Strontiodressérite - Définition

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La paragenèse

La strontiodressérite de la Drôme se trouve dans les marnes noires du Jurassique, en compagnie de calcite, célestine, tunisite, dickite, gypse et sulfures tels que sphalérite et chalcopyrite. Ajoutons encore leurs produits de d’altération telles que l’hydrozincite, la smithsonite, la cérusite, la plattnerite et la malachite.

Caractéristiques de la strontiodressérite de Condorcet

Dans le gîte de Condorcet, la strontiodressérite, en agrégats blancs mamelonnés et fibroradiés, se singularise par sa grande abondance comparativement aux gîtes mondiaux connus à ce jour. Visuellement, la confusion avec d’autres carbonates hydratés blancs est très grande, c’est le cas en particulier avec la dawsonite. De ce fait, lorsque nous avons étudié les premiers échantillons en 1999, nous pensions alors avoir affaire à de la dawsonite, un minéral déjà connu dans les Alpes. L’analyse par diffraction de rayons X a donné des résultats très différents, le diagramme de poudre obtenu correspondant à une espèce du groupe de la dundasite. Afin de supprimer toute ambiguïté dans la détermination, des analyses qualitatives ont été effectuées par spectroscopie de dispersion d’énergie de rayons X (EDXS). Les résultats ont montré la présence dominante de l’aluminium, du strontium, de l’oxygène et du carbone. De faibles quantités de calcium, de même que des traces de zinc et de baryum ont également été détectées sur certains échantillons. Suite à l’abondance de strontiodressérite à Condorcet, des analyses chimiques quantitatives ont été réalisées à l’aide de la microsonde électronique pour doser le strontium, le calcium et l’aluminium. Grâce au coulomat nous avons dosé le gaz carbonique (CO2) dégagé par le minéral lors de sa décomposition thermique à 1 000 °C. Les teneurs obtenues sont en excellent accord avec celles de la composition théorique et correspondent au matériel type du Québec.

À notre connaissance, c’est la première fois que du zinc est mis en évidence dans des minéraux du groupe de la dundasite. La présence de cet élément n’est pas étonnante dans le gîte de strontiodressérite de Condorcet : la sphalérite brun miel ainsi que ses carbonates d’altération, l’hydrozincite et la smithsonite, y sont localement abondants. Cette présence de zinc, qui se substitue au strontium et au calcium dans la strontiodressérite, laisse supposer l’existence d’une nouvelle espèce hypothétique, la « zincodressérite » de formule idéale : ZnAl2(CO3)2(OH)4, H2O.

De même, le calcium toujours présent dans les analyses (jusqu’à 3,7 % de CaO) supporte l’existence probable d’un équivalent calcique dans le groupe de la dundasite : l’hypothétique « calciodressérite » de formule idéale : CaAl2(CO3)2(OH)4, H2O.

Le gisement

À première vue, ce ravin semble ne présenter aucun intérêt. En y regardant de plus près, on peut cependant constater que le gisement, qui mesure environ trente mètres de longueur, se compose de quatre proéminences rocheuses. Elles font saillie hors d'un banc calcaire marneux délabré et de son support de marne durcie, qui sont parsemés de fentes et de fractures dans tous les sens. Les filons et autres fentes du premier point de recherche contiennent des minéraux intacts et d'excellente qualité, tandis que dans les trois protubérances suivantes, ils sont partiellement décomposés. Ils recèlent en revanche de la strontiodressérite, un minéral encore plus rare que la tunisite.

L'affleurement intact

La largeur des fissures dépasse rarement deux centimètres. Elles sont comblées soit de calcite, de célestine ou de tunisite, soit d’un mélange de ces trois minéraux. Dans le premier cas, la tunisite se présente sous forme de masse translucide et brillante de teinte violine très pâle, composée de cristaux imbriqués les uns dans les autres, sans solution de continuité. Dans le deuxième cas, la tunisite tapisse en général les parois des fissures. L’espace restant se remplit rapidement de calcite qui enrobe parfois des sulfures ou de la dickite. Il est donc très rare de trouver des cristaux de tunisite aux contours bien dessinés.

L'affleurement dégradé

La minéralisation dans le banc calcaire marneux

Les fissures des trois saillies suivantes du banc rocheux contiennent les mêmes minéraux que celles du premier affleurement. Les filons étanches, dont l'épaisseur peut atteindre le décimètre, contiennent donc souvent de la tunisite massive, très légèrement violine, de première génération. En général, les filons sont perméables et leur remplissage incomplet, ce qui a permis aux cristaux de se développer sans contrainte et de former des faces terminales. La plupart d’entre eux ont, cependant, subi de sérieuses dégradations. La célestine de première génération est pratiquement redissoute alors que la tunisite, protégée par une couche de calcite, n’a été que partiellement atteinte. La sphalérite de quelques filons restés étanches a supporté cette période destructive sans problème, tandis que dans les zones perméables, elle a été fortement détériorée, voire totalement décomposée. Les cavités qui subsistent contiennent souvent des vestiges de sphalérite et des résidus brun orangé. La chalcopyrite, le seul sulfure qui s'en soit sorti sans dommage, a, par la suite, engendré de la malachite. Quant à la calcite et la dickite, elles n'ont pas été inquiétées par ces ravages. Ces destructions sélectives ont cependant enrichi la solution aqueuse en sels minéraux et simultanément neutralisé son agressivité. Lors d'une sursaturation ultérieure, cette solution modifiée a dû se dessaisir des sels excédentaires qu’elle contenait. À cette occasion, elle a généré de la strontiodressérite, un minéral extrêmement rare qui apparaît uniquement dans les filons perméables, où les minéraux sont en voie de transmutation ou déjà déminéralisés, ainsi que dans tous les interstices où la solution modifiée a pu pénétrer. Certains minéralogistes classent ainsi la strontiodressérite parmi les évaporites.

