Hespérien - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs de cet article est disponible ici.

Introduction

Époques géologiques de Mars selon l'échelle de Hartmann & Neukum, l'Hespérien correspondant aux dates comprises entre 3,7 et 3,2 milliards d'années avant le présent.

Sur l'échelle des temps géologiques martiens, l'Hespérien désigne les époques comprises entre 3,7 et 3,2 milliards d'années avant le présent selon l'échelle de Hartmann & Neukum, mais entre 3,5 et seulement 1,8 milliards d'années selon l'échelle de Hartmann standard. Très sensiblement moins cratérisés que les terrains noachiens, les sols hespériens sont caractérisés par l'abondance des matéraux d'origine volcaniques, roches ignées et cendres volcaniques notamment. C'est la deuxième des trois époques (ou le deuxième éon) de la géologie martienne — la suivante est l'Amazonien, caractérisé par l'oxydation anhydre du fer à la surface de la planète.

Géographie et morphologie

Les terrains hespériens se situent principalement dans les régions volcaniques à l'interface entre les hautes terres noachiennes de l'hémisphère sud et les basses plaines amazoniennnes de l'hémisphère nord, ainsi qu'au fond des bassins d'Hellas et d'Argyre.

La principale région volcanique martienne est le renflement de Tharsis et, au sud et à l'est de celui-ci, la région de hauts plateaux de Daedalia, Syria, Icaria, Solis, Bosporos, Haumasia et Sinai ; ce haut plateau est profondément entaillé par le système de canyons de Valles Marineris, au nord duquel il se prolonge par des plaines volcaniques plus basses (et plus anciennes), Lunae et Ophir. Cette région, géologiquement la plus complexe de la planète, est entourée au sud et à l'ouest par des relèvements qui comptent parmi les plus spectaculaires formations d'origine tectonique sur Mars.

Plus à l'ouest, au-delà d'Amazonis Planitia, s'étend Elysium Planitia, deuxième plus importante formation volcanique de la planète, au nord de Terra Cimmeria. Au sud-ouest de cette région, en direction d'Hellas Planitia, se trouve Hesperia Planum, qui a donné son nom à l'éon, et, au-delà d'Hellas, Malea Planum, qui s'étire jusqu'à Sisyphi Planum. Enfin, à l'ouest d'Isidis Planitia se trouve Syrtis Major Planum.

Comme sur Terre, les volcans martiens se répartissent en deux grandes catégories : effusifs et explosifs. Les premiers sont de nature basaltique et forment les volcans boucliers gigantesques qui sont une caractéristique de la planète : Alba Mons et Olympus Mons, sur le renflement de Tharsis, comptent ainsi parmi les plus grandes structures de ce type dans le système solaire. Les seconds sont caractérisés par des laves visqueuses à tendance explosive dont les éruptions libèrent de grandes quantités de cendres qui s'accumulent en formant un dôme appelé tholus : c'est le cas, par exemple, de Ceraunius Tholus et d'Uranius Tholus, voisins d'Uranius Patera, un volcan semble-t-il contemporain d'Alba Mons mais dont le sommet paraît avoir explosé à la suite d'une éruption plinienne, laissant une caldeira très vaste par rapport à l'édifice volcanique.

Certaines régions présentent une morphologie évoquant un volcanisme fissural, notamment Syrtis Major Planum et surtout Hesperia Planum, avec des pentes particulièrement faibles et un système de caldeiras s'étirant dans une direction privilégiée.

Mars à l'Hespérien

Impacts météoritiques

La fréquence et la taille des impacts météoritique se seraient sensiblement réduites à l'Hespérien par rapport au Noachien. Les sols hespériens sont ainsi nettement moins cratérisés que les terrains noachiens, par exemple sur les flancs d'Alba Mons ou sur ceux de Tyrrhena Patera, deux structures a priori assez anciennes et situées pratiquement aux antipodes l'une de l'autre.

Volcanisme

La discontinuité entre Phyllosien et Theiikien, qui coïnciderait plus ou moins avec les débuts de l'hypothétique « grand bombardement tardif » (LHB en anglais), matérialiserait en fait l'époque d'activité volcanique maximum, qui se prolongerait au Theiikien — et donc à l'Hespérien — en disparaissant progressivement au fur et à mesure que la planète aurait perdu l'essentiel de son activité interne. Une corrélation entre le volcanisme de l'Hespérien et les impacts cosmiques du Noachien n'est d'ailleurs pas à exclure. Ce volcanisme aurait atteint son maximum à la suite des impacts cosmiques massifs à la fin de l'éon précédent, et chacune des cinq régions volcaniques de la planète jouxte directement un bassin d'impact :

  • le renflement de Tharsis, plus grande formation volcanique martienne, en bordure de l'hypothétique bassin boréal, plus grand bassin d'impact de la planète (et du système solaire), le bouclier d'Alba Mons étant, de surcroît, situé exactement aux antipodes d'Hellas Planitia
  • Malea Planum, en bordure sud-ouest d'Hellas Planitia, et Hesperia Planum en bordure nord-est, cette dernière région étant également voisine des antipodes de Chryse Planitia
  • Syrtis Major Planum, en bordure d'Isidis Planitia.

