Le stress est très souvent présent dans le cadre de la vie professionnelle. Parfois, les entreprises exigent beaucoup de leurs cadres. Ceci va provoquer une situation de stress, de pression. Beaucoup de gens se plaignent d’être stressés au travail. Il a un grand nombre de raisons pour stresser au travail : des clients impossibles, un patron trop exigeant, des collègues affreux, des commérages au bureau, des délais trop courts, etc.
Il y a des personnes qui aiment la poussée d’adrénaline au travail. Cela les stimule, leur redonne de l’énergie d’être confrontées au stress ; elles se sentent revitalisées. Néanmoins, ce n’est pas le cas de tout le monde. Certains se sentent plutôt abattus et ceci est peut être dû au stress dans le cadre du travail. Voilà quelques signes qui exposent la situation de ces derniers :
Le stress au travail est considéré sur le plan international, européen et national comme une préoccupation à la fois, des employeurs et des travailleurs. Ayant identifié la nécessité d'une action commune spécifique sur cette question et anticipant une consultation sur le stress par la Commission, les partenaires sociaux européens ont signé, le 8 octobre 2004, un accord sur le stress au travail dans le cadre de l'article 138 du Traité CE.
Nous avons tenté jusqu’à présent de donner une définition globale du stress comme une réaction psychique et physiologique résultant de la perception d’une atteinte de l’environnement, cette atteinte demandant un effort d’adaptation. À partir de cette définition, nous avons tenté de donner les conclusions directes de l’implication de la réaction de stress dans l’adaptation. La plus importante de ces conclusions était de dire que la perception de l’individu tenait une place centrale dans le déclenchement physiologique d’une réaction de stress. En allant plus loin, nous avons suspecté que les effets du stress sur la performance étaient en partie le résultat de modifications au niveau du traitement de l’information.
Empiriquement parlant, nous avons pu justifier cette position en montrant qu’il existait des modulateurs psychologiques de stress (voir plus haut « le traitement de l’information »), modulateurs qui avaient l’air d’avoir une influence sur la réaction de stress, et par la même sur la performance.
Certaines théories, plus ou moins d’actualité, évoquant le lien entre le stress et l’adaptation pourraient être mentionnées ici ; les théories de la motivation, de l’interférence ou encore de la combinaison font partie de celles-là. Ces diverses pensées, si elles ne sont pas toujours validées en totalité par la Recherche actuelle, ont néanmoins le mérite d’ouvrir le débat sur de nouveaux facteurs influencés et influençant le stress ainsi que la performance adaptative.
Il semble que la circularité des concepts de stress et de performance adaptative soit en partie la raison d’un manque de précision en ce qui concerne le concept de performance de l’adaptation :
Ce concept de performance de l’adaptation est si englobant que nous pouvons le retrouver dans toutes les situations de la vie et dans n’importe quelle action de l’individu ; être performant signifie parfois être rapide, d’autres fois être intelligent, d’autres fois encore savoir s’arrêter à temps, etc. À partir de cela, discourir sur le lien entre stress et performance adaptative paraît être une démarche illusoire car beaucoup trop globale et complexe. En fait, il paraît difficile de vouloir tirer un lien général entre stress et performance à partir d’une multitude de situations aussi différentes les unes que les autres.
Dans cette optique, Hockey a pu montrer que la performance demandée était différente selon la situation. De même, il a pu montrer que le lien entre le stress et des performances spécifiques n’était pas toujours le même.
Le stress n’a pas la même influence sur les performances de vigilance, d’attention de vitesse et de précision. Inutile donc de dire qu’un lien général entre stress et performance est illusoire.
De par son expérience, Hockey attire notre attention sur le fait que la provenance du stress influe aussi sur la performance. Ainsi, une situation stressante de bruit n’aura pas le même effet sur la vigilance qu’un excès de travail.
