Il est difficile de déterminer la masse d'une étoile à neutrons isolée. En revanche, si celle-ci fait partie d'un système binaire, il est possible de contraindre sa masse par l'étude de son orbite. En pratique cela n'est faisable de façon robuste que si l'on a un système très serré de deux étoiles à neutrons et que l'on observe l'émission pulsée de l'une d'entre elles (voire les deux). De tels systèmes sont appelés pulsars binaires, ou pulsars doubles quand on observe l'émission pulsée des deux astres. Dans de telles configurations, il est possible de déterminer la masse des deux astres, en raison d'effets dus à la relativité générale qui dépendent de diverses combinaisons des deux masses. La prise en compte de ces effets relativistes appelés pour des raisons évidentes paramètres post-képlériens est ici indispensable, car en ne tenant compte que des effets de gravitation universelle, un seul paramètre appelé fonction de masse est déterminable, celui-ci ne donnant que peu d'information sur les deux masses. En tenant compte des corrections de relativité générale, les paramètres post-képlériens permettent de contraindre les masses de ces objets.
Le phénomène de précession du périastre est dû à la relativité générale. Celui-ci a été la première confirmation observationnelle de la relativité générale quand Albert Einstein le calcula pour la planète Mercure pour laquelle il montra qu'il expliquait les irrégularités alors inexpliquées de son orbite. Pour un système binaire dont les composantes possèdent les masses M et M et dont l'orbite a une excentricité e et une période P, la précession relativiste du périastre
où on a introduit la quantité
(G est la constante de gravitation, c la vitesse de la lumière et M la masse du Soleil, soit environ 2×1030 kg.) La précession peut se réécrire
Historiquement, la première mesure de la précession relativiste d'un pulsar binaire fut réalisé au milieu des années 1970 avec le premier pulsar binaire découvert, PSR B1913+16, dont la période orbitale est de 7 h 45 min 6,9807 s, l'excentricité de 0,6171308. La précession observée de 4,226621 degrés par an permet alors de déduire une masse totale du système de 2,85 masses solaires, soit à une bonne précision près le double de la masse de Chandrasekhar, comme attendu pour deux étoiles à neutrons. L'effet est également observé dans d'autres pulsars binaires comme PSR B1534+12 (1,755794 degré par an), PSR J1906+0746 (7,57 degrés par an), PSR B2127+11C (4,4644 degrés par an) et PSR J0737-3039 (16,90 degrés par an). Dans tous les cas, la masse totale du système est de l'ordre de deux fois la masse de Chandrasekhar, soit dans les 2,8 masses solaires.
Il est en principe possible que la précession observée ait d'autres causes, du moins pour partie, que l'effet de relativité générale. Cependant, l'analyse des autres sources possibles de précession (effets de marée, aplatissement des astres) indique que ces effets sont négligeables.
Une étoile à neutrons vue comme un pulsar se comporte à une excellente approximation comme une horloge dont on observe les pulses émis à intervalles réguliers. De plus, une horloge située dans le champ gravitationnel d'un astre suffisamment massif est vue comme retardant lentement par rapport à une horloge identique restée sur Terre. Ceci provient de ce que la présence d'un champ gravitationnel affecte l'écoulement du temps. Dans l'hypothèse où une étoile à neutrons est elle-même plongée dans le champ gravitationnel d'un autre astre, l'écoulement du temps y est donc modifié par la présence à proximité de cet autre astre. Si maintenant, l'étoile à neutrons se déplace dans le champ gravitationnel de cet astre, alors cet effet d'écoulement du temps va être modulé du fait de la variation du champ gravitationnel ressenti par l'étoile à neutrons. Cette dernière contribution s'écrit, en notant T le temps « vécu » par l'étoile à neutrons (appelé temps propre) et t celui d'un observateur loin du champ gravitationnel de l'étoile compagnon,
M étant la masse du pulsar observé, M celle de son compagnon (observé ou non), a le demi grand axe de l'orbite et E l'anomalie excentrique. Le premier terme n'est pas directement observable, étant indistinguable de l'effet de ralentissement du temps existant à la surface de l'étoile à neutrons elle-même. Le second terme est, lui, observable dès que l'orbite est non circulaire. Il vaut :
L'effet est traditionnellement exprimé en remplaçant le demi grand axe a par sa valeur donnée par la troisième loi de Kepler, soit
Cet effet périodique est d'amplitude faible : même pour une orbite serrée (période de 8 heures), l'amplitude est de l'ordre de quelques millièmes de seconde (4,295 ms pour PSR B1913+16, bien aidé par la forte excentricité du système).
