadership is at hand]. On notera au passage que le "leadership" renoue avec l’origine du mot hégémonie, issu du grec hegemon, le chef.

Le lien entre norme et hégémonie: l'exemple américain

En mars 1992, dans un rapport très éclairant ("Global Standards, Building Blocks for the Future"), le Bureau d’évaluation technologique du Congrès des États-Unis dressait un cadre plutôt pessimiste du positionnement des normes américaines à l’époque : "De nombreux changements structurels se sont fait jour dans l’économie, qui posent la question de savoir si notre système peut continuer à être toujours aussi efficace à l’avenir. Parmi ces changements figure[nt] le développement d’une économie mondiale hautement compétitive que les États-Unis ne peuvent plus espérer dominer". Le rapport ajoutait: "[Certains] s’inquiètent de surcroît du fait que d’autres pays dans le monde sont mieux organisés et mieux à même d’influencer les procédures d’adoption des normes internationales, et ceci au détriment des relations commerciales américaines". Enfin: "Certaines normes seront probablement plus importantes que d’autres en termes d’intérêt national. Dans une économie de l’information mondialisée, les technologies de réseau apportent les éléments de base qui contribuent à la productivité et à la croissance. Or, ces technologies formeront le socle des infrastructures utiles à l’ensemble de l’économie. Dès lors, si les réseaux futurs ne parviennent pas à s’interconnecter par suite d’une normalisation déficiente, la nation risque de subir des pertes économiques considérables et d’être menacée dans sa sécurité. C’est pourquoi, même si le gouvernement [fédéral] manifeste peu d’intérêt pour le développement de certaines normes industrielles, il importera qu’il se penche avec un intérêt particulier sur d’autres, comme celles qui soulèvent la question de l’interopérabilité". Ces propos, au demeurant prophétiques pour ce qui concerne les réseaux et l'interopérabilité, illustrent la conscience qu'avait le législateur du lien existant entre norme et "domination" (pour reprendre l'expression utilisée dans le rapport), en d'autres termes entre norme et hégémonie.

Norme contre norme, ou l'hégémonie en position d'arbitre

Dans le domaine de l’Internet, dont les normes ont été élaborées et diffusées par des entreprises ou des consortiums américains, les États-Unis avaient opposé une fin de non-recevoir aux tentatives de création d’une véritable gouvernance de la Toile lancées par certaines organisations non gouvernementales au sommet des Nations-Unies sur la société de l'information (Tunis, 2005). Désireux de conserver la maîtrise du fonctionnement et de l’avenir des communications par le biais d’Internet et faisant face à la contestation de leur hégémonie dans l’organisation et la maîtrise des réseaux électroniques d’échanges de données, les représentants américains n'avaient pas hésité à renier une norme pourtant d’inspiration américaine elle aussi (la gouvernance), et de surcroît recommandée pour le fonctionnement des grandes structures internationales.

Les différentes approches des politiques de normalisation ou l'hégémonie partagée

Depuis bientôt un siècle (fin de la Première Guerre mondiale et effondrement des empires d'Europe centrale), le "centre économique du monde" s'est déplacé vers les États-Unis. Il est par conséquent impossible de ne pas évoquer la politique américaine de normalisation pour mieux la confronter à d'autres aires économiques: le Japon, dont la production de normes a peut-être été inférieure à ce qu'elle aurait pu être au regard de sa créativité et de son dynamisme commercial, et l'Union européenne, grande productrice de normes s'il en est. États-Unis, Europe, Japon: en citant ces trois zones géographiques tour à tour alliées et concurrentes, on voit bien qu'en matière de normes, notamment techniques, l’hégémonie est partagée.

Les paradoxes de la normalisation à l’américaine

Malgré le poids longtemps écrasant de l'économie américaine, la normalisation a toujours été vécue de manière ambivalente, du moins dans le secteur industriel.

Un premier paradoxe réside dans le fait que le système se réclame de la primauté du marché, tout en accordant une place considérable au gouvernement fédéral (en 2005, ce dernier était à l'origine de la création ou de l’utilisation de plus de 44 000 normes, contre 50 000 créées par le secteur privé).

Le second paradoxe est le fruit de l’histoire : les États-Unis sont à la fois l’un des pays où la mise en œuvre de la normalisation est la plus ancienne (citons l’industrie du médicament, qui mit en place dès 1829 des normes unifiées surtout le territoire; les chemins de fer, dont l’interconnexion des années 1890 a nécessité les efforts de plus de mille exploitants privés; l’automobile enfin, dont le héraut, Henry Ford lança en 1913 le premier modèle de voiture « standard »), mais c'est aussi l’un des rares où celle-ci a été longtemps la moins cohérente. De fait, si la création de l’American National Standards Institute (ANSI) remonte à 1918, date d’installation de son ancêtre, cette instance de normalisation n'avait même pas, au début des années 2000, de charte officielle ou de statut d’agence du gouvernement fédéral: simple organe de coordination, elle est surtout chargée de certifier et de mettre à disposition les normes écrites par d’autres (600 organisations sectorielles dont la puissante ASTM, American Society for Testing Materials, ou l’IEEE, Institute of Electrical and Electronics Engineers).

Le troisième paradoxe n'est pas le moindre et nous ramène à l'hégémonie: les industriels américains se plaignent volontiers que l’ISO soit sous influence européenne. L'ANSI avait d'ailleurs publié il y a quelques années (janvier 2005) une mise en garde dans laquelle elle indiquait qu'"Une préoccupation fréquemment exprimée [aux États-Unis] est le sentiment d’une domination européenne au sein de l’ISO et le fait que les normes sont écrites dans l’optique de la réglementation propre à l’Union européenne. [Or], toute influence indue en provenance d’une région du monde est de nature à se traduire par la mise en œuvre de normes internationales qui peuvent ne pas correspondre aux exigences de régions caractérisées par d’autres régimes légaux et règlementaires, ou qui sont incorporées à des technologies ou à des pratiques différentes".

La "privatisation" du processus de normalisation au cours des années 1990 et suivantes, même limité à l'industrie de l’électronique, ne fut-il pas une réponse à ces craintes et à ces insatisfactions?

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