Les réseaux routiers et ferroviaires moldaves diffèrent par leur structure et leur répartition géographique. On peut réaliser une analyse comparative entre les deux réseaux afin de comprendre les difficultés de circulation des Moldaves.
La différence entre réseau routier et réseau ferroviaire est frappante en Moldavie, comme s’il s’agissait de deux pays différents, avec des plans de déplacements distincts. Nous allons voir ce qui explique cette différence.
Le réseau routier est structuré en « étoile » autour de Chişinău. Ce schéma est à l’image de la centralisation politique qui existait dans ce pays avant son indépendance. Ces liaisons permettent d’absorber la majorité du trafic interne actuel, mais risquent de se trouver rapidement saturées.
Dans le détail, les routes principales en Moldavie sont gérées par le Département Routier du Ministère des transports et des communications via l'Administration d'État des Routes divisée en régions (similaires aux DDE en France).
Le réseau routier existant date de la période soviétique. Le réseau des routes locales fut le premier à être formé, et a été ensuite intégré au réseau routier international : le schéma en « étoile » se distingue par quatre grands axes nord-sud et est-ouest avec en plus, un axe latéral allant du nord au sud de la Transnistrie.
Cette structure présente quelques avantages :
Mais aussi beaucoup d’inconvénients :
Au 1er octobre 2001, la longueur totale du réseau ouvert à la circulation publique en Moldavie était de 10 500 km, dont 3 200 km de routes nationales (30,5 %) et 7 300 km de routes locales (69,5 %). La densité était de 315 km de routes pour 1 000 km², niveau relativement élevé pour un pays de l’ex-URSS. L’accès au réseau routier est donc assez facile.
En plus des routes publiques, il faut compter les 10 700 km de routes non publiques (routes et chemins de douaniers, routes privées, chemins agricoles) dont 6 100 km non goudronnées, mais où la circulation est possible.
Le réseau public est entièrement propriété de l'État et ne peut pas faire l’objet de privatisation ou de péage, pour l’instant. Un système de concession est cependant à l’étude.
Les routes sont de deux types : routes à grande circulation (M comme Magistrale), servant principalement au transport à longue distance, et routes républicaines (A comme Auto), servant de liaison entre Chişinău et les centres des pouvoirs publics locaux. L’ensemble de ces voies de circulation constitue « l’étoile » du réseau principal.
Dans l’hypothèse d’un futur développement économique du pays, ce schéma devrait engendrer une saturation de certains axes alors que de grands espaces resteraient non desservis, en particulier les points les plus éloignés de Chişinău.
Avant 1991, la volonté des autorités de la RSS de Moldavie était d’unifier les deux composantes territoriales du pays, Moldavie historique et Transnistrie. À cette époque, six grands ponts ont été construits sur le Dniestr, convenablement répartis du nord au sud pour assurer cette unification. Toutefois, ces ponts, de taille modeste, ne permettront pas d’absorber le trafic international en plus du trafic intérieur.
La politique soviétique avait deux objectifs pour ses républiques :
Au contraire de la route, le réseau ferroviaire ne connaît aucun centre névralgique en Moldavie. Le réseau est dans la continuité du réseau ukrainien et fait fi des frontières en passant d’un pays à l’autre selon les facilités géographiques, n’offrant que trois points de passage vers la Roumanie (dont un seul au gabarit ISO). C’est un schéma de fin de lignes, les chemins de fer moldaves n’étant qu'un appendice du réseau ukrainien. De grandes zones ne sont pas desservies par le rail.
La disposition de ce réseau engendre de gros handicaps pour la Moldavie :
En outre, Chişinău n’est qu’un lieu de passage parmi d’autres. L’absence de chute de ligne ne permet pas à la capitale moldave d’assurer le rôle centralisateur qu’elle possède avec le réseau routier. Cela deviendra une difficulté supplémentaire lors de la structuration du réseau.
Cette situation comporte tout de même deux points positifs :
En revanche, la majeure partie des lignes ferroviaires sont à voie unique. Leur exploitation est plus contraignante.
Pour bien comprendre la situation actuelle, il faut se pencher sur l’historique de la formation du réseau ferroviaire : le chemin de fer en Bessarabie a été officiellement lancé le 28 août 1871, avec le premier tronçon de l'itinéraire Tiraspol-Chişinău. Cette liaison entre la Bessarabie et les chemins de fer ukrainiens et russes de l’époque a servi de base au développement du système des transports en Moldavie.
C’est à partir de cet axe, aujourd’hui le plus développé, que s’est construit le réseau moldave pendant la période soviétique. Il a été prolongé jusqu’à la frontière roumaine (Ungheni) avant que deux autres ramifications ne viennent s’y attacher : une au sud-ouest à partir de Tighina et l’autre au nord pour rallier Kiev.
