Bastide (ville) - Définition

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Administration des bastides

La municipalité

Si les castelnaus étaient gérés par les seigneurs, de père en fils, les bastides sont encore une fois des cités innovantes quant à la forme de leur administration. En effet, la fondation s'accompagne de l'institution d'une représentation des habitants, à savoir :

  • les consuls, nommés par les fondateurs pour un an. Leur renouvellement se fait soit par cooptation, c'est-à-dire par le vote des consuls précédents, soit par le suffrage universel, mais à deux niveaux. Les consuls forment un conseil, et sont chargés de l'administration de la cité, de sa mise en défense, de ses réparations et de ses améliorations, comme les actuelles municipalités,
  • les jurés(ou jurats), plus particulièrement chargés de la justice et de la police, qu'il s'agisse de la voirie ou des métiers,
  • le bayle (petit bailli local), représentant de l'autorité royale, chargé de faire respecter les décisions prises au nom du roi ou du comte. Le bayle travaille en collaboration avec les consuls et peut être comparé de nos jours à un sous-préfet.

Au nombre moyen de six par bastide, les consuls sont choisis parmi les hommes dits "notables" dans la population de la bastide. Un certain nombre de candidats sont proposés par les consuls en exercice, avec un choix partiel pour le sénéchal.

La nomination des consuls et du bayle s'accompagne d'une cérémonie officielle, au cours de laquelle les nouveaux représentants de la population prêtent serment devant elle, s'engageant à servir la communauté et ne recevoir aucun avantage de leur fonction.

La justice

Là encore on assiste dans de nombreuses bastides à une évolution, avec par exemple, à l'instar du reste du royaume, l'abolition du duel. La possibilité de se défendre, la production de témoins, les enquêtes systématiques, la faculté de faire appel, sont autant de droits que l'on trouve dans toutes les bastides de l'époque.

De plus, les délits sont classés et jugés en fonction de leur importance dans les chartes de coutumes. Injures, vols, dettes, fraudes, violences et meurtres se voient attribuer des peines proportionnelles. Ces peines vont de simples amendes jusqu'à la prison et, bien entendu, la peine de mort. Mais le fait nouveau, là aussi, est la suppression des châtiments corporels, contrairement aux villes et villages environnants plus anciens. À Auch, on se fait couper l'oreille pour un vol ou percer la langue pour un blasphème. Dans une bastide voisine, pour les mêmes délits, il faut payer des amendes.

Autre particularité, les nobles se voient attribuer des peines plus lourdes qu'un simple habitant, en raison de leur statut, garant sans doute d'une exemplarité.

La défense

L'existence d'une garnison d'une dizaines d'hommes, ou plus souvent d'une confrérie de gardes choisis dans la population de la ville, peut être observée dans toutes les bastides qui ont le privilège de devoir se défendre. En l'absence de garnisons, des milices sont formées, gérées par les consuls et le bayle. Elles assurent les rondes de nuit et les tours de garde dans les périodes d'insécurité et de conflits.

Architecture des bastides

Les premières questions que se posent les urbanistes concernent les éléments préexistants sur le terrain devant servir à l'établissement de la bastide, comme l'existence ou non d'un village ou d'une église, de la nature du sol et bien sûr du relief du site choisi.

La place

Place de l'Isle-sur-Tarn (Tarn)
Enfants faisant du vélo sur la place à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne)
Fontaine sur la place à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne)

Au centre de chaque bastide, on trouve invariablement une place, à part une exception : Lavardac. Contrairement aux villages fondés aux siècles précédents, les castelnaus et les sauvetés, il semble que la création d'une place fut une priorité des fondateurs, pour le rôle économique de celle-ci dans la vie de la future cité.

Peut-être l'idée vient-elle du Proche-Orient. En effet y existaient des places magnifiques et les croisés n'ont pas dû manquer le mentionner dans leurs récits à leur retour. Dans tous les cas, le prototype de la place des bastides est celle de Montauban. Dans cette ville, la place est un carré de 70 m de côté, précipitant de quelques décennies le modèle type d'une place.

En position centrale, la place ordonne la division de la ville en quartiers appelés gaches. Disposée à l'écart ou en retrait de l'axe principal de circulation, la place adopte le plus souvent la forme carrée. Quelquefois rectangulaire, elle est à de rares exceptions en forme de parallélogramme ou de cercle. Il n'y en a généralement qu'une seule par bastide, sauf pour Saint-Lys (une pour le marché et une pour l'église), à Saint-Clar et à Albias. Les dimensions des places varie de 40 m x 40 m jusqu'à 70 m x 70 m. Marciac fait dans la démesure avec 75 m x 130 m. Pourtant, il n'y a jamais eu de rapport direct entre la taille de la place et l'importance de la bastide. Soustraite donc au maximum des courants de circulation, l'accès à la place se fait généralement par les angles. De plus, les places sont agrémentées souvent d'un puits ou d'une fontaine, parfois de citernes, pour les besoins en eau des habitants.

