Stress chez l'humain - Définition

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Approche psychologique du stress

Introduction

Avec l’approche biologique du stress, nous avons vu que lorsque l’organisme doit s’adapter à une demande environnementale, le corps dispose d’ajustements physiologiques non spécifiques répondant à cette demande. On se rappelle que pour l’approche biologique du stress, il importe peu que l’agent stressant soit d’origine physique ou psychique, interne ou externe, objectif ou subjectif, plaisant ou déplaisant, puisque la réponse non spécifique est toujours la même et que la seule chose qui compte c’est l’intensité de la demande de réajustement ou d’adaptation.

Comme ont pu le remarquer maints chercheurs, les organismes ne réagissent pas de la même façon lorsqu’ils sont confrontés aux mêmes événements. Par exemple, certains individus tomberont malades, alors que d’autres non (Holmes et Rahe, 1963). Il y aurait donc des variables individuelles rentrant en ligne de compte lorsqu’on parle de stress. L’approche biologique a pu expliquer ces différences individuelles par le biais d’une capacité d’adaptation différente chez chaque individu. Cependant, d’autres expériences comme celle de Friedman et Rosenman avec leur pattern comportemental de type A (1959) ont montré que ces différences individuelles ne peuvent être expliquées seulement par une capacité d’adaptabilité différente, mais aussi dans le fait que par un acte de pensée différent, certains individus parviennent à moduler leur stress. De cette manière le stress physiologique est diminué.

D’autres expériences, comme les effets du bruit sur l'exécution de certaines tâches, montrent aussi l’importance de variables contextuelles. En effet, un niveau sonore habituellement considéré comme stressant et perturbant peut aider à maintenir un niveau de performance lorsque les sujets sont fatigués comme a pu le montrer entre autres Broadbent (1971). L’approche biologique est incapable d’englober une telle découverte puisque pour elle le contexte n’est pas important. Les résultats prouvent malgré tout qu’il l’est.

En outre, comme ont pu le montrer Scott et Howard en 1970, « Certains stimulus, en vertu de leur signification particulière pour certains individus, sont susceptibles de ne provoquer des problèmes qu'à une partie des personnes ; alors que d'autres stimulus, de par leur signification plus largement partagée, provoqueront des problèmes à un plus grand nombre de personnes ». Il y aurait donc aussi des variables socioculturelles lorsqu’on parle de stress.

La relation de cause à effet stresseur => stress est donc remise en cause petit-à-petit et on se rend compte qu’il faut ajouter quelque chose à l’explication, c’est-à-dire la perception, au sens phénoménologique, qu’a l’individu de la demande qui lui est posée. Les chercheurs sur le stress vont alors aussi se pencher sur cette perception individuelle du stress en cherchant à mieux comprendre sa construction, son mode de fonctionnements, ses racines, ses effets sur l’organisme, etc.

Stress et épuisement professionnel

Le syndrome d'épuisement professionnel est un surmenage physique, épuisement professionnel ou autre, dont les répercussions psychiques manifestent un désordre "somato-psychique", alors que le stress est une angoisse d'inadaptation ou autre dont les répercussions physiques manifestent un désordre endocrinien "psycho-somatique". Le premier, de physique, arrive au psychique et le deuxième prend son origine psychique pour déboucher sur le physique.

Le phénomène "somato-psychique" est moins populaire que le phénomène "psycho-somatique" véhiculé par la psychanalyse, dès son origine freudien.

Le traitement de l’information, l’approche cognitive du stress

Lazarus (1984) est un des leaders de l’explication psychologique, il est le premier à montrer que le stress ne peut être envisagé par un simple lien de cause à effet du type « stresseur => stress » mais qu’il y a un phénomène perceptif dynamique et individuel qui est plus important que l’agent provoquant le stress lui-même. Selye a d’ailleurs bien compris les manques de sa théorie à ce niveau en disant à la fin de sa vie : « le stress, ça n’existe pas, c’est une abstraction ». Par cette phrase, il tend à souligner que l’agent stressant n’est pas celui objectivé dans la nature, mais plutôt celui qui est perçu par l’individu. L’individu n’est donc pas passif, il va rechercher activement des informations en donnant du sens à ce qui l’entoure, en privilégiant certaines informations provenant de l’environnement, tout en en oubliant d’autres. C’est ainsi qu’après des années d’études du stress à partir d’un pôle uniquement biologique, l’explication psychologique fait surface pour améliorer les manques de la précédente.