La différence d'écoulement du temps en fonction du champ gravitationnel affecte aussi le temps de propagation des signaux, ce à quoi s'ajoute un effet supplémentaire dû au fait que les signaux lumineux émis par le pulsar ne se propagent pas en ligne droite quand ils passent au voisinage d'un éventuel compagnon. Ceci affecte l'intervalle de temps entre les différents pulses reçus du pulsar et est connu sous le nom d'effet Shapiro, du nom d'Irwin Shapiro, qui en fit la prédiction en 1964 avant sa détection grâce aux sondes Viking posées sur Mars. Au cours d'une orbite, les temps d'arrivée des signaux sont modulés de la quantité
où ω est la longitude du périastre, qui est mesuré indépendamment par l'étude de l'orbite. Les quantités r et s sont appelées respectivement paramètre d'amplitude et paramètre de forme. Ils dépendent des masses par les formules
Le paramètre s est en général inutile pour contraindre les masses, car il dépend du sinus de l'angle d'inclinaison i qu'il n'est pas possible de déterminer, sauf cas très particulier (par exemple en cas de binaire à éclipses). Par contre le paramètre r donne immédiatement la masse du compagnon de l'étoile à neutrons. L'effet Shapiro reste extrêmement faible. Son amplitude est de l'ordre du temps mis par la lumière pour parcourir une distance de l'ordre du rayon de Schwarzschild de l'étoile, soit quelques microsecondes. Il n'est ainsi pas mis en évidence dans PSR B1913+16, mais l'est dans PSR B1534+12 et PSR J0737-3039, qui incidemment sont tous deux vus quasiment par la tranche (i très proche de 90 degrés, son sinus étant très proche de 1).
Un système de deux corps massifs en orbite l'un avec l'autre va être le siège de l'émission d'ondes gravitationnelles, à l'instar de deux objets possédant une charge électrique qui sont le siège de l'émission de rayonnement électromagnétique, quand ils se trouvent accélérés l'un par rapport à l'autre. Les ondes gravitationnelles, prédites par Albert Einstein dans le cadre de la relativité générale, n'ont jamais été observées directement, mais leur mise en évidence explicite a été réalisée avec des étoiles à neutrons, en l'occurrence au sein du pulsar binaire PSR B1913+16. L'émission d'ondes gravitationnelles provoque une lente usure de l'orbite des deux corps, qui lentement spiralent l'un avec l'autre. En pratique, cette émission se traduit par l'observation d'une baisse de la période orbitale du système. Un calcul classique permet d'évaluer cette variation selon la formule
L'effet étant cumulatif au cours du temps, il n'est pas difficile à mettre en évidence pour un pulsar binaire en orbite serrée. Par contre il est très difficile de distinguer cette usure réelle de l'orbite par une variation apparente de la période orbitale qui, elle, est due à des considérations purement cinématiques. Si le système observé accélère ou décélère par rapport à la Terre, une variation supplémentaire de la période du signal émis (quel qu'il soit) se superpose à sa variation intrinsèque par le simple fait que la distance parcourue par le signal entre l'émission et la réception varie de façon non linéaire. En pratique, cela se produit dans deux cas : soit l'objet est effectivement accéléré, par exemple s'il tombe vers le centre d'un amas globulaire, auquel cas on parle d'accélération séculaire, soit il se déplace en ligne droite suivant un mouvement rectiligne et uniforme, mais suffisamment vite pour que sa distance varie de façon non linéaire. On parle alors d'effet Shklovski. Dans les cas où il est possible de contraindre ces effets, on peut utiliser la formule du rayonnement gravitationnel pour contraindre les masses, comme ce fut le cas pour PSR B1913+16, ce qui valut le Prix Nobel de physique aux découvreurs de cet objet, Russell Alan Hulse et Joseph Taylor, qui mirent en évidence son rayonnement gravitationnel. Le pulsar binaire PSR B1534+12 est un exemple de pulsar binaire, dont on observe une usure de la période orbitale, mais dont l'amplitude ne correspond pas à la valeur attendue, les masses étant connues par ailleurs grâce aux autres paramètres post-képlériens. Il est considéré que ce désaccord provient d'une contribution notable de l'effet Shlovski que l'on contraint ici dans le cas de ce pulsar.
