Dans l’histoire de l'astronomie, l’astronomie arabe renvoie aux découvertes astronomiques accomplies par la civilisation islamique, particulièrement au cours de l’Âge d'or de l'Islam (VIIIe siècle-XVIe siècle), et transcrites pour la plupart en langue arabe. Ces découvertes ont été effectuées pour l’essentiel dans les sultanats du Moyen-Orient, d’Asie centrale, dans l’Al-Andalus, en Afrique du Nord, puis plus tard en Chine et en Inde. Les débuts de l’astronomie ont procédé d'un cheminement semblable aux autres sciences dans l’Islam, par l’assimilation de connaissances de l’étranger et la composition de ces éléments disparates pour faire naître une tradition originale. Les principaux apports sont indiens, perses et grecs, connus par des traductions puis assimilés. Par la suite, l’astronomie arabe exercera à son tour une influence significative sur les astronomies indienne et européenne et même sur l’astronomie chinoise.
Plusieurs étoiles visibles à l’œil nu dans le ciel, comme Aldébaran (α Tauri) et Altaïr (α Aquilae), ainsi que plusieurs termes d’astronomie comme « alidade », « azimut » et « almucantarat » témoignent par leur morphologie de leur origine arabe.
Avec environ 10 000 manuscrits conservés à travers le monde, dont une grande partie n’a toujours pas fait l’objet d'un inventaire bibliographique, le corpus astronomique arabe constitue l’une des composantes les mieux préservées de la littérature scientifique médiévale. Malgré les lacunes bibliographiques, les textes étudiés à ce jour fournissent une image fidèle de l’activité astronomique des peuples de langue arabe.
L’islam a influencé l'astronomie de manière à la fois directe et indirecte. La discipline religieuse, en posant un certain nombre de problèmes liés au calendrier, a donné un élan décisif à l'épanouissement de l’astronomie mathématique, et notamment à la trigonométrie sphérique.
Au VIIe siècle, chrétiens et Juifs pratiquaient des cérémonies religieuses liées au cycle des saisons, mais dont la date était déterminée par les phases de la lune, comme Pâques et Pessa'h. Ces deux religions étaient confrontées au fait que le mois lunaire, d’une durée d’environ 29,5 jours, n’est pas une division exacte de l’année tropique de 365 jours. Pour résoudre cette difficulté, les chrétiens avaient séparé le calendrier civil et le calendrier des fêtes "mobiles" ; quant aux Juifs, ils avaient adopté un calendrier fondé sur une découverte remontant à -430 par l’athénien Méton. Dans l'intervalle du cycle métonique, qui dure 19 ans, on dénombre 12 années de 12 mois lunaires et sept années de 13 mois lunaires. Ainsi, par interposition périodique d'un mois intercalaire, le calendrier annuel hébreu suivait à peu près le cycle des saisons.
Les astronomes, quant à eux, exploitaient le modèle de Ptolémée pour déterminer les positions de la lune et des étoiles. La méthode utilisée par Ptolémée pour résoudre les triangles sphériques, imaginée par Ménélaüs d'Alexandrie à la fin du Ier siècle, était encore maladroite : elle procédait par intersection de deux triangles rectangles ; une application du théorème de Ménélaüs permettait ainsi de trouver un arc inconnu pourvu qu'on connaisse les cinq autres éléments du triangle sphérique. Par exemple, pour déterminer l'heure à partir de l’altitude du Soleil, il fallait plusieurs applications successives du théorème de Ménélaüs. Ainsi, pour les astronomes arabes du Moyen Âge, la recherche d'une méthode trigonométrique plus simple constituait un défi très naturel.
L’islam encourage les musulmans à rechercher leur chemin grâce aux astres. Le Coran énonce en effet : « C'est lui qui a placé pour vous les étoiles (dans le ciel) afin que vous soyez dirigés dans les ténèbres sur la terre et sur les mers. » Avec une telle incitation, les premiers musulmans ne tardèrent pas à perfectionner les instruments astronomiques et de navigation, d'où vient qu'aujourd'hui encore, la plupart des étoiles naguère utilisées par les marins portent des noms arabes.