Le traitement de l’information est constitué de plusieurs variables, comme on a pu le voir précédemment : l’individualité, le contexte ou encore l’approche socioculturelle de tel ou tel événement.

Pour faire court, on peut dire que le stress ici est « un état psychologique issu de la perception d’un déséquilibre entre les attentes perçues et l’autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâches ». Cette définition de Jacques Larue (sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995) montre que le stress est ressenti par l’individu lorsque ce dernier ne se sent pas à la hauteur des demandes qu’il perçoit. Cette définition n’introduit cependant pas toute la dimension quantitative du stress, dimension modulée au niveau d’un traitement de l’information très complexe dont nous allons essayer d’en comprendre au mieux les fondements.

Lorsqu’un individu est soumis à une demande environnementale, ce dernier procède, souvent de manière inconsciente, à une évaluation cognitive (cognitive appraisal). Lazarus et Folkman (1984) distinguent deux sortes d’évaluation. Il y a d’abords l’évaluation de la situation même. Cette première évaluation (primary appraisal) se fait à partir de caractéristiques personnelles appelées ressources ainsi qu’à partir de la perception de certains facteurs environnementaux. Cette évaluation est une première ébauche de la situation telle qu’elle est perçue par l’individu. En second lieu, une seconde évaluation (secondary appraisal) est faite par l’individu, elle consiste en l’estimation de ses propres capacités à faire face à la demande. Cette estimation se fait sur la base de différentes simulations internes pour « faire face » (coping) au mieux à la demande. Après le choix d’une stratégie, l’individu peut réévaluer la situation une nouvelle fois. L’approche de Lazarus et Folkman inclut donc une dynamique cyclique en intégrant un feed-back permettant au sujet de savoir si sa stratégie est efficace. Ce concept est intéressant dans la mesure où dès le moment où le sujet se croit capable de contrôler ou s’accoutumer à la situation qui demande adaptation, alors cette dernière perd son effet perturbateur sur l’organisme.

On constate que le traitement de l’information dans le cas d’une situation stressante découle de plusieurs variables. Nous allons les expliquer brièvement.

Les ressources personnelles

Les ressources personnelles contribuent à faire en sorte que chaque individu réagisse différemment au stress. En s’appuyant entre autres sur Dorhenwend et Dorhenwend (1974. In Paulhan et Bourgeois, 1991, p. 34), on peut dire que les ressources personnelles pour faire face à une situation de crise, sont multiples. Citons-en quelques unes :

  • Les seuils de perceptions psychologiques et biologiques ;
  • l’intelligence, qui peut favoriser une évaluation plus approfondie autant de la situation que de ses propres capacité à y répondre ;
  • Les types de personnalité notamment entrevus dans les observations de Matthews et al. (1982. In Spencer, 2000) ainsi que Holmes et Will (1985. In Spencer, 2000). Ces auteurs montrent qu’il existe plusieurs types de comportement ayant des buts d’existence fondamentalement différents. Ainsi un comportement de type A serait caractérisé par un sentiment d’urgence, de compétitivité et d’hostilité, alors qu’un comportement de type B serait plutôt la recherche du temps libre, du plaisir, de la réalisation de soi, etc. Ces types de comportement seraient responsables d’une évaluation différente de la situation et de ses capacités individuelles. Le taux de stress serait alors changé. D’autres pans de personnalité auraient en outre aussi une influence sur la réaction de stress, comme c’est le cas avec l’extraversion ou l’introversion (Dennebaker et Susman, 1986. Dennebaker et O’Heron, 1984. In Spencer, 2000)), où les personnes ne pouvant parler de leurs problèmes sont plus victimes de maladies ;
  • l’état psychologique-physiologique (cognitif et émotionnel), qui interfère énormément dans l’évaluation autant de la situation que de sa propre personne. Ainsi une personne déprimée sera bien moins à même de faire une double évaluation en sa faveur ;
  • l’expérience passée, puissant modulateur de stress qui permet autant de relativiser que de dramatiser la situation présente;
  • Les croyances, dont des croyances irrationnelles (Albert Ellis, 1977, 1985, 1987. In Spencer. 2000) qui sont des « ouvertures à la détresse », parce que créant un stress supplémentaire. Ces croyances sont du type : « tout le monde devrait m’aimer », ou encore « je devrais être le meilleur au moins dans un domaine », etc. D’autres formes de croyance peuvent aussi moduler notre stress, comme le fait de croire en Dieu, en la Science, en l’Amour, etc. Ces croyances nous aident à supporter les aléas de l’existence, ils fixent une base solide sur laquelle reposer dans un environnement en perpétuel mouvement.
  • Le lieu de contrôle ou « locus of control » est un sentiment caractéristique différent chez chacun et relatif à la croyance irrationnelle de maîtriser (ldc interne) ou non (ldc externe) son existence. Il paraît bien évident qu’un lieu de contrôle interne est un puissant modérateur de stress, tandis qu’un lcd externe favorise une réaction de stress exacerbée. En outre, les individus disposant d’un lcd interne avec un haut degré d’attente d’efficacité sont encore moins sujets au stress que ceux qui n’ont guère confiance en eux.
  • Le sens de l’humour, prédisposant celui qui en a à une meilleure résistance aux situations stressantes.
  • etc.

