Pendule de Foucault - Définition

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Mise en équation

Pour simplifier, nous supposerons l'amplitude des oscillations suffisamment faible pour admettre que la masse oscillante du pendule se déplace horizontalement. Notons Oxy ce plan horizontal, avec O position de la masse au repos, Ox axe horizontal dirigé vers l'est (et donc tangent au parallèle), et Oy dirigé vers le nord (et donc tangent au méridien). Le troisième axe Oz sera vertical, dirigé vers le haut.

Cas du pendule simple

Sans tenir compte de la rotation de la Terre par rapport à un référentiel galiléen et dans le cas de petites oscillations, les équations du mouvement sont celles du pendule simple, à savoir :  \left \{ \begin{matrix} \ddot{x} = - \omega^2 x\\ \ddot{y}= - \omega^2 y \end{matrix} \right. où ω est la pulsation propre du pendule simple, soit : \omega = \sqrt{g/l} g est l'accélération de la pesanteur et l la longueur du pendule. A titre d'exemple, si à l'instant t = 0, le pendule passe en O avec la vitesse V0 selon l'axe Ox, alors, la solution à ce système est :

 \left \{ \begin{matrix} x = &{V_0 \over \omega} \sin(\omega t) \\ y = &0 \end{matrix} \right.

Cas du pendule de Foucault

Avec la rotation de la Terre par rapport à un référentiel galiléen, il faut tenir compte de la force de Coriolis dont l'accélération s'écrit 2 \Omega (\vec{v} \wedge \vec{k}) \vec{v} est la vitesse du pendule, \vec{k} est le vecteur unitaire porté par l'axe de rotation terrestre et Ω la vitesse de rotation angulaire de la Terre (à savoir un tour en un jour sidéral). Cette vitesse de rotation Ω est beaucoup plus faible que la pulsation propre ω du pendule.

Si on se trouve à la latitude θ, alors le vecteur \Omega \vec{k} se décompose, dans un repère lié au sol, en une composante de valeur Ωsinθ sur une verticale du lieu et une composante Ωcosθ dans un plan horizontal dont on peut orienter l'axe des ordonnées y vers le nord pour simplifier. Dans ce repère, le vecteur \Omega \vec{k} a pour coordonnées \begin{pmatrix} 0\\ \Omega \cos{\theta} \\ \Omega \sin{\theta} \end{pmatrix} . Si on note \begin{pmatrix} \dot{x}\\ \dot{y} \\ \dot{h}\end{pmatrix} les coordonnées du vecteur \vec{v} , l'accélération de Coriolis a pour composantes \begin{pmatrix} 2\dot{y} \Omega \sin{\theta} - 2\dot{h} \Omega \cos{\theta}\\ - 2\dot{x} \Omega \sin{\theta} \\ 2\dot{x} \Omega \cos{\theta} \end{pmatrix} .

En négligeant l'influence des déplacements verticaux (h), les équations du mouvement dans le plan Oxy deviennent :  \left\{\begin{matrix} \ddot{x} = - \omega^2 x + 2\dot{y} \Omega\sin{\theta}\\ \ddot{y} = - \omega^2 y - 2\dot{x} \Omega \sin{\theta}\end{matrix}\right. .

En utilisant la notation complexe z = x + iy, le système à résoudre s'écrit :  \ddot{z}+2i\Omega\sin{\theta} \dot{z} + \omega^2 z = 0

Proposons une solution classique de la forme z(t) = ert, on en déduit que le complexe r doit vérifier l'équation du second degré : r2 + 2iΩsin(θ)r + ω2 = 0 qui s'écrit aussi : \left(r+i\Omega\sin(\theta)\right)^2- i^2\omega^2\left(1+\sin^2(\theta)\frac{\Omega^2}{\omega^2}\right)=0

En notant \omega_0 = \sqrt{\omega^2 + \Omega^2 \sin^2(\theta)} , les deux solutions de l'équation du second degré sont : r=-i(\Omega\sin(\theta) \pm \omega_0) et on peut alors en déduire que la solution générale du système est de la forme :

z(t)= e^{-i \Omega \sin{\theta} t} \left(c_1 e^{i\omega_0t} + c_2{{e}}^{-i\omega_0t}\right) \qquad\qquad(1)

c1 et c2 sont deux constantes, éventuellement complexes, qu'on peut déterminer par deux conditions initiales comme par exemple, la position du pendule et sa vitesse à la date t = 0 qui conduisent aux deux équations :

 \left \{ \begin{align} z(0) = & c_1 +c_2 \,,\\ \dot{z}(0) = &-i \left( \Omega\sin(\theta) z(0) - \omega_0 (c_1-c_2) \right) \end{align}\right. \,.

