Cadet d'une famille de trois enfants, il est né à l'Ermitage le 6 mars 1867. À cette époque, son parrain Jean-Charles s'apprêtant à quitter La Nouvelle-Orléans et le métier de journaliste a offert à l'heureux père une presse de maison pouvant imprimer des étiquettes, des en-têtes de lettres, des fiches bibliographiques ou réaliser des catalogues de collection "envoyés à dix, vingt, trente amis, pour proposer des échanges". À l’image de son oncle, une fois son diplôme de fin d’études secondaires en poche, il conduit librement ses études et s’intéresse plus particulièrement à la botanique, la géographie physique et la préhistoire. La riche bibliothèque de ses ancêtres et l’éducation parentale nourrissent et forment son esprit scientifique. Le parc de l’Ermitage, « situé dans un repli du terrain du bois de Mons, avec ses arbres séculaires, ses fleurs, ses serres, ses étangs… » est le terrain privilégié de la mise en pratique des connaissances acquises par Jean Houzeau à l’occasion de ses nombreuses lectures, à l’instar de Jean-Charles qui avait réalisé un petit observatoire d’astronomie. Jean, a le regard fixé sur « le monde des insectes, celui des oiseaux et des plantes ». En effet, le parc de l’Ermitage offre « un matériel de choix à ses recherches commencées avec l’aurore, continuées pendant toute la journée et prolongées jusqu’à bien tard dans la nuit ».
L’origine de la culture des bambous par Jean Houzeau de Lehaie remonte à 1883. Lors d’une journée qu’il organise en été 1922 (la visite de l’Ermitage fait suite à celle du site géologique de Helin, des galeries préhistoriques de Spiennes et d’un terrain d’observation de la faune de la flore et du sol), il explique aux excursionnistes : « La collection fut transportée d’Hyon à l’Ermitage en 1898. Ces plantes sont pour la plupart fort peu accommodantes. Il a fallu de très longs tâtonnements pour connaître leurs exigences et les règles de leur culture ». Mais comment le goût de la botanique et l’intérêt précoce pour les bambous lui sont-ils venus ?
Sa mère Mélanie, née de Casembroot, éveille le jeune Jean avec des « narrations enchanteresses » qui sont autant d’invitations au voyage sous les tropiques ; elle n’a pas oublié le charme des plantes exotiques, souvenirs d’un long séjour au Suriname lorsque son père, général hollandais, était en garnison : « Pour qui n’a pas vécu sous les tropiques, il est difficile de s’imaginer la majesté des forêts de bambous » écrira Jean en 1906.
Lorsque Jean Houzeau fait ses premières expériences de plantations de bambous dans la propriété d’Hyon, il n’a que 16 ans. Il bénéficie des encouragements de ses parents.
Auguste Houzeau de Lehaie accompagné de son fils Jean ont été des visiteurs assidus des jardins botaniques et des jardins d’amateurs en Belgique, en France et en Angleterre. Ils ont probablement visité les grandes exploitations horticoles de l'époque et ont peut-être côtoyé les grands horticulteurs français et belges. Pour la Belgique, Louis Van Houtte tient une place toute particulière. Amateur passionné de botanique, grand explorateur de plantes, il fonde le magazine mensuel L’Horticulture belge (1836), devient responsable de la Société royale d’horticulture de Belgique (1837), et publie un annuaire (en français) Flore des serres et des Jardins d’Europe, catalogue luxueux à l’adresse des amateurs de jardins curieux de plantes nouvelles. Il crée à Gand une pépinière qui, à l’époque, n’a pas d’égale au monde : bien évidemment, sur les milliers de plantes en stock dans ses pépinières, les bambous représentent une infime partie : toujours est-il que Louis Van Houtte commercialise l’Arundinaria falconeri dès 1848 et l’Arundinaria fortunei envoyé du Japon en 1863 et ces plantes vont figurer dans la collection de Jean Houzeau.