Hockey nous montre donc qu’il existe différents stress spécifiques, ainsi que des performances spécifiques et qu’il est illusoire de vouloir trouver un lien général entre stress et performance.
Dans l’optique de Hockey, nous aurions donc dû préciser une situation précise avec la définition de performances demandées spécifiques. De même, le genre de stress auquel l’individu aurait été soumis, aurait dû être précisé. À partir de là, nous aurions été en mesure de déterminer la relation exacte d’une situation spécifique de stress sur certaines performances, elles-mêmes spécifiques.
Mais la spécificité des concepts de stress et de performance n’est pas la seule raison qui empêche de trouver une relation entre eux; dans la Recherche il existe aussi plusieurs problèmes qui empêchent la découverte de liens stables entre stress et performance adaptative.
Par exemple, l’expérimentation ne peut pas vérifier la quantité de stress ressentie par l’individu puisqu’elle n’influe que sur la situation expérimentale elle-même. En effet, selon l’approche cognitiviste, toute la dimension perceptive ne peut être contrôlée expérimentalement. De plus, cette perception sera différente pour chacun, ce qui fait qu’à situation expérimentale égale, les gens ne seront pas stressés de la même manière.
En outre, la condition expérimentale, par mesure éthique, ne peut normalement se permettre de pousser l’individu dans ses retranchements et de créer chez lui un stress. En effet, créer de la souffrance chez quelqu’un n’est pas acceptable moralement .
Pour finir, le stress étant un concept très "à la mode" depuis Selye, chaque individu a une conception spéciale de ce qu’est le stress et de sa relation avec la performance. Au début de ce travail, on a vu que les individus pensaient pour la plupart que le stress était un élément perturbateur dans l’amélioration de leur performance. À partir de là, des théories implicites peuvent apparaître et biaiser les résultats d’expériences étudiant le stress et la performance adaptative.
La relation entre le stress et performance adaptative est difficile à étudier car les concepts sont trop globaux et qu’ils sont moralement difficiles à étudier, qu’ils sont pris en compte dans des théories implicites et plus généralement perçus différemment par chacun. À partir de là, il semble illusoire de construire une théorie du stress et de l’adaptation. Cependant, les idées de Hockey pourraient constituer une voie possible en fractionnant les concepts. Elle permettrait une approche beaucoup plus fine des différents types de stress et de performances. De plus, elle éviterait les écueils de théories implicites.
Cette pensée stipule que le stress est contre-performant par le fait qu’il demande du temps et de l’énergie pour lutter contre le stress par le biais des stratégies de coping. De cette manière, cette même énergie et temps ne sont pas utilisés pour résoudre la demande perçue par l’organisme (Daillard, 2002).
Si cette théorie de l’interférence paraît de premier abord douteuse, elle introduit tout de même la notion d’énergie. Cette énergie, limitée, ne peut être en aucun cas utilisée partout et en même temps. Le choix de l’organisme pour mettre en place une stratégie de coping va de ce fait favoriser la contre-performance.
Cette notion d’énergie, bien que présente sous une autre forme, est un concept qui est déjà présent dans l’approche biologique du stress. En effet si l’on se souvient, le corps durant la phase de résistance était beaucoup plus endurant face au stimulus aversif, tout en étant beaucoup plus vulnérable à une nouvelle phase d’alarme. Nous verrons plus tard avec le modèle de Sanders (1983) que l’énergie disponible ou manquante pourrait avoir un effet sur la performance adaptative.
La brique centrale de cette théorie est constituée de la loi de Yerkes et Dodson (1908). Ces deux chercheurs ont été les premiers à décrire la relation quadratique entre le niveau d’activation et la performance dans une tâche d’apprentissage.
L’étude de Yerkes et Dodson portait sur des souris soumises à des chocs électriques d’intensité variable sur chaque erreur discriminative visuelle. Les résultats montrèrent une moins bonne performance de rétention pour des chocs électrique de faible ou forte intensité, les meilleures performances des souris étant obtenues par des chocs d’intensité moyenne.