En remplaçant les expressions trouvées pour les deux constantes dans l'équation (1), on peut alors écrire une équation plus aisément interprétable :

 z(t) =e^{-i \Omega \sin{\theta} t} \left[z_0\left(\cos(\omega_0 t) +i \frac{\Omega \sin(\theta)}{\omega_0}\sin(\omega_0 t) \right) + \frac{\dot{z}_0}{\omega_0} \sin(\omega_0 t)\right] \qquad\qquad(2)

Ainsi, si \dot{z}_0 est nulle et z0 un réel pur, la trajectoire au sol du pendule dans un repère tournant selon une pulsation Ωsin(θ) est une ellipse parcourue en une période de \frac{2\pi}{\omega_0} .

Si \dot{z}_0 est non nulle mais un imaginaire pur, le mouvement elliptique est perturbé par une oscillation perpendiculaire au plan principal d'oscillation et de même fréquence \omega_0\, .

Examinons alors deux manières de lancer le pendule :

  • Supposons que le pendule soit propulsé depuis la position d'équilibre (z(0) = 0 vers l'est à la vitesse \dot{z}(0)=V_0 et nous obtenons le mouvement décrit par l'équation :
 z(t)= \frac{V_0}{\omega_0} \sin(\omega_0 t) e^{-i\Omega\sin(\theta)t }
L'exponentielle complexe mise en facteur montre que la dynamique du pendule se décompose en un mouvement pendulaire simple (sinusoïdal de pulsation ω0) au sein d'un plan qui tourne lentement en raison de la rotation de la Terre (Ω) mais dont seule la composante verticale en ce lieu, Ωsin(θ), ne compte.
À chaque oscillation, le pendule repasse exactement par sa position de lancement qui est aussi sa position d'équilibre.
Mais on ne voit pas comment un tel mouvement peut être initié de manière simple.
Dans le cas général, le pendule s'écarte de part et d'autre du plan tournant et ce n'est que par cet artefact de conditions initiales très difficiles à réaliser en pratique que le mouvement pourrait rester dans un plan et osciller au sein de ce plan comme un pendule simple.
  • Supposons maintenant, comme le fit Foucault, que le pendule soit écarté de sa position d'équilibre par une corde tendue (par exemple vers l'est : z0 mètres) et qu'on la brûle afin de libérer le pendule avec une vitesse initiale nulle ( \dot{z}_0=0 ), on obtient la solution suivante :
 z(t)= z_0 e^{-i\Omega\sin(\theta)t} \left[ \cos(\omega_0t) + i \frac{\Omega\sin(\theta)}{\omega_0} \sin(\omega_0 t) \right]\qquad\qquad(3)
et il suffit de tracer la courbe paramétrée par la partie réelle (longitude est) et la partie imaginaire (latitude nord) pour obtenir le tracé A (cliquer sur la figure pour lire le programme de tracé en langage Gnuplot correspondant) même si la vitesse de rotation de la Terre est encore fictive et de l'ordre d'une rotation en 110 secondes au lieu d'une rotation par 24 heures.

Si on met une caméra dans le plan d'oscillation du pendule, on obtient l'animation B où le référentiel terrestre tourne. On peut remarquer, contrairement au cas simple examiné précédemment mais qui correspondait à un lâcher difficilement réalisable, que le pendule n'oscille pas rigoureusement dans le plan tournant mais s'en écarte de part et d'autre selon l'ellipse décrite dans la grande parenthèse.

B Pendule de Foucault de 67 mètres lâché au Panthéon de Paris à une distance de 50 mètres à l'est du point d'équilibre avec une vitesse initiale nulle. La vitesse de rotation de la Terre est exagérée (1 tour en 110 secondes). Vue d'une caméra liée au plan d'oscillation.

Il est également possible de voir le même pendule depuis le soleil, c’est-à-dire depuis une caméra fixe par rapport aux étoiles (animation C).

C Pendule de Foucault de 67 mètres lâché au Panthéon de Paris à une distance de 50 mètres à l'est du point d'équilibre avec une vitesse initiale nulle. La vitesse de rotation de la Terre est exagérée (1 tour en 110 secondes). Vue d'une caméra liée au soleil.

Le pendule de Foucault du Panthéon à Paris oscille sur notre vraie planète Terre avec une pulsation propre ω0 extrêmement proche de celle du pendule simple ω (les 8 premiers chiffres sont identiques) puisque Ω est très petit devant ω. La période d'oscillation, \frac{2\pi}{\omega}=2\pi\sqrt{\frac{l}{g}} vaut, si la longueur du fil fait 67 mètres, 16,42 secondes.

