Rhône - Définition

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Histoire du Rhône

Le Rhône est le seul fleuve reliant la Méditerranée à l’Europe du Nord. Il constitue depuis les Rhodiens et les Phéniciens un axe majeur de circulation des populations et des marchandises. Élément structurant dans l'organisation des territoires, le Rhône conduit aussi les hommes à se surpasser pour le dompter et surtout le traverser.

On trouve ainsi des traces d’occupation dès la préhistoire. Dès l’Antiquité, l’étain, le cuivre ou les peaux du nord sont échangées contre des productions de l’Orient et de la Méditerranée (ivoire, épices, étoffes, etc.).

En août 218 av. J.-C., Hannibal traverse le Rhône avec son armée de 80000 hommes et 37 éléphants dans le but de traverser les Alpes. L’armée romaine sous les ordres de Scipion étant toute proche sur la rive gauche du fleuve, il préfère remonter le long du fleuve à vive allure pendant 4 jours pour l’éviter et ainsi affronter l’ennemi en Italie, sur son territoire.

À l’époque romaine, il devient une voie de développement commercial. Plus tard, le vin, la vaisselle et le sel d'une part, les armes et les étoffes d’autre part empruntent en sens inverse le sillon rhodanien. La présence du fleuve permet le développement des villes comme Arles, Avignon ou Vienne qui profitent de leur atout géographique à la croisée du Rhône et des axes de communication terrestres et maritimes. Les franchissements du fleuve participent également de manière déterminante à l’histoire des villes et des territoires. Ces ponts, des ponts romains jusqu’aux ponts actuels, sont également un formidable moteur d’évolution et de progrès technique.

Morphologie et dynamique fluviale

Le Lac Léman induit une coupure totale entre le Haut-Rhône et le Rhône aval en matière de charge sédimentaire.

Rhône en amont du Léman

Cours du Rhône en amont du Léman

Le Rhône prend sa source dans le massif du Saint-Gothard, dans les Alpes. Il naît de la fonte du glacier du Rhône. Il emprunte une longue vallée étroite dans le Valais pour rejoindre le lac Léman à la hauteur de la commune du Bouveret. Entre sa source et le lac, le Rhône reçoit les eaux d'environ 200 torrents.

Dans sa partie située en Suisse, le Rhône a subi de nombreux aménagements visant à maîtriser son cours et diminuer les effets néfastes de ses crues ; ces travaux entrepris dès 1863 ne sont toujours pas terminés aujourd'hui.

Rhône à l'aval du lac Léman

La diversité du bassin se répercute sur les conditions de production et d’alimentation du Rhône en charge sédimentaire : diversité géologique du bassin, héritage des formations glaciaires, conditions morphoclimatiques contrastées de dégradation des bassins… L’aménagement du Rhône confié à la CNR pour les besoins de la navigation et de la production hydroélectrique a été presque mené à son terme. Seuls demeurent à courant libre le court tronçon de part et d’autre du confluent de l’Ain (abandon du projet d’aménagement de Loyette) et le Rhône à l’aval de Beaucaire. La succession de 20 aménagements a totalement remodelé le Rhône sur le reste du linéaire.

Les caractères morphologiques généraux

Rhone structure morpho.jpg

La dynamique fluviale naturelle du Rhône et de ses affluents, et la structure des pentes qui en est l'image, est fortement marquée par l'héritage des dernières glaciations.

En amont, jusqu'à Lyon pour le Rhône (et Valence pour l'Isère), les glaciers quaternaires (dernier maximum glaciaire il y a environ 18000 ans) ont laissé des alternances de zones surcreusées (les ombilics) et de zones proéminentes (les verrous). Les ombilics sont occupés par des lacs glaciaires lorsqu'ils étaient situés à l'écart des cours d'eau principaux capables de les réalluvionner (lac d'Annecy, lac du Bourget). En revanche, s'ils étaient situés sur un axe d'écoulement majeur, ils ont été alluvionnés en tout ou partie, mais sans que la continuité du transit des graviers ait pu toujours être rétablie : le Lac Léman n'est que très partiellement alluvionné par le Haut-Rhône, la plaine de Brangue-Le Bouchage, en amont de Lyon, est alluvionnée, mais la pente y était encore faible (zone de marais).

En aval, la remontée rapide du niveau marin à la fin de la dernière glaciation il y a quelque 10000 ans (remontée de 120m : transgression flandrienne) a forcé le fleuve à déposer ses alluvions (formation de la Camargue) : les graviers n'arrivaient toujours pas jusqu'à la mer, et se déposaient à l'entrée du delta. La plupart des affluents ont eu du mal à suivre la remontée du niveau du fleuve : ils déposent leurs alluvions grossières à l'entrée de la plaine du Rhône et se terminent par un lit à méandres mobiles (Ouvèze, Aygues, Ardèche, Cèze, Gardon).