Plus d'une demi-douzaine de couples d'étoiles à neutrons sont connus à ce jour, dont six ou sept permettent de déterminer assez précisément les masses des deux astres. Parmi ceux-ci, un seul est un pulsar double, PSR J0737-3039, les autres ne laissant voir qu'un pulsar et un compagnon sombre. La masse déduite du compagnon étant dans la même plage de masse (1,0 à 1,5 masse solaire), il est interprété comme étant une autre étoile à neutrons : il n'est ni assez massif pour être un trou noir, ni assez lumineux pour être une naine blanche.
Pulsar | Masse totale (M) | Masse (M) |
---|---|---|
PSR J0737-3039A | 2,588(3) | 1,337(5) |
PSR J0737-3039B | 2,588(3) | 1,250(5) |
PSR J1518+4904 | 2,62(7) | 1,56+0,13 |
PSR J1518+4904 (compagnon) | 2,62(7) | 1,05+0,45 |
PSR B1534+12 | 2,6784 | 1,3332(10) |
PSR B1534+12 (compagnon) | 2,6784 | 1,3452(10) |
PSR J1756-2251 | 2,58 | 1,40(3) |
PSR J1756-2251 (compagnon) | 2,58 | 1,18(3) |
PSR J1811-1736 | 2,57(10) | <1,74 |
PSR J1811-1736 (compagnon) | 2,57(10) | >0,93 |
PSR J1829+2456 | 2,5(2) | <1,38 |
PSR J1829+2456 (compagnon) | 2,5(2) | <1,30(8) |
PSR J1906+0746 | 2,61(2) | |
PSR J1906+0746 (compagnon) | 2,61(2) | |
PSR B1913+16 | 2,8284 | 1,4408(3) |
PSR B1913+16 (compagnon) | 2,8284 | 1,3873(3) |
PSR B2127+11C | 2,712 | 1,349(40) |
PSR B2127+11C (compagnon) | 2,712 | 1,363(40) |
Il est en principe possible de déterminer le rayon d'une étoile à neutron si l'on observe l'émission thermique en provenance de sa surface. La puissance rayonnée par un objet de rayon R et dont la surface est portée à la température T s'écrit en effet
σ étant la constante de Stefan. Un certain nombre de pulsars sont suffisamment proches pour que leur émission de surface soit, semble-t-il, visible. C'est, en autres, le cas de PSR J0633+1746 (Geminga), PSR B0833-45 (pulsar de Vela), PSR B1055-52 ou PSR B1706-44. Malheureusement il est extrêmement difficile d'exploiter ce genre de relations, pour plusieurs raisons :
Au final, une modélisation complexe est nécessaire pour pouvoir tenter d'extraire le rayon de l'étoile à neutrons, avec un résultat guère efficace. Par exemple, l'hypothèse d'une atmosphère d'éléments lourds ne marche pas du tout pour extraire le rayon des étoiles à neutrons jeunes, ceux-ci s'avérant avec cette modélisation largement trop petits pour être acceptables. C'est le cas de RX J0822.0-4300 (l'étoile à neutrons du rémanent Puppis A), pour lequel on trouve un rayon compris entre 1 et 1,6 kilomètre, le pulsar de Vela (entre 1,7 et 2,5 km), ou PSR B1706-44 (entre 1,9 et 5,8 km). Pour les étoiles à neutrons plus âgées (plus de 100 000 ans), le modèle s'avère plus satisfaisant, avec des résultats autorisant ou en tout cas s'approchant des valeurs de l'ordre de 10 km pour le rayon. C'est le cas de Geminga (entre 2,7 et 8,7 km), PSR B1055-52 (entre 6,5 et 19,5 km), RX J1856.5-3754 (plus de 16 km), ou RX J0720.4-3125 (entre 5 et 15 km). L'incertitude sur la distance est ici extrêmement handicapante : l'incertitude d'un facteur 3 pour la distance de PSR B1055-52 ou RX J0720.4-3125 explique à elle seule l'incertitude finale sur le rayon. Il est donc à l'heure actuelle impossible de faire une analyse suffisamment précise du rayon de l'étoile pour contraindre sa structure interne et notamment la composition du cœur.
