La position sociale de Beaugrand, la virulence de ses attaques contre Desargues, ses jugements sur Morin, les controverses auxquelles ont donné lieu sa géostatique, le peu de scrupule qu'il manifestait aux dires de ses détracteurs en exposant ses travaux avec Fermat, les accusations de plagiat qu'il a formulées contre Descartes, et surtout le surnom que lui a laissé ce dernier, ont donné de lui l'image d'un mathématicien incompétent, vaniteux et sans gloire.
En 1878, Augustus De Morgan dans A budget of paradoxes (Volume 1) l'étrille conscieusement. Il traite de ridicule sa prétention de voir les graves peser moins à mesure qu'ils se rapprochent du centre de la Terre (et de façon proportionnelle à leur distance). Il donne pour explication à ces folies le rang social de « De Beaugrand ».
« Telle était l'état de l'algèbre en France, 73 ans après la mort de Viète. Il est possible que la gloire de Viète, qui lui même tint tout sa vie un rang important dans l'état, ait donné aux français l'idée qu'un haut fonctionnaire se proclamant algébriste devait en être un ?... Cela expliquerait les Beaugrand, les Beaulieu, et tous les beaux »
Les affirmations de Pascal, alléguant dans son histoire de la Roulette (1658) que Beaugrand avait montré à Galilée (vingt-cinq ans plus tôt) la méthode des minimax de Fermat en la faisant sienne, pèsent très lourd dans son procès.. Cette rumeur semble contredite par les lettres de Cavalieri, qui laissent au contraire entendre que Jean de Beaugrand citait les sources des travaux qu'il présentait à l'étranger. Pour autant, Beaugrand demeure toujours assez mal traité par les historiens des mathématiques et, comme le remarquait en son temps le R.P Bosmans, il ne semble connu d'eux qu'à travers les écrits de Pascal. Les jugements de Baillet, l'un des premiers biographes de Descartes, ne sont pas étrangers à cet ostracisme
On peut cependant restituer le débat de la géostatique dans son contexte. Chacun des membres de l'académie de Mersenne s'opposait alors aux autres et possédait sa propre théorie des graves. Chacun poussait ses amis à intervenir, dussent-ils sortir de leurs domaines de compétence, comme le botaniste Guy de la Brosse, que Desargues ou Mersenne incitèrent à publier un pamphlet contre Jean de Beaugrand intitulé Éclaircissement d’une partie des paralogismes ou fautes contre les lois du raisonnement et de la démonstration que Monsieur de Beaugrand a commis en sa prétendue démonstration de la première partie de la quatrième proposition de son livre intitulé Géostatique'. Adressé au même Monsieur de Beaugrand (Paris, 1637). À cette époque les théories les plus exotiques tentent d'expliquer l'attraction terrestre ; ainsi pour Descartes la Terre est-elle creuse et il faudra attendre Newton et ses Principia pour trouver une première démonstration de la diminution souterraine de la gravitation, confirmant l'intuition de Beaugrand.
D'autre part, les modèles des conséquences de l'attraction terrestre sur une masse descendant dans un puits vers son centre ont évolué avec le temps :
« Des détracteurs de Desargues, le personnage le plus considérable paraît avoir été Beaugrand, secrétaire du roi, qui avait des relations avec beaucoup d'hommes distingués dans les sciences, et qui, lui-même, n'était pas dépourvu de savoir en mathématiques, car il a publié, sous le titre In isagogem F. Vietœ Scholia en 1631, un commentaire sur le principal ouvrage analytique de Viéte, et il a joué un certain rôle dans l'histoire de la cycloïde. Mais sa Géostatique, dont il est tant parlé dans les lettres de Descartes, et où il démontrait géométriquement que tout grave pèse d'autant moins qu'il est plus près de la terre, suffit pour montrer à quelles erreurs son esprit était sujet; et l'on ne s'étonne pas qu'il ait si mal apprécié les productions de Desargues. »
« Descartes n'en eût pas moins maintenu son jugement. »