La comparaison des statistiques nationales est délicate, car la détection et les classifications ont varié selon les époques et les pays. Ainsi, en France, le terme « cause environnementale » fait référence aux produits chimiques et à la pollution…, alors qu'en anglais, cela fait référence à tout ce qui entoure l'homme et, de manière générale, tous les facteurs exogènes, c'est-à-dire le soleil, l'alcool, le tabagisme, le nombre de grossesses…
En 2000, environ 278 000 personnes étaient annuellement diagnostiquées comme atteintes d'un cancer, soit un Français sur quatre. Le nombre total annuel des décès par cancer en France était, en 2004, de 152 708, soit environ 241 décès pour 100 000 habitants. C'est la première cause de mortalité en France, juste avant les maladies cardio-vasculaires (147 323 décès en 2004) dont le taux a baissé de 50% depuis les 25 dernières années alors que le taux de cancer n'a que peu diminué. Les 3 cancers les plus fréquents chez l’homme sont le cancer de la prostate, le cancer du poumon et le cancer du colon-rectum. Chez la femme, les 3 cancers les plus fréquents sont le cancer du sein, le cancer du colon-rectum et le cancer du poumon.
Il existe une augmentation du nombre de certains cancers. Les cancers du poumon, mésothéliomes, hémopathies malignes, tumeurs cérébrales et cancers du sein, de l'ovaire, du testicule, de la prostate et de la thyroïde sont en augmentation très significative depuis les années 1980... Ceci est en partie lié au vieillissement et à la croissance de la population et touche différemment l'homme et la femme. De 1980 à 2005 (en tenant compte de la démographie), le taux de cancers s'est élevé de 35 % pour les hommes et de 43 % pour les femmes. En 2008, l’INSERM a conclu d'une revue de la littérature scientifique mondiale relative aux liens entre ces 9 cancers en augmentation et exposition passive à des cancérogènes, avérés ou suspectés dans l'environnement (incluant donc le tabagisme passif, mais non le tabagisme actif), que ni les améliorations du dépistage ni l’évolution de la démographie ne pouvaient expliquer cette augmentation. L’exposition aux cancérigènes de l'environnement est donc supposée, mais reste mal évaluée, bien que des liens de causalité soient déjà établis par exemple entre cancer du poumon et pollution particulaire de l’air par le trafic automobile, le chauffage et l’industrie (« Environ 1 300 à 1 900 décès par cancer du poumon pourraient être évités chaque année dans 23 villes européennes si les niveaux de PM2,5 particules fines étaient ramenés respectivement à 20 et à 15 microgrammes par millimètre cube (µg/mm3) ». Mais la norme européenne sur les PM2,5 (max de 25µg/mm3 en 2010) ne sera en vigueur qu'en 2015.
On sait que les rayons ionisants (Rayon X et gamma en particulier) peuvent induire de nombreux cancers : (poumon, thyroïde, sein, cerveau, plèvre, leucémies…) et que les radiographies fréquentes augmentent le risque de cancer du sein et, peut-être d'autres cancers a conclu l’étude. Or ces examens sont de plus en plus fréquents (+ 5 à 8 % par an en France).
Plus de 900 molécules pesticides sont autorisées en France, souvent sans études toxicologique ou écotoxicologiques complètes (incluant donc les risques à long terme). L'exposition aux insecticides domestiques du fœtus lors de la grossesse ou dans l'enfance est associée à un doublement du risque de leucémie et moindrement à un risque de tumeur ou cancer du cerveau. L'AFSSET s’est en 2008 engagé à produire des avis et recommandations dans un proche avenir.