Les ressources personnelles sont donc, comme on peut le voir, multiples. Ces ressources sont toutes plus ou moins différentes pour chaque individu et il se peut aussi que certaines ressources soient partagées plus que d’autres. Pourtant, si l’on dressait le profil psychologique des ressources de chacun, il y a de fortes chances pour que chaque individu soit différent des autres. Cette différence pourrait être une explication de la diversité des réponses en situation stressante.

Les facteurs environnementaux

Certains facteurs environnementaux sont pris en compte par l’individu, d’autres non. Un autre individu pourrait tout à fait s’appuyer sur d’autres indices situationnels pour donner sens à ce qu’il perçoit. En fait, tout dépend de ce qui est prégnant pour lui. Ce qui fait sens pour l’individu dépend de ses propres ressources personnelles.

Les caractéristiques de la situation, le soutien social perçu, les influences socioculturelles, l’âge, le niveau socioculturel, la profession, etc. peuvent être des classes d’indices utiles à l’individu pour son évaluation de la situation.

Certains facteurs environnementaux servent d’indices presque chaque fois qu’ils sont présents dans la situation qui demande adaptation, et ceci par presque tous les individus. C’est notamment le cas de la prévisibilité et de l’habituation :

La prévisibilité permettrait de réduire les effets du stress comme a tenté de le prouver Weiss (1972) avec son expérience sur des rats. Dans cette expérience la variable indépendante était la possibilité ou non de prévoir une décharge grâce à un signal lumineux puis d’appuyer sur un bouton pour arrêter cette décharge. La variable dépendant était la grosseur moyenne des ulcères et il fut évident que les rats les plus touchés par des lésions stomacales étaient ceux qui n’avaient pas été avertis à l’avance. Cependant, d’autres études (Laborit) ont pu montrer que le fait d’être averti d’un danger et de ne pas pouvoir agir sur lui était encore pire que le fait de ne pas pouvoir agir sans être averti. Ainsi la prévisibilité est un modérateur de stress pour autant que l’organisme se sente en mesure de contrôler l’agent stresseur.

L’habituation, modérateur du stress, est un « terme désignant la diminution progressive et la disparition d’une réponse normalement provoquée par un stimulus lorsque ce dernier est répété. […] Le terme d’habituation s’emploie pour une réponse inconditionnelle non apprise, telle que la réaction d’orientation observée lorsqu’un stimulus nouveau apparaît dans le champ perceptif » (Richard, 2002). Ainsi dans l’exemple d’un stress, la chronicité de celui-ci désensibilise en partie l’organisme, ce qui permet une approche moins stressante de l’agent provoquant le stress.

En conclusion, on peut donc dire que certains indices environnementaux sont utilisés par tout le monde dès que c’est possible, tandis que d’autres seraient en fonction d’un consensus moins largement partagé et dépendent par exemple de la culture, de la profession, d’une certaine croyance, etc.

La théorie de la motivation

Découlant principalement d’auteurs tels que Dewey, Toynbee, Cohen (1980. In Daillard, 2002) ou encore Low et McGrath (1971. In Daillard 2002), cette théorie stipule que la perception d’une situation stressante est un puissant stimulant et conduit toujours à une motivation supplémentaire. Par là même, la performance est améliorée. Ici, le stress est vécu comme un défi que l’individu se fait un honneur de surmonter. Au contraire, un manque de stress conduirait à une motivation diminuée.

