Herschel est le nom d'un télescope spatial issu d'un programme de l'Agence spatiale européenne (ESA). Son objectif scientifique est de faire des observations astronomiques dans les domaines de l’infrarouge lointain et du submillimétrique, à partir de 80 µm, afin d'en savoir plus sur la naissance des étoiles et l'évolution des galaxies.
Ce télescope spatial, le plus grand réalisé lors de son lancement, est un satellite d’observations infrarouges pointées, successeur d’ISO (1995 — 1998), de Spitzer (2003 —) et d'ASTRO-F (2006 —). C'est une des composantes du programme Horizon (programme élaboré en 1980 définissant les missions de l'ESA pour la période 1985 — 2005) qui fédère de nombreux laboratoires européens (CEA-Irfu, CEA-Léti pour la conception et la réalisation des composants).
Cette mission est nommée d’après l'astronome William Herschel, d’origine allemande puis installé en Angleterre. Le chef de mission est Göran Pibratt, de l'ESA.
Herschel est un télescope de l’infrarouge lointain et sera le premier à observer l’univers jusque dans les rayonnements submillimétriques. Il est doté d’un miroir primaire de 3,5 m de diamètre (contre seulement 2,4 m pour le télescope spatial Hubble), ce qui en fera le plus grand télescope en orbite jusqu’à l’arrivée du James Webb Space Telescope en 2013.
Successeur de l’observatoire ISO, déjà réalisé par Thales Alenia Space et qui a révolutionné l’astronomie infrarouge de 1995 à 1998, Herschel sera capable d’observer des régions de l’univers, froides et chargées de poussières, inaccessibles aux autres télescopes. Il étudiera en priorité la genèse des galaxies et l’évolution des étoiles en formation, ainsi que les nuages de gaz et de poussières où naissent les étoiles, les disques protoplanétaires et les molécules organiques complexes dans la chevelure des comètes.
Le télescope spatial Herschel est arrivé le 12 février 2009 en Guyane, à bord d'un Antonov, puis a rejoint la base spatiale de Kourou pour ses derniers préparatifs en vue d'un lancement prévu pour le 16 avril.
Il a finalement été lancé (conjointement avec le satellite Planck) le 14 mai 2009 à 13 h 38 mn 17 s UTC, depuis Kourou, par un lanceur Ariane 5-ECA, le vol 188, sur une orbite très elliptique de 270 km de périgée et 1 193 622 km d'apogée le menant aux alentours du second point de Lagrange du système Terre/Soleil (dénommé L2).
Le 15 mai, une première correction importante de trajectoire a accéléré Herschel de 8,7 m/s par allumage de ses propulseurs à hydrazine pendant 22 min.
Le 14 juin, le couvercle du cryostat est ouvert. Le télescope prend sa première image de la galaxie M51 apparaissant avec une netteté inégalée ce qui laisse présager des futures images que Herschel doit prendre.
Vers le 15 juillet, au voisinage du point L2, il est placé suivant une trajectoire appelée orbite de Lissajous. Le satellite devrait y fonctionner pendant au moins 21 mois, la durée définitive étant essentiellement soumise aux fuites du système de refroidissement (2300 litres d'hélium liquide superfluide).
Il est développé sous maitrise d'œuvre de Thales Alenia Space-France, dans le Centre spatial de Cannes Mandelieu, directeur de programme Jean-Michel Reix, et une équipe industrielle comprenant une centaine d'entreprises réparties dans 15 pays européens.
Un module de service (SVM) a été conçu et fabriqué par Thales Alenia Space dans son usine de Turin, pour les deux satellites Herschel et Planck combinés dans un programme unique.
Les structures des deux modules de service sont très semblables, de forme octogonale. Chaque panneau est dédié à des équipements thermiques, des réchauffeurs, prenant en compte les dissipations thermiques des expériences et des équipements du satellite voisins.
De plus, une conception commune a été retenue aussi pour les deux satellites pour l'avionique, le système de mesure et de contrôle d'attitude, le système de contrôle et de gestion des données, le sous-système de télémesure et télécommande.
Tous les équipements de la plateforme sont redondancés.
Sur chaque satellite, la puissance est fournie par des générateurs solaires équipés de cellules photovoltaïques à triple jonction, une batterie, et un système de contrôle gérant la charge de la batterie et distribuant une tension régulée de 28 volts aux divers équipements.
Sur Herschel, le panneau de cellules solaires est fixé en bas du pare-soleil dont la fonction principale est de mettre le cryostat à l'ombre du soleil. Sa partie supérieure est couverte de miroirs en silice pure (OSR, Optical Solar Relector) réfléchissant 98 % de l'énergie solaire, évitant donc une entrée d'énergie dans cette zone contenant le cryostat.
Ce générateur solaire est constamment dirigé vers le Soleil, grâce au système de contrôle d'attitude à trois axes.
Le contrôle d'attitude est effectué par un calculateur prenant en compte les mesures des senseurs d'attitude et commandant les couples de contrôle pour répondre aux spécifications de pointage et de basculement des charges utiles du Herschel et du Planck.
Le satellite Herschel est stabilisé selon trois axes, respectant une spécification de pointage de 3,7 secondes d'arc.
Le senseur d'attitude principal pour les deux satellites et un star tracker. Sur Herschel, l'attitude est estimée à partir des mesures du star tracker et d'un gyroscope très précis. Les couples de contrôle sont fournis par des roues à réaction.
La charge utile est réalisée par EADS Astrium Satellites-Allemagne, repose sur un télescope avec un miroir primaire de 3,5 m de diamètre réalisé en SIC par Boostec à Bazet, France, près de Tarbes. C'est le plus grand miroir construit pour l'astronomie spatiale.
Elle comprend trois instruments scientifiques :
C'est une caméra à bolomètre et un spectromètre de moyenne résolution à photoconducteurs fonctionnant sur les longueurs d'onde de 55 à 210 microns. Le spectromètre permet l'analyse de la signature spectrale du carbone et de l'oxygène. Il a été fourni par l'institut Max-Planck pour la physique extraterrestre de Garching et Kayser-Threde, grâce à un financement du DLR (Allemagne). Les bolomètres ont été conçus et réalisés par le CEA-Léti puis testés et intégrés au CEA-Irfu ; les cryogénérateurs, développés par le CEA-Inac, abaisseront leur température de 2 K à 0,3 K.
C'est une caméra et un spectromètre de moyenne résolution fonctionnant sur les longueurs d'onde de 200 à 670 microns. Il possède cinq bolomètres pour mesurer trois couleurs et la plus grande longueur d'onde d'une source. Il a été fourni par l'Université de Cardiff au Pays de Galles, avec la France en co-investisseur. Spire est refroidi par les cryogénérateurs.
C'est un spectromètre hétérodyne à très haute résolution, fonctionnant sur les longueurs d'ondes de 157 à 625 microns, destiné à l'étude de la composition chimique, la cinématique et l'environnement physique des sources. Il a été fourni par le Netherlands Institute for Space Research (SRON), avec des participations de la France, de l'Allemagne et des États-Unis.
Le satellite embarque un imposant cryostat à hélium liquide (2400 litres) qui enserre le plan focal du télescope et les parties sensibles des trois instruments à l’intérieur d’un espace froid à 4 kelvins. La lente ébullition contrôlée de l’hélium liquide embarqué permettra de soutenir cette température cryogénique pendant les 3 ans et demi que durera la mission.