La période qui s'étend de la Renaissance au XVIIe siècle va voir un bouleversement si profond dans sa manière d'appréhender la logique que l'on parle souvent de révolution: la révolution copernicienne. Le système formel, qu'il soit d'ordre mathématique ou plus généralement d'ordre philosophique ne résiste pas au besoin des développements de la science. La construction d'Euclide n'est plus suffisante, la logique mathématique prend alors une nouvelle forme autorisant une part plus grande à l'intuition au détriment du formalisme. La physique au sens moderne du terme apparaît comme une source de savoir qui demande une profonde réforme de pensée à la fois sur l'empirisme (c’est-à-dire sur le rapport à l'expérience) et sur le rôle de la logique formelle qui apparaît de moins en moins comme le bon outil de source de savoir.
Les mathématiques prennent alors une liberté vis à vis du formalisme qui ne fera que grandir. Dès le début du XVIe siècle, Cardano utilise des nombres imaginaires qui ne suivent alors aucun formalisme acceptable dans des calculs intermédiaires. À l'aide de cette méthode, il résout un vieux problème, celui des polynômes de degré 3. Il est alors aisé de justifier le résultat par une vérification a posteriori. Il est à cette époque admis que cette technique n'est pas totalement acceptable, mais qu'importe si elle permet de résoudre de manière juste. Cette approche quitte le formalisme, mais uniquement pour un temps, celui de la recherche de la solution. Ensuite, la solution trouvée respecte parfaitement les postulats d'Euclide. Cette première lézarde dans l'édifice de la logique formelle n'est donc pas si redoutable.
Durant le XVIIe siècle et poussé par les besoins de la physique, le calcul infinitésimal apparaît. Cette branche des mathématiques prolonge les travaux de l'antiquité grecque sur la limite d'une suite ou d'une série. Ces travaux avaient été initiés par des paradoxes comme celui de Zénon ou les premiers résultats qu'avaient établis Archimède pour la quadrature de la parabole. Cette branche des mathématiques traite du calcul de la vitesse, de l'accélération et de manière plus générale du calcul différentiel et intégral.
Suivre un formalisme logique suppose une approche qui s'appuie sur des propositions démontrées sur la base d'axiomes ou de propositions déjà démontrées et avec des règles bien définies. Or le calcul infinitésimal suppose la notion de limite. À cette époque ce concept ne peut être appréhendé qu'à l'aide d'une approche intuitive. Leibniz et Newton proposent alors une notion d'infiniments petits. Cette notion, proche du 0 permet néanmoins des divisions entre eux. alors que le calcul de 0/0 n'est pas défini dans le cadre d'une logique formelle, il devient ici sensé et permet même d'être calculé. La logique mathématique devient donc un mélange d'intuition et de formalisme Euclidien. On peut dire qu'à cette époque, jamais les mathématiques et la logique au sens formel du terme n'ont été aussi éloignées.
Cette démarche est néanmoins trop puissante et démontre des résultats trop importants pour être refusée. La théorie de la gravitation universelle, fruit de ces nouvelles mathématiques, montre le premier exemple de loi physique s'appliquant non seulement sur terre mais aussi dans l'espace. Ce resultat aussi met fin à une vieille polémique sur le fait de savoir si la terre tourne autour du soleil ou l'inverse.
L'absence de formalisation disponible a ainsi poussé les mathématiques à quitter clairement le champ de la logique pure pour admettre des outils que seuls l'intuition autorise mais que la logique condamne.
La révolution en matière de logique touche de manière aussi profonde la philosophie. Cette révolution se situe dans une période correspondant approximativement au même moment que l'évolution de la logique en mathématique.