Cette théorie nous paraît de premier abord très simpliste lorsqu’on parle du lien qu’il y a entre le stress et la performance de l’adaptation. En effet, un stress provoquant un supplément de motivation peut tout à fait être observé chez des individus ayant un comportement de type A qui se complaisent dans l’urgence. Cependant, qu'en est-il des individus ayant des comportements de type B et qui ne sont en aucun cas motivés intrinsèquement par des conditions stressantes pour effectuer une performance ? Il semble bien clair que cela ne soit pas le cas.

En outre, le lien stress donc motivation supplémentaire ne fonctionne que si l’individu a un haut degré d’attente d’efficacité (voir « traitement de l’information ») qui le motive intrinsèquement à performer au maximum de ses capacités.

La théorie de la motivation, malgré une validité douteuse, nous fait cependant remarquer que la réponse de stress n’est pas le seul facteur influençant la performance. Dès lors, si l’on veut étudier le lien entre le stress et la performance adaptative, il faut avant tout trouver les autres variables influencants elles aussi la performance. De cette manière, ces autres variables ne constitueront plus des variables parasites si elles sont prises en compte.

La motivation pourrait donc être un des multiples facteurs entrant en interaction avec le stress et déterminant la performance. Pour des raisons de scientificité, les chercheurs ont souvent substitué le terme « effort » à celui de « motivation », ce premier étant observable et objectif par la quantité d’énergie dépensée par l’organisme, mais dépendant directement de la motivation.

La théorie de l’attente de Vroom (1964) stipule que l’effort consacré à une tâche est fonction de trois variables.

Il y a premièrement « l’attente » qui est la conviction qu’un effort d’une certaine intensité entraînera une certaine performance. Le sujet peut penser qu’il n’y a pas ou peu de relation entre son effort et la performance qu’il obtient. Son attente serait alors faible ou nulle.

Deuxièmement, « l’instrumentalité » qui est la perception des chances d’obtenir la récompense escomptée si la tâche est réalisée.

Et pour finir, la « valence » qui correspond à l’importance que le sujet donne à la récompense obtenue en cas de réussite.

Cette théorie, en décortiquant les raisons motivationnelles qui poussent un individu à fournir un certain effort, sous-entend aussi que les sources de stress inhibant la performance peuvent être multiples dans ce processus.

Tout d’abord avec l’attente : comme on vient de le voir, le sujet peut penser qu’il n’y a que peu de rapport entre son effort et sa performance. Dans ce cas, il a un degré d’attente bas. Pour nous, ce dernier correspond à un manque d’attente d’efficacité tel que nous l’avons défini dans l’approche cognitive du stress. Or nous avons vu que ce degré d’attente d’efficacité était un puissant modérateur de stress. Bandura (1985. In Spencer, 2000) a pu le prouver en démontrant que lorsqu’une personne se trouve en présence d’objets qui lui font peur, un haut degré d’attente d’efficacité est accompagné d’un faible taux d’adrénaline et de noradrénaline dans le sang. Bandura n’est pas le seul chercheur à avoir pu montrer cet état de fait, d’autres chercheurs, s’intéressant notamment aux compétitions sportives, ont pu le montrer aussi.

Le « degré d’attente d’efficacité » ou « attente » est donc une variable qui module tout à la fois le stress et la motivation. Ainsi, du moment qu’une performance est entre autres fonction de ces deux variables, le degré d’attente d’efficacité est doublement bénéfique.

Pour l’instrumentalité se pose le problème de l’incertitude, c’est-à-dire lorsque le sujet n’est pas en mesure de savoir ses chances de réussite lors d’une tache accomplie au mieux. Là aussi, ce facteur est constitutif en même temps de la motivation ainsi que de la réaction de stress. En effet, si l’incertitude provoque la démotivation, elle est aussi à la base d’une réaction de stress exacerbée. Cela peut être expliqué simplement : nous avons vu précédemment qu’un lieu de contrôle interne était capable de modifier fortement le stress. En effet, les individus pensant que tout sur terre est fondé sur le principe méritocratique- à chaque peine, son mérite et sa récompense- sont moins à même d’éprouver du stress que les gens comprenant que la principe méritocratique n’est pas entièrement vrai et qu’il réside une grande part d’incertitude dans la réussite de nos actions.

L’incertitude, entrevue dans un lieu de contrôle externe, est donc un facteur constitutif du stress et de la motivation, tout comme le degré d’attente d’efficacité.

Pour finir, la valence, c’est-à-dire l’importance accordée à la récompense, peut elle aussi conduire a un stress supplémentaire. En effet, que dire d’un individu qui désire fortement un résultat (valence haute) tout en ne pensant pas disposer des ressources nécessaires à la réussite de ce résultat ? Ce type d'individu sera clairement soumis à une forte dose de stress.

