Voir aussi : Hypothèse de Duesberg
Ceux qui appartiennent à cette communauté de dissidents sont apparemment unis par leur désaccord avec le concept qui voit dans le VIH la cause du sida, mais en réalité leurs positions spécifiques diffèrent sensiblement selon les groupes.
Les arguments des dissidents sont :
Les dissidents essayent d'expliquer ces contradictions par plusieurs hypothèses :
Comme causes du sida, ils suggèrent les drogues consommées à des fins récréationnelles ou non, la malnutrition et jusqu'aux médicaments antirétroviraux (le médicament qui est essentiellement sur la sellette est l'AZT), qu'on utilise pour traiter le syndrome.
De telles affirmations ont été abondamment examinées dans la littérature médicale et scientifique à comité de lecture ; le consensus scientifique qui s'en est dégagé est qu'elles ont été réfutées de façon convaincante et que c'est bien le VIH qui provoque le sida. Matthew Irwin et David Crowe ont fait une critique d'un de ces documents en indiquant qu'ils font essentiellement appel à l'argument d'autorité.
L'accumulation de preuves concernant les avantages importants de la médication anti-VIH moderne est actuellement regardée comme la principale confirmation du rôle du VIH dans l'apparition du sida.
Cependant, certains remettent en cause le mécanisme d'action supposé de la trithérapie, suggérant que son efficacité provient des propriétés oxydoréductrices intrinsèques des substances utilisées, dans le droit fil de l'hypothèse du stress oxydatif tentant à montrer l'importance des oxydants (peroxynitrites) dans l'infection à VIH.
Le concept selon lequel c'est le VIH qui cause le sida est largement considéré comme prouvé à l'intérieur de la communauté scientifique et dans le reste de la société. Pourtant le mouvement dissident a eu un certain impact, en faisant du débat une question civile et politique aussi bien qu'une question scientifique et de santé publique.
Le scepticisme à l'égard du VIH en tant que cause du sida a commencé presque immédiatement après l'annonce de la découverte du VIH. Un des premiers sceptiques importants a été le journaliste John Lauritsen, qui a soutenu dans ses articles pour The New York Native que le sida avait été en réalité provoqué par un vasodilatateur, le nitrite amylique, et que c'est une conspiration du gouvernement qui avait caché la vérité.
La publication de l'article « first AIDS » de Peter Duesberg en 1987 a apporté un nouvel appui aux théories dissidentes. Peu après, la revue Science constatait que les remarques de Duesberg lui avaient valu « une grande attention dans les mass-média, particulièrement dans la presse gay où il fait figure de héros ». Il faut dire que le soutien apporté à Duesberg par la communauté gay s'est volatilisé quand il a fait toute une série de déclarations perçue comme homophobes ; dans une interview pour the Village Voice, en 1988, Duesberg s'est dit convaincu que l'épidémie de sida avait été « provoquée par un style de vie qui était criminel voici vingt ans. » Au cours des années suivantes, d'autres sont devenus incrédules par rapport à la théorie du VIH du fait que les chercheurs n'arrivaient pas au début à mettre au point un traitement efficace ou un vaccin contre le sida. Des journalistes comme Neville Hodgkinson et Celia Farber ont essayé de propager des idées dissidentes dans les mass-média des États-Unis et de Grande-Bretagne; plusieurs documentaires de télévision ont également été réalisés pour permettre le questionnement du statu quo.
En 1996-1997, l'introduction d'une thérapie antirétrovirale extrêmement active (HAART), a permis d'améliorer de façon importante la survie et la santé générale des personnes affectées par le VIH. L'action positive du traitement par médication anti-VIH est considérée comme une preuve de plus du rôle du VIH dans l'apparition du sida, et plusieurs dissidents importants ont été amenés à accepter le rôle causal du VIH. Aujourd'hui, les arguments des dissidents qui nient cette activité indéniable de la trithérapie sont de plus en plus déconsidérés et perçus comme une obstination dangereuse à ne pas accepter la réalité. Ces théories n'en continuent pas moins à exercer une grande influence dans certaines communautés ; une enquête menée en 2005 à l'occasion de la Gay Pride dans quatre villes américaines a constaté que 33 % des personnes interrogées doutaient que le VIH provoque le sida.
Les activistes du sida se sont inquiétés du fait que les arguments des dissidents sur le peu de nocivité du VIH puissent être responsables d'un accroissement en nombre des infections qui lui sont dues. Selon Stephen Thomas, directeur de Centre pour la Santé des Minorités (Center for Minority Health) de l'Université de Pittsburgh : « Les gens ne comprennent pas. Ils voient partout des conspirations au lieu de songer à se protéger, à passer des tests et à rechercher quels soins et quels traitements leur conviennent. »
Dans le passé le gouvernement du Président sud-africain Thabo Mbeki a apporté son appui aux conceptions des dissidents ; des critiques accusent ces derniers d'être responsables par leur influence de la lenteur et de l'inefficacité de la réaction gouvernementale face à l'épidémie du sida.