Au tournant du XVIe siècle Léonard de Vinci est un vivant exemple de la volonté de réforme de la philosophie par une approche logique distincte. Il remet en question la notion de logique formelle au sens d'Aristote comme source de savoir au profit de l'expérience. Son utilisation du mot expérience ne correspond néanmoins pas à l'image moderne que l'on s'en fait mais plus à la notion d'observation. Il écrit dans le codex Atlanticus 119 v-a "Je me rend bien compte que, du fait que je ne suis pas un lettré, certains présomptueux croiront pouvoir me blâmer en alléguant que je suis un ignorant ... Et l'expérience ayant été la maîtresse de ceux qui écrivent bien, je la choisis pour maîtresse et, en tout cas, ferai appel à elle." L'intuition de Vinci va plus loin. Il écrit, dans la deuxième partie de sa vie, que la clé du savoir ne réside pas dans l'analogie mais dans les mathématiques. Il étudie systèmatiquement Euclide dans les années 1497-1499. Il souhaite comprendre le monde à l'aide d'une représentation mathématique correspondant à l'observation. Par exemple Léonard souhaite expliquer les mouvements de la langue "au moyen de [ses] principes mathématiques". Cependant ses faiblesses en mathématiques ne lui permettent pas de bâtir un savoir ayant muté d'un fondement logique provenant de l'Organon à une logique euclidienne. Les éléments de la révolution sont tous là, même si elle ne peut avoir lieu à cette époque par manque de résultats tangibles.
Un siècle plus tard Galilée remet fortement en question le savoir de son temps par son approche du cosmos. Il a utilisé avec succès les mathématiques pour définir les bases de la dynamique. Ces bases permettent par exemple de calculer la trajectoire d'un boulet de canon et sont donc bien accueillies des artilleurs (d'autant que le calcul explique pourquoi c'est toujours l'angle de tir de 45° qui donne la meilleure portée).
Il confronte alors le modèle héliocentrique de Copernic au modèle géocentrique de Ptolémée. Cette démarche semble dans un premier temps s'opposer au contenu de la Bible. De ce fait, Galilée remet en question les fondements du savoir comme l'avait fait trois siècles auparavant Roger Bacon. La techné qu'il utilise à travers la lunettes astronomique de Huygens (qu'il améliore), l'expérience et la modélisation mathématique pourraient ainsi contredire l'Organon, la métaphysique et l'interprétation de la bible. Faute de preuves, la polémique reste ouverte et il est condamné par l'Église. Cependant sa renommée est trop grande pour que cette attaque puisse être considérée comme anecdotique : ses cartes du ciel, utiles pour la navigation, restent utilisées en raison de leur précision.
À la fin du XVIIIe siècle Newton remplace le modèle empirique de rotation de Kepler par une approche qui explique le pourquoi de la rotation par la formule très simple :
F = mm'/d²
L'attitude de l'Eglise change alors du tout au tout : si les planètes elles-mêmes obéissent à des lois, cela ne suppose-t-il pas quelque part un législateur ? Peu à peu - et en citant le chanoine Copernic plus volontiers que Galilée - elle va utiliser cet argument à l'encontre de l'athéisme !
La révolution initialisée à l'époque de Vinci d'une explication du monde utilise toujours la logique aristotélicienne dans ses raisonnements, mais n'est plus fondée sur la Bible : elle bâtit sur l'expérience et l'induction.
Le siècle des lumières considère cette découverte comme un pilier du savoir. Cette démarche fondée sur une nouvelle 'logique' qu'on appelle à l'époque la "raison éclairée de l'homme" est l'approche essentielle de cette philosophie. L'appel à la logique, au sens de l'expérience et aux mathématiques devient fréquent et Dieu commence à être étudié sous un angle différent de celui suggéré par la métaphysique et la Bible.
Kant, dans la Critique de la raison pure et ses cours de Logique, élabore une logique propre à la philosophie critique : la logique transcendentale. Celle-ci n'est pas fondée sur la logique formelle, mais au contraire la fonde.Hegel élabore à son tour une logique dans la Science de la logique (1812) et la première partie de l'Encyclopédie des sciences philosophiques (1817-1830). Il s'agit de la logique dialectique, qui se démarque aussi bien de la logique formelle que de la logique transcendentale.