En 1787, Carl Axel Arrhenius, un lieutenant de l'armée et chimiste amateur, découvre une roche noire lourde dans une ancienne carrière proche du village suédois d'Ytterby (aujourd'hui dans l'archipel de Stockholm. Pensant qu'il s'agit d'un minéral inconnu contenant du tungstène, élément qui vient d'être découvert, il le baptise ytterbite (d'après le nom du village où il l'a découvert, plus le suffixe -ite pour indiquer qu'il s'agit d'un minéral) et envoie des échantillon à plusieurs chimistes pour des analyses.
Johan Gadolin, de l'université d'Åbo, identifie un nouvel oxyde ou "terre" dans l'échantillon d'Arrhenius en 1789 et publie son analyse complète en 1794. Ces travaux sont confirmés en 1797 par Anders Gustaf Ekeberg qui baptise le nouvel oxyde yttria. Dans les décennies qui suivent les travaux de Lavoisier, qui a développé la première définition moderne des éléments chimiques, on pense que les terres peuvent être réduites pour obtenir les éléments purs, ce qui signifie que la découverte d'une nouvelle terre était équivalente à la découverte d'un nouvel élément, qui aurait alors été dans ce cas l'yttrium (on donnait aux oxydes une terminaison en -a et aux éléments en -ium).
En 1843, Carl Gustav Mosander découvre que les échantillons d'yttria de Gadolin contiennent trois oxydes différents : de l'oxyde d'yttrium blanc (yttria), de l'oxyde de terbium jaune (baptisé à l'époque "erbia" ce qui peut prêter à confusion), et de l'oxyde d'erbium rose (baptisé à l'époque "terbia" ce qui peut là encore prêter à confusion). En 1878, Jean Charles Galissard de Marignac isole un quatrième oxyde, l'oxyde d'ytterbium. Les nouveaux éléments seront ensuite isolés à partir de chacun de leurs oxydes, et baptisé d'une manière qui rappelle le nom du village "Ytterby" (yttrium, ytterbium, terbium, et erbium). Au cours des décennies suivantes, sept autres métaux seront découverts dans lyttria de Gadolin. Comme finalement cet yttria n'était pas une terre mais un minéral, Martin Heinrich Klaproth le renomme gadolinite en hommage à Gadolin.
L'yttrium métal a été isolé pour la première fois en 1828 par Friedrich Wöhler en chauffant du chlorure d'yttrium anhydre avec du potassium selon la réaction :
Jusqu'aux années 1920, le symbole chimique utilisé pour l'yttrium était Yt, puis le Y s'est imposé dans les usages.
L'yttrium est présent dans la plupart des minéraux contenant des terres-rares, ainsi que dans certains minerais d'uranium, mais ne se rencontre jamais à l'état natif dans la nature.
On trouve l'yttrium dans les sables de monazite ((Ce, La,Th, Nd,Y)PO4) et bastnosite ((Ce, La,Th, Nd,Y)(CO3)F). Il est très difficile à séparer des autres métaux de la même famille auxquels il y est toujours associé. L'yttrium apparaît dans un grand nombre de minéraux, toujours associé aux autres terres rares :
Ces minerais sont plus ou moins radioactifs.
Les échantillons lunaires collectés au cours du programme Apollo contiennent une quantité notable d'yttrium.
L'yttrium est présent dans la croute terrestre à hauteur de 31 ppm, ce qui en fait le 28e élément le plus abondant, avec une abondance 400 fois plus élevée que celle de l'argent. On le trouve dans les sols à une concentration de 10 à 150 ppm (moyenne dans les masse à sec de 23 ppm) et dans l'eau de mer à une concentration de 9 ppt.
L'yttrium ne joue aucun rôle biologique connu, mais on le rencontre dans la plupart (si ce n'est tous) les organismes, et il se concentre chez l'homme dans le foie, les reins, les poumons, la rate et les os. Il n'y a normalement pas plus de 0,5 mg d'yttrium dans le corps humain. On le trouve à hauteur de 4 ppm dans le lait maternel. Les plantes comestibles en contienne à des concentrations comprises entre 20 et 100 ppm, les concentrations les plus élevées se rencontrant dans le chou. Les plantes ligneuses possèdent les concentrations d'yttrium les plus élevées connues avec 700 ppm.
