Pierre Gassendi - Définition

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Introduction

Pierre Gassendi

Pierre Gassend dit Gassendi, né à Champtercier près de Digne le 22 janvier 1592 et mort à Paris le 24 octobre 1655, est un mathématicien, philosophe, théologien et astronome français. Un cratère lunaire porte son nom.

Biographie

La légende veut que Pierre Gassend ait commencé à se passionner pour les beautés du ciel en gardant les troupeaux de ses parents pendant la nuit. Enfant, il a suivi les cours des écoles de Digne, et fit preuve de grandes dispositions pour les langues et les mathématiques. Il s'inscrit par la suite à l'Université d'Aix-en-Provence, où il suit l'enseignement philosophique de Philibert Fesaye.

Premières années

En 1612, le collège de Digne lui demande quelques conférences de philosophie. En 1614, Pierre Gassend obtient son doctorat en théologie à Avignon. Il est nommé chanoine de Digne. En 1617, il entre dans les ordres. Il est nommé professeur de rhétorique au collège de Digne. En 1618, Gassend note ses premières observations du ciel lors de l'apparition d'une comète "à tête crépue". Il entre en relation avec l'astronome Joseph de Gaultier de La Valette (1564-1647). En 1620, il établit les tables de la position de Jupiter par rapport aux étoiles fixes. L'année suivante, il donne leur nom aux aurores boréales. De 1622 à 1623, Gassend est nommé professeur de philosophie au collège d'Aix. Il en est chassé semble-t-il par l'arrivée des jésuites. Le 14 avril 1623, il observe une éclipse de Lune à Digne. La même année, il décrit les positions de la planète Mars. Il se rend à Grenoble.

En 1625, il publie à Grenoble contre Aristote ses Exercitationes paradoxicæ versus Aristoteleos, son premier livre (rédigé en 1622). Cette rupture prépare celle que Descartes opérera 12 ans plus tard avec la publication du discours de la Méthode. En 1625, Gassend est à Paris, il observe la position de Venus depuis le pont neuf et une éclipse avec Claude Mydorge. En avril, il retourne dans le midi. En 1626, il devient le prévôt de la cathédrale de Digne ; mais dès lors sa vie se confond avec ses observations astronomiques ; il est un inlassable collectionneur d'éclipses. En correspondance avec le philosophe Thomas Hobbes, avec lequel il partage ses critiques contres Descartes, Gassend est en rapport avec tous les grands astronomes de son temps : Képler, Riccioli, Hortensius, Hévélius... sa renommée s'étend de Prague à Aix en passant par Dantzig, Leyde et Bologne. Une grande partie de ses observations sont menées en étroite liaison avec son ami le conseiller au Parlement Nicolas Claude Fabri de Peiresc au près duquel il passe ses années de transition. À Galilée, il écrit le 20 juillet 1625 :

« Tout d'abord, ami Galilée, je voudrais que vous soyez bien convaincu du plaisir de l'âme avec lequel j'embrasse votre opinion en astronomie, sur le système de Copernic. Les barrières d'un monde assurément vulgaire sont brisées. L'esprit libéré erre à travers l'immensité de l'espace. Peut-être conviendrait-il que vous publiiez votre travail. En le cachant vous feriez une grave injure aux lettres et à ceux qui s'adonnent aux sciences les plus divines…Si une résolution bien arrêtée, ou la destinée, vous imposent une réserve telle que vous ne puissiez même pas communiquer par lettre à vos amis ce que vous avez conçu, faites une exception pour moi. Laissez -moi espérer ou vous demander d'être votre correspondant. »
Le temps des éclipses