On voit donc que les variables constitutives de la motivation sont aussi toutes présentes dans l’explication de la réaction de stress. En outre, selon la théorie de la motivation de Vroom et la définition du stress que nous avons donné auparavant, stress et motivation sont fortement corrélés: la démotivation est synonyme de stress dysfonctionnel et conduit à une performance dégradée, tandis que la motivation est synonyme de stress fonctionnel et conduit à une performance améliorée.

La théorie de l’attente de Vroom est donc complètement en accord avec la théorie de la motivation. Cependant, le pôle motivationnel du stress, bien que présent, n’est pas le seul, et ce dernier est plus que le découlant automatique et unique de la motivation. Fort de ce propos, nous allons continuer sur une théorie complètement différente qui pense que le stress est contreproductif.

Les stratégies de coping et stratégies d’ajustement

Le mot « coping » vient du verbe anglais « to cope with » dont il faut retenir la signification de « faire face à ». Selon Lazarus (1984), les capacités à « faire face » ou « coping » correspondent à l’ensemble des pensées et des actes développés par le sujet pour résoudre les problèmes auxquels il est confronté et ainsi de réduire le stress qu’ils engendrent, le coping vise donc la minimisation du lien stress-détresse. Le coping est toujours présent lorsque l’individu a perçu une demande d’adaptation et comprend beaucoup de processus autant conscients qu’inconscients.

Concernant les processus inconscients, nous pouvons citer les mécanismes de défenses observés par Freud comme le déni, le déplacement, l’agressivité objectale, l’intellectualisation, etc.

Les processus de coping conscients sont soumis aux lois de l’apprentissage; on les appelle alors les stratégies d’ajustement au problème. Ces stratégies sont constituées de trois grandes classes : les stratégies d’ajustement axées sur le problème, axées sur les émotions et pour finir sur l’hygiène de vie (Spencer, 2000).

Toutes les stratégies d’adaptation axées sur le problème visent la diminution ou l’élimination du stress par un acte cognitif et comportemental en agissant directement sur la source du stress. L’attaque, l’évitement, les techniques de résolution de problèmes constituent des stratégies axées sur la résolution du problème. Parfois, le problème ne peut être changé et il faut s’en accoutumer tant bien que mal. Les stratégies d’adaptation axées sur les émotions peuvent rendre alors un grand service à l’individu. Elles correspondent à une stratégie cognitive et émotionnelle qui permet de diminuer, voire d’éliminer le stress en percevant la source de stress différemment. La relaxation sous ses diverses formes (training autogène, Jakobson-Wolpe, sophrologie, Yoga, méditation, oraison, etc.), l’humour, l’expression des émotions, la comparaison sociale, sont des stratégies d’adaptation axées sur l’émotion. Pour finir, les stratégies d’adaptation axées sur l’hygiène de vie favorisent la prévention à la guérison. En pleine forme l’individu sera plus à même de supporter les demandes environnementales.

Une approche cognitivobiologique du stress et sa fonction dans l’adaptation

L’explication biologique ne nous a paru pas suffisante pour expliquer un concept aussi complexe que le stress. En effet, comme nous l’avons vu, une telle explication n’inclut à aucun moment le psychisme de l’organisme qui perçoit la situation selon certains cadres de pensée ; dans l’explication biologique du stress la réaction de stress est directement liée à une situation provoquant le stress, cette dernière tenant lieu de référant objectif vis-à-vis du stress ressenti.

Cependant, comme on peut le constater par la suite même avec des procédés aussi simples évolutivement parlant que l’habituation, la réaction de stress est toujours fonction d’une demande perçue par l’organisme, et non en fonction de la demande objective elle-même. Cette position est en accord avec la pensée cognitiviste qui pense qu’entre la situation réelle et la réaction de stress, il y a tout un traitement de l’information, fondamentalement différent chez chacun, et qui serait capable de moduler le stress ressenti.

Une autre limite de l’explication biologique a déjà été mentionnée, c’est le concept de non-spécificité de la réaction de stress ; c’est une réponse innée et stéréotypée qui se déclenche d’elle-même dès que l’homéostasie est perturbée. Ainsi peu importe que l’agent stressant soit d’origine physique ou psychique, interne ou externe, objectif ou subjectif, plaisant ou déplaisant, la réponse non spécifique sera toujours la même. Si l’on se souvient nous avions remis en doute cette non spécificité de la réaction de stress pour deux raisons principales.