Entre ces deux secteurs, le Rhône montre un profil plus ou moins lissé avec une faible épaisseur d'alluvions, un substratum proche et des pentes relativement fortes.

La structure des pentes

Rhone structure pente.jpg

Le Haut-Rhône présente une décroissance globale de la pente (à l’exception d’un secteur de gorges non pertinent pour l’analyse d’ensemble) associée à une tendance à l’alluvionnement du lit et à la réduction de la charge de fond, jusqu’à interruption de celle-ci entre le Guiers et Sault-Brenaz (pente descendant localement au-dessous de 0.2‰). Les apports de l’Ain et une recharge sédimentaire dans les terrasses würmiennes favorise une forte activité en amont de Lyon associée à une forte pente (0.8‰). Une tendance à l’alluvionnement à l’entrée de Lyon et les apports liquides de la Saône conduisent à une pente plus faible sur le tiers amont du Bas-Rhône. Le tiers central est caractérisé par une pente forte (supérieure à 0.8‰ localement) associée à de fréquents affleurements rocheux, mais qui ne font pas seuil : on est là à la limite de la pente structurale (imposée par le cadre structural et non par l’équilibre entre transits solide et liquide : « transport passif ») et d’une pente morphologique (lit librement divaguant formé d’alluvions, en échange permanent avec le transport par charriage : « transport actif »). La pente diminue ensuite régulièrement jusqu’au delta.

Apports grossiers et apports fins

Dynamique sédimentaire du Rhône : généralités

Le transit sédimentaire couvre une large gamme de matériaux. On distingue classiquement deux modes de transport : le transport par charriage sur le fond des alluvions grossières et le transport en suspension des sédiments fins.

Lorsqu’il s’agit de comprendre les évolutions morphologiques du Rhône, la distinction charriage / suspension est fondamentale. La transition entre les deux modes de transport se situe en général dans les sables plutôt grossiers (entre 200µm et 1mm). Sur tout le cours du Rhône, c’étaient les graviers et galets qui, avant les grands aménagements, constituaient le transit sédimentaire « actif », c’est-à-dire qui façonnait le lit du fleuve. Les sédiments fins (limons et sables) transportés en suspension jouaient un rôle secondaire dans les marges alluviales.

Les graviers et galets n’atteignaient pas la mer : ils contribuaient à l’alluvionnement à l’entrée du delta. Les apports de graviers sont aujourd’hui insignifiants.

Les limons et argiles sont emportés loin des côtes et contribuent à la sédimentation pélagique.

En définitive, seuls les sables jouent un rôle actif dans la dynamique sédimentaire du littoral. Les sables qui participent à la dynamique du littoral sont transportés en suspension dans le Rhône, y compris dans la partie deltaïque.

Dynamique sédimentaire du Rhône : l'exemple du Valentinois
La plaine de Valence

Le trait dominant de la plaine de Valence est une surface déprimée, encadrée au nord, à l’est et au sud par des collines ou lambeaux de plateaux surtout molassiques, de formes et de hauteurs modérées (200 à 300m).

Le fond molassique Miocène fut recouvert par les alluvions fluvio-glaciaires de l’Isère, dont les terrasses marquent aujourd’hui encore la forme de la plaine, et les dépôts périglaciaires des rivières descendant du massif du Vercors et formant des cônes de déjection entre les buttes molassiques. Plus au sud, les dépôts périglaciaires abondants de la Drôme formèrent, à la confluence, une vaste plaine alluviale en éventail qui rejeta progressivement le cours du Rhône au pied des versants ardéchois.

Le Rhône apporta ses propres alluvions : par endroits, l’élargissement de son lit fluvial est propice aux accumulations sédimentaires. Le fleuve a naturellement tendance, sur sa basse plaine, à divaguer. Sa pente longitudinale assez forte engendre des vitesses d’écoulement importantes. L’Isère, à quelques kilomètres en amont de Valence, lui apporte près du quart de ce que roule déjà le fleuve. Ajouté aux eaux torrentielles de ces affluents en période de pluie ou de fonte des neiges, ce Rhône puissant peut devenir énorme et sauvage.

Les facteurs de perturbation de la dynamique fluviale

Les aménagements pour la navigation

A partir du milieu du XVIIIe siècle, des endiguements insubmersibles sont construits par les riverains. Ils restent cependant peu nombreux jusque vers 1840. A la suite des graves inondations de 1840 est créé le « Service spécial du Rhône ». A cette date débute la construction systématique de digues insubmersibles dans la plaine d’inondation.