On peut dénombrer 3 types principaux de formes de place. Cependant, sur les trois cents bastides recensées à ce jour, seules une centaine ont une place correspondant à l'un de ces types :

  • Plan à quadrillage : c'est le cas le plus fréquent. C'est le type de place de bastide par excellence. La place est quadrangulaire avec accès par les angles, avec des façades d'un seul tenant (sans andrones, voir Maisons). Ce type de place dérive directement de celui de Montauban. Souvent l'emplacement de la place est un îlot soustrait à la construction privée. Elle se situe en général au centre de la ville et en commande tout le plan. Ce sont les plus belles et les plus grandes places de bastides. Elles font 60 x 60 m en moyenne au XIIIe siècle, 90 x 90 m au XIVe. Les plus grandes vont jusqu'à 70 x 140 m (deux îlots).
  • Plan à axe unique : ce type de place résulte d'un plan de bastide organisé suivant un axe unique (une rue principale étoffée de plusieurs rues parallèles, coupées par des perpendiculaires). La place se trouve alors entre deux rues. L'entrée se fait par les angles. Ces places font en général 50 à 55 m de côté.
  • Plan à enveloppement : la place est entièrement fermée vers l'extérieur. C'est-à-dire que la place ne touche aucune rue. L'existence de ce type de places montre bien que la place d'une bastide n'est pas un lieu de circulation. Ces places sont cependant très rares. Elles se retrouvent par exemple à Tournay où il s'agit d'un carré de 70 m sur 72.
Couverts à Monségur (Gironde)
Couverts à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne)

Élément architectural majeur de la bastide, la place assure plusieurs rôles :

La place joue d'abord un rôle administratif en accueillant la maison communale. Les consuls, représentants de la population, et le bayle, représentant de l'autorité royale ou comtale, y siègent lors d'assemblées, pour les décisions de justice ou d'organisation de la bastide.

De plus, la place est d'emblée réservée au marché et aux foires. Elle a en effet une fonction économique très forte (plusieurs chartes stipulent que tout ce qui est à vendre doit d'abord être amené sur la place).

À caractère festif pour les fêtes et grandes manifestations, la place devient un centre d'attraction, voire un symbole social. En effet, les maisons donnant sur la place sont souvent celles des plus anciennes familles (celles s'étant établies en premier).

Les couverts

Aujourd'hui lorsqu'on se promène sur la place d'une bastide on remarque qu'elle est souvent à portiques. C'est un aménagement qui n'a pas été fait que dans les bastides. On appelle ces places : places à couverts ou places des cornières.

En fait, il s'agit d'embans rajoutés aux façades des maisons après leur construction. Dans un premier temps ils étaient en bois puis ils sont remplacés par des couverts en pierre plus tard. Les arcs les soutenant sont au départ des arcs brisés, puis au fil des reconstructions seront remplacés par des arcs en plein cintre.

La halle

La halle est souvent au milieu de la place, ici à Revel (Haute-Garonne)
Halle de Bassoues (Gers)

Au centre de la place on trouve aussi souvent une halle de marché. Comme les couverts, elle apparait plus tard.

Il s'agissait de protéger les marchands du soleil et de la pluie. À l'étage loge souvent le pouvoir consulaire.

La halle a souvent un clocher. Elle a véritablement tous les attributs d'une cathédrale commerciale. C'est une basilique ayant retrouvé ses origines romaines.

Les murailles

Les fondateurs ne construisaient pas de fortifications autour des villes en général. Ils laissaient aux habitants le soin de le faire par un impôt ou un octroi. Cela fait que le jeu d'interférences entre la régularité du parcellaire et le tracé du mur d'enceinte est à l'origine d'une grande diversité dans le plan des bastides.

Remparts de la bastide de Saint-Aulaye aux portes du Périgord.

Il est rare qu'elles soient construites à la fondation de la bastide, même dans celles implantées près d'une frontière. Il s'agit en effet d'une époque calme entre la croisade des albigeois et la guerre de Cent Ans. Libourne est un bon exemple. Dix ans après la fondation, les habitants avaient demandé de l'argent à leur seigneur pour construire une muraille. Une fois reçu, ils l'ont dépensé pour l'embellissement de leur ville. Un bel exemple de remparts de pierre est encore visible à Saint-Aulaye. Cette bastide fondée au XIIIe siècle,aux portes qu Périgord a été fortifiée aux XVe siècle et XVIe siècle


Au début de la guerre de Cent Ans, de nombreuses bastides furent détruites du fait de l'absence de défenses. Les autres s'entourèrent hâtivement de remparts de pierre.

Les maisons

Maisons de ville à 2 travées reconstruites au XVIIIe siècle à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne)

Les nouveaux habitants (ou poblans) qui s'installent dans la bastide ont en général un an pour construire leur maison, sans doute pour inciter les nouveaux venus à s'installer durablement. On retrouve dans des textes d'époque la trace d'amende pour des poblans ayant dépassé le délai. Construites par les poblans eux-mêmes, les premières maisons sont donc assez rudimentaires en général. Certaines règles d'implantation très précises doivent être respectées, comme l'alignement de la façade avant sur la rue, la présence d'un étage en plus du rez-de-chaussée, ou encore la nécessité de laisser une espace vide - appelé androne (ou entremis) - de 25 à 40 cm de large, espace destiné à éviter la propagation des incendies et à faciliter l'écoulement de l'eau.

Avec le développement économique, l'espace urbain mute. Autour de la place, une petite halle s'établit devant chaque échoppe : ce sont des couverts, des arcades, des amabans ou des garlandes (voir ci-dessus couverts). Puis ce rajout apparaît dans les rues commerçantes.

Sous les rues, des caves se creusent. Et au-dessus, certaines maisons se faisant face sont reliées par des pontets.

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