Le lanceur Proton mesure 44 mètres de haut (sans sa charge utile de 5,7 tonnes vers la Lune), possède un diamètre maximal de 7,4 mètres et pèse 680 tonnes.
un 1er étage composé de 6 moteurs à une chambre RD-253, à forte pression dotés d'une système de postcombustion brûlant les gaz, de 884 tonnes de poussée totale (981 tonnes dans le vide) fonctionnant jusqu'à T+126 secondes ;
un 2e étage composé de 4 moteurs RD-0210 de 240 tonnes de poussée totale dans le vide fonctionnant jusqu'à T+334 secondes ;
un 3e étage composé d'un moteur RD-0212 de 60 tonnes de poussée dans le vide plus un moteur à quatre chambres orientables de 3 tonnes de poussée fonctionnant jusqu'à T+580 secondes.
Le lanceurProton dont le premier tir réussi eut lieu en 1965 était encore utilisé en 2008.
Le 1er lancement d'un 7K-L1 simplifié et inhabité (Cosmos 146), le 10 mars 1967, a pour but de certifier le Proton et son 4e étage (le bloc D de la N1 propulsé par RD-58). C'est un échec suite à la défaillance de ce dernier et le vaisseau est mis sur orbite solaire ;
Le 2e lancement (Cosmos 154), le 8 avril 1967, réitère le précédent. Nouvelle défaillance du 4e étage après 2 orbites terrestres ;
Le 3e lancement 7K-L1 inhabité, le 28 septembre 1967, est un échec suite à la défaillance d'un moteur RD-253 du 1er étage, qui est détruit. Le vaisseau est récupéré à 65 km au nord du cosmodrome ;
Le 4e lancement d'un 7K-L1 inhabité, le 22 novembre 1967, est un échec suite à la défaillance du moteur RD-0210 no 4 du 2e étage, qui est détruit tandis que le vaisseau est récupéré à 285 km du cosmodrome, à 80 km au sud-ouest de Zhezqazghan ;
Le 5e lancement d’un 7K-L1 (Zond 4), le 2 mars 1968, est un demi-succès. Le vaisseau est certes injecté sur une orbite lunaire de 354 000 km d’apogée mais rate sa skip reentry (rentrée par rebonds). Il est détruit automatiquement à 10 km d'altitude au-dessus du golfe de Guinée, à la suite d’une panne du système de contrôle d’altitude ;
Le 6e lancement d’un 7K-L1, le 23 avril 1968, est un échec dû à une extinction prématurée à T+260 secondes des moteurs RD-0210 du 2e étage, commandée de façon erronée par le vaisseau, qui est éjecté et récupéré à 520 km du cosmodrome, à 110 km à l'est de Zhezqazghan ;
Le 7e lancement d’un 7K-L1, qui doit avoir lieu le 21 juillet 1968, est annulé suite à l'explosion, le 14 juillet 1968, des réservoirs du 3e étage lors de leur remplissage en diméthylhydrazine, tuant trois techniciens. Des réunions d'urgence politico-militaires sises au cosmodrome évoquent surtout la future invasion de la Tchécoslovaquie suite au Printemps de Prague, le cosmonaute Aleksei Leonov déclare : « C'est bien ce mois que nous aurions dû effectuer le premier survol de la Lune. Quant à l'atterrissage, on ne le croit plus réalisable, faute de moyens » ;
Le 7e lancement d’un 7K-L1 (Zond 5) du 15 septembre 1968 panique pourtant les responsables du programme Apollo lorsque l'observatoire anglais de radioastronomie de Jodrell Bank intercepte dans la nuit du 18 au 19 septembre 1968 une conversation entre les cosmonautes Pavel Popovitch et Vitali Sevastianov à bord, semble-t-il, de Zond 5 et le centre de contrôle des vols d'Evpatoria (Ukraine). La NASA se rend compte au bout d'un moment que les cosmonautes sont à Terre et testent la chaîne de communications. À bord du vaisseau ne se trouvent, en effet, que des mouches, des tortues, des vers, des plantes, des bactéries, etc. Le lancement est parfait : le 1er étage se sépare et le 2e s'allume à T+126 secondes à 42 km d'altitude, la tour de sauvetage est éjectée à T+185 secondes, le 2e étage se sépare et le 3e s'allume à T+338 secondes à 130 km, le 3e étage s'éteint à T+481 secondes à 161 km d'altitude, le bloc D brûle durant 108 secondes et place Zond 5 sur une orbite d'attente très précise (à 400 m de la périgée prévue, à 200 m de l'apogée prévue). Après 56 minutes en orbite, le bloc D s'allume à nouveau et place le vaisseau sur une trajectoire translunaire