À la Renaissance, cet équilibre idéal entre harmonie et physique devient intenable par la quantité de sphères et d'épicycles nécessaires pour expliquer les écarts et les nombreuses anomalies observées. La vieille théorie de Philolaos qui faisait de la Terre un astre mobile et sonore revient à la mode et est reprise en 1453 par Copernic (théorie de l'infini qui ne peut pas avoir de centre). La quête d'harmonie idéale correspond, sur le plan technologique, au développement de l'horloge, mère de toutes les machines. L'univers n'est qu'une vaste horloge mise en place par le Créateur … La musique est alors soumise aux impératifs rythmiques.
La révolution copernicienne entraîne la perte de notre anthropocentrisme : la Terre n'est plus qu'une planète comme les autres, tournant autour du Soleil.
Léonard de Vinci consacre un chapitre de ses travaux afin de savoir "si le frottement des cieux fait son ou non" et apporte des arguments pour réfuter la théorie.
Après la disparition de Copernic, Tycho Brahé (1546-1601) construit le premier grand observatoire et cumule les observations qui sont scrupuleusement consignées. Il ne parvient pas à renoncer à la vision géocentrique de l'univers.
Johannes Kepler hérite de ses documents et énoncera les lois relatives au mouvement des planètes. Kepler attribue au soleil une fonction motrice, anime les planètes sur une orbite elliptique. Insatisfait, il recherche l'harmonie des sphères dans l'harmonie musicale, mode mathématique qui a le plus de chances d'être le fil conducteur vers la compréhension des intervalles planétaires. Dieu est architecte et géomètre mais il est aussi surtout musicien, donc il ne peut en être autrement ! Ce Dieu musicien doit donc attribuer à chaque planète une phrase musicale qui lui soit propre puisque, selon la tradition, chaque planète est vivante et douée d'une âme.
Selon Kepler, la vitesse angulaire de chaque planète, dans son mouvement autour du Soleil, mesurée en secondes de degré par jour, fournit le nombre de vibrations de chaque son. Sur une orbite elliptique, la vitesse de chaque planète n'est pas constante et ce son décrit une phrase d'autant plus étendue que l'ellipse de l'orbite est allongée. La note fondamentale correspond à l'aphélie (distance maximale par rapport au Soleil). Kepler arrive ainsi à obtenir les mélodies de base de chacune des planètes, les notes de la Terre pouvant être simplement mi, fa, mi, fa, … Autrement dit : " miseria, famina, miseria, famina … " (indéfiniment). Ce n'est pas là la vision d'un joyeux drille ! Le chant de Mercure est un soprano (sopraniste ? Mercure ?). Celui de Vénus est un contralto et, en continuant ainsi à s'éloigner du Soleil, celui de Mars un ténor léger, et pour les géants Jupiter et Saturne, deux basses profondes. Le résultat de ses travaux harmoniques "Harmonices mundi" est publié en 1619. L'ambitus orbital de Mercure se compose d'une octave plus une tierce : do … do … mi. Vénus répète inlassablement la même note : mi , mi , mi … La Terre se limite à un demi ton : sol , la♭ , sol … Mars donne une quinte : fa , sol , la , si♭ , do … Jupiter se promène sur une tierce grave : si … ré, ainsi que Saturne : fa … la
Quelques années plus tard, Galilée s'attache également à établir un lien entre ses préoccupations astronomiques et ses recherches en matières musicales sous l'influence de son père, Vicenze Galilei (1520-1591). Organiste et compositeur, Vicenze eut Zarlino pour maître ; ses compositions inspirèrent Frescobaldi et Vivaldi.
Marin Mersenne traduit les ouvrages de Galilée et reprend ses travaux sur la vibration des cordes dans son "Harmonie universelle" en 1636. Son intérêt pour l'astronomie le pousse à y inclure des dessins de télescopes afin de réactualiser la question de l'harmonie des sphères.
Par la suite, si le divorce est définitivement consommé entre l'astronomie et l'harmonie, les planètes et les étoiles ont inspiré de nombreux musiciens et des témoignages de l'état des recherches se trouvent souvent traduit en musique. Pour citer quelques exemples, l'oratorio "la Création" de [Joseph_Haydn|Joseph Haydn] est inspiré des travaux de William Herschel qui a émis l'hypothèse d'une explosion originelle de l'univers et des théories d'Emmanuel Kant. " Und es werde licht ! ".
La même démarche est formulée par Jean-Féry Rebel dans "Les Elémens", ne se résolvant pas, en 1737, à admettre la vision d'un monde organisé. (Mais n'y entend-t-on pas, en fait, le monde qui s'organise peu à peu ?)
Les trajectoires apparentes des planètes ont la particularité de traverser toujours les mêmes constellations. Celles-ci traditionnellement au nombre de douze forment le zodiaque En réalité, il conviendrait d'en ajouter une treizième, Ophiuchus (ou serpentaire) que Claude Ptolémée avait répertorié parmi les 48 qu'il recensa dans son Almageste.
La tradition a associé douze instruments de musique à chaque constellation. Sans attendre la Renaissance qui marque l'apogée de l'influence astrale sur l'iconographie musicale, de nombreux indices révèlent les liens puissants unissant le zodiaque et les instruments de musique. La collégiale de Saint-Bonnet-le-Château (près de Saint-Étienne) nous en fournit un exemple. Les voûtes et les murs de la crypte sont décorés de fresques représentant, par leurs signes symboliques, les douze constellations du zodiaque. À chacune d'elle est associé un instrument de musique ou un ange musicien.
L'artiste anonyme a concilié la musique avec le ciel d'hiver. Il harmonise le zodiaque afin que le chant des planètes soit accompagné d'instruments pendant leur ronde cosmique. Ces fresques cachent certainement d'étonnants rébus.