En 1628, après un passage à Paris en mai, Gassend voyage pendant neuf mois avec François Luillier et sur ses instances. Il arrive vers la fin de l'année en Flandres et en Hollande où il rencontre Isaac Beeckman, Thomas Hobbes et Henricus Reneri (Henri Regnier). Il compose de Paraheliis sur la demande Peiresc et Examen de la doctrine de Fludd demandée par Mersenne. En 1629, il tente de dissuader l'astronome-astrologue Jean-Baptiste Morin de publier une fausse théorie des marées ; il fait quelques observations sur les flocons de neige dont se servit ultérieurement Descartes. Le 10 juin 1630, il observe (de Paris) une éclipse de Soleil quasiment totale. Il contribue alors à populariser à Paris les thèses de Galilée, notamment par la publication de ses lettres : De motu impresso a motore translato et De proportione qua gravia decidentia accelerentur. Le 6 novembre 1631, toujours à Paris, Gassend décrit le passage de Mercure devant le Soleil (annoncé par Kepler). Il tente de reprendre son expérience en décembre avec le passage de Vénus en décembre, mais son passage a lieu de nuit. Le 27  octobre  1632, il décrit une éclipse de Lune à Lyon chez le frère du ministre-cardinal Armand de Richelieu. Le 8 avril  1633 Gassend se déplace à la chapelle de Saint-Lazare, près de Digne, afin d'y observer une éclipse de Soleil. En février 1634, il adresse une lettre de consolation à Galilée qui vient d'être condamné et auquel il conseille, la patience. Le 14  mars 1634, il est à nouveau à Digne pour y observer une éclipse de Lune. Le 9 avril de la même année, il se trouve à Aix pour observer Jupiter ; et le 11 septembre pour observer Mars. En 1635 Gassend est à Aix ; il y décrit la première éclipse de Lune de l'année. En 1636 il mesure à Marseille, la hauteur du Soleil au solstice d'été afin de reprendre les mesures effectuées 2000 ans plus tôt par Pythéas.

L'après Peiresc

Après la mort de Peiresc en 1637, dont il édite la vie et garde un profond chagrin, Gassend se lie avec le gouverneur de Provence, Louis de Valois, comte d'Alais et duc d'Angoulême qui devient alors son protecteur, mais demeure essentiellement à Paris. Il y enseigne aux familles nobles et aux jeunes gens qu'elles protègent, Claude-Emmanuel Chapelle, le fils naturel de François Luillier, maître des Comptes et ses amis, François Bernier, Jean Hesnault, sans doute Cyrano de Bergerac, Molière, peut-être Boileau et La Fontaine, suivent son enseignement. Il est en correspondance avec le père Mersenne.

Le 18 octobre 1641, Il observe une éclipse de Lune de l'abbaye de Saint-Germain. La même année, il illustre à Marseille par une expérience de physique les théories de Galilée sur la chute des corps. Un curieux narre la scène :

« M. Gassendi ayant été toujours si curieux de chercher à justifier par les expériences la vérité des spéculations que la philosophie lui propose, et se trouvant à Marseille en l'an 1641 fit voir sur une galère qui sortit exprèz en mer par l'ordre de ce prince, (...) qu'une pierre laschée du plus haut du mast, tandis que la galère vogue avec toute la vitesse possible, ne tombe pas ailleurs qu'elle ne feroit si la même galère étoit arrêtée et immobile. »

En cette année 1641, Gassend est élu à l'agence générale du clergé de France. Une position officielle parmi les plus importante car elle fait le lien entre l'église et les séculiers. Il rencontre Thomas Hobbes. En mars, il reçoit les Méditations de Descartes ; leur querelle commence véritablement à cette occasion. Descartes répond à Mersenne qu'il « méprise » ce pauvre homme qui « n'a pas le sens commun et ne sait en aucune façon raisonner ». Après la réponse de Descartes à ses objections, il publie ses Instances, que fait imprimer son ami Sorbière et auxquelles Descartes répondit par une lettre à son éditeur. Le 14 avril 1642 Gassend observe une éclipse de Lune de l'hôtel de Thou. Mersenne l'engage à porter la contradiction à Jean-Baptiste Morin qui a attaqué son De motu impresso une translato motore. Le 27  septembre  1643, il observe une éclipse de Lune à Sucy-en-Brie, en compagnie de l'abbé de Champigny et du président Molé.

La consécration et la fin

En 1645, il est nommé professeur de mathématiques au Collège royal. Il y enseigne l'atomisme d'Épicure et de Lucrèce. Pour lui, cette physique est compatible avec la doctrine chrétienne. Une de ses tâches est d'y lutter contre la croyance, ordinaire à l'époque, en les feux infernaux souterrains. Le 30 janvier 1646 Gassendi observe encore une éclipse de Lune ; toujours en 1646, il publie avec Fermat, contre le jésuite Casrée, un livre sur l'accélération des graves. En 1647, il publie De Vita, moribus, et doctrina Epicuri libri octo. pour défendre la doctrine d'Epicure. L'année suivante, il se réconcilie officiellement avec Descartes (de passage à Paris) grâce aux bons soins de César d'Estrées. Tannery a évoqué un repas des trois philosophes, Descartes, Gassend et Hobbes, réunis à la table du marquis de Newcastle.