Cancer | Incidence | Mortalité |
---|---|---|
Tous les cancers | 319 380 | 145 762 |
Prostate | 62 245 | 9 202 |
Sein | 49 814 | 11 201 |
Côlon-rectum | 37 413 | 16 865 |
Poumons | 30 651 | 26 624 |
Cavité buccale et pharynx | 12 270 | 4 000 |
Lymphome Malin Non Hodgkinien | 10 224 | 4 203 |
Vessie | 9 679 | 4 482 |
Rein | 7 949 | 3 684 |
Mélanome (peau) | 7 401 | 1 440 |
Pancréas | 7 218 | 7 787 |
Estomac | 6 794 | 4 756 |
Thyroïde | 6 672 | 403 |
Foie | 6 433 | 7 390 |
Utérus (corps) | 5 774 | 1 800 |
Œsophage | 4 721 | 3 850 |
Myélome | 4 516 | 2 789 |
Ovaire | 4 375 | 3 180 |
Système nerveux | 4 120 | 3 019 |
Larynx | 3 735 | 1 406 |
Leucémie lymphoïde chronique | 3 224 | 1 059 |
Leucémies aiguës | 3 082 | 2 733 |
Col de l'utérus | 3 068 | 1 067 |
Testicule | 2 002 | 82 |
Maladie de Hodgkin | 1 544 | 218 |
Plèvre | 906 | 1 090 |
Il est essentiel de bien noter la différence entre l'incidence d'un cancer (la fréquence annuelle calculée sur une durée précise) et la mortalité. Ce tableau montre bien que certains cancers très fréquents (prostate) ont une mortalité faible contrairement à des cancers plus rares (pancréas) qui ont une mortalité très élevée.
La France est parfois présentée comme étant le pays ayant la plus longue survie après cancer. Mais concernant la survie à 5 ans après le diagnostic, elle serait le second en Europe derrière la Suède, avec environ 52% de survie (63 % pour les femmes, 44 % pour les hommes). Cela cache de grandes disparités selon les cancers. On atteint des chances de survie de 95 % pour le cancer de la thyroïde; chez les hommes, on atteint 80 % de survie à 5 ans pour le cancer de la prostate, et quasiment 100 % pour les cancers des testicules, et, chez les femmes, 85 % pour le cancer du sein entre 15 et 44 ans, mais 78 % au-delà de 75 ans. En revanche, les cancers profonds sont diagnostiqués plus tardivement et sont très souvent mortels: cancer du pancréas (10 % de survie), du poumon...
L'état et l'assurance maladie ont consacré un peu plus de 12 milliards d'euros à la lutte contre le cancer en 2004, 90% de cette somme étant dédiée aux soins
Le taux de survie dépend aussi de l'âge. Cinq ans après le diagnostic, 70 % des 15–45 ans survivent. Alors que seuls 39,4 % des malades cancéreux âgés de 75 ans survivront plus de 5 ans... sachant qu'étant donné le risque de métastases, on ne parle pas de guérison pour un cancer, mais de rémission (voir plus loin).
Pour estimer l'efficacité du dépistage et des soins, on utilise le taux de survie et la surmortalité à une certaine durée après le diagnostic.