Premièrement, le lien entre hypothalamus et cortex en plus du système limbique laisse présager que ce n’est pas seulement la quantité d’adaptation demandée (par le biais des émotions) qui est transmise à l’hypothalamus, mais aussi la qualité de cette adaptation par une perception provenant du cortex.

Deuxièmement, plusieurs auteurs nuancent les travaux de Selye, et mettent en évidence des patterns de réponses au stress présentants des différences. Par exemple, Cox & Cox (1985. In Rivollier, sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995) observent des différences de réponse sécrétrices d'adrénaline et de noradrénaline à diverses situations de stress. Ils montrent également une sensibilité de sécrétion en fonction des caractéristiques du travail telles que le mode de rémunération et la cadence de travail. La conclusion de cette étude est que l'activation de noradrénaline est en relation avec l'activité physique, les contraintes psychologiques et les frustrations engendrées par les types de tâches, alors que l'activation d'adrénaline est liée au sentiment d'effort et de stress.

Concernant l’explication physiologique, les conclusions de Cox et Cox sont très intéressantes. En effet, noradrénaline et adrénaline, bien qu’ayant la même fonction durant la phase d’alarme, n’ont pas le même potentiel de transmission de l’information : l’action de l’adrénaline est une forme atténuée de l’action noradrénergique. Ceci s’explique par une sensibilité réduite des récepteurs noradrénergique alpha pour l’adrénaline. Ainsi, l’hypothèse que l’on peut faire est que la médullosurrénale diminue la production de noradrénaline au profit de l’adrénaline, conduisant à une phase d’alarme diminuée avec les avantages que cela peut apporter dans certaines situations.

Non-spécificité de la réponse et objectivisme « contre-phénoménologique », sont donc les deux grandes critiques que l’on peut faire à l’explication biologique et surtout l’explication de Hans Selye.

La position cognitiviste quant à elle, n’a pas eu le même genre de problèmes. Elle a eu cependant des difficultés à relier le psychisme aux points forts de l’explication biologique. Ainsi, on a pu voir des définitions du stress excluant le pôle physiologique du stress, comme c’est le cas avec la position de Jacques Larue (sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995) : « un état psychologique issu de la perception d’un déséquilibre entre les attentes perçues et l’autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâche ».

Mais le stress est aussi un état physiologique, comme peuvent nous le montrer de multiples exemples de la vie quotidienne. D’ailleurs, des auteurs tels que Selye ont pu montrer l’impact du stress sur le corps avec les maladies dites « de l’adaptation ». De ce fait, on ne peut rayer le pôle biologique du stress et l’on se doit de l’intégrer à une définition englobante.

Si l’on regarde la littérature sur le stress, il y a eu relativement peu d’essais entrepris pour relier précisément les deux explications. Nous allons essayer d’en donner une comme hypothèse et qui rassemble ce que l’on a vu depuis le début de ce travail :

Tout commence par la perception de la situation constituée d’un traitement cognitif et émotionnel de l’information. Ce traitement de l’information est constamment remis à jour.

Le pôle émotionnel du traitement de l’information est en relation avec l’activation de la réaction de stress physiologique, comme a pu le montrer Cannon. Il a observé qu’une émotion déclenchait la sécrétion de catécholamines, provoquant ainsi la réponse immédiate du syndrome général d’adaptation. Concernant l'aspect physiologique, l’émotion pourrait transmettre comme information à l’hypothalamus, la quantité d’ajustement (adaptation) à fournir.

Le pôle cognitif du traitement de l’information pourrait transmettre des informations à l’hypothalamus sur la nature de la situation perçue. Ce renseignement pourrait permettre par la suite une plasticité de la réponse de stress en fonction de la situation.

Sans pour autant rentrer plus dans les détails physiologiques- cela prendrait trop de temps- l’apport principal de ce schéma est qu’il lie d’une manière directe le traitement cognitif et émotionnel de l’information à la réaction physiologique de stress, réaction qu’il considère comme spécifique. Pour ces deux raisons, le schéma s’écarte de la définition du stress faite par Selye.

On a vu précédemment les avantages d’une réponse spécifique de stress : le fait que la médullosurrénale diminue la production de noradrénaline au profit de l’adrénaline, pourrait conduire à une phase d’alarme moins violente. Ainsi la perception de certaines situations pourrait conduire à une phase d’alarme moins violente.

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