Le rapport du petit côté de l'ellipse sur le grand côté a pour expression \frac{\Omega \sin(\theta)}{\omega_0} et est très petit. Le pendule de Foucault oscille donc quasiment dans un plan qui tourne en raison de la rotation de la Terre. Mais le plan n'effectue un tour complet en 24 heures qu'aux pôles. A une latitude θ donnée, la période, \frac{2\pi}{\Omega \sin(\theta)} , inversement proportionnelle au sinus de cette latitude, est plus longue. Cette période définit le jour pendulaire (pendulum day). Le sinus de 30° valant 1/2, un pendule de Foucault implanté à une latitude de 30° effectuerait un tour complet en 48 heures. La durée d'une rotation complète d'un pendule de Foucault situé à une latitude autre que l'équateur permet ainsi de déterminer cette latitude indépendamment de tout autre mesure.

A la latitude nord de 48°52' du Panthéon à Paris, le plan tourne donc de -\frac{2\pi}{\Omega\sin(\frac{(48+52/60)\times 2 \pi}{360})}\frac{360}{2\pi}3600= -11°19' en une heure.

La Terre ne tournant pas uniquement sur elle-même, mais également autour du Soleil et d'autres astres l'influençant, la rotation du référentiel terrestre n'est pas de 24 heures par jour, mais de 23 heures 56 minutes par jour sidéral.

Lâcher du pendule de Foucault à 6 mètres à l'est du centre de la coupole du Panthéon à Paris : traces au sol des 3 premières oscillations (longitudes en mètres, latitudes en millimètres)

Nous avons ainsi représenté sur la figure ci-contre les 3 premières oscillations après un lâcher à vitesse nulle à une distance de 6 mètres à l'est du centre de la coupole du Panthéon. Etant donnée la faible déviation vers le nord par rapport au déplacement est-ouest du pendule durant ces trois premières oscillations, l'échelle de l'ordonnée (sud-nord) est multipliée par 1000 ce qui correspond à un déplacement en millimètre. La force de Coriolis, perpendiculaire au déplacement et proportionnelle à la vitesse, fait dévier le pendule de son plan d'oscillation initial vers le nord ; elle est maximale lorsque que la vitesse est maximale c’est-à-dire lorsque le pendule passe près du point d'équilibre, qu'il dépasse à 0,86 mm au nord ( z_0\frac{\Omega\sin(\theta)}{\omega_0} ). Le pendule s'arrête au bout d'une demie période (donc 8,21 secondes) à l'opposé et a encore été dévié vers le nord. Au retour, le sens de la vitesse est inversé et la force de Coriolis fait déplacer le pendule vers le sud. Il passe à 0,86 mm au sud du point d'équilibre puis s'arrête à 5,4 mm au sud du point de lancement à la fin de la période d'oscillaton soit après 16,42 secondes. La vitesse du pendule par rapport à notre repère terrestre étant alors nulle, la force de Coriolis est donc nulle et le pendule repart dans la même direction en effectuant un point de rebroussement.

Le pendule revisité : quel système de référence ?

Le pendule de Foucault pose la question de la nature du repère qui sert de référence. En effet, tout mouvement est relatif. Si la Terre est en rotation, elle l'est par rapport à quelque chose. On ne peut pas parler d'un mouvement sans définir un cadre de référence. Ce cadre est un référentiel galiléen, mais comment ce référentiel est-il défini ? Plaçons le pendule de Foucault au pôle. La Terre tourne par rapport à un repère galiléen selon l'axe terrestre avec la pulsation Ω. Le pendule tourne par rapport à la Terre avec une pulsation qui vaut au pôle − Ω, selon la verticale du lieu qui est également l'axe terrestre. Le pendule oscille donc dans un plan fixe par rapport à un repère galiléen.

Dans une première approximation, le plan du pendule est fixe par rapport au Soleil. Mais, si Foucault avait réussi à construire un pendule capable d'osciller suffisamment longtemps, disons pendant un mois, il se serait aperçu que le plan d'oscillation dérivait également par rapport à la position du Soleil. Notre étoile ne fait donc pas partie du système de référence en question.

Peut-être faut-il alors considérer les étoiles proches du Soleil ? Mais là aussi, si l'expérience pouvait durer suffisamment longtemps, elle montrerait que le plan des oscillations se déplace nettement par rapport aux étoiles après quelques années. Quel objet choisir dans ce cas ? Le centre galactique, la galaxie d'Andromède, le Groupe local, le superamas local ? Chacun de ces objets donnerait l'illusion d'être fixe par rapport au plan des oscillations, mais finirait, après un temps de plus en plus long, par révéler une dérive.