Le réseau ferroviaire moldave couvre une longueur utile de 1 139,3 km, dont 13,9 km à l'écartement UIC entre Ungheni et la frontière roumaine. La longueur développée des voies est de 2 318 km (avec les triages, embranchements et voies de service). Au total, ces infrastructures couvrent une superficie de 10 800 hectares. Le densité est de 0,34 km de voie ferrée pour 1 000 km².
Un programme d’électrification, abandonné en Moldavie en 1994, a toutefois été mené à bien sur le tronçon Kutchurgan (Ukraine) – Tiraspol afin d’éviter le changement de locomotive en frontière. Cependant, ce programme ne concerne que la partie transnistrienne de la Moldavie.
Depuis le 30 mars 1992, le chemin de fer national moldave était une administration dépendant du Ministère des Transports et des Routes (maintenant le Ministère des Transports et les Communications). Le 1er janvier 2001, l’entreprise publique « CFM » fut créée, avec des charges structurelles s’élevant à 4,92 milliards de lei (585 M€) dont 1,764 milliard de lei (209 M€) doit être autofinancé. L’entreprise emploie 12 300 personnes. Les CFM sont constitués de 37 divisions, disposant d'une grande autonomie au sein de l’entreprise nationale.
La restructuration se poursuit, avec la séparation de la gestion des infrastructures et de l’exploitation ferroviaire et la distinction entre transport de voyageurs et transport de marchandises.
Actuellement[évasif], l'entreprise nationale (EST CFM ), en pleine restructuration, satisfait tout juste les demandes internes en transport de voyageurs et de marchandises, ainsi que le transport international avec les pays de la CEI et le sud-est de l'Europe, principalement la Roumanie et l’Ukraine.
Les changements géopolitiques de la région et la transition vers l'économie de marché en Europe aussi bien qu’en Asie mèneront sans aucun doute au développement rapide du processus d'intégration au XXIe siècle à savoir :
En ce qui concerne les voies navigables, la Moldavie possède un petit réseau pouvant être utilisé dans les axes nord-sud et dans le transport international.
Le transport fluvial est y peu développé à cause de l’absence de grands fleuves traversant le pays.
Hors Transnistrie, la Moldavie historique est enclavée entre deux fleuves de taille moyenne et peu entretenus :
La Moldavie possède 3 ports fluviaux :
Au total, la Moldavie compte 1 356 km de voies navigables (dont 716 km sur le Prout et 640 km sur le Dniestr). Les navires supérieurs à 249 TPL y sont proscrits. Le transport fluvial moldave traite environ 50 000 TPL de fret par an, dont la majorité sur le Dniestr.
Les fleuves moldaves présentent le double inconvénient d'être limités dans leur utilisation par leur gabarit et par le fait qu’ils délimitent tous deux des frontières, officielles ou non. Il n’existe d’ailleurs pas de traité international pour l’utilisation de ces fleuves.
De plus, aucun canal est-ouest ne vient relier les deux fleuves, interdisant le trafic de transit de matériaux lourds par la Moldavie. Il n’existe donc pas de réseau structuré de voies navigables en Moldavie.
En fait, le salut de la Moldavie vient du Danube. En 1993, la Moldavie se faisait « rétrocéder » par l’Ukraine un petit bout de terre à l’extrême sud du pays : le village de Giurgiulesti. En effet, Staline avait fait découper les frontières sud de la RSS de Moldavie de façon qu’elle ne dispose d’aucun accès à la mer, même via le Danube.
Le gouvernement a décidé d’y construire un terminal pétrolier, avec des projets de terminal à marchandises et de port pour passagers dans l'embouchure du Prout. Ce terminal aura une capacité totale de 500 000 tonnes par an.
La Moldavie a rejoint l'Organisation maritime internationale (OMI) et adhère à l’accord de Belgrade des pays regroupant les riverains du Danube. Ce premier pas allait servir de base juridique pour le développement du transport maritime en Moldavie. Au début 2001, le parlement a adopté le Code de la navigation commerciale. De plus, le parlement moldave doit ratifier un certain nombre de conventions internationales gérées par l’OMI, tel que SOLAS, MARPOL, MPPS, LOAD MARK, PDNV, etc. Cela permettra aux navires moldaves d’obtenir tous les certificats de conformité aux normes internationales et le pavillon moldave pourrait être utilisé par la flotte internationale grâce à la souplesse de sa législation et les niveaux de salaires bas, avec les rentrées fiscales s’y rapportant.
L’état des infrastructures fluviales constitue un grand point faible pour la Moldavie, qui ne peut pas accueillir de gros tonnages de fret, en particulier en vrac. Par exemple, l’importation de céréales ou de pétrole est encore problématique.
