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Coordonnées | |
Pays | Jordanie |
Région** | États arabes |
Type | Culturel |
Critères | (i) (iii) (iv) |
Numéro d'identification | 326 |
Année d’inscription | 1985 |
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Pétra (de πέτρα petra, « rocher » en grec ancien ; البتراء Al-Butrāʾ en arabe), de son nom sémitique Reqem ou Raqmu (« la Bariolée »), est une ancienne cité troglodytique située dans l'actuelle Jordanie, au cœur d'un bassin bordé par les montagnes qui forment le flanc oriental de l'Arabah (Wadi Araba), grande vallée prolongeant le grand rift vers le nord et qui s'étend de la mer Morte au golfe d'Aqaba.
Créée dans l'Antiquité vers la fin du VIIIe siècle av. J.-C. par les Édomites, elle est ensuite occupée vers le VIe siècle av. J.-C. par les Nabatéens qui la font prospérer grâce à sa position sur la route des caravanes transportant l'encens, les épices et d'autres produits de luxe entre l'Égypte, la Syrie, l'Arabie du Sud et la Méditerranée. Vers le VIIIe siècle, la modification des routes commerciales et les séismes entraînent l'abandon progressif de la ville par ses habitants. Pétra a abrité à son apogée jusqu'à vingt-cinq mille habitants. Tombé dans l'oubli à l'époque moderne, le site est redécouvert par le monde occidental grâce à l'explorateur suisse Jean Louis Burckhardt en 1812.
Les nombreux bâtiments, dont les façades monumentales sont directement taillées dans la roche, en font un ensemble monumental unique qui, depuis le 6 décembre 1985, est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. La zone autour du site est également, depuis 1993, un parc national archéologique.
Pétra est située à mi-chemin entre le golfe d'Aqaba et la mer Morte à une altitude de 800 à 1 396 mètres au-dessus du niveau de la mer, dans un fond de vallée de la région montagneuse d'Édom, à l'est de la vallée de l'Arabah. De nos jours le site de Pétra se trouve à près de 200 km au sud de la capitale jordanienne Amman, soit à environ 3 heures de route.
La situation de Pétra, dissimulée entre des rochers aux parois abruptes et dotée d'un approvisionnement sûr en eau en fait un lieu propice au développement d'une cité prospère. L'endroit n'est accessible que par un étroit sentier montagneux par le nord-ouest ou à l'est par un canyon d'environ 1,5 kilomètre de long et jusqu’à 200 mètres de profondeur, le Sîq, l'accès principal, qui, à son endroit le plus resserré, mesure seulement deux mètres de large.
La présence d'eau et la sécurité apportée par le site ont fait de Pétra une halte naturelle au croisement de plusieurs routes caravanières qui reliaient l'Égypte à la Syrie et l'Arabie du Sud à la Méditerranée, chargées principalement de produits de luxe (épices et soie en provenance d'Inde, ivoire en provenance d'Afrique, perles de la Mer Rouge et encens du sud de l'Arabie). La résine de l'« arbre à encens » (Boswellia) était convoitée dans le monde antique tout entier comme une offrande religieuse particulièrement précieuse, mais également comme médicament.
L'activité commerciale engendrée par les caravanes et les taxes perçues produisaient d'importants profits pour les Nabatéens. De ce fait, la ville abrita du Ve siècle av. J.-C. au IIIe siècle un important marché.
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Pétra étant une ville troglodyte située au milieu d'escarpements rocheux, la pierre est visible partout sur le site. Celle-ci est composée de grès, roche détritique issue de l’agrégation et la cémentation (ou diagenèse) de grains de sable. Il s'agit d'une roche cohérente. Elle est organisée en strates qui offrent parfois des déclinaisons de couleurs chatoyantes (allant du jaune au violet en passant par le rose) renforcées par l'intensité de la lumière, particulièrement en fin d'après-midi.
Pétra est située dans une région à forte sismicité. Elle se trouve à la limite entre deux plaques qui coulissent: la plaque d'Arabie et la plaque d'Afrique. Le 19 mai 363, en 419, 551 et 747, des tremblements de terre ont endommagé la ville et ses monuments.
La nappe phréatique d'eau salée située en dessous de Pétra remonte et dégrade les monuments à leur base.