Selon La Ligue nationale contre le cancer, en 2006, le taux de survie à cinq ans après diagnostic en France, pour des patients suivis entre 1989 et 1997 était :
Hommes | Femmes | ||
---|---|---|---|
75 % et + | |||
Lèvre | 96 % | Thyroïde | 95 % |
Testicule | 95 % | Maladie de Hodgkin | 92 % |
Thyroïde | 88 % | Mélanome de la peau | 89 % |
Maladie de Hodgkin | 85 % | Lèvre | 88 % |
Mélanome de la peau | 83 % | Sein | 85 % |
Prostate | 80 % | Corps utérin | 76% |
50 à 74 % | |||
Pénis | 67 % | Col utérin | 70 % |
Rein | 63 % | Rein | 64 % |
Vessie | 60 % | Os, articulations et cartilages articulaires | 62 % |
Os, articulations et cartilages articulaires | 59 % | Larynx | 59 % |
Côlon | 56 % | Rectum | 58 % |
Rectum | 55 % | Côlon | 57 % |
Larynx | 54 % | Vulve et vagin | 52 % |
Lymphome malin non hodgkinien | 54 % | Vessie | 50 % |
25 à 49 % | |||
Nasopharynx | 45 % | Langue | 45 % |
Intestin grêle | 45 % | Myélomes multiples | 43 % |
Myélomes multiples | 42 % | Intestin grêle | 42 % |
Cavité orale | 38 % | Ovaire | 40 % |
Langue | 33 % | Fosses nasales, sinus annexes de la face, oreille moyenne et oreille interne | 37 % |
Hypopharynx | 34 % | ||
Leucémie aiguë lymphoblastique | 29 % | ||
Estomac | 28 % | ||
25 % et - | |||
Estomac | 23 % | Système nerveux central | 19 % |
Système nerveux central | 20 % | Poumon | 18 % |
Poumon | 13 % | Œsophage | 14 % |
Œsophage | 11 % | Mésothéliome de la plèvre | 13 % |
Foie | 7 % | Foie | 9 % |
Mésothéliome de la plèvre | 6 % | Pancréas | 7 % |
Pancréas | 5 % |
Pour un groupe de personnes chez lesquelles on a diagnostiqué un cancer, on peut distinguer celles mortes des suites de leur cancer, et celles mortes d'autre chose. La surmortalité à une durée t (par exemple de 10 ans) liée au cancer est la probabilité de mourir du seul fait du cancer durant la durée t qui suit le diagnostic.
Le problème de l'évaluation de cette mortalité est qu'il faudrait connaître les causes de tous les décès des personnes dont on a diagnostiqué un cancer, ce qui est impossible. On utilise donc une autre estimation ; pour un groupe de personnes du même sexe et du même âge, on utilise la « survie relative », c'est-à-dire le rapport entre :
La surmortalité est alors le complément à 1 de cette survie relative.
Les études montrent une surmortalité d'environ 2 % au-delà de 10 ans après le diagnostic dans les pays développés, ce qui pointe l'irrationalité de la ségrégation que subissent les patients ayant eu un cancer de la part des assurances et des banques (surtaxes, refus de prêt…).
Les résultats ci-après sont issus du document Cancers — Pronostics à long terme de l'INSERM.
L'étude Eurocare s'est penchée sur une vingtaine de pays européens pour des cas diagnostiqués durant trois périodes (les malades étudiés durant une période forment une « cohorte ») : 1978–1985, 1985–1989 et 1990–1994. Cette étude ne distingue pas le stade du diagnostic.
délais après diagnostic | surmortalité | ||
---|---|---|---|
deux sexes confondus | femmes | hommes | |
0–1 an | 27 % | 20 % | 33 % |
2e année | 15 % | ||
5e année | 5 % | ||
10e année | 2,27 % | 1,95 % | 3,18 % |
11–12eannée | 2 % | moins de 2 % | un peu plus de 2 % |
délais après diagnostic | surmortalité par classe d'âge | ||||
---|---|---|---|---|---|
toutes classes d'âge confondues | 15–44 ans | 45–54 ans | 54–65 ans | 65–74 ans | |
0–1 an | 27 % | 12 % | 33 % | ||
4e année | moins de 5 % | ||||
10e année | 2,27 % | 1,24 % | 2,06 % | 2,42 % | 3,03 % |
11–12eannée | 2 % | un peu plus de 1 % | plus de 3 % |
surmortalité | localisation du cancer |
---|---|
< 2 % |
|
2–5 % |
|
> 5 % |
|
L'étude étasunienne SEER s'est intéressée au stade du cancer au moment de son diagnostic, selon trois catégories :
surmortalité | localisation du cancer |
---|---|
< 1 % |
|
1–3 % |
|
3–5 % | larynx (2,90 %) |
> 5 % | poumon (7,20 %) |
Les enfants représentent moins de 1 % des cas de cancer ; dans les pays développés, ils sont guéris dans deux tiers des cas. Dans les pays industrialisés, environ 1 enfant sur 500 déclare un cancer avant l'âge de 15 ans (presque 1500 nouveaux cas par an en France, dont 50 % avant l'âge de 6 ans). Les leucémies (450 cas nouveaux par an en France) sont les plus fréquents. Les autres tumeurs sont principalement;
Les tumeurs embryonnaires sont plus fréquentes les premières années de la vie, et des sarcomes osseux et des tissus mous chez les grands enfants.