En parallèle, un principe d’aménagement du chenal est adopté pour améliorer les conditions de navigation selon un tracé sinusoïdal à grand rayon de courbure. Des digues submersibles sont construites le long des rives concaves. Le barrage systématique des bras secondaires est engagé. Parfois, le double objectif de protection des terres et de fixation du chenal navigable conduit à des digues insubmersibles, comme à Pierre-Bénite.

La loi de 1878 déclare d’utilité publique « les travaux d’amélioration du Rhône entre Lyon et la mer ». Les aménagements connaissent alors une expansion rapide.

Girardon (1884) révolutionne les conceptions de l’aménagement à courant libre. Il modifie l’utilisation des épis plongeants et noyés, des seuils de fond, des tenons et des traverses selon une méthode qui sera appliquée sur le Rhône aval avec succès [in Poinsart, 1992]. Les « casiers » résultent de l’association systématique des tenons aux digues basses. L’objectif est de tendre vers un chenal de 150 m de large en général, avec une profondeur d’eau d’1 m 60 sous l’étiage conventionnel.

En 1938, l’aménagement du Rhône à courant libre est à peu près systématique entre Lyon et Arles. Le tressage a disparu au profit d’un lit unique sans latitude de divagation, muni d’annexes hydrauliques de plus en plus déconnectées.

Durant les années 1980, la CNR réalisa le Canal de Savières afin de permettre la navigation entre le Lac du Bourget (qui est le plus grand lac naturel de France) et le Rhône. Le niveau du canal du Haut-Rhône est monté de 4 m et une écluse a été construite pour permettre le passage des bateaux. Un barrage fut érigé pour régulariser le niveau de l'eau afin d'accueillir ce nouveau canal long de 4500 m.

L’aménagement CNR

Dès 1899, l’aménagement de Miribel-Jonage (barrage de Jons et usine de Cusset) constitue la première exploitation du Rhône pour l’hydroélectricité.

La CNR est créée en 1934. L’aménagement général du Rhône par la CNR a débuté en 1950 avec la mise en eau de Génissiat. Il s’agit du seul barrage de haute chute du Rhône. L’aménagement a porté ensuite dans les années 1950/1960 sur la partie centrale du Bas-Rhône (chute de Donzère-Mondragon). Il s’est poursuivi dans les années 1970 par l’aménagement des tiers aval et amont du Bas-Rhône, puis dans les années 1980 par l’aménagement du Haut-Rhône.

A l’exception de Génissiat, il s’agit d’ouvrages de basses chutes, entièrement effaçables, associés (sauf sur Seyssel et Vaugris) à des dérivations. Le débit dérivé varie de 700 m³.s-1 sur le Haut-Rhône à 2200 m³.s-1 sur le Bas-Rhône aval. Il est en moyenne 1,5 fois supérieur au module.

L’aménagement du Rhône pour la production hydroélectrique et la navigation concerne ainsi la quasi-totalité du linéaire : seul le tronçon entre Sault-Brenaz et Lyon (avec l’abandon du projet de chute de Loyette) et l’aval de Vallabrègues jusqu’à la Camargue ne sont pas concernés.

L’impact de ces aménagements sur le transit des graviers est lié à deux grands facteurs : la perturbation du régime des pentes dans les retenues et la perturbation du régime des débits dans les tronçons court-circuités.

Dans la retenue

Dans les retenues, la pente est nulle ou faible pour tous les débits ordinaires et les crues annuelles. Il n’y a que pour les crues exceptionnelles que la pente tend vers la pente naturelle.

Or la capacité de transport diminue rapidement avec la pente. D’une manière générale, une réduction de 25% de la pente conduit à un transit de graviers 5 fois moindre. Une pente égale à la moitié de la pente naturelle correspond pratiquement à une pente de non transport : le débit de début d’entraînement est en effet plus que triplé : il correspond alors à un débit dépassé 1 jour tous les 10 ans en général.

Au droit du barrage

Lorsque le débit du Rhône dépasse le débit nominal de la dérivation, les vannes du barrage sont progressivement ouvertes. L’ouverture des vannes de fond permet la chasse des matériaux déposés à l’amont immédiat du barrage.

Cependant, tant qu’il demeure une perte de charge au barrage, la pente amont est inférieure à la pente naturelle, et ne permet qu’un transit partiel des graviers jusqu’au barrage. L’ouverture des vannes de fond permet l’évacuation des sédiments accumulés devant le barrage, mais pas le transit de toute la charge de fond amont.