Aux alentours de Pétra, on peut trouver des roches contenant de la silice, que les Nabatéens ont pu extraire dans des carrières pour faire du béton imperméable.
Ces caractéristiques géologiques particulières ont permis aux habitants de Pétra de se cacher et de se protéger des attaques.
L'eau est nécessaire au développement des activités humaines. Les sources étant peu abondantes dans cette région semi-désertique, c'est l'eau de pluie, environ 150 mm par an (aujourd'hui de 50 à 250 mm), qui assurait l'essentiel des besoins. Les sources seules ne pouvaient fournir de l'eau que pour quelques familles. Les Nabatéens construisirent un système de captage des eaux et de redistribution avec des règles de répartition aux habitants.
Pétra, située dans une cuvette, pouvait récupérer les eaux pluviales d'un bassin de 92 km2 grâce à la relative imperméabilité des roches. Cette faible perméabilité du sol posait néanmoins de nombreux problèmes, comme le déclenchement de crues très puissantes et donc destructrices. En effet, jusqu'à ce qu'il soit dévié au XXe siècle, le cours d'eau du Wadi Moussa (« ruisseau de Moïse ») qui coule depuis la source d'Aïn Moussa (« source de Moïse ») dans le Sîq jusqu’au village de Gaia était à l'origine de crues meurtrières comme en 1963. Il existe aussi un « petit Sîq » qui rejoint le Sîq principal près des tombes royales.
Au Ier siècle, Strabon dira que les habitants de Pétra « ont des sources en abondance, que ce soit pour des fins domestiques ou pour arroser leurs jardins ».
Des installations de collecte et de distribution d'eau destinées à stocker et transporter l'eau en s'affranchissant du relief escarpé sont encore visibles de nos jours, notamment des barrages hydrauliques et des réservoirs à ciel ouvert. Il existait également un important réseau de citernes souterraines. Au nord-est et sud-est de Pétra, les eaux du Sîq coulaient dans des galeries taillées dans la roche et enduites de plâtre imperméable, ou dans un réseau hydraulique en pente douce constitué de tuyaux en terre cuite ou en céramique. Ce réseau alimentait l'aqueduc, les 200 citernes (dont plusieurs sur le mont Umm al-Beira, ou « Mère des citernes »), beaucoup de réservoirs et un nymphaeum, ou fontaine publique. Un réseau de plus gros débit permettait aussi de capter l'eau de source plus éloignée et d'alimenter des quartiers en hauteur. Ces réseaux amenaient environ 40 millions de litres d'eau par jour à Pétra.
Le système de distribution d'eau a été comparé avec celui de Rome à la même époque, lui aussi très avancé, bien que la taille des deux cités fut très différente, Rome étant beaucoup plus peuplée. Il était néanmoins suffisant pour couvrir les besoins de la cité.
L'eau, d'une importance cruciale, constituait également le talon d'Achille de la ville. Ainsi les Romains coupèrent-ils l'aqueduc, lors d'un siège de la ville, afin d'obtenir une reddition plus rapide des habitants.
Le résultat de cette maîtrise de l'eau était, à l'époque, la création d'une véritable oasis artificielle. Seuls des vestiges de ces installations sont encore visibles.
Lorsque la ville était en plein essor, l'eau servait essentiellement à la consommation des habitants et du bétail ainsi que, dans une phase plus tardive, à l'arrosage des jardins.
Des céréales, comme l'orge ou le blé, des arbres fruitiers et des vignes étaient sans doute cultivés à Pétra. Des pressoirs creusés dans des rochers ont été retrouvés, datant probablement de la période de domination romaine qui avait donné au vin une grande importance.
De nos jours, des aménagements agricoles sont visibles autour du site comme des cultures en terrasses dans le secteur de Zurrabeh, créés pour lutter contre l'érosion des sols et obtenir des rendements plus élevés. Depuis l'abandon du site, le manque d'entretien des aménagements hydrauliques a entraîné la destruction de l'essentiel des barrages ; seuls quelques vestiges sont encore visibles, tels qu'un ouvrage dédié à la distribution de l'eau dans le lieu dit des « jardins romains ».
Actuellement, des troupeaux de chèvres noires sont également visibles autour du site de Pétra. Leur domestication est prouvée depuis le néolithique.