Le texte originel étant définitivement perdu, on ne dispose actuellement que de reconstructions tardives en désaccord sur de nombreux points. On pense que la version originelle contenait 365 drogues mais beaucoup de versions actuelles en donnent un nombre différent. La classification devait être en trois classes (supérieure, intermédiaire et basse) mais les compilations actuelles proposent quatre classes ou plus : les arbres, les plantes, les animaux, les minéraux, elles-mêmes ensuite subdivisées en catégorie supérieure, intermédiaire et basse. Enfin, l'extension des classes peut varier d'une compilation à l'autre. Ainsi, des minéraux toxiques comme le réalgar (xionghuang 雄黄, sulfure d'arsenic) peut se trouver dans la classe supérieure (compilation de Cao Yuanyu) ou dans la classe intermédiaire (compilation de Gu Guanguang).
L'ouvrage se présente comme une encyclopédie de matières médicales, arrangées sous forme de liste non ordonnées de notices. La difficulté propre à la langue chinoise et jamais vraiment résolue, d'ordonner les listes de noms (pour éviter de devoir parcourir toute la liste pour retrouver une entrée) a amené les éditeurs contemporains du Shennong bencao jing à diviser les drogues en nombreuses classes naturelles (minéraux, arbres etc.) moins longues à parcourir. Cette méthode semble remonter à Tao Hongjing et a été appliquée à toutes les matières médicales bencao ultérieures, y compris les recompilations du Shennong bencao jing.
A la différence des pharmacopées gréco-latines de l'Antiquité, aucune description des plantes n'est donnée. Chaque notice adopte un format standard très concis : la saveur, la nature, suivis d'une liste d'indications, d'autres appellations et du milieu. Voyons par exemple le ginseng :
La nature chaude ou froide de la drogue servait à orienter son usage thérapeutique suivant le principe suivant :
Une drogue est dite chaude ou froide suivant la sensation de chaleur ou de fraicheur provoquée par son absorption.
Les termes anatomiques sont ceux de la médecine traditionnelle chinoise dont le noyau conceptuel était en cours de constitution à l'époque de la première compilation du benjing. La racine de ginseng est classée dans la catégorie des drogues supérieures et fait partie des produits liée à la recherche de l'immortalité. L'"allègement du corps" était un but visé pour atteindre l'état éthéré des Immortels capables de voler et de "chevaucher les nuages".
Suivant la préface du Bencao jing, les drogues doivent être classées en trois catégories :
Dans la catégorie supérieure, on trouve des racines, le ginseng, la réglisse de l'Oural ou la silère (Apiacée), la baie du lyciet(Solanacée), des champignons Ganodermes, l'écorce du cannelier (la cannelle), des os de dragon longgu (fossiles de mammifères), le gras d'ours et des minéraux comme le cinabre (sulfure de mercure), la fluorine, le mercureou le quartz.
Les drogues de cette catégorie n'étaient pas destinées à soigner une maladie déclarée mais à garder un corps en bonne santé. Elles correspondent assez bien pour certaines d'entre-elles, comme l'a fait remarquer Georges Métailié, à la notion moderne d'alicament. Il faut toutefois faire attention qu'au regard de la toxicologie moderne certaines de ces drogues sont assez toxiques. La notion de wudu 无毒 "non toxique" doit donc plutôt être comprise comme "sans grande efficacité thérapeutique". Comme on le voit clairement sur toutes les notices des minéraux de cette classe (jade, cinabre, mercure... 17 minéraux en tout) qui comportent toutes une indication du genre 不老 bulao "empêche de vieillir", 神仙不死 shenxian busi "permet de devenir immortel", 延年 yannian "prolonge la vie", 轻身 qingshen "allège le corps" (comme celui d'un Immortel), la visée était avant tout celle des pratiques alchimiques, cherchant à prolonger la vie, voire à atteindre l'immortalité.
Comme le fait remarquer Frédéric Obringer : « Si les rédacteurs de cette première matière médicale restent inconnus, ils appartiennent très certainement à ce milieu d'alchimistes et de possesseurs de recettes et méthodes plus ou moins magiques, de guérisseurs que l'on a l'habitude de rapprocher des pratiques et des représentations taoïsantes ».