En 2000, quand s'est tenue à Durban une Conférence internationale sur le sida, le Président Mbeki a convoqué un Groupe consultatif Présidentiel comprenant un certain nombre de dissidents, y compris Peter Duesberg et David Rasnick. La presse générale a été exclue des réunions de ce Groupe ; un correspondant invité a écrit que Rasnick avait plaidé pour que les tests du VIH fussent légalement interdits et qu'il avait nié avoir constaté la moindre preuve d'une catastrophe par le sida en Afrique du Sud ; Duesberg de son côté « avait fait une présentation si éloignée de la réalité médicale en Afrique que plusieurs médecins locaux en hochaient la tête. »
Dans son message adressé à la Conférence internationale sur le sida, Mbeki a réitéré son point de vue selon lequel le VIH n'était pas entièrement responsable du sida, à la suite de quoi des centaines de délégués sont sortis pendant sa communication. Mbeki a aussi envoyé une lettre à un certain nombre de dirigeants dans le monde pour exprimer sa méfiance devant cette représentation de « l'expérience occidentale sur la réalité africaine » et il comparait la communauté des chercheurs qui avait accepté la théorie en cours à ceux qui avaient soutenu le régime qui permettait l'apartheid. Le ton et le contenu de cette lettre de Mbeki ont amené des diplomates américains à se demander au départ s'il ne s'agissait pas d'un canular. Cette conduite du président a consterné les scientifiques et les activistes appartenant au courant majoritaire et ils ont répondu par la déclaration de Durban, un document où ils affirmaient que le VIH était bien la cause du sida et qui a été signé par plus de 5.000 chercheurs et médecins. Cette déclaration a reçu une réponse de la part de Matthew Irwin et David Crowe
La ministre sud-africaine de la Santé Manto Tshabalala-Msimang s'est aussi attiré de violentes critiques pour avoir souvent conseillé aux malades des remèdes comme l'ail, le citron et l'huile d'olive, en même temps qu'elle insistait sur la toxicité possible des médicaments antirétroviraux, qu'elle appelait « des poisons ». La South African Medical Association l'a accusée « de jeter le trouble sur un public vulnérable ». En septembre 2006, un groupe de plus de 80 chercheurs et universitaires a demandé « la révocation immédiate du Dr Tshabalala-Msimang comme ministre de la Santé et la fin de la politique désastreuse et pseudoscientifique qui a caractérisé l'attitude du gouvernement sud-africain devant le VIH/sida ». En décembre 2006, Nozizwe Madlala-Routledge, ministre adjointe de la Santé, a avoué qu'aux niveaux les plus élevés on avait nié la réalité sur le sida.
Le gouvernement de Mbeki a été largement critiqué pour avoir retardé la mise en route de programmes destinés à fournir des médicaments antirétroviraux aux malades du sida dans un état avancé et aux femmes enceintes séropositives. Le programme national de traitement n'a commencé qu'après que la Campagne d'Action pour le Traitement (TAC) eut conduit à intenter un procès contre les ministres du gouvernement, en les proclamant responsables de la mort de 600 personnes séropositives par jour parce qu'elles n'avaient pas pu accéder à la médication. L'Afrique du Sud a été un des derniers pays de la région à commencer un tel programme de traitement et la mise en route a été beaucoup plus lente que prévue.
À la XVIe Conférence internationale sur le sida, Stephen Lewis, délégué spécial des Nations Unies pour le sida en Afrique, a attaqué le gouvernement de Mbeki pour la lenteur de sa réaction devant l'épidémie de sida et à sa soumission aux théories dissidentes :
En 2002, Mbeki a demandé que son nom ne soit plus utilisé dans la littérature dissidente et que les dissidents arrêtent de signer des documents en ajoutant « Membre du Groupe consultatif sur le sida créé par le Président Mbeki ».
Au début de 2005, l'ancien président sud-africain Nelson Mandela a annoncé que son fils était mort de complications de sida. Cette annonce publique a été vue autant comme un effort pour combattre la stigmatisation associée au sida que comme une « déclaration politique conçue pour forcer le Président [Mbeki] à ne plus nier les faits ».
En 2007, Thabo Mbeki conserve un certain scepticisme vis-à-vis de l'hypothèse officielle.
Un grand nombre d'experts et d'activistes du sida assurent que le mouvement de réévaluation du sida met des vies en danger en persuadant les gens de ne plus se protéger lors des rapports sexuels ou de ne plus prendre leur traitement antirétroviral. On lit en particulier dans la déclaration de Durban :
En réponse à de telles accusations, le Groupe dissident de Perth a nié encourager les rapports sexuels non protégés ou la consommation de drogue ; effectivement, ils soutiennent que le sexe anal passif et l'usage de drogue accroissent le risque d'être atteint du sida et devraient être évités.
Duesberg soutient que le VIH en lui-même est inoffensif, et que les personnes contaminées par ce virus seront traitées avec des médicaments dont il assure qu'ils sont la cause du sida. Pour lui, le risque et les dégâts proviennent de la peur liée à cette maladie, peur qui précipite les traitements par certains médicaments qu'il juge dangereux. De plus il tient de source gouvernementale qu'il faut en moyenne 1000 rapports sexuels non protégés avec un partenaire séropositif au VIH pour être à son tour infecté. Il déclare toutefois que l'emploi de préservatifs peut être utile après tout, car il « protège les gens de l'infection par le VIH, qu'ils pourraient attraper après 1000 rapports non protégés, les mettant ainsi à l'abri du sida que provoquerait le traitement anti-VIH. »