Dans le système solaire, l'yttrium s'est formé par nucléosynthèse stellaire, majoritairement par processus S (≈72%) et minoritairement par processus R (≈28%).
Les isotopes de l'yttrium sont parmi les produits de fissions les plus communs engendrés par la fission d'atomes d'uranium lors des explosions nucléaires ou dans les centrales nucléaires. En terme de gestion des déchets, les isotopes les plus importants sont 91Y et 90Y, avec des périodes radioactives de 58,51 jours et 64 heures respectivement. Le premier est formé directement lors de la fission des noyaux d'uranium. Malgré sa demi-vie courte, le second est en équilibre séculaire avec son parent à période longue, le strontium 90 (demi-vie de 29 ans).
Tous les éléments du groupe 3 possèdent un nombre impair de protons et ont donc peu d'isotopes stables. L'yttrium n'en possède qu'un, 89Y, qui est également le seul qui se rencontre dans la nature. L'abondance de l'yttrium 89 est plus élevé que ce qu'elle devrait être au premier abord. Ceci s'explique par le fait que son processus de formation, lent, tend à favoriser les isotopes de nombre de masse voisin de 90, 138 ou 208, qui possède un noyau atomique inhabituellement stable avec 50, 82 et 126 neutrons respectivement. 89Y possède un nombre de masse de 90 et 50 neutrons dans son noyau.
Au moins 32 isotopes artificiels de l'yttrium ont été observés, avec des nombres de masse compris entre 76 et 108. Le moins stable est 106Y avec une période de 200 ns et le plu stable 88Y avec une période de 106,626 jours. Hormis 91Y, 87Y, et 90Y qui ont des demi-vies de 58, 51 jours, 79,8 heures et 64 heures respectivement, tous les autres isotopes de l'yttrium ont des demi-vies plus courtes qu'une journée, et pour la plupart qu'une heure.
Les isotopes de l'yttrium de nombre de masse inférieur ou égal à 88 se désintègrent principalement par émission de positron pour former des isotopes du strontium. Ceux de nombre de masse supérieur ou égal à 90 se désintègrent principalement par émission d'électron pour former des isotopes du zirconium.
L'yttrium possède au moins 20 isomères excités métastables, avec des nombres de masse compris entre 78 et 102. De multiples états d'excitation ont été observés pour 80Y et 97Y. Alors que la plupart des isomères de l'yttrium sont moins stables que leur état de base, 78mY, 84mY, 85mY, 96mY, 98m1Y, 100mY, et 102mY possède des demi-vies plus longues, parce qu'ils se désintègre par décroissance β plutôt que par transition isomérique.
Les similitudes de propriétés chimiques de l'yttrium et des lanthanides font qu'il est concentré dans la natude selon les mêmes procédés et qu'on le retrouve dans des minerais au sein de minéraux contenant des terres-rares. On peut observer une séparation partielle entre les terres-rares légères (début de la série) et les terres-rares lourdes (fin de la série), mais cette séparation n'est jamais complète. Bien qu'il possède une masse atomique plus faible, l'yttrium est se concentre du côté des terres-rares lourdes.
Il y a quatre sources principales d'yttrium:
L'yttrium est difficile à séparer des autres terres-rares. Une méthode pour l'obtenir pur à partir du mélange d'oxyde contenu dans le minerai est de dissoudre l'oxyde dans l'acide sulfurique puis d'utiliser la chromatographie à échange d'ions. L'ajout d'acide oxalique permet de faire précipiter l'oxalate d'yttrium. Cet oxalate est ensuite transformé en oxyde par chauffage sous oxygène. On obtient ensuite du fluorure d'yttrium par réaction avec le fluorure d'hydrogène.
La production mondiale annuelle d'oxyde d'yttrium a atteint 600 tonnes en 2001, avec des réserves estimées de 9 millions de tonnes. Seules quelques tonnes d'yttrium métal sont produites chaque année par réduction du fluorure d'yttrium en une éponge métallique par réaction avec un alliage de calcium et magnésium. L'yttrium peut être fondu à 1600°C au four à arc.