avec un survol photographique de la Lune à 1 960 km d'altitude. Avant la rentrée, une panne au centre de contrôle entraîne une perte de liaison avec le gyroscope de bord et le vaisseau entame une trajectoire balistique à 20G. Malgré un amerrissage dans l'océan Indien le 21 septembre 1968 en lieu et place du Kazakhstan et la récupération de la capsule le lendemain, James Webb, l'administrateur de la NASA estime que la mission est « la plus importante démonstration spatiale faite par une nation à ce jour » et les États-Unis, qui pensent que le prochain lancement sera habité, avancent la date du vol Apollo 8 ;
Le 8e lancement d’un 7K-L1 (Zond 6) du 10 novembre 1968 est encore inhabité. Le 14 novembre 1968, le vaisseau contourne la Lune à 2 420 km de distance mais lors du retour, deux accidents qui auraient été fatals à un équipage ont lieu : une dépressurisation de la cabine et l'ouverture prématurée des parachutes, si bien que Zond 6 s'écrase le 18 novembre 1968 à 31 km de Novokazalinsk, à 70 km du cosmodrome ;
Début octobre 1968, le général Kamanine estime (ou espère) qu'Apollo 8 n'a aucune chance de succès car Saturn V n'a volé que deux fois (avec un demi-échec) et que les États-Unis n'ont encore jamais envoyé de vaisseau autour de la Lune. Le 26 novembre 1968, en vue de battre ces derniers sur le fil, l'URSS doit obligatoirement utiliser la fenêtre de tir 8-12 décembre 1968. le 1er vol habité d’un 7K-L1 est fixé au 9 décembre 1968 puis repoussé au 17 décembre 1968, tandis que les équipages Valeri Bykovski-Nicolaï Roukavichnikov et Pavel Popovitch-Vitali Sevastianov) (équipage de secours), sélectionnés le 23 septembre 1968, s'entraînent à la Cité des étoiles. Alors qu'un Proton et un Zond sont prêts dans le hall d'assemblage, tous les quatre s'envolent vers le cosmodrome et attendent huit jours un ordre de lancement qui ne viendra pas.
Pendant ce temps, Frank Borman, James Lovell et William Anders survolent la Lune à bord d'Apollo 8 (24 décembre 1968)
Dès le 12 décembre 1968, Kamanine diagnostique les raisons de l'échec soviétique du vol circumlunaire habité : dissensions entre l'Armée de l'air (VVS) et ses opposants, dispersion des moyens entre entités responsables chacune d'une partie du vol habité : Forces des missiles stratégiques (RSVN), Marine (VMF), État-major et armée de l'Air qui, selon lui, devrait être seule en charge des vols habités. Kamanine note également que l'État a dépensé 10 milliards de roubles dans le programme N1 sans effet visible et dénonce plus généralement le concept des vols habités automatiques et se prononce en faveur de vols pilotés, citant les exemples du Soyouz, qui ne seront habitables qu'en 1968, tandis que les capsules Gemini (Gemini 3 en 1965 à Gemini 12 en 1966) ont volé dix fois et les capsules Apollo (Apollo 7 et Apollo 8 en 1968) deux fois. En conclusion, il estime que ce système a donné 2 à 3 ans d'avance aux États-Unis au détriment de l'URSS. Suite aux 20 orbites lunaires effectuées par Apollo 8 les 24-25 décembre 1968, il déclare « Aujourd'hui, quand les trois astronautes d'Apollo 8 survolent la Lune, le monde entier peut voir à quel point nous sommes en retard en matière de vols pilotés. Leur vol est vraiment un événement historique : c'est un grand jour pour toute l'humanité. Nous éprouvons toutefois une certaine amertume en pensant à nos possibilités manquées. ».
Le programme Proton/Zond ne s'arrête pas pour autant, mais les efforts se concentrent désormais sur le programme N1-L3.
Le 9e lancement d’un 7K-L1, le 20 janvier 1969, est un échec suite à l'extinction d'un moteur RD-0210 du 2e étage de T+501 à T+526 secondes, tandis que la capsule (celle du 7e vol annulé) est récupérée à 350 km d'Irkoutsk ;
Le 10e lancement et 1er d’un 7K-L1 habité (équipage Pavel Popovitch-Vitali Sevastianov) qui doit avoir lieu le 1er juillet 1969 est annulé.
Le 11e et dernier lancement d’un 7K-L1 (Zond 8), toujours inhabité, le 20 octobre 1970, est un succès.