En 1648, une maladie de poitrine le contraint à quitter Paris pour le midi. En 1649, il publie ses commentaires sur le dixième livre de Diogène Laërce et son Syntagma philosophiae Epicuri. qui est son livre le plus célèbre. Il voyage en Provence, passe deux ans à Toulon où il retrouve son secrétaire, élève et protégé, François Bernier, revenu d'un long voyage en Europe de l'est. Le 8  avril  1652, il détermine les diamètres apparents du Soleil et de la Lune qui selon lui, sont dans un rapport de 1 contre 1000 à 1028. L'année suivante il revient à Paris. Bernier y attaque Morin pour défendre Gassend ; l'astrologue le fait menacer d'excommunication et Gassend obtient de Bernier qu'il cesse sa dispute. Sorbière se propose de traduire la philosophie de Gassend et d'Epicure mais la publication ne se fait pas et l'impression en est arrêtée pour complaire à Gassend. En 1653, Gassend publie ses vies de Tycho-Brahé et de Copernic ainsi qu'une histoire de l'église de Digne. Le 11 août 1654, Gassend observe sa dernière éclipse dans le château de Montmort, au Mesnil-Saint-Denis. Soigné par sept médecins, et de nombreux apothicaires, il reçoit douze saignées, sept purges et vingt-deux lavements avant de s'éteindre le 24 octobre 1655 entre les bras de son élève. Un monument de marbre blanc reçut sa dépouille dans la propre chapelle de son ami Montmort, en l'église Saint Nicolas des Champs.

La postérité 

Henri Louis Habert de Montmor publia ses œuvres complètes à Lyon en 1658 et Bernier répandit sa doctrine en la vulgarisant. Déformée, la philosophie de Gassend apparût dès lors comme celle d'un matérialiste. les médecins Nicolas de Blegny, Guillaume Lamy, G.B. de Saint Romain (témoin des expériences sur le vide réalisée au Puy-de-Dôme) contribuèrent à forger cette image. Le scepticisme de Saint-Evremond s'en réclame ; on en retrouve des échos chez Jean-Baptiste Vico en Italie et chez Martin Martinez en Espagne. En Angleterre, Francis Glisson reprend certaines de ses thèses. Sa pensée se confond au XVIIIe siècle avec celle des sensualistes voire des libertins. L'épicurisme et l'atomisme de Pierre Gassend sont mal connus, on ne conserve souvent de lui que sa défense de l'âme animale. Son article dans l'Encyclopédie court sur trente lignes. En 1852, une statue de bronze est érigée en son honneur dans sa ville natale. Il demeure néanmoins selon le mot d'Edward Gibbon : le plus grand philosophe parmi les hommes de lettres, et le plus grand homme de lettres parmi les philosophes.

L'homme

Selon le témoignage de ses contemporains, Gassend se levait régulièrement à trois heures du matin, jamais plus tard que quatre heures, et quelquefois à deux. Il étudiait jusqu'à onze heures, à moins de recevoir une visite et se remettait à l'étude vers deux ou trois heures après midi jusqu'à huit. Il soupait légèrement (une tisane tiède, des légumes, rarement de la viande) et se couchait entre neuf et dix. On le disait pieux, et pratiquant avec scrupule ses devoirs de prêtre ; ses paroissiens l'appelaient le saint prêtre. Par sa pauvreté, sa modestie, sa douceur, son humanité, sa bienfaisance, sa charité et sa simplicité, il faisait figure d'un anachorète, vivant dans le monde selon la règle d'un monastère. Son ami Guy Patin, écrivit de lui :

« M. Gassendi est si délicat qu'il n'en ose boire, et s'imagine que son corps brûlerait s'il en avait jamais bu. »

Peu d'auteurs ont imaginé qu'il s'agissait là d'une posture, ou d'un masque.

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