Les préoccupations taoïsantes des auteurs peuvent se déceler dans la hiérarchie des classes qu'ils proposent : si la catégorie supérieure est qualifiée de jun souverain, l'intermédiaire de chen ministres et l'inférieure de zuoshi assistant, c'est bien que les objectifs des auteurs valorisent plus les chercheurs d'immortalité que les médecins et guérisseurs.
La catégorie intermédiaire des drogues comportent de nombreux minéraux toxiques comme l'orpiment cihuang (trisulfure d'arsenic), la chalcanthite shidan (sulfate de cuivre hydraté) et des plantes comme le gingembre ganjiang, l'éphèdre de Chine mahuang. Cette classe intermédiaire rassemble aussi bien des drogues toxiques ayant une efficacité thérapeutique que des drogues permettant de prolonger la vie. D'après Paul Unschuld 13% d'entre elles reçoivent un des qualificatifs caractérisant un prolongement de la vie alors que ces qualificatifs étaient appliqués à 83% des drogues de la catégorie supérieure. Et comme le fait remarquer très justement cet auteur « cette classe est superflue d'un point de vue de systématique médicale car elle contient des drogues qui auraient pu être rangée dans la catégorie supérieure et des drogues qui, en raison de leur efficacité [thérapeutique], pourraient appartenir à la classe inférieure ». L'introduction de cette classe peut se comprendre par le désir d'établir un vaste système de correspondance entre le cosmos et l'homme. Pour refléter l'ordre cosmique, les drogues supérieures, intermédiaires et inférieures doivent être catégorisées comme appartenant au Ciel, à l'Homme et à la Terre, de même que le nombre de drogues (365) doit correspondre au nombre de jours de l'année solaire.
Enfin la catégorie inférieure représentait 125 entrées, correspondant à des matières qui ont une action violente sur les fonctions physiologiques et sont généralement vénéneuses. La rhubarbe, différents aconits et les noyaux de pêches en font partie. Ce sont des poisons qu'il ne faut utiliser qu'à doses très légères et très contrôlées.
Les drogues les plus toxiques étaient réputées pouvoir s'attaquer aux troubles ancrés au plus profond du corps là où les traitements de surface de l'acupuncture ou la moxibustion ne pouvaient pénétrer. Dans la préface de l'ouvrage, il est indiqué que :
Les maladies susceptibles d'être "attaquées" par les drogues toxiques avaient un profil étiologique particulier : il s'agissait des affections provoquées par une influence maléfique xie 邪, des accumulations et autres blocages et nouures, liées à des situations inextricables où tout est entremêlé et où rien ne circule.
La croyance aux démons est très profondément ancrée dans la culture chinoise. A l'époque pré-impériale, les démons étaient tenus pour responsables des maladies. Bien qu'à l'époque de la rédaction du Shennong bencao jing un système d'interprétation naturaliste des maladies, basées sur les concepts de Yinyang et des Wuxing (cinq phases) avait commencé à émergé, la croyance au pouvoir pathogène des démons restait vive. « Dans environ 15% des 357 notices de drogues de la version reconstruite par Mori Risshi, il est fait mention de "tuer" ou de "chasser" les démons ou d'éliminer la "possession démoniaque" comme indication thérapeutique ».
Soit par exemple, la notice sur de la corne de rhinocéros xijiao (犀角):
Les diverses espèces de rhinocéros qui existaient dans la Chine ancienne avaient disparu à l'époque des Royaumes Combattants (-453, -221). Et comme tout ce qui est rare est précieux, à l'époque de la rédaction du benjing la corne de rhinocéros avait acquis la réputation de pouvoir chasser les démons. A cet aura magique, s'ajoutait son renom de médicament froid permettant de lutter contre les maladies chaudes (donc d'antipyrétique) et les poisons (donc d'antidote).
Alors que le développement des connaissances scientifiques en Europe s'est fait contre la physique d'Aristote ou la médecine de Galien, la Chine n'a pas rompu avec ses anciens systèmes conceptuels préscientifiques de l'Antiquité. Les efforts du régime communiste pour faire rentrer la Chine dans la modernité se sont faits en préservant la médecine traditionnelle chinoise et le vieux fond culturel de l'antiquité. Ce fait culturel est certainement à l'origine de la menace d'extinction qui pèse actuellement sur plusieurs espèces animales entrant dans la pharmacopée traditionnelle chinoise.