Plusieurs points sont donc à améliorer :
Le manque d’investissements publics pendant la période de la perestroïka et la transition économique douloureuse de la Moldavie ont eu comme résultat de laisser une infrastructure désuète et sujette à incidents.
La démonstration de la désuétude des infrastructures est simple à faire. En regardant les statistiques de transport depuis 1985 (début de la perestroïka), on constate une diminution chronique du fret et une répartition modale très favorable à la route : en 2001, 46 000 camions, 260 000 voitures et 15 000 autocars étaient enregistrés.
Les tendances principales observées dans l'histoire récente des transports routiers sont :
Le ralentissement des échanges en termes de fret et la diminution des voyages pour les passagers montrent un manque de confiance dans les infrastructures du pays, aussi bien en termes de qualité que de sécurité et que de coût de transport, devenu au fil du temps très prohibitif.
L’entretien et la réparation des routes est souvent médiocre en raison du sous-financement public chronique aboutissant à une politique d’achat de matière première de mauvaise qualité, de sous-qualification des ouvriers et de leur encadrement. Pour la période 2001-2002, le financement total pour les routes locales était d'un million de dollars, ce qui était absolument insuffisant.
Un rapport sur « les conditions des routes, des rues et des ponts », établi après consultation de la population entre novembre 2002 et mars 2003 montre que quasiment toutes les routes du pays (nationales, locales, urbaines et les rues de villages) ainsi que de nombreux ponts sont dans une situation désastreuse et ont un besoin urgent de réparation. La totalité des demandes soumises au ministère dépassait de plus de 8 fois le budget annuel d'entretien des routes du Ministère. Il faut souligner que ces demandes ne concernaient que les besoins absolument urgents.
À la fin des années 1990, la Moldavie était donc un pays à reconstruire dans sa totalité. La chance de cet état de fait est qu’il était possible de repenser complètement les réseaux afin d’offrir aux Moldaves des plans de déplacements adéquats et d’intégrer la Moldavie aux grands itinéraires européens.
Le transport aérien en Moldavie est en grande partie limité au trafic voyageurs. Les volumes aériens en termes de fret sont restés limités en raison d’une capacité réduite du traitement du fret. Les grandes expéditions aériennes utilisent les aéroports de Budapest, Bucarest et Francfort avec post-acheminements routiers. Certaines interventions gouvernementales récentes ont affaibli l'industrie, ont limité les initiatives privées et les investissements étrangers dans le transport aérien et les services aéroportuaires .
Il n’existe qu’un seul aéroport international en Moldavie : celui de Chişinău. Il reçoit en moyenne 5 000 mouvements d’avions par an et gère 250 000 passagers et 3 000 tonnes de fret. Il peut accueillir jusqu’à 44 appareils de toutes tailles, les pistes ayant été rallongées et réhabilitées à l’occasion du sommet de la CEI en octobre 2002. Il relie les principales capitales européennes, le Proche-Orient, et la CEI.
En dehors de Chişinău, il existe d’autres aérodromes non utilisés commercialement, ou seulement pour le fret : Tiraspol et Bălţi et une trentaine d’autres sites (aérodromes privés, militaires ou en friche), avec ou sans tarmac, vestiges de la guerre froide.
L’aéroport de Tiraspol a fait l’objet d’une réhabilitation par la Russie pour permettre l’atterrissage d’avions gros porteurs de l’armée afin d’évacuer les armements soviétiques encore présents en Transnistrie. Par la suite, cet aéroport pourra être utilisé commercialement en particulier pour le fret, car les infrastructures militaires mises en place peuvent facilement trouver une application civile sans un gros effort de financement. Tiraspol pourrait alors jouer le rôle de second aéroport du pays, en délestant Chişinău du fret lourd et en développant le partenariat entre les deux aéroports.
De plus, l’axe terrestre entre les deux villes (autoroute et chemin de fer) pourra être utilisé et contribuera à l’essor de l’économie locale et au rapprochement entre les deux « États moldaves ».
L’aéroport de Bălţi pourra se spécialiser également, en particulier sur le court-courrier avec les pays proches.
Cette concentration d’aéroports pour ce petit pays, résultat des investissements militaires soviétiques dans cette région, est une opportunité d’ouverture internationale et pourra permettre le développement des bassins économiques autour des grandes villes, décentralisant ainsi l’économie. Le « hub » régional voyageurs pour les destinations lointaines restant Chişinău.
