Pierre Jean Robiquet - Définition

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Références et sources

  • « Pierre Jean Robiquet », dans Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne : histoire par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les hommes avec la collaboration de plus de 300 savants et littérateurs français ou étrangers, 2e édition, 1843-1865
  • Pierre Jean Robiquet (1780-1840), dans "Figures pharmaceutiques françaises", 3 p, de Pierre Crété.
  • A. Bussy. Eloge de Pierre Robiquet. J. pharm., avril 1841.
  • Histoire des apothicaires chez les principaux peuples du monde, par Adrien Philippe (1853)

Travaux

Pierre-Jean Robiquet développera tout au long de sa carrière une démarche entièrement axée sur l'obtention de principes actifs extraits de différents organismes vivants dont l'expérience courante a mis en évidence des propriétés pharmaceutiques, médicamenteuses ou toxiques.

La mise en évidence d'une brique essentielle du monde vivant: les acides aminés- Découverte de l'asparagine

Colloborateur de Louis-Nicolas Vauquelin, en 1805, il participe à l'obtention, à partir des asperges, dont les propriétés diurétiques sont connues depuis longtemps, de l'asparagine, substance qui en est le principe actif et le tout premier des acides aminés identifiés dans les tissus vivants, dont l'obtention fixa l'attention des chimistes par la limpidité et la beauté de ses cristaux.

Durant l'été 1805, Pierre Robiquet isole du suc d'asperges plusieurs cristaux dont deux espèces "parurent appartenir à des substances nouvelles"; l'une des deux tout spécialement "parfaitement blanche et transparente lorsqu'elle avoit cristallisé plusieurs fois, a une saveur fraiche légèrement sucrée qui excite la salive; elle est dure , cassante et présente une forme régulière"

Pierre Robiquet et Louis Nicolas Vauquelin, aidés de M.Haüy pour l'analyse cristallographique, soumettent cette substance à différents traitements avec les moyens modestes de l'analyse chimique de ce tout début de XIXe siècle; ils reconnaissent rapidement l'originalité de ce "principe cristallisable comme les sels et qui n'est cependant ni un acide ni un sel neutre, et dont la solution dans l'eau n'est affectée par aucun des réactifs employés pour reconnoître la nature des sels dissous dans l'eau. Le principe dont nous venons de donner les propriétés n'est point un produit accidentel et dépendant de quelques circonstances particulières de la végétation; nous l'avons depuis ce temps-là constamment retrouvé...."

Sans entrevoir qu'ils viennent de révéler l'une des briques de la construction du vivant, ils réalisent clairement qu'il s'agit là d'une classe entièrement nouvelle de molécules "Depuis longtemps... on n'a trouvé dans les végétaux un principe immédiat aussi singulier que celui dont nous allons parler".

L'asparagine est le premier des 22 acides aminés qui président à la construction des protéines du vivant à être ainsi isolé;

Les progrès sur ces constituants fondamentaux allaient rester très lents tout au long du XIXe siècle. Une forme polymère, la cystine, d'une autre acide aminé, la cystéine, est isolée en 1810, mais sa forme de base monomère n'est identifiée qu'en 1884 [1]; la leucine et la glycine furent identifiées en 1820 [2].

Recherches diverses en pharmacologie

Quatre ans plus tard, en 1809, il obtient à partir de la racine de réglisse une substance sucrée qui n'a pourtant du sucre ordinaire que la saveur douce, qu'il appelle glycyrhizine.Il met en évidence en outre un constituant gras et résineux (0,8%), de petites quantités de gomme, des substances albuminiques, des tannins, de l'amidon, un principe colorant jaune, un principe amer (plus tard reconnu comme la glycymarine), et, comme dans l'asperge, une fraction analogue à l'asparagine, qui sera identifiée comme telle en 1828 par Plisson.

Passant à des objets du monde animal, en 1810 il isole pour la première fois de Lytta vesicatoria la cantharidine, une molécule complexe aux propriétés vésicatoires puissantes, qui joue un rôle important dans l'écologie de plusieurs types d'insectes qui l'utilisent comme moyen de défense afin de préserver leurs œufs des prédateurs [1].

Dès l'Antiquité, donc bien avant qu'on connaisse la structure du principe actif, les mouches espagnoles séchées avaient la réputation d'avoir des vertus aphrodisiaques. En réalité, ces propriétés supposées de la cantharidine ne sont attestées ni par la théorie ni par l'expérience. En revanche, il s'agit d'une substance dangereuse dont la toxicité est comparable à celle des poisons les plus violents comme la strychnine.

