Le bois énergie est un type de bioénergie utilisant la biomasse constituée par le bois. Il s'agit essentiellement de l'utilisation du bois en tant que combustible, et dans une moindre mesure en tant que source de combustible. Il peut s'agir d'une énergie renouvelable si le bois est produit par une gestion durable des forêts.
Le "bois de feu" se présente sous quatre formes essentielles :
Le bois peut également être converti en combustibles plus élaborés :
Le bois est l'une des sources d'énergie les plus anciennement utilisées par l'humanité. Depuis la préhistoire jusqu'au début de l'exploitation du charbon, le bois fut de loin la plus importante source d'énergie possible pour le chauffage et pour la cuisson des aliments. Au Moyen Âge puis à l'époque moderne, c'est le bois qui permit le développement de certaines industries gourmandes en énergie et qui nécessitaient des températures élevées, comme la sidérurgie et la verrerie. À cet effet, le bois était transformé en charbon de bois par des artisans spécialisés, les charbonniers. Ce métier a quasiment disparu au XIXe siècle avec l'apparition et le développement spectaculaire de l'extraction de la houille (aussi appelée « charbon de terre »).
Le bois eut aussi une période d'intérêt particulier pendant la Seconde Guerre mondiale pour alimenter les véhicules à gazogène ou pour pallier le manque de charbon. En Europe, la pénurie de charbon due au conflit a engendré une forte augmentation de la consommation de bois, ainsi en Suisse pendant les dernières années du conflit la consommation était de plus de deux fois supérieure à la production naturelle.
Aujourd'hui, le bois énergie suscite un regain d'intérêt en raison du prix grandissant des énergies fossiles, de sa disponibilité et de son caractère renouvelable.
La combustion du bois comme source d'énergie a un bilan carbone neutre du point de vue des émissions atmosphériques, dans la mesure où le bois est exploité comme une énergie renouvelable. C'est-à-dire que la quantité de CO2 libérée par la combustion du bois est compensée par la capture d'une même quantité de CO2 pour la croissance de l'arbre. Ceci est vrai tant que l'exploitation du bois conduit à une quantité de bois créé au moins équivalente à celle consommée.
Ce bilan ne prend pas en compte l'énergie grise qui ici est notamment constituée de l'énergie nécessaire à l'exploitation et l'entretien des forêts, à la découpe des arbres et au transport du bois jusqu'aux lieux de combustion. Comme agent énergétique, le bois produit 42 g de CO2 par kWh pour sa combustion, contre plus de 400 pour le fuel et 40 à 66 pour le nucléaire. De plus la filière bois dispose encore d'une marge importante d'amélioration (performance des techniques de coupe et débardage, diminution de l'usage des emballages plastiques, voire passage au vrac, pour les pellets et le bois densifié).
Du point de vue de la présence de carbone organique dans les sols la situation est plus complexe : la décomposition naturelle du bois est un processus alimentant une importante biomasse de détritivores et saprophytes et aboutit in fine à la création d'humus qui remplace le sol emporté par érosion. La combustion, a contrario, ne produit qu'une faible quantité de cendres qui sont essentiellement des sels minéraux inorganiques. En revanche, le débitage des arbres crée une importante quantité de divers déchets de bois (branchages, sciure, copeaux, écorce ...) qui contribue à nourrir cette biomasse là où ils ne sont pas valorisés sous forme de plaquettes forestières.
La combustion de bois dans de mauvaises conditions peut être une source importante de pollution atmosphérique. Du bois insuffisamment sec, une combustion lente, l'utilisation de bois souillés (traités contre insectes ou champignons, peints, etc) produisent des fumées constituées de particules de suie, de divers composés organiques volatils dont des hydrocarbures aromatiques polycycliques, des dioxines, des furanes, de monoxyde de carbone, d'acide cyanhydrique, etc. qui posent tous des problèmes importants de santé publique.
La combustion complète à haute température de bois bien sec produit quand même une quantité notable d'oxydes d'azote (le bois étant un matériau vivant donc constitué en partie de protéines) et des particules fines constituées essentiellement de sels inorganiques (cendres). Les chaufferies de grandes taille doivent comporter des filtres limitant cette pollution. Pour les équipements individuels le surcoût important des filtres (20 à 100%) empêche en pratique leur développement. Les particuliers peuvent, dans certains cas, bénéficier d'une aide à l'achat de ces filtres, et les prix devraient baisser dans l'avenir avec la multiplication des ventes.
Des études pointent la pollution (métaux lourds, etc.) provoquée par les cendres épandues sur la terre. C'est oublier que la décomposition naturelle du bois en forêt aurait libéré la même quantité de ces sels minéraux dans le sol.
Dans différents pays, le développement du bois-énergie, dans le cadre de la promotion des énergies renouvelables, fait craindre une aggravation de la pollution atmosphérique, notamment par les particules fines. Le défaut de propreté des émissions (notamment celles de particules) est le point faible des combustibles solides (voir infra : Suisse et Canada).
Le programme européen Carbosol
Ce programme scientifique, initié en 2001, rassemblait des chercheurs de différentes nationalités et avait pour objectif notamment de définir les parts respectives des combustibles fossiles (transport, industrie, chauffage au fioul et au gaz) et de la biomasse (chauffage au bois, feux de végétaux) à la pollution par les particules carbonées qui sont reconnues les plus dangereuses pour la santé. Les résultats de l'étude ont été publiés à la mi-décembre 2007 : la combustion de biomasse (feux de cheminée, feux agricoles et feux de jardins) est responsable de 50 à 70% de la pollution carbonée hivernale en Europe. Pour lutter efficacement contre cette pollution, notamment en hiver, le programme suggère de s'attaquer principalement à la combustion de biomasse par des évolutions technologiques et une réglementation sévère limitant ses modes d'utilisation. Il ajoute : « de telles mesures sont d’autant plus nécessaires, que de récentes études épidémiologiques ont souligné la similarité des effets sur la santé entre les fumées de combustion de biomasse et les produits pétroliers (diesel), tant dans la nature que dans la fréquence des troubles engendrés (affection respiratoire, cancer du poumon...) ». Voir à ce sujet l'étude scientifique (en Anglais), présente dans la bibliographie du rapport, qui traite des effets sur la santé de la fumée de bois.
Un certain nombre de documents issus des Offices de l'environnement (OFEV) et de l'énergie (OFEN) montrent la préoccupation de la Confédération.
1. Un document des OFEN et OFEV présente un état des lieux complet sur le chauffage domestique au bois.
Concernant la part de la combustion de biomasse dans les émissions de particules fines en Suisse : « Les chauffages au bois représentent 18% des particules émises par la combustion, et la combustion en plein air 16%. Les chauffages au bois et la combustion à l’air libre contribuent au total presque autant à l’émission de poussières fines que les moteurs diesel, qui sont responsables de 39% des particules de combustion » (p. 2).
Principaux types de poussières fines émises par les chauffages au bois (p. 3) :
Outre la suie et les sels et oxydes, l’incinération de déchets ou de déchets de bois peut aussi dégager d’autres substances nocives telles que des métaux lourds et de la dioxine, qui sont en partie hautement toxiques.
Contrairement aux exploitants de chauffages au fioul ou au gaz dans les conditions habituelles, « le mode d’exploitation des chauffages au bois et le combustible utilisé peuvent influencer considérablement les émissions générées lors de l’utilisation courante, ce qui confère à l’exploitant une importante responsabilité » (p. 5). Le problème des risques de combustion incomplète se pose notamment avec les appareils à alimentation manuelle (appareils à bûches) (p. 3), les appareils à alimentation automatique étant les plus fiables, notamment les appareils à pellets (granulés) à condition d'utiliser exclusivement des pellets de qualité certifiée (p. 5).
Dans le résumé de la page 6, on peut noter :
2. Un deuxième document de l'OFEV, intitulé « Chauffages - Du bois d'accord, mais jamais sans filtre », précise que les émissions de particules fines sont le point faible des combustibles solides : « ... les chauffages à bois en produisaient à eux seuls un sixième, bien plus que les chauffages au mazout et au gaz réunis, et ce malgré le rôle secondaire joué par cette énergie sur le marché. Une disproportion qui s’explique par la difficulté à transformer des combustibles solides en chaleur sans produire de poussières ».
En cas de smog hivernal, la DTAP a adopté un Concept d’intervention contre les poussières fines en trois niveaux : niveaux d'information, d'intervention 1 et d'intervention 2. À partir du niveau d'intervention 1, les autorités décrètent des mesures comme la vitesse de 80 km/h sur des autoroutes, l’interdiction de faire des feux à l'extérieur et l’interdiction d'utilisation de chauffages secondaires utilisant des combustibles solides excepté les installations équipées de filtres à particules pour la réduction des poussières fines ou avec le sceau de qualité de énergie-bois Suisse.
3. Remplacement du mazout par le bois : une mesure prématurée
Un autre document de l'OFEV précise que les mesures ayant pour objectif la lutte contre l'effet de serre, mais aussi la protection de l'air, ne peuvent inclure le remplacement du mazout (huile de chauffage) par du bois « tant que les émissions des chauffages au bois ne seront pas ramenées au niveau de celles des chauffages à mazout ». Le document avait rappelé auparavant que « les particules générées par la combustion de la biomasse (par ex. le bois) présentent un potentiel de toxicité équivalent à celui engendré par la combustion d’énergie fossile (par ex. le diesel) ».
4. En 2006, la Suisse a modifié son ordonnance sur la pollution de l'air (OPair) afin de mettre en oeuvre plusieurs mesures du plan d'action qui « vise à diminuer à chaque source les émissions de poussières, de poussières fines, et de suies de diesel et de bois ». Ces mesures visent entre autres les chauffages au bois d'une puissance supérieure à 70 kW, la plupart à chargement automatique, qui « même bien exploités [...] émettent au moins 300 fois plus de poussières fines qu'un chauffage similaire alimenté à l'huile ou au gaz ».
L’Agence Fédérale de l’Environnement, notant que les émissions de particules fines issues des installations de combustion du bois étaient en constante progression depuis 1995, a publié en 2007 un guide à l’attention des utilisateurs du chauffage au bois. Le communiqué de presse accompagnant ce guide rappelle que le bois est un combustible neutre vis-à-vis du climat mais que sa combustion dans des conditions non optimales ou l’utilisation de combustibles non appropriés peut entraîner une pollution de l’air, à travers notamment les particules et les hydrocarbures aromatiques polycycliques. Les principales recommandations sont les suivantes :
Depuis plusieurs années, des campagnes d'information ont été lancées par les instances gouvernementales pour le remplacement des appareils par des appareils plus performants (certifiés EPA), l’encouragement à ne pas utiliser ce mode de chauffage comme mode de chauffage principal ou en cas d’épisodes de pollution. Des campagnes d’échantillonnage réalisées à Montréal depuis 1999 ont en effet montré l’influence du chauffage au bois sur les niveaux de particules, d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et de composés organiques volatils (COV), notamment en soirée et le week-end.
Dans le commentaire de la Direction de santé publique d'une région du Québec sur les émissions du chauffage au bois, on lit : « Du point de vue de la propreté de ses émissions, le chauffage au bois sera toujours une forme de combustion désavantagée par rapport à ses concurrents les plus rapprochés que sont le mazout et le gaz naturel... Comme on l’a vu dans l’exposé des principes de combustion, plus un combustible peut rapidement passer à l’état gazeux, moins il risque de générer des sous-produits de combustion incomplète. Or le bois est un combustible solide et ses constituants oxydables passent plus difficilement que le mazout ou le gaz naturel à l’état gazeux ».
On peut remédier en partie à ce problème en fragmentant ou en pulvérisant le bois pour augmenter la surface de contact de ses composants avec l’air ; c'est l'effet recherché avec les granulés de bois. « Les poêles à granules représentent le cas le plus complet de l’application des principes de combustion appliqués aux appareils de chauffage à combustible ligneux. Cela leur a permis d’atteindre des niveaux d’efficacité [...] et une réduction des émissions de particules [...] inégalés par les autres types d’appareil de chauffage au bois. À tel point que plusieurs modèles sont exemptés de la certification EPA » (cf. pp. 5 et 18).
Depuis le 28 avril 2009, sauf exceptions, la ville de Montréal a interdit l'installation de nouveaux appareils ou foyers à combustibles solides ; seule l'installation d'appareils à granulés est autorisée.
La combustion du bois émet plus de fines particules (notamment les PM1, de taille inférieure à 1 micromètre), et certains autres polluants, que l'ensemble des véhicules Diesel.
La réduction de ces émissions devient un véritable enjeu de santé publique, ainsi que le confirment les données officielles suivantes :
Participation à la consommation d'énergie finale | CO | PM10 | PM2,5 | PM1,0 | HAP | COVNM | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Bois énergie | 5% | 28,8 | 20 | 32 | 57 | 65 | 17,6 |
Fioul domestique (FOD) | ? | 1,9 | 4,9 | 7,4 | 12 | 5,4 | 2,3 |
Gaz naturel | 21 % | 0,70 | 0,044 | 0,071 | 0,064 | ~ 0 | 1,6 |
Transports | 44 % | 23,4 | 12,4 | 14,2 | 20,5 | 27 | 18,2 |
- COVNM : en ce qui concerne les émissions de benzène, le CITEPA ne fournit pas de données spécifiques au bois énergie, mais précise que : « Le principal secteur émetteur de benzène est le résidentiel/tertiaire (74,7%) en particulier du fait de la combustion du bois, suivi du transport routier avec 15;2% ».
Comme en Suisse, on note une forte disproportion entre l'importance relativement secondaire du combustible bois sur le marché de l'énergie (il représente 5% seulement de la consommation d'énergie finale en France métropolitaine) et sa contribution très importante aux émissions de certains polluants majeurs. Cette disproportion porte notamment sur les émissions de monoxyde de carbone, de particules fines et très fines et d'hydrocarbures aromatiques (HAP et benzène) ; elle est le fait majoritairement du chauffage au bois dans le secteur domestique (85% du bois-énergie est utilisé en chauffage individuel). Depuis 1990, on note globalement une amélioration sensible, mais encore insuffisante. Le renouvellement des appareils se fait encore assez lentement, les vieux appareils à faible rendement et forte pollution (foyers ouverts, ou cheminées ouvertes, mais aussi foyers fermés, inserts et poêles anciens) sont encore très présents ; à ceci s'ajoutent des pratiques pas toujours favorables à une bonne combustion (notamment l'utilisation de bois trop vert ou trop humide et la pratique du feu continu à allure réduite). Tous ces facteurs influencent fortement les résultats du tableau.
Un rapport du MEDD (Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable) compare certaines émissions spécifiques de chauffages domestiques au bois, au FOD, au gaz et au charbon.
Dans le secteur domestique, une réduction plus significative des émissions polluantes du chauffage au bois nécessite une accélération du renouvellement du parc et la poursuite de l'amélioration des appareils. Ces objectifs sont inclus dans le Plan Particules, intégré dans le deuxième Plan National Santé Environnement.
Les mesures visant la réduction des émissions polluantes du bois énergie dans tous les secteurs l'utilisant (domestique, collectif et industriel) s'avèrent nécessaires pour assurer un développement durable de ce combustible. Les chaufferies collectives et industrielles peuvent bénéficier de systèmes de traitement des fumées performants. Concernant le développement de la production de chaleur par la biomasse, la Direction Générale de l'Energie et du Climat (DGEC, Ministère de l'Ecologie) estime nécessaire, outre la prévention des conflits d'usage, d'en maîtriser les problèmes de pollution atmosphérique : « si ces problèmes ne sont pas traités correctement, les projets risquent de connaître un coup d’arrêt ».
Voici la conclusion d'une étude du CSTB sur le bois énergie : « Le bois est une énergie renouvelable d’avenir, notamment sous la forme de plaquettes ou de granulés dont le marché se développe rapidement. Les aspects de la problématique du bois énergie sont multiples, de la gestion du patrimoine naturel à la sécurité incendie en passant par l’indépendance énergétique et l’impact environnemental. L’importance de certains aspects tels que la qualité de l’air ou les risques sanitaires ne doit pas être sous-estimée sous peine de compromettre le bon développement de la filière. En particulier on doit favoriser les appareils à bon rendement de combustion non seulement pour économiser les ressources mais aussi pour diminuer les risques sanitaires ».