Le Coran influa également sur l'astronomie arabe « par son enseignement selon lequel l’Univers est réglé selon une loi fondamentale » qui « plonge ses racines dans le concept islamique du tawhîd, l’unité de Dieu », ainsi que par « la place plus importante qu'il accorde aux données empiriques que ne le faisaient la civilisation hellène » qui poussa les musulmans à « s'investir davantage dans l’observation du ciel que ne l’avaient fait les penseurs grecs, notamment les platoniciens et les aristotéliciens », lesquels se défiaient des représentations des sens et estimaient que la raison suffit pour comprendre la Nature. L’accent mis par le Coran sur l’importance de l’observation, de l’interprétation et de la contemplation (par la récurrence des verbes « voir », « méditer » et « contempler »), poussèrent ainsi les musulmans à concevoir une méthode scientifique originale accordant une place particulière aux faits d’observation. Muhammad Iqbal écrit à ce sujet :
« Le ton généralement empiriste du Coran suscita chez ses lecteurs le respect des faits, et devait faire d'eux les pionniers de la science moderne. Ce n'était pas un mince progrès que d'éveiller l'empirisme à une époque qui se détournait du visible comme dépourvu de valeur pour l’homme dans sa quête du Divin. »
On trouve d’ailleurs plusieurs versets cosmologiques dans le Coran (610-632), où l'on retrouve le schéma antique de séparation de la terre et des cieux, conçus initialement comme deux surfaces accolées :
Un autre verset évoque le modèle cosmographique grec :
Divers hadiths attribués à Mahomet témoignent aussi qu'il s'est opposé à l’astrologie et aux superstitions en général. Par exemple, lorsqu'une éclipse survint à la mort de son fils Ibrahim ibn Muhammad, et qu'une rumeur interprétait ce phénomène comme un signe de la compassion de Dieu, Mahomet aurait affirmé :
« Une éclipse est un phénomène naturel. C'est folie d’attribuer de telles choses à la mort ou à la naissance d'un homme[réf. souhaitée]. »
Plusieurs règles de l’islam ont poussé les fidèles à améliorer calculs et observations astronomiques.
Le premier motif est le calendrier musulman. Le Coran édicte en effet que « Le nombre des mois est de douze devant Dieu, tel il est dans le livre de Dieu, depuis le jour où il créa les cieux et la terre. Quatre de ces mois sont sacrés ; c’est la croyance constante. » Pour cette raison, les musulmans ne pouvaient se contenter ni du calendrier chrétien ni du calendrier hébreu, et devaient en créer un nouveau.
Le second motif est l'interprétation du mouvement lunaire. Les mois, dans la religion musulmane, ne commencent pas avec la nouvelle lune astronomique, définie comme l'instant où la lune a la même longitude écliptique que le soleil (elle est donc invisible, noyée dans l'albédo solaire) ; les mois commencent lorsque le croissant lunaire commence à apparaître au crépuscule. Le Coran dit précisément : « Ils t’interrogeront sur les nouvelles lunes. Dis-leur : Ce sont les époques fixées pour l’utilité de tous les hommes et pour marquer le pèlerinage de la Mecque. » Pour déterminer les phases de la lune, il fallut développer de nouvelles méthodes de calcul et mettre aux points des instruments adaptés à l'observation de la lune.
Les musulmans sont également tenus de prier en se prosternant dans la direction de la Kaaba à La Mecque et d’orienter leurs mosquées dans cette direction : il leur faut donc aussi savoir trouver la direction de cet endroit, où qu'ils se trouvent sur Terre. Le dernier problème est la détermination du moment de la Salah. Les musulmans doivent pouvoir déterminer les heures de prière à cinq moments de la journée (de l’aurore au soir) à partir de la position des astres.
Le calcul du jour où le croissant lunaire recommence à devenir visible constituait un redoutable défi pour les savants arabes. Bien qu'en effet la théorie de Ptolémée du mouvement composé de la lune soit assez exacte à l'époque de la nouvelle lune, elle ne donne la trajectoire de la lune que par rapport au cercle de l’écliptique. Pour prédire quel jour la lune commence à redevenir visible, il fallait pouvoir décrire son mouvement par rapport à l’horizon, un problème dont la résolution appartient à une géométrie sphérique assez sophistiquée. Ce sont la détermination de la direction de la Mecque depuis un lieu donné et l'heure des Salah qui ont poussé les musulmans à élaborer une telle géométrie. La résolution de ces problèmes suppose en effet que l'on sache calculer le côté d'un triangle sphérique de la sphère céleste à partir de ses trois angles et des deux autres côtés ; pour trouver l'heure sidérale, par exemple, il faut savoir construire le triangle dont les sommets sont le zénith, le pôle nord, et la position du Soleil. L’observateur doit connaître l’ascension droite du Soleil et celle du pôle : la première peut être mesurée au sextant, et la seconde n'est autre que la latitude de l’observateur. L'heure est donnée par l’angle entre le méridien (l’arc compris entre le zénith et le pôle) et le cercle horaire du Soleil (c’est-à-dire l’arc compris entre le Soleil et le pôle).