Les filons au remplissage partiel, qui abritent des scalénoèdres centimétriques de calcite blanchâtre, sont souvent couverts ou parsemés de sphéroïdes de strontiodressérite d’un blanc éclatant. Ils forment de spectaculaires agrégats fibroradiés.

Ces filons ainsi que les fissures importantes du banc calcaire marneux abritent fréquemment de la dickite, un minéral argileux blanc, microcristallin. Elle remplace, dans la mesure du possible, la célestine de première génération redissoute et comble partiellement des zones déminéralisées. Les lacunes qui subsistent sont parfois parsemées de cristallites individuelles fusiformes, blanches et brillantes qui sont le premier stade du développement des sphéroïdes. Elles s’assemblent en gerbes graciles, à la base desquelles se forme ensuite un petit noyau sphérique qui augmente rapidement de volume et enrobe de plus en plus les cristallites disposées en étoile. Ces complexes cristallins font ainsi penser à des pelotes d'épingles ou à des hérissons aux longs piquants dressés. À la fin de leur évolution, les sphéroïdes peuvent totalement incorporer les sommets des cristallites. Ces différents stades, qui se côtoient sans problème, peuvent également s'observer sur les plans de fracture du remplissage calcique de certaines fissures.

Les cristaux de célestine de deuxième génération et les sphéroïdes de strontiodressérite se sont très souvent déposés simultanément sur les scalénoèdres des filons de calcite.

De petits groupes de cristaux carrés et troubles de tunisite de troisième génération (type B) accompagnent parfois les sphéroïdes de strontiodressérite dans des recoins éloignés de certaines géodes de calcite. Ils se sont développés aussi bien sur du matériel décomposé que sur des minéraux intacts et peuvent même apparaître sur les sphéroïdes de strontiodressérite. La longueur de leurs arêtes varie entre 0,3 et 0,7 mm.

On a même ramassé au fond du ravin un cristal de galène de quatre centimètres de grandeur dont l’une des faces est parsemée de cristaux submillimétriques partiellement couverts de rouille. La position idéale et les contours très nets du plus grand d'entre eux permettent de constater qu'il s'agit de tunisite de troisième génération de type B aux angles à peine tronqués. Cette superposition n'a jamais été observée dans ce gisement, ni dans celui de tunisite de la Drôme. Il provient vraisemblablement d’un filon de galène enfoui sous les éboulis. C’est d’ailleurs sur cette galène que Nicolas Meisser a décelé la plattnerite.

Suite à une « erreur de gestion », la strontiodressérite s'est même déposée sur des cristaux intacts de tunisite de deuxième génération pouvant atteindre 5 mm de côté ! Ils forment des groupements jointifs d’individus de type C accolés par leur base (001). Cette superposition est d'autant plus surprenante que la formation de la strontiodressérite découle, en partie, de la décomposition de la tunisite. Des vestiges d’un enduit jaune orangé opaque, qui recouvrent par places le tapis cristallin, permettent de déduire que la tunisite a été protégée durant la période destructive par un minéral qui, après sa redissolution, a laissé subsister ces traces en souvenir de son passage. Pour l'instant, cette particularité n'a été observée que sur un seul échantillon.

Le gypse, dernier minéral de cette paragenèse, forme, par places, des croûtes millimétriques, incolores et transparentes sur les minéraux et coiffe parfois les sommets des scalénoèdres d’un bonnet gris peu esthétique.

La minéralisation dans les marnes

La solution hydrothermale issue du Trias, qui a pénétré dans les fentes du banc rocheux, a également imbibé et durci les marnes sous-jacentes. Elles sont devenues cassantes et ont été brisées et disloquées par des pressions latérales d’origine tectonique. Au contact du banc calcaire marneux, ses fragments sont souvent partiellement tapissés de scalénoèdres millimétriques brun sombre de calcite de deuxième génération. Les encroûtements de strontiodressérite qui adhèrent sans problème à la calcite se trouvent souvent en porte-à-faux un à deux millimètres au-dessus de la marne. Ces espaces sont le résultat d'un décapage partiel de leur surface grumeleuse et très friable par l'eau de pluie infiltrée dans les fentes et autres interstices. En ce qui concerne les échantillons qui traînent sur le pierrier, on constate que le choc infligé à cette marne par les gouttes de pluie a encore accentué les dégâts. Toutefois, l'importante dégradation observée lors de la pénétration des fentes est souvent constatée et n'a rien de caractéristique.

Plus bas encore, la solution a pénétré entre les fragments de la marne totalement disloquée et à peine durcie. Elle a tapissé ces vides avec des encroûtements de strontiodressérite parfois accompagnés de cristaux rhombiques de célestine de troisième génération. Cette marne contient souvent des grains de sphalérite partiellement décomposés.

Là également, le gypse est le dernier minéral qui ait cristallisé. Il forme des cristaux plats ainsi que des plages assez étendues entre les couches de la marne. Les mâcles en « fer de lance » sont fréquentes.

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