Cette relation dite en « U inversé » qui prédit que la performance la meilleure sera atteinte par un niveau d’activation moyen, a été plus ou moins bien commentée par maintes recherches qui tentaient d’expliquer ce phénomène contre-intuitif. Ainsi certains chercheurs ont expliqué la relation en U inversé par un changement de stratégies cognitives (Tyler et Tucker, 1982 In Jean Rivollier. Sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995) par le rétrécissement du champ attentionnel (Easterbrook, 1959. In Jean Rivollier. Sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995), etc.
Une des meilleures explications fournies pour expliquer la loi de Yerkes et Dodson a été donnée avec la théorie de l’éveil de Scott (1966. In Daillard 2002). Cette théorie pense que le niveau d’éveil du cerveau détermine le degré d’attention face à un stimulus. Ainsi l’éveil jouerait un rôle très important dans le traitement de l’information et par là même dans la performance. De la même manière que la loi de Yerkes et Dodson qui évolue de manière quadratique, la théorie de l’éveil pense que seul un éveil moyen permet une performance accrue. En revanche, un éveil faible ou fort conduirait à une performance amoindrie.
Cette théorie de l’éveil peut paraître assez abstraite et contre intuitive. Elle est basée cependant sur des études solides telles que celle de Wilkinson (1963) qui a pu observer une relation quadratique entre l’interaction du bruit et du manque de sommeil, et l’efficacité-précision de temps de réaction.
Les résultats de cette recherche sont étonnants : le bruit, élément souvent considéré comme stressant peut être autant bénéfique que perturbant selon la fatigue du sujet. Pour le dire autrement, un sujet en forme et en présence de bruit est moins performant que s’il était dans un environnement silencieux. Par contre un sujet fatigué et en condition de bruit environnemental sera beaucoup plus performant que s’il était dans un environnement silencieux ! Cette expérience corrobore merveilleusement la théorie de l’éveil de Wilkinson.
On a souvent vu la loi de Yerkes et Dodson se généraliser au stress et à la performance. Mais tout comme la motivation, on ne peut pas dire que seul l’éveil est constitutif du stress et de la performance de l’adaptation.
Le modèle énergético-cognitif du stress et de la performance de Sanders (1983. In Davranche. 2003) présente les étapes et les mécanismes du traitement de l’information. Il a également l'avantage de prendre en compte l’effet de l’effort (dû à la motivation, c.f. la théorie de la motivation) et de l’éveil (c.f. Wilkinson). Le concept d’énergie (c.f. la théorie de l’interférence) y est repris.
Le modèle de Sanders (1983) est le résultat d’un conglomérat de deux approches du traitement de l’information. La première est l’approche computationnelle qui pense que la performance dépend de la qualité du traitement de l’information, traitement effectué par une succession de stades opérants des transformations de représentation (Sternberg, 1969. In Davranche). Dans cette optique, Sanders crée le « modèle sériel discret » (1980), modèle qui sera à la base de celui de 1983.
Le modèle sériel discret pense que le traitement de l’information est constitué de 4 étapes :
La deuxième approche adoptée par le modèle de Sanders (1983) est l’approche énergétique qui pense que la performance doit être expliquée en termes de quantité de ressources allouées à une tâche.
Sanders reprend les trois mécanismes énergétiques de Mcguiness et Pribram (1980. In Davranche, 2003) :
Pour que l’explication soit complète, l'existence d'un mécanisme d’évaluation est importante pour juger du fonctionnement approprié de l’éveil et de l’activation. L’information utile à l’évaluateur provient de deux retours d'information (feed-back).
Le premier feed-back renseigne l’évaluateur sur l’état physiologique du système. Il provient directement de l’éveil et de l’activation et il permet de déclencher une action immédiate de l’effort en cas de déséquilibre entre ces mécanismes.
Le deuxième feed-back renseigne l’évaluateur sur la performance cognitive ou comportementale réalisée. Il est comparé à la performance et à l’état, obtenu par cette dernière, voulus par l’individu. Il paraît vraisemblable que la performance idéale et l’état idéal voulus par l’individu soient changeants et dépendent de nouvelles informations sur le stimulus, de nouveaux buts voulus, etc.
Lorsque le feed-back de la performance obtenue n’est pas jugé suffisant par l’évaluateur, ce dernier active un peu plus l’effort. Celui-ci quant à lui, active un peu plus l’éveil et l’activation puisque, en l'état, ils ne permettent pas d’assurer une performance suffisante.
Nous avons vu jusque là le traitement de l’information de Sanders sans y voir apparaître le stress. Nous y venons maintenant. Pour l’auteur de ce modèle, le stress correspond à une sensation subjective désagréable de l’évaluateur lorsqu'un déséquilibre énergétique ne peut être compensé par l’effort. À partir d’une telle définition, nous pouvons ressortir cinq causes principales de stress :
Comme on peut le constater, Sanders a une vision très large de ce qu’est le stress. Nous pouvons constater que l’effet de la loi de Yerkes et Dodson se fait ressentir, puisque le stress est autant dans la sur-stimulation que dans la sous-stimulation.
On comprend aussi dans cette définition de Sanders qu’un effort puissant, provenant d’une motivation forte de l’individu, constitue une barrière protectrice contre un grand nombre de situations de stress. Un effort puissant permet une meilleure performance et donc une meilleure adaptation au problème. Dans ce modèle ce n’est pas vraiment le stress qui a un effet sur la performance mais plutôt cette dernière, dans un rapport « performance perçue / demande perçue » Parce qu’elle ne peut pas être améliorée, tout étant insuffisante pour l’individu (demande perçue), la performance fait ressentir un stress de l’évaluateur ! Cette conclusion pose le problème compliqué de la circularité de la relation stress-performance.
L’approche cognitiviste face à l’approche biologique a aussi posé ce problème de la circularité des concepts de stress et de performance adaptative. En effet, on se souvient que la définition cognitiviste du stress était un état psychologique issu de la perception d’un déséquilibre entre les attentes perçues et l’autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâche. Il nous apparaît maintenant très clair que cette définition inclut le fait que le rapport performance / demande influe sur le stress.
Dans le modèle cognitiviste du traitement de l’information, la performance prise en compte par l’individu se situe à deux niveaux :
Pour résumer, le stress proviendrait du fait que l’on ne se sente pas à la hauteur de ce que l’on pense devoir faire pour être adapté. En outre, le fait que l’être humain soit capable de se représenter dans le temps à partir du présent, pourrait conduire à ce qu’il ressente un stress dû à un événement qui n’est pas encore arrivé (c’est le stress vu au deuxième) ou d’un événement qui est déjà arrivé comme dans la cas d'un stress post-traumatique.
Par ailleurs, le stress joue aussi un rôle sur la performance de l’adaptation, comme le démontrent toutes les études biologiques du stress. Selye a pu montrer par exemple, que la réaction de stress mettait l’organisme dans un état tel qu’il favorisait la lutte et la fuite qui sont des manières d’éviter une situation à laquelle on ne peut s’adapter. Or, éviter effectivement une situation à laquelle on ne peut s’adapter, signifie, entre autres, qu'on est adapté à son environnement.
De plus, Selye a pu montrer que lorsque l’organisme ne pouvait éviter la demande d’adaptation qui lui était faite, alors ce dernier accroissait sa résistance à cette demande, ce qui montre encore le lien du stress avec la performance adaptative.
En conclusion, il semble impossible de supprimer la circularité de concepts tels que le stress et l’adaptation sans léser une des théories du stress. De plus, est-il vraiment utile et possible de le faire ?