Parmi ces volcans, Alba Mons compte peut-être parmi les plus anciens. Il s'agit d'une structure de 1 600 km de diamètre, plus large qu'Olympus Mons mais nettement moins élevée que ce dernier, culminant à environ 6 600 m d'altitude. Il présente des traces d'érosion rappelant celles laissées par les pluies sur les volcans hawaïens, et sa caldeira couverte de poussières lui donnent un aspect plutôt ancien. Les coulées de lave semblent à la fois fines et longues, témoignant d'une grande fluidité, avec très peu de cendres. Ce volcan s'est peut-être formé au Noachien, suite à l'impact à l'origine du bassin d'Hellas Planitia, mais son activité se serait surtout concentrée au milieu de l'Hespérien en se prolongeant au début de l'Amazonien. De l'autre côté de la planète, les plateaux volcaniques de Malea, d'Hesperia et de Syrtis Major se seraient formés à la même époque qu'Alba Mons.

Les autres volcans de Tharsis, et notamment Olympus Mons, ainsi que d'Elysium, seraient un peu plus tardifs et auraient été actifs de l'Hespérien à l'Amazonien, jusqu'à parfois des époques très récentes — seulement quelques centaines de millions d'années avant le présent pour certaines parties de leurs caldeiras.

Le tableau ci-dessous présente une synthèse synoptique des principaux volcans martiens et de la datation de leur formation lorsqu'elle a pu être déterminée à l'aide du taux de cratérisation relevé sur leurs différentes surfaces ; ces dates, lorsqu'elles sont estimées, se rapportent aux plus anciens terrains identifiés à la surface de chacun des volcans, ceux-ci s'étant nécessairement formés plus tôt, de sorte qu'il ne peut s'agir que d'une borne inférieure à l'âge de ces volcans — ce que traduit le signe « ≥ » :

  Volcan Type Coordonnées Altitude Âge   Localisation
  Alba Mons Bouclier 40,5° N et 250,4° E ~ 6 600 m   3,50 Ga     Marge nord-ouest du renflement de Tharsis.
  Uranius Tholus Tholus 26,1° N et 262,3° E ~ 4 500 m   4,04 Ga     Groupe d'Uranius, nord du renflement de Tharsis.
  Ceraunius Tholus   Tholus 24,0° N et 262,6° E ~ 8 250 m   3,75 Ga  
  Uranius Patera Patera 26,0° N et 267,0° E ~ 6 500 m   3,70 Ga  
  Olympus Mons Bouclier 18,4° N et 226,0° E 21 229 m   3,83 Ga     Point culminant de Mars, ouest du renflement de Tharsis.
  Tharsis Tholus Tholus 13,4° N et 269,2° E ~ 8 750 m   3,71 Ga     Volcan isolé au centre du renflement de Tharsis.
  Jovis Tholus Tholus 18,2° N et 242,5° E ~ 3 000 m   3,70 Ga     Nord-ouest du renflement de Tharsis.
  Ulysses Tholus Tholus 2,9° N et 239,4° E ~ 5 500 m   3,92 Ga     Ouest du renflement de Tharsis.
  Biblis Tholus Tholus 2,7° N et 235,4° E ~ 7 000 m   3,68 Ga  
  Ascraeus Mons Bouclier 11,8° N et 255,5° E 18 225 m   3,60 Ga     Tharsis Montes, centre du renflement de Tharsis.
  Pavonis Mons Bouclier 0,8° N et 246,6° E 14 058 m   3,56 Ga  
  Arsia Mons Bouclier 8,4° S et 238,9° E 17 761 m   3,54 Ga  
  Apollinaris Mons Stratovolcan 9,3° S et 174,4° E ~ 3 250 m   3,81 Ga     Volcan isolé à l'extrême sud-est d'Elysium Planitia.
  Elysium Mons Gris 24,8° N et 146,9° E 14 028 m   3,65 Ga     Groupe principal au nord-ouest d'Elysium Planitia.
  Hecates Tholus Gris 32,1° N et 150,2° E ~ 4 500 m   3,40 Ga  
  Albor Tholus Gris 18,8° N et 150,4° E ~ 3 750 m   2,16 Ga  
  Syrtis Major Fissure 7,9° N et 67,9° E ~ 2 000 m   3,75 Ga     Plateau de Syrtis Major Planum.
  Tyrrhena Patera Fissure 21,1° S et 106,5° E ~ 3 000 m   3,98 Ga     Centre ouest d'Hesperia Planum.
  Hadriacus Mons Bouclier 32,1° S et 91,8° E ~ -250 m   3,90 Ga     Aux confins d'Hellas Planitia et d'Hesperia Planum.
  Amphitrites Patera Bouclier 58,7° S et 60,9° E ~ 1 700 m   3,75 Ga     Malea Planum, au sud-ouest d'Hellas Planitia.
  Peneus Patera Bouclier 57,8° S et 52,5° E ~ 1 000 m   n. d.
  Malea Patera Bouclier 63,4° S et 51,9°& E ~ 0 m   n. d.
  Pityusa Patera Bouclier 66,8° S et 36,9°& E ~ 2 000 m   n. d.
Identification et âge des principaux volcans martiens.