délais après diagnostic | surmortalité |
---|---|
0–1 an | > 10 % |
4e année | 2 % |
7e année | 1 % |
Une étude a confirmé que l’exposition des ménages français aux pesticides domestiques augmente (doublement environ) le risque de cancers hématopoïétiques (cancer du sang) de leur enfant.
Cette étude a exploité le RNHE, le « Registre National des Hémopathies malignes de l'Enfant » (antérieurement dénommé « Registre National des Leucémies de l'Enfant ») qui enregistre les cas signalés d’hémopathie maligne ou à la limite de la malignité, chez les enfants habitant en France métropolitaine ayant moins de 15 ans au moment du diagnostic.
L’étude s’est aussi appuyée sur le registre national ESCALE (Etude sur les cancers de l'enfant pour la période 2003-2004).
Les mères d’un échantillon d’enfants atteints de cancers du sang et celles d’un échantillon-témoin ont été questionnées sur l’usage éventuel de pesticides (par la mère ou par le père) dans l’habitation lors de la grossesse ; en différentiant les insecticides (bombes utilisé à la maison, traitement d’animaux de compagnie, ou traitement du jardin ou des cultures…), les herbicides et les fongicides. Les chercheurs ont aussi intégré des paramètres tels que l'âge, le sexe, le degré de d’urbanisation de l’environnement et le type de logement (appartement ou maison).
Le panel retenu pour la période d’étude (2003-2004) était les parents de 764 enfants ayant déclaré une leucémie aiguë, 130 enfants ayant présenté un lymphome de Hodgkin (LH), et 166 cas de lymphome non-hodgkinien (LNH). Ce groupe ayant été comparé à une population-témoin de parents de 1681 enfants. Le dépouillement des questionnaires a montré qu’utiliser des insecticides dans la maison durant la grossesse a significativement augmenté le risque que l’enfant déclare une leucémie aiguë (leucémie lymphoïde ou leucémie myéloïde) ou un lymphome non hodgkinien, surtout un Lymphome de Burkitt (près de 3 fois plus de risque : OR = 2,7, IC à 95%, 1.6-4.5) ou des tumeurs mixtes à cellule de lymphome non hodgkinien (OR = 4.1; 95% CI, 1.4-11.8). Par contre l’exposition aux pesticides domestiques n’a pas augmenté le risque de lymphome hodgkinien à sclérose nodulaire (« Nodular sclerosis ou "NSHL" pour les anglosaxons »), cancer qui touche surtout des filles plus âgées.
L’utilisation domestique de pesticides par le père a également semblé lié à une légère augmentation moindre, mais également significative du nombre de leucémie aiguë (OR = 1,5, IC à 95%, 1.2-1.8) et de lymphome non hodgkinien NHL (OR = 1,7, IC à 95%, 1.2-2.6), mais les liens avec la leucémie aiguë ne sont plus significatifs après prise en compte de l'usage des pesticides par la mère durant la grossesse.
Cette étude confirme l'hypothèse que l'usage domestique des pesticides joue un rôle dans l'étiologie de ces cancers hématopoïétiques de l'enfance. Les auteurs concluent que la cohérence des résultats avec ceux d'études antérieures soulève à nouveau la question de l'opportunité de prévenir l'usage des pesticides dans l’environnement des femmes enceintes.