Cette étude pionnière, démontrant, dès 1810, la possibilité d'extraire le principe actif d'une matière médicamenteuse complexe, peut être considérée comme fondatrice pour les recherches de chimie appliquée et sera le point de départ de nombreuses recherches ultérieures.

Il met en outre en évidence dans cette même étude la présence de l'acide urique dans des insectes qui se nourrissent de feuilles.

Dès 1816 avec Jean Jacques Colin il s'intéresse à l'huile d'amandes amères (le fruit du Prunus dulcis), sujet sur lequel il reviendra pendant 15 ans. Robiquet and Colin analysent la présence d'un constituant qu'ils appellent éther hydrochlorique, en réalité le 1,2-dichloroéthane, et suggèrent son utilisation comme stimulant médicinal. Quinze années plus tard, cette fois en collaboration avec Antoine François Boutron Charlard, Robiquet extrait l'amygdaline de ces mêmes amandes amères, un glycoside qui sera testé au XIXe siècle comme anti-cancéreux par Ernst T. Krebs sous le nom de "Vitamin B17", mais sans résultats concluants. Ce travail, qui menait aux portes des composés aromatiques, resta toutefois inachevé, ne parvenant par exemple pas à expliquer la production de benzaldéhyde dans certaines des réactions de dissociation qu'ils effectuèrent, et il devait revenir à Friedrich Wöhler et Justus Liebig de tirer toutes les conclusions quant à la structure de l'amygdaline et à la mise en évidence du radical benzoile C7H5O dans une étude conduite quelques mois plus tard (1832).

Des études ultérieures menées aux États-Unis depuis 1972 notamment au Sloan-Kettering Cancer Institute tant sur l'amygdaline que sur le laetrile, un composé de structure voisine, n'ont pu prouver aucune efficacité anti-cancérologique, alors même que sa dégradation spontanée "in corpore" par la beta-glucosidase présente notamment dans l'intestin grêle pouvait conduire à des taux élévés de cyanure risquant d'induire des risques élévés pour les patients.

De l'usage de colorants naturels à leur synthèse industrielle: l'étape pionnière de l'alizarine

Le grand enjeu des chimistes du XIXe siècle, ce sont les colorants naturels, et la recherche de la mise au point de leur synthèse industrielle. Ce domaine sera un champ de recherche privilégié de Pierre-Jean Robiquet.

Les lichens, avec lesquels on prépare l'orseille, cette matière colorante violette, sont pour lui l'occasion de la découverte du variolarin.

En 1826, en collaboration encore avec Jean-Jacques Colin, Pierre-Jean Robiquet extrait de la racine de la garance deux colorants, l'alizarine, un colorant rouge très persistant et promis à un bel avenir industriel, et la purpurine, un colorant plus instable.

L'alizarine devait devenir le premier colorant naturel à être synthétisé par voie industrielle, par un procédé mis au point en 1868 par deux chimistes allemands, Karl Graebe and Karl Lieberman, tous deux employés de la société BASF, à partir de l'anthracène. Cette même voie de synthèse était obtenue presque en même temps et de façon indépendante par un chimiste anglais, William Perkin, le groupe BASF en obtenant tous les droits grâce à un unique jour d'antériorité dans le dépôt de son brevet !. -->

En 1829 il découvre l'orcine dans le lichen Variolaria dealbata principe incolore, cristallisable, de saveur sucrée et ayant la propriété de se transformer en un corps violet sous l'influence de l'eau, de l'oxygène et de l'ammoniaque.

De l'usage des drogues naturelles extraites des plantes à la synthèse des premiers médicaments : l'étape pionnière de la codéine

En 1832, Robiquet examine l'opium, dont il s'était déjà occupé à plusieurs reprises ; la codéine, un des principes actifs de cette sorte de thériaque naturelle, est découverte et parfaitement définie, elle est aujourd'hui d'usage universel comme antitussif, anti-diarrhéïque et complément alimentaire, l'un des principes médicamentaux les plus utilisés au monde; de nos jours, la codéine est communément obtenue par voie de synthèse chimique à partir de la morphine (méthylation d'une liaison O-H) plutôt que par extraction directe de l'opium.

L'acide méconique, à peine connu auparavant, est étudié soigneusement, et les modifications qu'il éprouve de la part de la chaleur, sont déterminées avec précision.


Les dernières années sont consacrées, avec l'aide de ses collaborateurs, à la publication du détail de ses travaux.

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