Ce n’est que lorsque la perte de charge au barrage devient négligeable que l’on peut véritablement parler de transparence totale. La crue assure alors non seulement le transit des apports d’amont, mais également la reprise d’une partie de la sédimentation de la retenue. Cette transparence totale n’est assurée qu’à partir de la crue centennale.

Dans le Vieux Rhône court-circuité

A peu de choses près, on peut considérer que le débit dérivé est constant (en réalité, le débit dérivé est le plus souvent un peu diminué pendant les fortes crues), sauf incident dans le fonctionnement du barrage. La majeure partie du temps, il ne reste dans le Vieux Rhône que le « débit réservé », incapable de transporter des sédiments.

La fréquence des débits morphologiquement actifs est donc fortement diminuée, ce qui réduit d’autant la capacité de transport dans les RCC (Rhône court-circuité).

Les hautes eaux jusqu’à la crue annuelle assuraient avant aménagement près de 98% du transit des graviers. Sur l'aménagement de Chautagne (Haut-Rhône), la gamme de débit correspondant à des fréquences de 20 à 130 jours par an (entre 400 et 700 m³.s-1 avant aménagement) assurait le transit de 75% du transit total. Avec la dérivation de 700 m³.s-1, le Vieux Rhône est aujourd’hui au débit réservé (morphologiquement totalement inefficace) pour cette gamme de fréquence. Il n’y a que pour les débits rares (au-dessus de 900 m³.s-1 dans le Vieux Rhône, c’est-à-dire 1 jour tous les 3 ans) que le transit des graviers est peu perturbé. Mais ces débits sont peu efficaces en termes de bilan annuel. Au total, seul 1% de la capacité de transport naturelle est conservée dans le Vieux Rhône !

Sur Donzère-Mondragon (Bas-Rhône), la dérivation (1980 m³.s-1) est proportionnellement plus faible qu’à Chautagne. L’effet de réduction des débits est donc moindre, mais les incidences restent qualitativement similaires. La capacité de transport résiduelle couvre 6% de la capacité naturelle.

Les extractions de granulats
Extractions de matériaux alluvionnaires sur le Rhône et ses affluents

Les mouvements de matériaux sur le Rhône résultent des différents modes de gestion des sédiments mis en œuvre sur le fleuve et ses affluents. D’une façon générale, ils se traduisent, soit par des extractions de matériaux grossiers lorsque leur valorisation économique le permet (il s’agit alors de graviers, du sable grossier jusqu’au galet), soit par des déplacements sans extraction, d’un lieu à un autre du lit, de matériaux fins (des sables fins jusqu’aux argiles en passant par les limons). Les matériaux extraits correspondent au matériau participant au transport par charriage, alors que les matériaux fins remobilisés correspondent au type de matériaux participant au transport par suspension.

En dehors des raisons d’entretien du lit, les extractions de matériaux ont été historiquement motivées par des besoins économiques liés à la réalisation des aménagements du Rhône, des infrastructures routières, et plus récemment des plateformes des centrales EDF ou des remblais TGV.

Aujourd’hui, les mouvements de matériaux, extractions ou remobilisation répondent à un besoin de gestion du lit du Rhône pour les besoins propres :

  • à la navigation (maintien d’un chenal navigable pour un gabarit donné)
  • à l’entretien des ouvrages (barrages, vannes, écluses, etc.),
  • à l’exploitation électrique (dragages énergétiques à la restitution),
  • à la protection contre les crues (partie aval des affluents)
  • à l’entretien du lit des RCC (décapage des bancs, charruage).

Volume moyen annuel de graviers extraits sur tout le Rhône en aval du Léman dans le lit mineur : 900000 m³.an-1.

Volume moyen annuel de matériaux fins remobilisés dans le lit mineur : 1100000 m³.an-1.

Fonctionnement actuel du Rhône

Transit sédimentaire en suspension
Transit naturel et actuel par suspension
Transit en suspension naturel

Le transit en suspension est rapide. Il faut compter moins de 24h de transit en moyenne pour 100km. Les effets de dépôt / reprise sont relativement marginaux (sauf naturellement dans les grands réservoirs naturels – le Léman… – ou artificiels). En fonctionnement naturel, les dépôts dans les marges boisées (qui peuvent atteindre plusieurs décimètres au cours d’une crue) sont régulièrement repris par le fleuve par érosion de ces marges lors des divagations du bras vif. La faible mobilité actuelle du Rhône favorise un exhaussement irréversible de ces marges, ainsi qu’une réduction de la largeur du lit principal dans les retenues. Mais l’endiguement du fleuve limite la largeur sur laquelle s’appliquent ces évolutions, et donc les volumes concernés. Dans ces conditions, les apports du Rhône à la Camargue sont directement issus de la production du bassin versant. Il en résulte que les évolutions du bassin versant influent rapidement et directement sur les apports en suspension.