En France, Angleterre ... (reprendre ses Catalogues et notes de M. YM Allain)
Ses notes bibliographiques témoignent bien des recherches documentaires très approfondies qu’il a effectuées sur les bambous. Il analyse de nombreuses revues spécialisées de botanique, d'horticulture, d'ethnographie d'Europe et du Japon. Ainsi à titre d’exemple il a recensé tous les articles sur les bambous de la Revue horticole. Rien de ce qui a été publié sur les bambous ne lui est étranger, quel que soit le domaine (botanique, économique, agronomique, artisanal)… Ses archives reflètent bien l’étendue de ses investigations à ce sujet. Tous les grands auteurs botaniques du XIXe siècle lui sont familiers. On peut citer, par exemple, Franz Josef Ivanovich Ruprecht, Philipp Franz Siebold (l’introducteur du Pseudosasa japonica en 1850), Freeman Mitford, Sir Dietrich Brandis et G.S. Gamble, ainsi que ses homologues et contemporains nippons Tomitarō Makino et Shibatea dont il traduit les écrits relatifs aux bambous.
Au plus près des connaissances scientifiques des bambous et de leur culture, dans les années 1870 et 80, Jean Houzeau de Lehaie étudie plus particulièrement les travaux d’Auguste et Charles Rivière, Les Bambous (1879) et ceux de William Munro, Monograph of Bambusaceae (1886). On peut citer aussi les travaux du professeur suisse Carl Schröter, ethnographe géographe.
n° | Nom du botaniste ou de l'observateur | Ouvrages de référence | Période de publication étude(s) sur les bambous | Cité par Jean Houzeau | Commentaire |
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1 | Alexandre le Grand -356/-323 av. J.C. | oui | Selon J. Houzeau la première mention d’une bambusée se trouve dans une lettre d’Alexandre le Grand à son précepteur Aristote. Ce fait n’est pas surprenant puisque ce grand conquérant a fait explorer le delta de l'Indus pour y étudier la flore, la faune, le sous-sol et même dresser des cartes. | ||
2 | Pline l'Ancien - 23/59 ap. J.-C. | Histoire naturelle | source : Rupr. | ||
1 | Mathias de l'Obel (Lobelius)1538-1616 | oui | Fait référence à une bambusée en 1571. | ||
2 | Charles de l'Ecluse 1526-1609 | 1601 | Source : Rupr. | ||
3 | Garcia da Orta (Garciam ?) 1500-1568 | Colóquios dos Simples e Drogas e Cousas Medicinais da Índia (1563) | 1605 (à vérifier) | Source : Rupr. Il fonde un jardin botanique sur l'île de Bombay et y expérimente la culture de plantes venant d'Europe ou d'Inde, mais aussi de Chine et d'Iran. | |
4 | Georges Macgrave (Magravia) | Histoire naturelle du Brésil | 1648 | Source : Rupr. | |
5 | Guillaume Pisonia (Pisonem, Wilhelm Piso, Guillaume Le Pois) 1611-1678 | Histoire naturelle (1648), Différents opuscules sur la canne à sucre, le Manihot...(1660) | 1958 | Source : Rupr. Médecin, pharmacien, botaniste, né à Leyde, voyageur au Brésil. A eu Marcgrave comme collaborateur. cf. Glossaire de botanique par Alexandre Etienne Guillaume Théis. | |
6 | Gaspard Bauhin 1560-1624 | 1671 (?) | Source : Rupr. Il cite C. Bauhinum (1671). On peut supposer qu'il fait référence à G. Bauhin mais la date de publication est postmortem. | ||
7 | Georg Everhard Rumphius (Rumpf)1627-1702 | Herbarium Amboinense | Entre 1741 et 1750, (35 ans après la mort de Rumpf). | Décrit plus de 24 espèces de bambous. Il les désignait en latin Arundarbor ou « arbres creux » ou encore « Roseau arborescent » et les a regroupés en trois classes. Rumpf n’utilise pas le terme bambou. Selon lui le terme javanais mambu connu dès le XVIe siècle désigne une graminée qui a la forme d’une canne creuse. Elle serait une onomatopée qui pourrait correspondre aux détonations d’un arbre creux dans le feu. | |
8 | Hendrik van Rheede 1636-1691 | Hortus Malabaricus | 1678-1703 | Le « Jardin de Malabar » comprend 12 volumes, 742 plantes, 791 planches. Il s’agit d’une œuvre ethno-médicale. Le quatrième volume est en partie consacré à l’étude des bambous et roseaux. | |