Si l'expérience pouvait être menée suffisamment longtemps en considérant comme référence les objets les plus lointains de l'univers, les galaxies ou quasars situés à des milliards d'années-lumière, on pourrait constater encore une infime dérive du plan d'oscillation[réf. souhaitée].

Finalement, l'ultime recours serait de considérer comme référence le rayonnement de fond de l'univers[réf. souhaitée] . Avec ce système de référence, et si l'expérience de Foucault était réalisable, le plan des oscillations serait enfin fixe et il n'y aurait plus de dérive. Ce n'est donc qu'en fonction de l'Univers dans son ensemble, que nous pouvons définir un référentiel galiléen par rapport auquel le plan des oscillations est fixe.

Le pendule de Foucault se moque donc de la présence du Soleil ou de la Galaxie. Son mouvement lui est directement dicté par l'Univers entier. Cette expérience met en évidence une sorte de lien mystérieux entre chaque point et l'Univers tout entier et Ernst Mach s'est posé la question de savoir quelle serait la Mécanique dans un Univers vide (voir Principe de Mach). Jusqu'à nouvel ordre, la nature de ce lien reste inconnue.

Effets parasites

La mise en évidence de la rotation terrestre par le pendule de Foucault est une expérience très délicate. Le plan d'oscillation du pendule tourne de quelques degrés par heure (maximum, 15° aux pôles). Plusieurs phénomènes risquent de masquer ce que l'on veut mettre en évidence.

  • L'amortissement du pendule par le frottement dans l'air : il est proportionnel à la section du pendule, à son volume, et inversement proportionnel à son poids. On choisira donc un objet dense et lourd. Il faut une sphéricité parfaite, un cylindre est parfois plus approprié pour de petites amplitudes.
  • L'asymétrie du pendule. Celui-ci doit être parfaitement symétrique pour ne pas dévier. Il ne doit pas non plus pivoter sur lui-même : l'effet Magnus le dévierait de son plan d'oscillation (cependant, il tournera légèrement sur lui-même en raison de sa précession !). Il faut aussi veiller au point d'attache.

Le pendule doit être lancé sans composante de vitesse perpendiculaire au plan d'oscillation. Comme il s'agit d'un pendule sphérique, on doit effectuer la correction d'erreur systématique : Victor Puiseux a montré que si le pendule effectuait une ellipse, celle-ci entraînait un effet de précession proportionnelle à son aire et inversement proportionnelle au carré de la longueur du pendule. \omega_{puiseux} = {{3 \over 8}.{{a.b} \over {L^2}}.\omega_{pendule}} . Il faut utiliser un pendule long et le lancer en le lâchant sans vitesse initiale par rapport au laboratoire ; sa trajectoire sera donc légèrement elliptique, mais toute la manipulation sera alors reproductible et l'on pourra corriger les erreurs systématiques.

L'astuce de l'anneau de Charron est peu connue (cf Bulletin de la SAF de novembre 1931) mais pourtant très efficace : on entretient le mouvement du pendule par un électroaimant très pointu, et le cylindre est lui-même muni d'une pointe qui vient quasiment en contact de celle de l'électroaimant. Celui-ci est alimenté par un courant continu basse tension haché de la façon suivante : l'anneau de Charron (C) est placé à quelques décimètres du point d'oscillation O (pour une longueur de 1,70 m environ). Quand le fil de suspension métallique touche l'anneau très bien centré, le courant passe, il y a force électromagnétique attractive, donc retard vers la montée, mais avance sur la descente ; puis rien, puis symétriquement pour l'autre côté. L'astuce consiste à ce que la self entraîne un retard dans le courant : il y a donc bien globalement un gain d'énergie. L'amplitude des oscillations (2 degrés environ) est imposée par le bilan énergétique. L'énergie perdue pendant une oscillation, qui croit avec l'amplitude, est exactement compensée par l'énergie fournie par l'électroaimant. Certes la période du pendule est composée de deux mouvements, l'un autour de O, et l'autre autour de (C) (de rayon très petit, 0,5 mm environ). On peut le vérifier par la mesure de T (en effectuant évidemment toutes les corrections qui s'imposent (en particulier fil d'acier maintenu en O par un mandrin cylindrique). L'originalité du système n'est pas qu'il entretienne le pendule, mais que le frottement solide du fil sur l'anneau (C) pendant une partie du mouvement, loin de perturber la précession, est au contraire un très subtil moyen pour supprimer l'influence des conditions initiales de lancement qui sont si critiques. Celui du Palais de la Découverte fonctionnait sur ce principe.

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