À l'inverse, la modélisation des étoiles à neutrons par une atmosphère d'hydrogène permet d'obtenir des valeurs (fort imprécises) plus compatibles avec les valeurs attendues .
Dans l'hypothèse où des atomes (éventuellement fortement ionisés) se trouvent à la surface d'une étoile à neutrons, il est en principe possible d'observer des raies d'émission ou d'absorption venant d'eux, et par suite mesurer le décalage vers le rouge d'origine gravitationnelle issu de la surface de l'étoile à neutrons. Celui-ci, noté comme de coutume z, est donné en fonction de la masse M et du rayon R de l'étoile à neutron par la formule
G et c étant respectivement la constante de Newton et la vitesse de la lumière. L'observation du décalage vers le rouge permet donc d'accéder directement au rapport masse-rayon de l'étoile. Or les observations des pulsars binaires contraignant assez directement la masse à une fourchette relativement étroite aux alentours de 1,35 masse solaire, on est ainsi en mesure d'obtenir le rayon. De plus, le rapport masse-rayon ne dépend guère de la masse de l'étoile, mais surtout de sa densité centrale, qui est elle-même essentiellement déterminée par la nature de la matière qui s'y trouve. Il est ainsi possible de tester directement certains aspects relatifs à l'équation d'état de la matière des étoiles à neutrons, et, dans l'idéal de contraindre les hypothèses relatives aux étoiles étranges ou étoiles à quarks, dont le cœur est susceptible d'abriter une forme relativement exotique de matière. La raison à cela est que ces deux formes possibles d'étoiles sont notablement plus compactes qu'une étoile à neutrons ordinaire, aussi une valeur élevée du décalage vers le rouge gravitationnel est-elle un bon moyen d'attester leur existence.
Par exemple, la binaire X à faible masse EXO 0748-676, découverte par le satellite artificiel EXOSAT. Lors d'une phase d'activité en 2000, il avait été possible d'identifier de probables raies d'émission de l'oxygène VIII et du fer XXV et XXVI, c'est-à-dire d'atomes ne possédant plus qu'un seul ou deux électrons, permettant d'associer à l'astre un décalage vers le rouge gravitationnel de 0,35. D'autres détections de décalage vers le rouge avaient été effectuées auparavant, mais uniquement sur des astres à très fort champ magnétique, qui lui-même influence la position des raies spectrales (voir Effet Zeeman). L'utilisation de EXO 0748-676, dont le champ magnétique déduit des propriétés du rayonnement X de l'astre est relativement faible, échappe donc à ce type de biais.
Le décalage vers le rouge observé est relativement intéressant. Sa valeur est incompatible avec une étoile à neutrons de masse et d'équation d'état usuelles (1,4 masse solaire et pas d'étoile étrange ou d'étoile à quarks). Si le cœur de l'étoile n'est pas composé de matière exotique, alors sa masse est comprise, selon les équations d'état envisageables, entre 1,6 et 1,8 masse solaire, alors que si sa masse est bien de 1,4 masse solaire, le décalage vers le rouge pointe assez fortement en faveur d'une étoile à quarks dont le cœur est dit en phase CFL (Color-flavor locked). La mesure de la masse de l'étoile à neutrons est ainsi ici indispensable pour discriminer entre ces deux hypothèses.
À noter au passage que ce type de mesure est extrêmement sensible aux détails de la phase d'activité de l'astre. Lors d'une autre phase d'activité en 2003, et malgré un temps d'observation considérable (600 000 secondes, soit près de 7 jours) avec le télescope spatial XMM-Newton, aucune raie précédemment mise en évidence sur cet astre n'a été revue .