9 | Engelbert Kaempfer 1651-1716 | 1712 | Source : Rupr. | ||
10 | Johannes Burman 1907-1780 | 1737 | Source : Rupr. | ||
11 | Carl von Linné 1707-1778 | Le père de la botanique moderne a répertorié une vingtaine de bambous. C’est à lui qu’il revient d’avoir introduit dans le vocabulaire scientifique le terme bambou et de les classer dans la famille des graminées. | |||
12 | William Roxburgh 1751-1815 | Flora Indica | En 1820, William Carey (1761-1834) fait paraître à titre posthume le premier volume de sa Flora Indica, or Descriptions of Indian Plants. En 1824, Carey édite le deuxième volume enrichi des remarques du botaniste Nathaniel Wallich (1786-1854). | ||
13 | Carl Ludwig Willdenow 1788-1850 | ||||
14 | Karl Sigismund Kunth 1765-1812 | Distribution méthodique des graminées | 1935 | Alexandre Humboldt lui confit la mission de déterminer son herbier. Kunth va consacrer 24 ans de sa vie à décrire une partie de l'herbier d'Humboldt et de Bonpland. Dans la tribut des Bambusées, le nom de K. S. Kunth est associé à plusieurs bambous sud-américains et est l'auteur du genreGuadua. | |
15 | Carl Ludwig Blume 1789-1862 | Source : William Munro | |||
16 | Franz Josef Ivanovich Ruprecht 1814-1870 | Bambuseae | 1839 | oui | C'est le premier auteur linnéen à réaliser une monographie sur les bambusées |
17 | William Munro 1818-1880 | A Monograph of the Bambusaceae, including Descriptions of all the Species | 1868 | oui | |
18 | James Sykes Gamble 1847-1925 | The Bambuseae of British India | 1896 | oui | J. S. Gamble un botaniste anglais qui s’est spécialisé également dans la flore du sous-continent indien. Fondateur de l’ Herbarium de Dehra Dun, il est l’auteur d’une étude très détaillée sur la tribu des Bambusées en Inde et Birmanie. Dans son ouvrage intitulé ‘The Bambuseae of British India’ il y décrit 117 espèces de Bambusées soit 45 descriptions supplémentaires de taxons indo-malais par rapport à celles réalisées par le colonel Munro. |
19 | Le baron Mitford | The Bamboo garden | 1879 | oui | Il est l’un des premiers amateurs de bambous à réunir dans sa propriété (Batsford Park - dans la banlieue de Londres) une « importante collection de bambous rustiques ». Si pour l’auteur « ce petit livre n’a pas de prétention scientifique », selon Jean Houzeau de L, Bamboo garden est à la fois un ouvrage très savant et une œuvre littéraire, il a puissamment contribué à clarifier la nomenclature de bambous jusqu’alors si obscure. |
20 | Ernest Mason Satow | The cultivation of bamboos in Japan | 1899 | oui | Cette étude du diplomate et nippologue E. Satow comprend principalement une traduction partielle de Nihon Chiku-fu, le fameux Manuel des bambous japonais de Katayama Nawohito, publié en 1885, mais aussi une nomenclature des bambous japonais. |
21 | Auguste et Charles Rivière (Père et fils) | Le Bambou (réunion sous ce titre suite complète d'articles parus dans la revue Société d'acclimatation, intitulée "Les Bambous") | 1878 | oui | Auguste Rivière (jardinier en chef du Luxembourg) et Charles Rivière (directeur du Jardin d'Essai au Hamma d'Alger) sont les premiers auteurs français, bien que n’étant pas de formation botanique, à proposer, à partir de l’observation et de l’étude des bambous sur une dizaine d’années, une monographie approfondie et raisonnée de la classification botanique des bambous, de la description de leurs caractéristiques, de leur végétation souterraine et aérienne, de leur culture, de leur multiplication. |
22 | Sir Dietrich Brandis | Indian tree (reprise d'une grande partie de ses très nombreuses études botaniques de la flore indien et birmane) | 1906 | oui | Rencontre fortuite de Jean Houzeau de Lehaie à l'Herbarium Kew en 1906. Sir Dietrich Brandis l'incite à poursuivre les recherches entreprises sur la voie de la systématique du bambou. J. Houzeau est bien à l'origine de la systématique des bambusées rustiques (1910) |