En effet, Bucarest et Kiev, les capitales les plus proches se trouvent toutes deux à plus de 400 km et leurs droits d’atterrissage sont beaucoup plus élevés. L’apport des aéroports internationaux de Iasi (Moldavie roumaine) et d’Odessa (Ukraine) n’est pas non plus à négliger ; en développant l’axe terrestre déjà existant.
Cette stratégie de séparation entre le fret et le passage est indispensable au développement moldave, en regard au taux de croissance du trafic international de voyageurs prévu par la CEMT (de 80 à 90 % entre 2000 et 2015). L’aéroport de Chişinău, par sa petite taille, risque d’être saturé avant 2015.
La Moldavie est un pays enclavé aussi bien au niveau géographique (pas d’accès maritime) qu’au niveau des infrastructures (déplacements difficiles). Parmi ces problèmes, on constate l’absence chronique de passage vers l’extérieur ou leur limitation extrême (pont sur le Prout avec limitation de tonnage, changement de bogies pour les trains) et l’obstacle transnistrien vers l’est.
Si ce dernier relève de la détermination politique, la question de l’infrastructure dépend plus d’un manque d’investissement en équipement :
Officiellement, trois aéroports moldaves sont un point de sortie autorisé :
Pour le mode aérien, la frontière de Chişinău est encore suffisante pour traiter la majorité des flux entrants et sortants de la Moldavie. Toutefois, dans l’hypothèse de développement du mode, comme expliqué à la page précédente, les services douaniers, sanitaires et d’immigration pourraient se trouver rapidement saturés.
Il en est de même pour les gares ferroviaires, qui ne sont que quatre :
Les deux premières n’offrent un débouché que peu intéressant vers l’étranger, dans des régions elles-mêmes enclavées ou dont les infrastructures ne permettent pas de rallier les grands axes européens. La troisième, sur la ligne d'Odessa et permettant de rejoindre le reste du réseau de la CEI, se trouve en Transnistrie et ce point-frontière est soumis au bon vouloir de l’administration locale.
Pour la route, les points-frontières, déjà insuffisants pour écouler les flux en 1992, ont été encore diminué par l’existence de la Transnistrie, même si certains flux y transitent encore.
Le transit par la Transnistrie est extrêmement problématique. Le passage en « frontière » y est lent, la corruption active, les vols fréquents. De plus, pour juguler les exportations sauvages et le marché noir, la Moldavie a fait changer les sceaux de ses tampons de douane. La Transnistrie a répondu par une discrimination continue des trafics par de nombreuses barrières tarifaires et administratives, empêchant ou ralentissant tout transit par son territoire des exportations vers l’Ukraine et la Russie. Cet état de fait est problématique pour la Moldavie qui se prive de nombreux accès vers la CEI, son marché historique. Seul subsiste l’accès par Cosăuti (district de Soroca), au nord du pays, distant de plus de 150 km de Chişinău. Cet accès n’avait pas été prévu pour recevoir la quasi-totalité des échanges entre la Moldavie et le reste de la CEI et jouit d’un monopole de passage entre les deux pays. Ce point de convergence est sans cesse encombré. Le taux de fret est souvent revu à la hausse à cause du détour considérable effectué par les transporteurs et de l’attente de plus en longue à ce point-frontière.
Pour contourner ce problème, l’État Moldave a innové en créant des postes de douane mobiles qui se déplaceraient au gré de la demande sur certains points frontières. De plus, cette brigade spécialisée pourrait rapidement se placer en frontière, le jour venu de la réunification de la Moldavie. Ce projet est soutenu et financé par le programme européen TACIS pour la formation du personnel. Ce projet est encore peu avancé, faute de candidat.
L’enclavement de la Moldavie est aussi dû au développement de normes à l’époque soviétique qui empêchent aujourd’hui les échanges pour cause d’incompatibilité technique.
L’exemple le plus frappant est celui de l’écartement des voies qui diffère de Moldavie à Roumanie. Le point nodal de Ungheni est fortement encombré tout le long de l’année à cause du temps d’attente technique pour le changement des bogies qui vient s’ajouter au temps administratif de procédures douanières.
Dans l'est de la Moldavie, c’est le courant de traction ferroviaire qui pose problème. On change trois fois d’énergie : électrique, 15 kV en Ukraine, puis 3000 V continu en Transnistrie puis traction diesel de Tiraspol à Chişinău. De plus, les locomotives ne sont pas toujours disponibles. Il en résulte une perte moyenne de deux heures en plus du temps d’attente administratif.
Sur la route aussi, des barrières techniques se mettent en travers des transporteurs moldaves. Les véhicules Euro 0 de fabrication soviétique n’ont plus le droit de circuler en Roumanie depuis le 1er janvier 2002, comme dans les autres pays d’Europe, alors que le commerce moldave dépend en grande partie de ses échanges avec les régions frontalières.