Malcolm Adiseshiah est un pédagogue indien, né à Vellore en Inde du Sud en 1910, décédé en 1994.
Pendant la période postcoloniale, Adiseshiah défendit l’éducation comme un facteur vital du développement socio-économique.
Dans les années qui suivirent la guerre, estimant non seulement que l’éducation ne recevait pas une part équitable des ressources nationales et de l’aide internationale destinée à la mise en place et au développement d’institutions, mais que les dirigeants des pays nouvellement indépendants faisaient leur la notion superficielle de l’éducation dont ils avaient hérité, il souligna l’importance croissante que l’éducation revêtait pour l’édification d’une nation. Il agit sur la pensée des banquiers et de ceux qui fournissaient une aide, comme sur celle des bénéficiaires de cette aide ; il modifia la façon dont était perçu « le rôle de l’homme dans le développement », expression qu’il utilisait souvent et qu’il rendit célèbre.
Adiseshiah proclama que l’éducation jouait un rôle qui transcendait ces paramètres limités et qu’elle constituait un service public déterminant pour l’éradication de la pauvreté et pour la croissance socioéconomique. Aux postes de haute responsabilité qu’il occupa à l’Unesco au cours des années 1950 et 1960, il se rendit célèbre par sa thèse selon laquelle l’éducation pouvait apporter une contribution décisive au développement socio-économique du tiers monde.
Né dans la ville de Vellore en Inde du Sud, le jeune Malcolm a pour père, un professeur de philosophie et une mère qui fut la première femme à siéger au conseil municipal de Vellore et présider le club féminin de Vellore.
Après huit années d’études universitaires à Madras, à la London School of Economics et à Cambridge, Malcolm Adiseshiah enseigna pendant dix ans l’économie à Calcutta et à Madras avant d’entrer à l’UNESCO. C’était l’époque où John Maynard Keynes ébranlait les fondements traditionnels de l’économie. Frais émoulu de ses études auprès de Keynes, Adiseshiah enseigna la macro-économie et les causes du chômage prolongé à ses étudiants de licence du Christian College de Madras. Il enseignait l’importance du secteur agricole, montrant que, dans un pays comme l’Inde, la croissance économique reposait sur le développement de l’agriculture et que l’industrialisation ne pouvait être réalisée sans une rupture avec l’économie de subsistance. Il se donna beaucoup de mal, et en retirait d’ailleurs beaucoup de satisfaction, pour trouver dans les villages des exemples illustrant les théories économiques qu’il exposait dans ses cours. Il avait coutume d’enfiler un short kaki et de partir avec ses étudiants pour des villages avoisinants où, comme il l’écrit lui-même, il travaillait sur « l’économie du riz pilé à la main, du papier fabriqué à la main, des étoffes tissées à la main, les assolements et le crédit rural ».
Les archives de l’UNESCO contiennent 118 fichiers d’écrits d’Adiseshiah, ce qui doit représenter à peu près 48 000 pages. Il suffira ici de rappeler brièvement deux de ses principaux domaines d’action à l’UNESCO. En premier lieu, le travail de pionnier que furent le lancement et la mise au point de projets d’assistance technique dans le tiers monde et, en second lieu, les huit années où il exerça les fonctions de directeur général adjoint. À soixante ans, il retourna en Inde, passionnément désireux de promouvoir le développement socio-économique de son pays. Il fonda l’Institut d’études du développement de Madras (MIDS). Le MIDS devint rapidement un précieux centre de recherche pour l’État du Tamil Nadu et pour l’Inde.
Adiseshiah tenait à revenir à l’étude des problèmes de l’Inde rurale. Au cours des premières années du MIDS, il dirigea un certain nombre d’études sur le Tamil Nadu rural : l’économie de la culture sèche, de la réforme agraire, de l’irrigation, de l’emploi rural et du logement rural. Parce qu’il était particulièrement soucieux du sort des pauvres et des secteurs négligés de la société indienne, il dirigea des études sur la pauvreté et l’offre de produits de première nécessité au Tamil Nadu, sur l’évolution des revenus du travail et le statut social de la communauté Harijan au Tamil Nadu, sur les conditions d’existence des castes et tribus « énumérées », sur les petits pêcheurs et sur les conditions de vie des femmes.
On peut souligner son rôle d’enseignant, surtout quand il fut au MIDS dans le dernier quart de sa vie. C’est à la tête de cet institut qu’il prit une série de mesures pour remédier à la qualité assez faible des travaux de recherche économique qui étaient alors entrepris, en particulier dans le cadre des programmes formels de doctorat en sciences sociales. Il organisa d’abord une réunion des plus grands spécialistes des sciences sociales de l’Inde du Sud, manifestation qui devait devenir un événement annuel dans le calendrier du MIDS. Puis, il institua en 1971, avec le concours du Conseil indien de recherche en sciences sociales, un programme de formation de six semaines en méthodologie de la recherche à l’intention des étudiants du doctorat en économie de toutes les universités de l’Inde du Sud.
Il organisa ensuite un programme spécial de formation pour les directeurs d’études de doctorat. Ces activités donnèrent lieu à la publication d’un guide, A guide to research in economics, considéré aujourd’hui, en matière de recherche économique, comme un ouvrage de référence dans les universités indiennes. Dans le cadre des programmes du MIDS nouvellement créé, Adiseshiah, en sa qualité de fondateur-directeur, lança une série de séminaires mensuels destinés à servir de tribune publique pour des discussions sérieuses sur des questions socio-économiques variées.
Le MIDS publiait tous les mois une lettre d’information, le Bulletin, qui reproduisait le document établi pour le séminaire mensuel ainsi qu’un compte rendu des débats auxquels il assurait ainsi une plus large diffusion. Mais le Bulletin servait davantage encore de référence avec ses éditoriaux de vingt-cinq pages qu’Adiseshiah écrivit jusqu’à la fin de sa vie. Il s’agissait d’un commentaire mensuel factuel sur les facteurs économiques, éducatifs et sociaux relatifs au Tamil Nadu, à l’Inde et aux affaires internationales.
En plus de son travail au MIDS, Adiseshiah fut membre en 1972 de la Commission de planification de l’État du Tamil Nadu nouvellement créée ; de 1975 à 1978, il fut le vice-chancelier de l’Université de Madras et, de 1978 à 1984, membre du Parlement.
Il fut membre du Conseil consultatif central de l’éducation, du Conseil indien de la recherche en sciences sociales, du Conseil national de formation des maîtres et président de l’Association économique indienne. Il dirigea la publication d’un certain nombre d’ouvrages, notamment Science in the battle against poverty [La science dans la bataille contre la pauvreté] et Towards a learning society [Vers une société étudiante]. Il fut aussi l’auteur de deux livres sur l’importance socio-économique de l’éducation : Que mon pays s’éveille (1970) et Il est temps de passer à l’action (1972). Quinze universités de l’Inde et d’autres pays lui conférèrent un doctorat honoris causa.
À sa mort, il légua tous ses biens à l’Institut des études sur le développement de Madras qu’il avait fondé, une partie étant destinée à la création d’un fonds spécial pour l’enseignement et la recherche en économie.