Le transit naturel a pu être estimé à 20 millions de tonnes par an dans les années 1950. Il est possible que le transit ait atteint 30 millions de tonnes par an au début du XXe siècle, au moment du maximum démographique dans les Alpes, qui avait favorisé un fort déboisement des versants.

Transit actuel

Les apports du bassin versant n'ont pas changé de façon significative depuis le milieu du XXe siècle: l'état des versants, le développement des zones de ravinement et le fonctionnement des torrents ont peu évolué. En revanche, les grands barrages piègent des volumes significatifs de sédiments fins : Vouglans sur l'Ain, Génissiat sur le Rhône, Serre-Ponçon sur la Durance, Tignes sur l'Isère, le Sautet et Monteynard sur le Drac, Sainte-Croix sur le Verdon, etc. La fixation du lit du Rhône et de certains de ses affluents a favorisé également la sédimentation dans les marges alluviales. On peut estimer les apports actuels à 10 millions de tonnes par an.

Transit sédimentaire par charriage
Charriage naturel et actuel
Transit naturel avant aménagements

Au contraire, le transit par charriage est beaucoup plus lent. Pour fixer les idées, le temps de transit est de plusieurs décennies pour 100km. La continuité du transit par charriage avant les grandes perturbations dues aux aménagements hydroélectriques et aux extractions est une hypothèse de travail satisfaisante sur beaucoup de tronçons de longueur modérée, où les variations en altitude du lit sont négligeables à l’échelle humaine. En revanche, même avant les grands travaux pour la navigation et la production hydroélectrique, il n’y avait pas continuité du transit des graviers à l’échelle d’un bassin comme celui du Rhône. Les délais depuis la dernière glaciation (de l’ordre de 15000 ans) ont en effet été insuffisants pour que les profils en long sur une telle échelle aient atteints un équilibre assurant la continuité du transit. Avant aménagement, la continuité du transit était ainsi interrompue sur le Rhône en amont de Sault-Brenaz, et réduite de manière très importante à l’amont de Lyon, ainsi qu’en Chautagne. Il en était de même dans la partie aval de plusieurs affluents (Isère, Eygues, Ouvèze, etc.). D’amont en aval, on avait avant aménagement les ordres de grandeur suivants :

  • à l’aval du lac Léman, les apports étaient assurés principalement par l’Arve (100000 à 150000 m³.an-1)
  • ces apports, complétés par ceux des Usses et du Fier, se déposaient progressivement, tandis que la pente diminuait de 1 ‰ à 0.2 ‰ : le transit était nul à Sault-Brenaz.
  • à l’amont de Lyon, la reprise des dépôts morainiques (glaciaires) et les apports de l’Ain favorisait une pente forte avec un transit soutenu (100000 m³.an-1). La majeure partie de ce transit se déposait à l’entrée de Lyon, dans le secteur de divagation de Miribel. Le transit ne devait pas dépasser 30000 m³.an-1 à l’aval de Lyon.
  • sur le Bas-Rhône, le transit reprenait progressivement à la faveur des apports des affluents, pour atteindre un maximum de l’ordre de 400000 m³.an-1 à l’aval de la Durance.
Transit actuel

Le transit des graviers a été totalement bouleversé au cours du XXe siècle:

  • les apports de la plupart des affluents se sont taris, en raison des aménagements et interventions dont ils ont fait l'objet : barrages, dérivations, extractions). La Durance, l'Arve, le Fier, qui apportaient des volumes importants au Rhône, ne charrient plus guère de graviers dans leur partie terminale.
  • sur le Rhône, des extractions importantes ont eu également lieu, et ont laissé des fosses d'extraction importantes.
  • de toute façon, le Rhône aurait été aujourd'hui incapable de transporter les apports naturels : pentes trop faibles dans les retenues, débits trop réduits dans les tronçons court-circuités.

Au total, on arrive paradoxalement à un nouvel "équilibre" : presque pas d'apports, presque pas de transport.

Le transit de graviers ne dépasse guère quelques milliers de m³.an-1 sur la plupart des tronçons, avec un maximum de quelques dizaines de milliers de m³.an-1 entre la Drôme et l'Ardèche.

Dynamique du lit
Evolution en plan du lit du Rhône entre Donzère et Mondragon
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