La synagogue de Bingen am Rhein a été construite en 1905 et comme la majorité des synagogues en Allemagne, elle sera détruite par les nazis en 1938.
Bingen-Am-Rhein, située dans le Land de Rhénanie-Palatinat, en bordure du Rhin, à 35 kilomètres à l'ouest de Mayence, capitale du Land, compte actuellement près de 24 400 habitants.
Une communauté juive importante existe à Bingen depuis le Moyen Âge. Dès le Xe siècle, des Juifs se sont installés dans la ville, et vers 1160, Benjamin de Tudèle y mentionne l'existence d'une communauté juive. Lors des fêtes de Roch Hachana de 1198 ou de 1099, les Juifs de Bingen sont dévalisés et chassés de la ville. Les Juifs ne reviennent à Bingen qu'au début du XIVe siècle. Ils ont une très grande importance pour l'archevêque de Mayence en tant que bailleurs de fonds. En matière de droit et de religion, les Juifs de Bingen sont sous l'autorité du tribunal rabbinique de Mayence. La plupart des familles juives vivent alors dans la Judengasse (ruelle aux Juifs), située au centre-ville, entre la Judenpforte (porte aux Juifs), située à hauteur de l'actuel Rheinstraße (rue du Rhin), au nord et la place du marché de l'ouest, dénommée depuis 1933 Rathausstraße (rue de la Mairie), au sud.
Lors du pogrom de 1348-1349, la communauté juive est détruite. Dès 1354, plusieurs familles juives se réinstallent à Bingen. Dans les décennies suivantes, six à neuf familles vivent en ville. Un certain Kussel, fils de Salman s'installe à Bingen en 1388, et en 1418, devient le "chef" des Juifs de l'archevêché de Mayence. Lors des incendies de la ville de 1403 à 1409, le quartier juif est aussi détruit.
Au XVe siècle, le rabbin Seligmann Bing (mort en 1469), acquiert une grande notoriété dans les pays germaniques, pour sa grande piété et ses connaissances universellement reconnues. Depuis 1469, les Juifs sont menacés d'expulsion, mais la décision est reportée à plusieurs reprises, et ne sera appliquée, quoique partiellement qu'en 1507.
Du XVIe au XVIIIe siècle, des Juifs vivent à Bingen. En 1689, la ville compte 21 familles juives. C'est l'année où les Français incendient la ville, détruisant aussi la synagogue. En 1765, le nombre de familles juives s'élève à 51, ce qui avec un total de 343 personnes, représente 12 pourcents de la population totale de 2 812 habitants de la ville.
En 1800, pendant l'occupation française, qui a débuté en 1793, la population juive de Bingen, obtient l'égalité des droits avec la population chrétienne. Mais lors des révolutions de 1848, se déroulent de graves émeutes contre les Juifs, et seul l'envoi de l'armée de Hesse et l'arrestation de plusieurs personnes impliquées dans le pogrom, permettent de calmer la situation.
Au XIXe siècle, la population juive croit fortement, passant de 297 habitants en 1807, à 409 habitants en 1828 (soit 10,2 pourcents de la population totale de la ville, d'environ 4 000 habitants), puis à 507 habitants en 1861 (soit 8,6 pourcents des 5 916 habitants], à 542 habitants en 1880 (soit 7,7 pourcents sur 7 062 habitants) et à 713 en 1900 (soit 7,4 pourcents des 9 600 habitants de la ville). Après 1900, la population juive va commencer à décroitre dû à une émigration vers l'étranger ainsi que des départs vers des grandes villes allemandes. En 1910, on recense 601 habitants juifs représentant 6,0 pourcents de la population totale de 9 952 habitants. En 1924, les familles juives habitant les bourgs de Kempten am Rhein, Gaulsheim, Bingerbrück, Bad Münster am Stein-Ebernburg et Weiler, soit un total de 35 personnes, sont rattachées à la communauté de Bingen.
Jusqu'en 1933, les résidents juifs de Bingen jouent un rôle important dans la vie économique et sociale de la ville. La communauté juive possède une synagogue, une école, un mikvé (bain rituel) et un cimetière. Il y a d'abord eu une école religieuse, puis à partir de 1834 une école élémentaire, mais cette dernière fermera après la mort prématurée de son professeur, Anton Bachrach. Les élèves juifs fréquenteront alors les écoles publiques de la ville.
Lors de la Première Guerre mondiale, la communauté juive de Bingen compte une vingtaine de morts et de nombreux blessés. En 1924, le nombre de Juifs de Bingen avoisine les 500; les dirigeants de la communauté sont Julius Simon, Isidor Groß, le docteur Otto Marx, Bernhard Loeb et Oskar Meyer. 42 élèves sont inscrits à l'école religieuse où le professeur et en même temps chantre de la synagogue est Alfred Löwy.
En 1932, le président de la communauté est le docteur Otto Marx, avec comme vice-président Isidor Groß et Nathan Loeb. Le Hazzan est Isi Bayer.
Bingen est le siège d'un rabbinat d'arrondissement dont dépendent jusqu'à la période nazie, les communautés juives de Dromersheim, Fürfeld, Gau-Algesheim, Gensingen, Ingelheim am Rhein, Ockenheim, Schwabenheim an der Selz, Sprendlingen, Stein-Bockenheim et Wöllstein. Les principaux rabbins du XIXe et XXe siècle ayant officié à Bingen sont:
1870-1889: aucune information vérifiable disponible pour cette période.
La communauté juive est très active et très organisée. Elle dispose de nombreuses associations d'aide aux personnes défavorisées de la communauté, regroupées dans la Zentralkasse für jüdische Wohlfahrtspflege (La Caisse centrale de protection des Juifs) dirigée lors de sa création en 1924 par le rabbin Appel. Parmi ses associations: Armenverein (Association des pauvres), Männerkrankenverein (Association des hommes malades), Frauenkrankenverein (Association des femmes malades), Humanitätsverein (Association humanitaire) et Mädchenausstattungsverein (Association de dotation des jeunes filles); La Jüdischer Jugendverein (Association de la jeunesse juive), dirigée en 1924 par Robert Stein, puis en 1932 par Paul Schirlig; La Synagogenchorverein (La chorale de la synagogue) dirigée en 1924 par Ernst Groß; les associations locales de la Centralverein deutscher Staatsbürger jüdischen Glaubens (Association centrale des citoyens allemands de religion juive) avec 156 membres en 1924, et de la Reichsbund jüdischer Frontsoldaten (Ligue du Reich des soldats juifs du front) présidé en 1932 par le procureur Stern.
Depuis 1876, à coté de la communauté réformée nettement majoritaire à Bingen, existe la Israelitische Religionsgesellschaft (Communauté juive orthodoxe) avec sa propre synagogue, son propre rabbin, son quartier de cimetière et une école. En 1924, le poste de rabbin est vacant, et les dirigeants de cette communauté sont Julius Kann, Fritz Rosenthal et Hermann Wolf. En 1932, Julius Kann est le président de la communauté et Martin Wolf le secrétaire. A l'école, douze élèves suivent les cours donnés par Gustav Anger, qui est non seulement enseignant mais aussi shohet (abatteur rituel) et Hazzan (chantre) à la synagogue.
L'action sociale est organisée conjointement par les deux communautés avec la Caisse centrale.
Les rabbins orthodoxes sont:
En 1933, 465 Juifs vivent à Bingen, ce qui représente 3,3 pourcents de la population totale de 14 098 habitants. Le 1er avril 1933, commence à Bingen la persécution par les nazis des citoyens juifs de la ville par l'appel au boycott de leurs commerces et la privation de leurs droits.
Cette persécution va aller en s'amplifiant jusqu'à la nuit de Cristal du 9 au 10 novembre 1938, où les membres de la SA locale et des environs, aidés par une partie de la population pillent et saccagent de nombreux commerces et habitations détenus par des Juifs. L'imposante synagogue libérale est pillée et incendiée complètement, tandis que l'intérieur de la synagogue orthodoxe est dévasté. Les habitants juifs sont arrêtés et conduits par camions à travers la ville jusqu'à la Hessischen Hof située dans la Mainzer Straße. La majorité des hommes sont ensuite déportés dans des camps de concentration.
En 1939, sur les 465 juifs vivant à Bingen en 1933, 243 auront quitté la ville ou auront réussi à émigrer à l'étranger. En 1942, 152 Juifs restés en ville sont déportés, et 17 autres les deux années suivantes. La quasi-totalité d'entre eux périront dans les camps d'extermination.