En libérant d'importantes quantités de dioxyde de soufre SO2 dans l'atmosphère de Mars, l'activité volcanique soutenue de l'Hespérien serait à l'origine des sulfates hydratés, notamment de la kiesérite MgSO4•H2O et du gypse CaSO4•2H2O, qu'on retrouve dans les dépôts sédimentaires de cette époque, et qui sont à l'origine du nom — le « Theiikien » — de l'éon stratigraphique correspondant à l'Hespérien.

Champ magnétique global et tectonique

Le champ magnétique rémanent de l'écorce martienne mesuré par Mars Global Surveyor montre que seules les régions les plus anciennes de la planète témoignent encore d'un paléomagnétisme significatif: les bassins d'Utopia, d'Hellas et d'Argyre sont ainsi totalement dépourvus de champ magnétique, ainsi que les grands massifs volcaniques de Tharsis et d'Elysium ; la région de Malea Planum est également amagnétique. En revanche, certaines régions hespériennes sont encore magnétisées : c'est ainsi le cas de Syrtis Majors Planum et d'Hesperia Planum, qui présentent d'ailleurs la même polarité. Ces différentes observations mènent à la conclusion que Mars avait perdu son champ magnétique global il y a au moins 3,8 milliards d'années, lors de la formation des grands bassins d'impact noachiens, raison pour laquelle ceux-ci son amagnétiques. La présence d'une magnétisation autour de Syrtis Majors et d'Hesperia pourrait être celle de terrains noachiens sous-jacents enfouis sous les matériaux hespériens.

Les hauts plateaux prolongeant le renflement de Tharsis vers le sud et l'est sont également magnétisés dans leur moitié sud, au niveau de Solis Planum et d'Haumasia Planum, appuyant leur interprétation comme une formation d'origine tectonique — la seule de cette ampleur sur Mars — issue d'un soulèvement et d'une translation (avec rotation dans le sens inverse des aiguilles d'une montre) peut-être provoqués par le même panache mantellique à l'origine des points chauds de Tharsis, des boursouflures de Syria Planum et des failles de Noctis Labyrinthus s'élargissant en Valles Marineris.

Atmosphère et hydrosphère

On estime que Mars devait posséder, au Noachien, une atmosphère plus dense et plus chaude qu'aujourd'hui, exerçant une pression au sol plusieurs centaines de fois supérieure à la pression actuelle. Une fraction importante de cette atmosphère aurait été soufflée dans l'espace lors des impacts d'astéroïdes du grand bombardement tardif, daté de la fin du Noachien, entre 4,1 et 3,8 milliards d'années avant le présent. Selon une théorie plutôt bien acceptée, ces impacts auraient « éteint » le champ magnétique global de Mars en réchauffant le manteau au point d'annuler le gradient thermique à l'origine des mouvements de convection au sein de la phase liquide du noyau, supposés être à l'origine du champ magnétique par effet dynamo.

La disparition de la magnétosphère aurait conduit à l'érosion progressive de l'atmosphère de Mars par le vent solaire, entraînant une lente baisse de la pression et de la température au sol. Ceci expliquerait la nature très différente des traces laissées par l'eau liquide sur les sols hespériens par rapport aux terraines noachiens : au lieu d'une multitude de lits de cours d'eau asséchés évoquant des bassins fluviaux au Noachien, on trouve plutôt à l'Hespérien de grandes structures éparses témoignant de coulées de boue catastrophiques souvent associées directement à une région volcanique. L'océan boréal, dont l'existence au Noachien est conjecturée depuis une vingtaine d'années, aurait cessé d'exister dès le début de l'Hespérien.

Tant que la pression atmosphérique est suffisante, l'eau liquide est susceptible d'exister à des températures très inférieures à °C, notamment lorsqu'elle contient des chlorures ou de l'acide sulfurique H2SO4 — l'eutectique du mélange H2SO4•2H2O – H2SO4•3H2O gèle ainsi un peu en-dessous de -20 °C, et celui du mélange H2SO4•6,5H2O – H2O gèle autour de 210 K, température légèrement inférieure à -60 °C, qui est la température moyenne actuelle sur Mars. La baisse progressive de la pression au sol aurait néanmoins conduit la majeure partie de l'eau martienne à s'évaporer et à se dissiper dans l'espace sous l'effet du vent solaire, de la dissociation photochimique par le rayonnement ultraviolet du Soleil, et de la faible gravité martienne.

Page générée en 0.142 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales | Partenaire: HD-Numérique
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise