Les auteurs de ce dossier sont Henry de Boisseguin, Louis de la Bastide et Véronique Martin, un grand merci à eux.
Introduction
Planète du dieu de la guerre, Mars fut également chez les Babyloniens associé au dieu des Enfers et de la Peste ou, chez les Grecs, à Arès qui semait la mort mais sut inspirer l'amour à Aphrodite. Elle fut aussi un cauchemar pour les astronomes. De touttemps la planète Mars a fasciné et étonné les hommes. Dans les années 1990, la phobie des petits hommes verts de Mars a mis en ébullition l'inspiration artistique de beaucoup de cinéastes... Du fait de sa grande similitude avec la Terre un projet est né: la terraformation de Mars.
On peut donc s'interroger si l'homme peut changer le climat de Mars pour la rendre habitable.
Pour répondre à cette question, nous étudierons dans un premier temps le concept du "terraforming", puis dans une seconde partie, l'état actuel de Mars et enfin, les projets de terraformation de Mars.
2 - Le terraforming: le concept
De tout temps, l'homme a transformé son environnement. Il est ici question de changer le climat d'une planète. Avec les progrès technologiques que notre société connaît actuellement, l'action de l'homme sur l'environnement de la planète Terre est de plus en plus considérable. L'homme a réussi à transformer le climat de la Terre. De là à espérer qu'un jour nous puissions modeler et transformer une planète entière à notre guise, il n'y a qu'un pas...
Naissance d'un concept (historique)
Le procédé qui consiste à modifier radicalement les conditions existantes à la surface d'une planète pour la rendre habitable est née sous la plume de William Olaf Stapledon, un poète et philosophe anglais surtout connu pour ses romans de science-fiction. Le concept apparaît pour la première fois dans un roman de 1930, Last and First Men, relatant l'épopée de l'humanité à travers le système solaire et l'Univers sur... Deux milliards d'années ! Pour purifier l'atmosphère empoisonnée de Neptune et la rendre respirable, les hommes libèrent à sa surface des plantes génétiquement modifiées, qui vont absorber les molécules toxiques et injecter de l'oxygène.
Le mot terraforming (terraformation en français) est né en 1942 dans le cerveau d'un écrivain de science-fiction américain, Jack Williamson (dans Collision Ship), le but étant de rendre une planète aussi hospitalière que la Terre.
Depuis son invention le terraforming est un sujet de prédilection des auteurs de science-fiction. L'œuvre de référence sur la terraformation de Mars et ses conséquences est l'étonnante trilogie de Kim Stanley Robinson (Mars la rouge, Mars la verte, Mars la bleue, 1993-1996).
En 1961, Carl Sagan est le premier scientifique à prendre la terraformation au sérieux et à l'appliquer à une planète: Vénus. Sagan propose un mécanisme pour rendre la planète Vénus plus clémente. Comparée à la Terre, Vénus est un véritable enfer. A sa surface, la température avoisine les 460°C, et la pression atmosphérique est 90 fois plus élevée que la pression atmosphérique terrestre. N'importe quel organisme déposé à la surface de Vénus est immédiatement cuit et écrasé ! A la température et à la pression atmosphérique s'ajoute la grande quantité de gaz à effet de serre de l'atmosphère vénusienne (CO2 et vapeur d'eau). L'idée de Sagan consistait à tenter d'absorber le CO2 atmosphérique par l'activité photosynthétique d'algues et ainsi aboutir à un refroidissement de la planète. Mais ce scénario n'avait pas grande chance d'aboutir à un changement radical du climat de Vénus car sous l'effet de fortes chaleurs le développement d'algues est peu probable...
A ce jour l'étude la plus détaillée est celle de Christopher Mc Kay, Owen Toon et James Kasting qui se sont focalisés sur la planète la plus prometteuse en matière de terraformation: Mars, planète à laquelle nous nous intéresserons par la suite.
"Ingénierie planétaire" et "terraforming": quelles différences? Quelles relations ?
Définitions
Les hommes peuvent survivre dans un milieu hostile de deux manières différentes: soit ils amènent leur propre environnement comme ils l'ont fait sur la Lune lors des différentes missions Apollo avec des bouteilles d'oxygène, soit ils essayent de transformer l'environnement inhospitalier de manière à le rendre habitable.
Buzz Aldrin photographié sur la Lune avec sa combinaison obligatoire à sa survie...
Photo: "à la conquête de la Lune" de Jacques Villain
La seconde solution est de loin la plus intéressante: les colons pourraient alors vivrent en totale autonomie et indépendamment de la Terre. C'est l'objectif de notre étude.
On parle "d'ingénierie planétaire" pour définir les actions à entreprendre pour modifier une planète pour qu'elle ressemble au final à la notre. Cependant le terme d'ingénierie planétaire peut être utilisé pour définir deux phases: l'ecopoiesis (mot grec dont la racine signifie "la réalisation des conditions nécessaires à la vie", qui signifie aussi l'implantation d'organismes pionniers à la surface d'une planète) suivi de la terraformation proprement dite.
Comme il le suggère, le terme terraformation désigne l'ensemble des opérations nécessaires à la transformation d'une planète en une autre Terre. C'est-à-dire réussir à créer sur une planète (Mars, Vénus...) une atmosphère et un environnement similaire à ce que nous connaissons sur Terre. C'est un processus d'ingénierie planétaire.
La recette pour fabriquer une planète habitable n'est pas simple et demande un certain temps, en effet selon les hypothèses la durée totale du terraforming varie entre une centaine d'années et 100 000 ans dans le cas de Mars.
Comment faisons-nous ?
Le réchauffement de Mars est une étape indispensable à sa terraformation. Pour terraformer une planète il est nécessaire de transformer son atmosphère...
Pour une planète comme Vénus où l'atmosphère est constituée principalement d'acide sulfurique (vastes nuages à 60 Km d'attitude) et de dioxyde de carbone (CO2, de 0 à 30 Km) et où la température moyenne s'élève à 470°C avec une pression atmosphérique 90 fois plus élevée que sur Terre, le travail semble plutôt laborieux. Cependant, les scientifiques pensent qu'en introduisant une bactérie dite hyperthermophile (c'est-à-dire qui atteint son métabolisme optimal dans les hautes températures) on peut améliorer l'état actuel de la planète. Le pyrodictium occultum est une bactérie qui atteint son métabolisme optimal à 105°C. Sur Terre, elle peut être trouvée dans les volcans sous-marins où elle s'attache aux coussins de magma à l'aide de longs fils de protéines. De plus, elle est lithotrophique: elle trouve toute son énergie dans la roche, obtenant notamment son oxygène en faisant réagit l'acide sulfurique, et ses condiments à l'aide du CO2.
Il va sans dire que Vénus serait un paradis pour elle. Petit à petit l'atmosphère deviendrait respirable pour les petits végétaux, permettant au final l'obtention d'un taux d'oxygène suffisant pour l'homme, ainsi que l'ajout de gaz tel que le diazote (N2)...
Pyrodictium Occoltum:
Pour une planète comme Mars, quatre modifications majeures devraient être opérées:
- Augmenter la température de surface de près de 60°C,
- Densifier l'atmosphère,
- Rendre l'eau liquide disponible,
- Diminuer le flux d'U.V. (ultra violet, domaine d'une longueur d'onde inférieur à 400nm et qui va jusqu'à 10nm) et des rayons solaires.
Une fois ces modifications obtenues, l'ecopoiesis devient possible.
3 - Le terraforming: les besoins
Quels sont les besoins vitaux d'un organisme humain ?
(qui détermineront les changements climatiques nécessaires à la terraformation...)
L'Homme est conditionné pour vivre dans des conditions d'environnement précises: notamment la présence d'eau, d'air, une pression et une température du milieu ambiant adéquates. Toute déviation notable par rapport à son milieu naturel est susceptible d'entraîner un fonctionnement anormal de l'organisme. C'est la raison pour laquelle il faut tenir compte des critères énumérés ci-dessus pour une transformation du climat martien.
La présence d'eau
Si la Terre est la seule planète habitée du système solaire, c'est grâce à l'eau. S'il est possible de jeûner durant des semaines, la privation d'eau pendant plus de trois jours est souvent fatale. Rien d'étonnant à cela: l'eau est le constituant essentiel du vivant et représente 65 à 70% du poids d'un adulte.
Dotée de propriétés exceptionnelles, la molécule d'eau joue plusieurs rôles clés. A la fois milieu liquide dans lequel baignent les cellules et vecteur de chaleur sous forme de vapeur, elle est l'un des meilleurs solvants disponibles (l'eau est un solvant polaire c'est-à-dire permettant la dilution des espèces ioniques). La plupart des corps étant solubles dans l'eau, celle-ci est chargée de transporter et de redistribuer les minéraux à la surface de la Terre. Pour l'homme l'eau est la boisson physiologique indispensable car elle est acalorique et source de minéraux utiles.
Le cycle de l'eau s'effectue sous l'effet d'énergie thermique apportée par le Soleil. L'eau s'évapore depuis la surface des océans et des continents. Elle transite ensuite par l'atmosphère, où elle ne reste en moyenne que huit jours. Par condensation, elle retombe finalement en pluies et vient grossir les mers. Et le cycle recommence... L'implantation d'un tel cycle sur Mars serait un grand pas pour sa colonisation par l'homme.
Dans la stricte définition des physiologistes, la respiration est l'ensemble des fonctions qui assurent les oxydations cellulaires; elle regroupe la ventilation (convection gazeuse entre l'air ambiant et l'alvéole pulmonaire), la circulation sanguine et les transferts intra-cellulaires du dioxygène.
L'oxydation est une réaction chimique souvent provoquée par le dioxygène, par laquelle on retire des électrons à un atome ou à une molécule.
Les oxydations cellulaires sont les résultats d'actions enzymatiques qui aboutissent finalement à la production d'énergie et à l'élimination des déchets toxiques. Ce sont ces réactions qui sont vitales à la survie des cellules et donc à l'organisme, et qui nécessitent un apport de dioxygène.
L'organe le plus sensible au déficit de dioxygène (ou hypoxie) est le système nerveux: pour éviter tout problème il est préférable d'essayer de stabiliser le pourcentage de dioxygène dans l'air respiré à 20,946%.
La présence d'une température et d'une pression donnée
La température
L'organisme humain a besoin d'une certaine température pour vivre, elle doit être comprise entre -3 et 40°C en moyenne. En effet au sein de l'organisme se trouvent des enzymes (ou "biocatalyseur"), c'est-à-dire des substances organiques produites par l'organisme lui-même ayant pour but d'accélérer des réactions. Ces enzymes dépendent des conditions extérieures: pH et température.
L'influence de la température sur les enzymes organiques peut se résumer sur le graphe ci-dessous:
La pression
La pression dans l'atmosphère, ou pression barométrique, varie avec l'attitude selon une loi approximativement exponentielle. La valeur standard de la pression au niveau de la mer est 1013,25 hPa (hectopascal), sur la Terre. Cette pression relativement constante permet à l'organisme d'avoir un certain équilibre. Lors d'un changement de milieu ou d'altitude, l'homme doit être vigilant, par exemple lors de la plongée sous-marine, on observe une augmentation de la pression dûe à la poussée d'Archimède qui peut provoquer le phénomène dit de "bloodshift" c'est à dire une diminution du volume de sang estimée à un peu moins d'1 litre( cf.: schéma 1 ci-dessous), ou inversement, lors d'une augmentation de l'altitude, la pression diminue (cf.: schéma 2). Sur la Lune, la pression étant plus faible que sur la Terre, l'homme est beaucoup plus léger ce qui lui permet de faire des sauts impressionnants. Cependant l'homme voit son habilité motrice diminuer.
Schéma 1:
La poussée d'Archimède (antagoniste de la pesanteur) redistribue une importante quantité de sang de la partie inférieure du corps vers le thorax (la masse sanguine est représentée en rouge).
Schéma 2:
Buts et utilités du terraforming
La terraformation d'une planète permettrait à l'homme de disposer d'une planète de rechange, d'une deuxième planète! La planète rouge se prête le plus à la terraformation, de par sa proximité de la Terre et de ses points communs avec elle... En cas de surpeuplement de la Terre, une partie de la population pourrait coloniser l'ex-planète rouge devenu bleue. De plus, on observe une dégradation de plus en plus important de l'atmosphère terrestre, si celle-ci devenait irrespirable (par suite d'un incident nucléaire ou autre...) l'homme pourrait émigrer vers une planète terraformée...
Les scientifiques pensent que si l'on réussit à envoyer des hommes sur Mars, beaucoup de questions pourraient être résolues, telle que la présence d'eau, de vie extra-terrestre... De plus on pourrait découvrir des nouveaux minéraux, et pourquoi pas, de nouvelles énergies? La terraformation d'une planète, quelle qu'elle soit, est un véritable challenge pour l'homme. La terraformation de Mars sera-t-elle celui du 21ème siècle, comme l'a été dans les années 1960 la conquête de la lune?
La suite du dossier est entièrement dédié à l'étude de la planète Mars d'une part et à sa terraformation d'autre part.
4 - Etat actuel de Mars: caractéristiques
Nous sommes maintenant amenés à nous demander si la planète Mars peut être terraformée. Mais avant cela il faut connaître précisément les caractéristiques de Mars. Il faut donc faire une liste des différences et des similitudes entre la Terre et mars, et voir plus en profondeur son atmosphère, si il existe de l'eau sur mars et si oui sous quelle forme. De plus il est intéressant de se demander si Mars a accueilli la vie et si elle l'accueille encore.
Quelles sont les caractéristiques de Mars?
Information générale
Mars est la quatrième planète du système solaire, c'est une planète tellurique ayant un rayon deux fois plus petit que la Terre, soit 3394 km, et une masse presque dix fois plus petite que la Terre. La pesanteur y est de 3,72m/s², à peu près 3 fois plus petite que sur Terre. Sa période de rotation est de 24h 37 min et 22.7s. Une année martienne dure 1 an et 11 mois soit 780 jours, et son inclinaison est de 25° 12' ce qui est assez proche de celle de la Terre (23° 27'), et qui donne à Mars un cycle semblable à des saisons. Celle-ci se remarque spécialement par la formation de calottes de CO2 lors des périodes froides (il faut que la température soit de -123°C pour que le CO2 puisse se condenser) et de la sublimation de celles-ci en été. Mars est situé a 1.5UA et ne semble pas présenter de champs magnétique.
Le schéma ci dessus montre les saisons de l'hémisphère nord.
La pression atmosphérique n'est que de 6hPa soit plus de 150 fois inférieure à celle de la Terre, et ne permet pas la présence d'eau à l'état liquide sur sa surface. C'est le problème majeur pour le maintien de la vie telle que celle de l'homme. L'atmosphère de Mars est composée principalement de dioxyde de carbone CO2 (95,32%) mais aussi de 2,7 % de diazote, et de 1,6 % d'argon. Il y a également des traces de dioxygène (0,13 %), de monoxyde de carbone (0,07 %) ainsi que de vapeur d'eau. L'atmosphère de Mars contient très peu d'ozone (0,3 ppm, soit 1/60ème de l'épaisseur de la couche d'ozone terrestre) et Mars ne possède donc pas de protection contre le rayonnement UV.
A l'origine Mars devait posséder une pression de 1 à 5 bars mais sa faible attraction n'a pas été suffisante pour retenir les gaz qui se sont alors échappés dans le vide. La libération des gaz n'a pas été totale (20% seulement). De plus il est possible que de gros météorites aient soufflé l'atmosphère et contribué à sa perte.
La majorité de l'eau que contenait Mars s'est évaporée et sous l'influence des rayons du Soleil s'est transformée par photodissociation en Hydrogène et Oxygène simple qui de par leur faible poids ne sont pas retenus gravitationnellement sur la planète.
La température
Mars est situé à 1.5UA, sa température maximale est de 22°C mais peut descendre jusqu'à -143°C avec une moyenne de -53°C. Les causes de cette faible température sont nombreuses. La première est liée à son éloignement du Soleil, ce qui fait qu'elle ne reçoit que très peu d'énergie, de plus lorsque le sol est réchauffé par le Soleil une grande partie de cette énergie est réfléchie sous forme de rayon infrarouge. Cette énergie peut ne pas être perdue si la présence de gaz à effets de serre est assez importante, or le CO2 de Mars (principal gaz à effet de serre) s'est déposé dans les sols sous la forme de carbonates (principalement du calcaire ou carbonate de calcium, CaCO3) par le cycle de l'eau. Par exemple, sous l'effet des pluies, le CO2 se transforme en acide carbonique (H2CO3) selon la réaction suivante: CO2 + H2O == H2CO3. L'acide carbonique peut ensuite se lier au calcium pour former du carbonate de calcium (calcaire) qui se dépose dans les océans. Et donc sa concentration a diminué et l'effet de serre avec lui. Normalement l'activité tectonique ainsi que radioactive de la planète assure l'équilibre en faisant "fondre" ces carbonates mais sa faible taille ne lui a pas procuré assez de réserve pour que son activité radioactive dure jusqu'à aujourd'hui.
La planète Mars possède aussi ce que l'on pourrait appeler un cycle de poussière. Des tempêtes de poussières apparaissent à intervalles réguliers lorsque Mars est au plus près du Soleil (périhélie). A ce moment le pôle sud reçoit près de 40% d'énergie en plus que le pôle Nord. Il naît alors un contraste de température entraînant des vents violents qui soulèvent une grande quantité de poussière dans l'atmosphère. Les particules absorbent alors plus d'énergie que l'air environnant, provoquant des vents encore plus violents qui soulèvent encore plus de poussière et qui de cette manière s'étendent sur toute la planète et provoquent un échauffement général. Ce phénomène existe aussi sur Terre mais le caractère désertique de Mars lui permet de s'entretenir. Les vents peuvent alors atteindre 100 km.h-1.
L'image de gauche, obtenue par le spectromètre d'émission thermique entre le 18 juin et le 28 juillet, montre l'impressionnante progression du nuage poussiéreux (Crédit photo: NASA/JPL) que peut créer un réchauffement de plus de 30°C.
5 - Etat actuel de Mars: l'eau
Nous avons précédemment vu que la température et la pression atmosphérique de Mars ne permet pas à l'eau liquide de se maintenir, mais qu'il existe encore une infime part d'eau dans l'atmosphère de la planète.
De l'eau a coulé sur Mars
Les nombreuses photographies de Mars montrent qu'un liquide, vraisemblablement de l'eau, a coulé sur la planète. En effet des réseaux de vallées sont présents presque partout à la surface et sont la plupart du temps situés sur des vieux terrains.
On peut distinguer deux types de réseau: des réseaux longs, sinueux, avec peu d'affluents (Nirgal Vallis) et des réseaux petits, complexes avec de nombreux affluents. Les réseaux de vallées ressemblent au premier abord aux vallées terrestres. Cependant, et contrairement aux vallées terrestres, nous n'avons pas encore observé de lits de rivières au fond des vallées martiennes. De plus, les réseaux de vallées sur Mars ne sont jamais aussi denses que leurs homologues terrestres. Ces éléments indiquent que les vallées martiennes n'ont pas uniquement été formées sous l'action d'un cours d'eau. Les formes observées sur Mars pourraient également s'expliquer par un sapement de terrains (affaiblissement du sol par des eaux souterraines ou liquéfaction de la glace du sous sol et effondrement d'une partie du terrain). Des processus similaires ont eu lieu sur Terre (au Colorado par exemple). Le sapement permet en fait d'expliquer correctement les réseaux longs et sinueux. Quant aux réseaux plus complexes, ils ont sans doute une double origine: creusement de la vallée sous l'action d'un cours d'eau puis sapement du terrain.
De plus ce schema montre un aspect d'îles-larmes (ici à l'embouchure d'Ares Vallis) qui semblent avoir été façonnées par le courant. Le flot a divergé après avoir rencontré un obstacle, ici un cratère. La larme du bas mesure 45 Km de long.
Où est passée toute cette eau?
La planète Mars est apparue dans la même région du système solaire que la planète Terre et il n'y a pas de raisons qu'au cours de sa formation, elle n'ait pas accumulé autant d'eau que sa sœur. Il est donc évident qu'il y avait de l'eau sur mars mais la question est de savoir où est passé toute cette eau et surtout si elle est toujours présente sur la planète.
On estime que l'eau disponible lors de la formation de Mars formait une couche d'au moins 100 mètres d'épaisseur.
On pense que suite aux inondations l'eau s'est transformée en glace mais la pression de l'atmosphère diminuant, cette glace ne pouvait plus fondre et se sublimait alors automatiquement. Le schéma suivant montre que l'atmosphère de Mars n'est pas suffisante pour posséder de l'eau à l'état liquide. Une fois dans l'atmosphère l'eau se perd dans l'espace ou subit une photodissociation par le rayonnement UV. Mars est alors devenu un désert à l'échelle planétaire.
D'autres scientifiques plus optimistes pensent que sous une surface aride et désolée, Mars cacherait effectivement une très grande quantité d'eau, principalement sous la forme de glace. Le sous-sol martien renfermerait la presque totalité des ressources en eau de la planète ! Cette eau serait présente sous plusieurs formes principales: liée chimiquement à certains minéraux comme les argiles, ou interstitielle (contenue dans les pores et les fractures des roches).
Mars ayant subit un grand bombardement de météorites on pense que ceux-ci ont donné naissance à près de 2 km d'éjecta qui repose sur des coulée de laves et des dépôts sédimentaires liés au début de la vie de la planète. De plus les nombreux impacts ont fissuré le sous-sol rocheux de la planète.
Le tout forme une couche superficielle hautement poreuse qui entoure la planète et que l'on nomme mégarégolite, fortement poreuse à cause des nombreuses fracture. Mais cette porosité diminue avec la profondeur car la roche est soumise à son propre poids.
Le niveau d'auto-compaction est défini par la profondeur à partir de laquelle la porosité tombe en dessous de 1%. La présence d'eau à l'intérieur d'un pore peut contrebalancer la pression qui tend à les fermer. Ainsi, une croûte humide possède une porosité qui persiste à une profondeur bien supérieure à celle d'une croûte totalement sèche. L'eau peut aussi jouer le rôle inverse, en diminuant la porosité par différents mécanismes (par exemple en précipitant certaines substances qui vont obstruer les pores rocheux).
Les atterrisseurs viking ont estimé cette porosité à 50%, mais leurs calculs ont été fait en étudiant la fine couche en surface. Selon nirgal.net il semble plus raisonnable d'opter pour une porosité de 20% c'est à dire similaire à celle de la Lune. Avec une telle porosité le sous sol de Mars pourrait contenir l'équivalent d'une couche de 540 mètres d'eau recouvrant la totalité de la planète, et le niveau d'auto-compaction apparaîtrait à une profondeur de 8 kilomètres. De plus il est possible que Mars puisse posséder des océans souterrains sous la surface, sous forme de glace.
Le monticule que l'on peut voir est un pingo, une poche de glace compacte qui, en se formant, a eu assez de puissance pour soulever la surface. Les pingos constituent des indicateurs particulièrement visibles de la présence de glace dans le sous-sol.
Cette image montre avec évidence que des "pingos" existent bien sur Mars, ce qui est une principale évidence de grandes quantités de glace dans le sous sol de martien. Mais cette glace n'est pas toujours stable et il est possible que de l'eau se sublime surtout au niveau des latitudes moyennes.
A partir d'un certain niveau, la température augmente avec la profondeur. A une distance d'environ 3 kilomètres sous la surface pour l'équateur et de 5 kilomètres sous les pôles, la température du sous-sol atteint la valeur fatidique de 0°C et l'eau liquide peut alors exister. Le deuxième facteur n'est autre que la pression. A des profondeurs importantes (plusieurs kilomètres), la pression lithostatique (c'est à dire la pression exercée par les roches) doit être suffisamment forte pour permettre à des nappes d'eau d'exister.
En admettant une porosité de 20% Mars renfermerait alors l'équivalent d'une couche de plus de 500 mètres d'eau recouvrant toute la surface de la planète, dont 150 mètres à l'état liquide. On pense qu'une quantité importante d'eau pourrait se trouver piégée sous la glace de CO2 des pôles (ici: la calotte polaire Nord). La présence de glace dans le sous-sol laisse des traces nettes en surface (ex: pingo). Et les caméras des orbiteurs qui ont tourné pendant des années autour de la planète rouge n'ont pas manqué de les enregistrer. Mais tous ces signes ne peuvent aboutir qu'à une simple théorie basée seulement sur des traces indirectes. Nous allons donc maintenant voir les traces d'eau aujourd'hui.
Des traces d'écoulement recentes
Des traces d'écoulement sont établis sur de nombreuses photos, entre autres prises par la sondeMars Global Surveyor.
Les clichés permettent d'apercevoir distinctement des sortes de ravines en forme de V sur le flanc du cratère. Toutes les ravines partent du même niveau et se prolongent par un fin chenal un peu plus foncé que le sol à coté. Il semble possible que ces ravines aient été causées par un liquide, chaque rigole comporte trois éléments géomorphologiques distincts typiques des écoulements d'eau sur Terre. A l'amont, on trouve une sorte de dépression en forme d'amphithéâtre, qui correspond plus ou moins à la source elle-même. Cette dépression se prolonge vers l'aval par un chenal en V qui entaille la pente rocheuse. Après quelques centaines de mètres, le chenal semble disparaître en donnant naissance à un delta formé de l'accumulation des débris charriés par l'écoulement. Une étude montre que le tiers des écoulements sont situés sur des falaises et des cratères, et le quart des autres sur les parois des régions polaires Sud et quelques autres sur des vallées très importantes. De plus près de 90% d'entre elles s'observent dans l'emisphere Sud et sont localisés entre 30° et 70° de latitude.
Voyons maintenant plus en détails comment auraient pu se former ces rigoles.
Tout d'abord il faut savoir que pour avoir été causées par de l'eau, il faudrait que cette eau soit présente tout au plus à quelques centaines de mètres sous la surface martienne, avec au moins un volume de 2000 m³ pour pouvoir déplacer de telles quantités de débris. Ces ravines semblent être jeunes car elles entaillent des terrains vierges de cratères, et surtout parce qu'elles affectent des structures géologiques éphémères. Ces structures ne dépassent pas 10 000 ans, ainsi on peut dire que ces ravines datent d'au plus 10 milliers d'années. De plus on peut remarquer que ces zones sont plus claires que les zones alentours, or sur Mars la poussière ne cesse de tomber et forme une couche claire. Ces terrains étant encore foncés, l'écoulement date de peu de temps.
Le problème est de savoir si c'est bien de l'eau qui a coulé sur Mars. On pourrait penser que ces ravins ont été causés par des avalanches de matériaux secs qui sont d'ailleurs banals. Mais les sources partent toutes d'à peu près le même points alors que des avalanches pourraient partir de n'importe quel point.
De plus ces rigoles ont très bien pu avoir été creusées par un fluide autre que l'eau, tel que le CO2 liquide mais celui-ci ne peut pas exister à une pression aussi faible. De plus la présence d'eau liquide à une si faible profondeur et par une pression aussi basse pose un problème. Pour pallier ce paradoxe les chercheurs ont mis au point la théorie du barrage de glace. Certains chercheurs affirment que ce n'est pas de l'eau qui coule mais bien du CO2, cette hypothèse semblant bien plus probable car de l'eau ne pourrait pas exister à une si faible profondeur et à une si faible température (-120°C).
Voyons tout de même la théorie donnée par la Nasa qui permet de donner de l'espoir et de financer de telle recherche, et qui est reprise dans le cas de coulées de CO2 .
Théorie du barrage de Glace
Tout commence par la présence à quelques centaines de mètres de profondeur d'une couche géologique semi-poreuse.
Lors d'un évènement géologique la couche est tronquée et affleure alors le long de l'escarpement. L'eau commence ainsi immédiatement à se répandre le long des parois. Mais la température (qui est généralement située en dessous de 0°C) et la pression atmosphérique très basse ne vont pas lui permettre de rester dans cet état. L'eau va se mettre à bouillir, et tandis qu'elle se perd dans l'atmosphère un bouchon de glace va se former au niveau de la source. Derrière la carapace de glace, la pression hydrostatique monte progressivement. L'inévitable finit alors par se produire. La pression est tellement forte que le bouchon naturel de glace explose, livrant le passage à des flots de liquides qui se répandent avec violence sur les pentes abruptes. Le débit est tellement important que l'eau a le temps de parcourir quelques dizaines ou centaines de mètres avant de disparaître. La faible distance parcourue par les rigoles prouvent qu'il existe une limite au-delà de laquelle l'eau ne peut plus exister sur forme liquide.
L'eau ne coule donc plus sur mars ou seulement dans de rares cas exceptionnels, mais on peut penser qu'elle existe encore à l'état liquide sous la surface. Or qui dit eau liquide dit peut être présence de Vie.
6 - La vie sur Mars: les indices
Nous avons vu précédemment qu'il existait de l'eau à l'état liquide sur Mars, et qui dit eau dit possibilité de vie. La théorie actuelle sur la naissance de la vie sur Terre étant basée sur un ensemencement par des météorites, il y a autant de chance que Mars ait été ensemencé à la même époque. Mais il ne suffit pas que les conditions soit réunies pour qu'il y ait forcément apparition de vie. Il nous faut donc chercher des preuves. Pour cela nous pouvons étudier les météorites martiennes ou bien nous rendre sur place faire des tests, ce qui présente un nombre important de difficultés.
Généralité sur les météorites martiennes
On compte de nos jours 26 météorites martiennes découvertes par l'homme. La plupart ont été découvertes en antarctique. Mais on peut se demander comment un morceau de Mars a bien pu arriver sur Terre.
Ce schéma montre qu'un astéroïde de quelques dizaines de mètres arrivant à plus de 10km.s-1 a suffisamment d'énergie pour accélérer des fragments de Mars au delà de la vitesse de libération, qui est de 5,2km.s-1. Et un faible pourcentage de ces fragments peut retomber sur la Terre généralement après un voyage d'environ 10 millions d'années. Les chercheurs ont choisi de désigner les météorites martiennes par SNC (pour Shergottite Nakhlite Chassignite, du nom des lieux de découverte des trois premières météorites martiennes).
Pour dater ces météorites on utilise les couples uranium 238 / plomb 206 (238U / 206Pb, t1/2: 4,5 milliards d'années), potassium 40 / argon 40 (40K / 40Ar, temps de demi-vie de 1,26 milliards d'années) ou encore rubidium 87/ strontium 87 (87Ru / 87Sr, temps de demi-vie de 48,8 milliards d'années). Les chercheurs démontrent que ces météorites proviennent de Mars car elles possèdent la même proportion des différents isotopes de l'oxygène et qu'ils ont majoritairement été formés récemment, et que certains possèdent une structure minéralogique qui suggère une appartenance à des basaltes hydratés. Donc ils ont été formé sur un corps présentant encore une activité volcanique il y a seulement quelques centaines de millions d'années. Les météorites semblent ainsi provenir de Mars car les autres planètes telluriques du système solaire ont des caractéristiques impliquant qu'aucun fragment ne peut arriver sur la Terre.
Des indices en faveur d'une vie sur Mars
Les indices en faveur de l'existence d'une éventuelle vie martienne sont au nombre de cinq. Pris séparément, ce ne sont pas des preuves d'une activité biologique. Mais mis ensembles, l'hypothèse que Mars ait connu la vie est renforcée. pour expliquer les différentes structures observées on peut penser à des phénomènes géochimiques complexes qui n'ont rien à voir avec la vie, mais qui nécessitent des conditions qui ne peuvent être réalisées ensemble.
Les nanofossiles
L'équipe de David Mc Kay a observé dans la météorite ALH84001 des structures longiformes de 20 à 100 nanomètres de long. Ces structures ressemblent à des bactéries terrestres, mais en 100 fois plus petit. Pour certains ce ne sont que de vulgaires cristaux qui ressembleraient étrangement à des micro-organismes. Ou encore ils auraient pu être causés par l'application de la fine pellicule d'or qui sert à l'observation au microscope électronique. Mais ces impuretés ne pourraient avoir cette allure et elles seraient beaucoup plus nombreuses. La question est donc de savoir si de tels micro-organismes peuvent exister. Or des recherches récentes ont montré que de telles nanobactéries existaient sur terre par exemple près des sources thermales.
Les globules de carbonates
les structures observées semblent être des globules de carbonates d'origine biologique. Leur âge par datation argon est antérieur à la formation de la roche (-3.6 milliards d'années). A cette époque Mars était chaude et humide avec une atmosphère et une eau saturée en CO2, et de l'eau a pu s'infiltrer et déposer des carbonates qui se sont apparemment fossilisés. Il est possible que des organismes aient participé au dépôt de ceux-ci. En effet ces carbonates présentent une structure complexe (au centre, du calcium et du manganèse, puis des anneaux concentriques de fer, de magnésium et de soufre) qui pourraient être le résultat de réactions d'oxydoréduction d'origine biologique. Les conditions de formation, et spécialement pour la température, sont très importantes car certains se sont formés à très haute température (600°C) par réaction chimique. Or de telles températures sont bien évidemment incompatibles avec la vie. Une étude complexe des proportions des couples 18O/16O a permis de conclure une température de formation inférieure à 100°C, ce qui est compatible avec la vie. Mais il ne faut pas exclure une contamination dans les glaces de l'antarctique où la météorite a séjourné près de 13000 ans.
ALH84001 contient de nombreuses variétés de cristaux de magnétite (un oxyde de fer de formule Fe3O4). Mais parmi eux, certains sont bien particuliers et rappellent ceux synthétisés par des bactéries terrestres vivant en anaérobiose (c'est à dire en absence d'oxygène). Ces cristaux sont structurellement parfaits et ont cristallisé dans le système cubique. Il semble qu'ils soient identiques en taille, en forme et en composition, à ceux produits par des micro-organismes terrestres. Apparemment, aucun processus non biologique ne serait capable de produire des cristaux de cette forme. Enfin, ces grains de magnétite sont vraiment incorporés dans la roche et ne peuvent donc provenir d'une contamination.
Mais d'autres cristaux présentent des structures cristallines qui ne peuvent se former qu'à des températures supérieures à 500°C, à partir de gaz chauds. Des cristaux de ce type (allongés) peuvent se former au niveau des fumerolles (fissures dans les zones volcaniques qui laissent s'échapper du gaz). Dans ces conditions, les carbonates n'auraient pas une origine biologique mais géochimique.
Il semblerait que certaines bactéries terrestres puissent produire des cristaux allongés, et non pas uniquement cubiques donc il est possible que ces magnétites aient été formées par des organismes vivants.
Lors de la formation d'une roche certains minéraux peuvent prendre une orientation particulière sous l'influence d'un champ magnétique. ALH84001 contient ce magnétisme conservé par des sulfures, Or ils perdent cette orientation si la température dépasse 325°C. Cela indique que la roche n'a pas subit ce genre de températures et ainsi que les autres éléments n'ont pas pu se former à une température supérieure. De plus pour que ces minéraux acquièrent cette orientation il faut que Mars ait possédé un fort magnétisme, ce qui implique une protection des rayons cosmiques et des vents solaires nocifs à la vie.
Les PAHs
Enfin les Chercheurs ont détecté des composés organiques complexes ou PAH (pour hydrocarbures aromatiques polycycliques). Ceux-ci sont concentrés autour des grains de carbonates.
Les PAH proviennent généralement de la désintégration des tissus vivants. Ceux d'ALH84001 semblent provenir de la fossilisation d'anciennes formes de vie martienne. Les PAH de ces météorites se distinguent de ceux que l'on trouve habituellement dans d'autres météorites ou de la glace de l'Antarctique car ils sont de grande taille. De plus, la localisation de ces molécules semble montrer qu'elles ne proviennent pas d'une contamination terrestre, car plus on s'enfonce dans la roche plus la concentration des PAH est importante alors que dans le cas d'une contamination, on observerait l'inverse. Mais encore une fois cette présence n'implique pas nécessairement la vie. Il peuvent se former à partir d'autres composés organiques (à très haute température et sur une très longue période) ou bien provenir de météorites qui se seraient abattues sur Mars.
La météorite ALH84001 et son cube témoin de 1cm de coté:
Une contamination terrestre ?
Deux équipes de chercheurs ont annoncé que la météorite avait été contaminée par des molécules organiques terrestres. La première a montré que les acides aminées présents dans la météorite avaient une origine terrestre. Leur étude est basée sur la forme de ces acides aminées ainsi que sur le rapport 2D/1H. La seconde a recherché l'origine du carbone et ils ont conclu, en analysant la quantité de 13C, que celui présent dans les carbonates était clairement d'origine extraterrestre.
Que dire ?
Que l'astéroïde ait été contaminée ne remet pas en cause que la Nasa ait découvert des traces d'une vie antérieure à la chute de ce météorite. La vie aurait donc existé sur mars il y a 3,6 milliard d'années sous la forme de micro-organismes. Mais devant une telle affirmations la prudence reste de rigueur car rien ne prouve avec certitude absolue que cette pierre provient bien de Mars (comme toutes les autres météorites SNC d'ailleurs). Et les composés observés pourraient avoir une origine chimique ou géochimique plutôt que biologique (les atterrisseurs des sondes Viking ont permis de mettre en évidence la chimie "exotique" du sol martien que nous allons évoquer plus loin). Cette météorite ne règle donc pas définitivement la question de l'existence d'une vie martienne. Elle ne fait que relancer le débat.
7 - La vie sur Mars: la quête des vikings
Dans les années 70 la Nasa a envoyé sur Mars deux sondes, les Viking I et II, qui avaient entre autre mission la détection d'une forme quelconque de vie sur la planète.
Ces deux sondes contenaient de nombreux instruments dans le but de réaliser des expériences biologiques au nombre de 3. Mais aussi de nombreux autres tests. Les deux atterrisseurs ont fonctionné durant deux années martiennes. Avant l'envoi des atterrisseurs, de nombreuses expériences avaient été réalisées pour étalonner les détecteurs de vie. Celles-ci ont été réalisées sur une multitude de sols pour être certain de ne pas faire d'erreur d'interprétation des résultats.
Y a t-il photosynthèse ?
Cette expérience devait servir à détecter une assimilation du gaz carbonique par des organismes capables de fabriquer eux-même de la matière. Un échantillon de terre est placé en présence de CO2 marqué au carbone 14. Puis l'échantillon est mis sous une lampe pendant un certain temps. Le CO2 est chassé puis l'échantillon est porté à 600°C pour vaporiser les éventuelles matières organiques. Un détecteur de radioactivité recherche ensuite des éventuelles traces de 14C.
Il se trouve que le détecteur a bien trouvé du 14C mais également dans l'expérience témoin, qui avait été stérilisé par chauffage, donc même sans vie le sol de Mars absorbe du CO2.
Y a t-il respiration ?
Le conteneur est rempli d'atmosphère martienne puis on humidifie le sol pendant une semaine pour faire germer les éventuels spores, enfin on ajoute à l'échantillons des nutriments pour voir si ils se développent et rejettent un gaz lors de la digestion de matière organique. L'analyse dure 200 jours. On remarque que lorsque les nutriments sont versés il y a un dégagement important pendant près de deux heures puis plus rien. Il semble donc qu'il n'y ait eu qu'une réaction chimique avec les molécules du sol.
Un certain métabolisme
Cette expérience ressemble beaucoup à la précédente et vise à rechercher des traces d'un métabolisme qui utiliserait des nutriments pour se nourrir. La nuance réside dans le fait que les échantillons de sol martien sont humidifiés par un bouillon nutritif où les atomes de carbone de chaque composé organique sont radioactifs. Un détecteur doit identifier le CO2 radioactif éventuellement dégagé. Il se trouve qu'un dégagement fort est constaté mais que celui-ci ne dure pas. Le plus important est que pour la seule fois de ces trois expériences le tube stérilisé ne réagit pas. Il semble donc qu'il y ait une forme de vie mais il est étonnant que la réaction cesse définitivement alors même qu'il reste encore 90% des nutriments. Il semble qu'il faille encore une fois évoquer la thèse d'une réaction avec le sol de Mars.
Le résultat de cette expérience est encore aujourd'hui sujet à controverse. On peut difficilement nier le côté positif du résultat. Mais celui-ci n'est pas pour autant catégorique.
Ce que l'on peut en dire
On remarque donc que le sol martien possède des propriétés bien surprenantes. Les expériences des Viking ne donnent pas une vraie réponse à la question de la vie sur Mars et il faut bien comprendre également que le sol ne correspond pas à celui des 3cm de surface, de plus il semblerait qu'il existe une substance qui serait corrosive et qui détruirait toutes molécules organiques (une sorte de super-oxydant) et qui permettrait d'expliquer les bizarreries des différentes expériences de Viking.
Pour répondre à ces différentes questions il faudra attendre un retour d'échantillons, et peut être même que l'homme y pose le pied.
8 - Les méthodes de terraformation
Comment augmenter la température régnant à la surface de Mars, l'épaisseur de son atmosphère et sa composition afin d'y permettre la vie?
Un élément clef: l'effet de serre
Comme dit précédemment, une atmosphère très ténue, environ 100 fois moins dense que celle de la Terre, entoure la planète Mars. Cette atmosphère est principalement constituée de dioxyde de carbone, d'un peu d'azote et d'argon, et de traces d'autres composés. Ces caractéristiques ont deux conséquences importantes. D'une part, l'atmosphère ne peut engendrer un effet de serre important et se refroidit donc rapidement la nuit, bien au-dessous de 0°C. Le dioxyde de carbone lui-même gèle aux latitudes élevées, engendrant des calottes polaires dont l'extension est variable selon la saison. Il en résulte des changements très importants de la pression atmosphérique globale, qui peut descendre au-dessous de 7 millibars. Ces variations de pression engendrent des tempêtes de sable qui balaient la surface martienne. D'autre part, l'atmosphère est trop fine pour arrêter les particules et le rayonnement énergétique venant du Soleil. Ceux-ci arrivent à la surface et empêchent l'édification de composés formés de molécules complexes.
Deux facteurs importants entrent en jeu pour rendre Mars habitable:
- La pression atmosphérique
- La température à la surface
On suppose qu'un réchauffement artificiel de Mars (qui ne serait pas obligatoirement important, quelques degrés seulement), aurait pour conséquence la libération dans l'atmosphère du CO2 contenu dans des réservoirs naturels du sol. Cela augmenterait l'effet de serre, donc la température martienne, et un effet boule de neige se mettrait en place. Une augmentation de la température martienne engendrerait la fonte des pôles et par la même la création d'océans qui pourraient permettre la vie, et une atmosphère rendant la planète habitable car la protégeant des radiations solaires... Des études très poussées, menées notamment par Robert Zubrin (un scientifique convaincu de la possible terraformation de Mars) ont conclu qu'une hausse de 4°C suffirait pour initier le processus.
Dans ce qui va suivre, nous allons examiner le potentiel des différents schémas proposés pour produire le réchauffement initial déclencheur du processus, comme des miroirs en orbite stationnaire, l'importation de gaz de type "chlorofluorocarbones" (appelés communément "CFC") aux hauts pouvoirs à effet de serre, ou encore la production artificielle sur Mars de ces halocarbones.
Utilisation de miroirs en orbite martienne
Si cette hypothèse est retenue, elle nécessitera la mise en orbite à 200 000 km d'altitude de miroirs de diamètre supérieur à 100 km. C'est le minimum requis pour vaporiser le CO2 contenu dans les calottes glaciaires du pôle Sud martien, car en effet les glaces polaires de Mars contiennent beaucoup de ce gaz dense, composant une grande partie de l'atmosphère, actuellement sous forme solide ou emprisonnée. La chaleur provoquée par la mise en place de miroirs irradiant intensément la planète et agissant ainsi comme un "deuxième soleil" pourrait libérer ce gaz dans l'atmosphère et par là même augmenter l'effet de serre de Mars. Construit à partir de matériaux légers comme l'aluminium, chaque miroir pèsera au minimum 200 000 tonnes, et la quantité de métal requis pour en produire un sera colossale: une telle masse d'aluminium correspond à la totalité de la production mondiale d'aluminium sur 5 jours. Le miroir illuminerait le pôle Sud selon un angle faible et apparaîtrait dans la zone du ciel opposée au Soleil.
Une telle expérience a déjà été étudiée sur Terre, mais dans des proportions moindres, bien évidemment. Le premier miroir de l'espace a été testé par les Russes en orbite terrestre, et mesurait 20 mètres de diamètre (projet Znamia).
Le miroir Znamia, un miroir de ce type pourrait servir pour rechauffer Mars:
Vue d'artiste, le miroir renvoie la lumière du soleil vers Mars:
Utilisation des gaz à effet de serre
Nous savons que l'atmosphère terrestre est un mélange complexe de gaz qui retiennent la chaleur du Soleil près de la surface de la Terre, un peu comme les vitres d'une serre captent la chaleur des rayons du soleil. Les principaux gaz à effet de serre sont la vapeur d'eau, le dioxyde de carbone, le méthane, l'oxyde nitreux, l'ozone et les halo carbures. Ces gaz à "effet de serre" empêchent la chaleur du soleil de s'échapper, en fait ils absorbent les radiations infrarouges réfléchis par la planète, si bien que la quantité d'énergie reçue est plus importante que la quantité d'énergie renvoyée. Les gaz peuvent être plus ou moins absorbeurs D'I.R comme nous le verrons par la suite. par exemple, la température sur Terre baisserait de 33 degrés à -18 degrés, une température trop froide pour la vie telle que nous la connaissons, si il n'y avait aucun gaz a effet de serre dans son atmosphère.
Le CO2 n'est pas le seul gaz responsable de l'effet de serre, il n'a même qu'une contribution relativement faible sur Terre.
Les chlorofluorocarbones (ou CFC) induisent un effet de serre, à nombre de molécules égaux, dix mille fois plus important que le CO2. D'où l'idée d'introduire de manière artificielle des CFC dans l'atmosphère martienne, d'autant plus que les CFC ont une longue durée de vie (une centaine d'années) et ne sont pas toxiques. Des études ont été menées dans les domaines des infrarouges, où le CO2 a un faible pouvoir réflecteur, et ont montré qu'une introduction de faibles quantités de CFC (10ppm -parties par million-) entraînera une hausse de température de 30°C, et que toute autre hausse supérieure à 30°C aurait à moyen terme un effet contraire, car les pertes de chaleur seraient alors plus importantes que le gain créé.
Mais malheureusement les CFC n'apprécient pas l'atmosphère martienne: les radiations Ultra Violet, énergétiques avec leur longueur d'onde comprise 200 et 300 nm, cassent les liaisons C-Cl présentes dans les molécules et ne sont pas stoppées aussi aisément que sur Terre par une couche d'ozone (O3) protectrice. Les molécules CFC typiques n'auraient plus qu'une durée de vie de quelques heures! Une solution serait d'utiliser des Perfluorocarbones, inertes et donc insensibles ou très peu aux U.V., mais dont le pouvoir réflecteur est encore inconnu.
Gaz (Durée de séjour approximative dans l'atmosphère):
Dioxyde de carbone (100 ans)
Méthane (12 ans)
Protoxyde d'azote (120 ans)
Halo carbures (jusqu'à 50.000 ans)
Formule du Perfluorocarbures: CnF2n+2
Formule du Hydrofluorocarbures: CnHmFp
Réduction de l'albédo (pouvoir réfléchissant) des calottes polaires
L'albédo d'un objet représente sa capacité à renvoyer l'énergie. Il est égal au rapport: A = énergie renvoyée / énergie reçue
Ainsi, un corps ayant un albédo de 0 absorbe toute l'énergie reçue et ne restitue rien, l'albédo étant un rapport, sa valeur maximale est 1.
L'albédo des calottes martiennes a été évalué à 0,77. Sagan estime qu'en 100 ans on peut dégazer (vaporiser) ces dernières rien qu'en abaissant leur albédo à 0,73. En effet, en diminuant l'albédo, on augmente l'énergie absorbée donc la chaleur du corps. On pourrait par exemple noircir les glaces polaires à l'aide de couches de poussière. Mais même avec la quantité estimée de poussière nécessaire à l'opération, la stabilité des couches soumises au fort vent martien est compromise.
Surfaces (Albédo en %):
Neige (90%)
Glaces de mer (60% à 85%)
Déserts sableux (30% à 50%)
Végétation (10% à 25%)
Sol nu ou roches (10% à 20%)
Forêts (10% à 15%)
Mer calme (5% à 10%)
La quête de l'eau
Cette étape est de loin la plus longue et délicate: elle consiste à remettre en marche l'hydrosphère martienne, initiant le cycle de transfert de l'eau entre le sol et le ciel. L'eau n'est certes pas présente sur Mars à l'état liquide, mais on en trouve de grosses quantités dans les calottes polaires (peut être 5.10e15 tonnes) et dans le sous-sol de la planète (sous forme de permafrost ou de pergélisol, c'est à dire un sol gelé en permanence du fait de la température extrêmement basse). L'objectif est de vaporiser cette eau, afin d'enclencher le cycle des pluies: dès lors, des lacs, des fleuves et des océans se formeraient sur Mars, l'eau empruntant les grands canyons martiens. Les grandes plaines du Nord, dont l'altitude moyenne culmine à 2000 mètres au dessous du niveau moyen, se transformeraient en un gigantesque océan, tandis que l'hémisphère sud renfermera de multiples mers intérieures.
Projets loufoques...
Bien d'idées ont été proposées, beaucoup extrêmement farfelues. Citons notamment un projet d'explosions nucléaires à la chaîne visant à dégazer le régolite martien et à réveiller les volcans éteints, ou encore celui visant à transformer le satellite de Mars Phobos en micro étoile. Et puis comme le but est de réchauffer Mars, pourquoi ne pas la bombarder d'astéroïdes pour rapprocher son orbite du Soleil ?
Phobos, satellite de Mars:
Le résultat escompté
Après toutes ces transformations, Mars aura bien évolué: elle sera une planète non plus rouge mais bleue, et aura une atmosphère suffisamment dense pour réaliser un effet de serre et arrêter les U.V. solaires.
Sa température serait légèrement positive. Mais malgré tout, il n'y aurait toujours pas d'oxygène dans l'atmosphère, donc la présence humaine, même si elle pourra se faire sans combinaisons spéciales, sera cautionnée par l'emploi de masques respiratoires. Mais malgré tout, l'ecopoïesis est devenue possible.
L'implantation d'êtres vivants ou Ecopoïesis
Cette mise en place possible de la vie à la surface de Mars (grâce à la présence d'une température supérieure à 0°C et de CO2) va permettre grâce à des organismes vivants judicieusement choisis, une production d'un gaz vital pour les hommes: le dioxygène. Il faut faire appel à des organismes anaérobies (qui peuvent se développer en absence de dioxygène), mais de plus résistants à des conditions extrêmes: acidité et salinité élevées par exemple. Citons notamment les Cyanobactéries, qui produisent du dioxygène à partir du CO2 ambiant...
Exemples d'organismes utilisés:
- Deinococcus Radiodurans
Deinococcus Radiodurans est une bactérie hétérotrophique (qui ne peut produire sa propre matière organique) possédant une résistance impressionnante aux UV et aux radiations ionisantes, grâce à sa structure cellulaire sur plusieurs couches et son système de réparation de l'ADN très perfectionné. Deinococcus Radiodurans est même quelquefois retrouvée dans les eaux de refroidissement des réacteurs nucléaires.
- Chroococcidiopsis
Chroococcidiopsis est une bactérie de type "cyanobactérie", capable de survivre dans un large champ de conditions extrêmes: aridité continue, salinité élevée, températures très basses ou très hautes... Dans les milieux les plus hostiles, il est probable que seule cette bactérie puisse survivre. Elle est relativement commune dans les régions désertiques et sèches, et vit dans des petites coquilles protectrices et transparentes qui agissent à la fois comme cage à moisissures et à UV.
La finalité: un développement possible d'une flore puis d'une faune
Petit à petit, l'atmosphère deviendrait respirable pour les petits végétaux, comme les algues, les mousses ou les lichens. Ceux-ci feraient double usage: ils serviraient de ressources renouvelables en oxygène, et de nourriture pour les futurs colons. Une fois ces végétaux introduits avec succès, le taux d'oxygène de l'atmosphère augmenterait encore jusqu'à un point acceptable pour les végétaux "lourds", comme les arbres. Le taux d'oxygène subirait alors une nouvelle hausse progressive, qui serait combinée par l'ajout d'un gaz inerte tel que l'azote dans l'air martien en vue de diminuer le taux de C02. A partir de là, la vie animale deviendrait possible sur la planète terraformée, c'est à dire sur une planète ou les conditions physiques et chimiques sont équivalentes à celles de la Terre par l'action de l'homme.
9 - Conclusion
Au cours de cette étude, la notion de terraformation s'est éclaircie, notion de plus en plus prise au sérieux par les scientifiques, certaines recherches ayant été effectuées. La planète Mars possède dans son état actuel une atmosphère ténue, des températures variant de -143° à 22°C et ne possède pas d'eau liquide (mais l'eau a un jour coulé sur Mars). Y a t-il eu une vie sur Mars? Pour répondre à cette question on s'appuie sur l'étude de météorites martiennes (dont la principale est ALH84001). Les indices en faveurs de la vie sont les nanofossiles, les globules de carbonates, la magnétite, le magnétisme et les PAHs. On considère que la vie aurait existé il y a 3,6 milliard d'années sous forme de micro-organismes. L'étude des météorites est insuffisante (car la pierre n'est pas forcément d'origine martienne). On complète cette étude par les informations fournies par les sondes Viking. On apprend entre autre que le sol martien possède des propriétés surprenantes ainsi que l'atmosphère (réaction avec des nutriments...).
Pour terraformer Mars, trois grand moyens existent:
1- L'utilisation de miroirs en orbite martienne (qui nécessitent une très grande quantité d'aluminium).
2- Les gaz à effet de serre (principalement les CFC, mais qui présentent un temps d'existance trop faible)
3- Réduction de l'albédo des calottes polaire (par le biais de poussières noires).
L'étape indispensable est la libération de l'eau et la mise en place d'une hydrosphère martienne. Une fois qu'il existe une atmosphère, l'ecopoeisis est possible, celui-ci permet l'augmentation du taux de dioxygène dans l'atmosphère puis le développement d'une faune et d'une flore! Les délais de la terraformation sont relativement importants et on peut se poser la question: à quand le premier homme sur Mars? Et à quand la naissance d'un petit homme terrien sur Mars dans des conditions viables pour l'organisme?