Longueur d'un arc - Définition

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Contenu de Minkowski

Motivation

Un lampion peut posséder une surface plus grande que celle du cylindre qui le circonscrit.

Minkowski s'intéresse surtout aux courbes fermés et simples car elles définissent une frontière d'un espace compact dans le plan euclidien. Les résultats qu'il établit sont particulièrement intéressants s'il peut les généraliser aux dimensions supérieures.

Les outils issus de la géométrie différentielle ne sont pas toujours très adaptés pour cela. Un exemple est donné par le théorème isopérimétrique, dans le cas général on cherche à démontrer un solide d'un espace euclidien de dimension n possède un volume plus petit que celui de la boule de même surface. Le terme de boule de rayon r désigne l'ensemble des points à une distance inférieure à r d'un point donné appelé centre. Il n'est pas trop complexe de montrer que la courbure moyenne en chaque point d'une surface, frontière d'un solide qui atteint l'optimum isopérimétrique, est nécessairement constante. En dimension 2, il est très simple de montrer que l'unique courbe simple et fermé de courbure moyenne constante est le cercle, une démonstration naturelle est l'œuvre d'Hurwitz et utilise l'inégalité de Wirtinger. En dimension 3, la démonstration est connue, mais elle est suffisamment technique pour ne dater que du début du XXe siècle. Le cas général n'est toujours pas démontré.

Le contenu 1 dimensionnel d'un lacet simple correspond à longueur de l'arc, au sens de Jordan.

La définition de Jordan pour la longueur d'une courbe n'est pas adaptée non plus car elle ne se généralise pas directement aux dimensions supérieures. La généralisation naturelle consisterait à définir l'aire de la surface d'une portion de cylindre comme la borne supérieure de la surface d'un polyèdre dont les sommets se trouveraient sur la frontière du cylindre. L'exemple sur la droite illustre l'inconsistance d'une telle généralisation. le polyèdre utilisé est un lampion dont les sommets sont situés sur des hexagones parallèles, chaque fois décalés d'un douzième de tour. Si les plans des hexagones se rapprochent de plus en plus, la surface du polyèdre augmente jusqu'à l'infini.

Minkowski trouve une solution pour définir la longueur d'un arc qui résiste au passage à une dimension supérieure. Son approche intuitive est différente de celles considérées jusqu'ici. Il ne s'appuie pas comme Jordan sur la longueur d'une ligne polygonale, mais directement sur la fonction volume de l'espace euclidien de dimension n. Cette fonction est en général définie par la mesure de Lebesgue. Pour une valeur ε, suffisamment petite, Il considère les points à une distance inférieure à ε de la courbe C qu'il étudie. Il obtient un ensemble, illustré en rose sur un exemple en dimension 2 sur la figure de gauche, la courbe C est représentée en bleu. Un tel ensemble est appelé un tube.

Si la valeur ε diminue, le volume du tube se rapproche du produit de la longueur de l'arc par le volume de la boule de dimension n - 1 et de rayon ε. Dans le cas du cercle de rayon r et en dimension 2, le tube est constitué de la zone de l'espace compris entre un cercle de rayon r + ε et un autre de même centre et de rayon r - ε. Son volume est exactement 2π.r que multiplie 2ε. En dimension 3, le tube est un tore, une fois encore son volume est exactement le produit de 2π.r par la surface d'un disque de rayon ε. Cette définition, si elle est un peu plus complexe à mettre en œuvre, se généralise aisément aux dimensions supérieures.

Formalisme

Minkowski, avec Hausdorff, développent des outils permettant de mieux appréhender l'étude général des solides. L'ensemble étudié est celui des compacts non vides d'un espace euclidien E, de dimension n. La somme de Minkowski associent à deux ensembles A et B le solide A + B composé des sommes d'éléments de A et de B. Cet ensemble est équipé d'une distance, dite de distance de Hausdorff. Le tube étudié correspond à la somme d'un compact C, correspondant à la courbe dont on souhaite mesurer la longueur et de la boule de rayon ε, il est noté ici Cε.

Si la courbe C est simple et fermée et de classe C2, alors le volume du tube Vol(Cε) s'exprime en fonction de la longueur LC de l'arc C et du volume Vol(Bn-1(ε)) de la boule d'un espace euclidien de dimension n - 1 et de rayon ε, ceci à condition que ε reste suffisamment petit :

 Vol(C_{\epsilon}) = L_C\cdot Vol(B_{n-1}(\epsilon))

Si la courbe n'est pas fermée, l'égalité reste vraie si l'on ajoute le volume d'une boule de rayon ε en dimension n. En effet, deux demi boules vont s'ajouter, chacune à l'une des extrémités de la courbe, on obtient :

 Vol(T_{\epsilon}) = L_C\cdot Vol(B_{n-1}(\epsilon)) + Vol(B_{n}(\epsilon))

Quelle que soit la configuration précédente, on obtient une nouvelle manière de définir la longueur d'un arc :

  • Le contenu 1 dimensionnel d'un ensemble C d'un espace euclidien de dimension n, noté M1(C), est la limite suivante, quand elle existe :
M_1(C) = \lim_{\epsilon \to 0} \frac {Vol (T_{\epsilon})}{Vol(B_{n-1}(\epsilon))}

Cette définition est bien une généralisation de la longueur définie précédemment :

  • Si C est l'ensemble d'arrivé d'un arc paramétré compact de classe C2, la longueur de C est égale à son contenu 1 dimensionnel.

Cette définition est particulièrement pertinente dans le cas de l'étude de la longueur de la frontière d'une surface S compacte en dimension 2 de frontière C. Si la frontière est paramétrable par un arc de classe C2, on dispose du théorème suivant, appelé formule de Steiner-Minkowski :

  • La longueur LC de l'arc C est égale à la limite suivante :
L_C = \lim_{\epsilon \to 0} \frac {Vol (S + B_2(\epsilon))}{Vol (S)}

Le contenu de Minkowski permet de généraliser à de nombreuses surfaces cette formule.

Courbe fractale

La courbe de Péano possède une image mesurable, mais cette mesure correspond à celle d'une surface.

Dès 1872, Karl Weierstrass montre qu'une courbe peut avoir un comportement étrange, il construit un exemple d'arc, par définition continu, et nulle part différentiable. Plus tard, Péano construit sa courbe, dont l'image est l'ensemble des points d'un carré de côté 1. En 1904, le mathématicien suédois Koch trouve un exemple concret de courbe répondant au cahier des charges de Weierstrass, à travers un étrange flocon. Tous ces exemples correspondent à ce qui est maintenant appelé une fractale.

Cette famille de courbes, initialement considérées comme un peu pathologiques, s'avèrent essentiels pour une meilleure compréhension de certaines branches des mathématiques. L'étude d'un système dynamique comme celui de Lorenz porte sur une équation différentielle dont le comportement limite se situe à l'intérieur d'une zone géométrique définie par une telle courbe (pour être plus précis, la zone correspond à l'adhérence d'une telle courbe).

Pour l'analyse de telles courbes, un équivalent de la longueur s'avère nécessaire. Or pour la courbe de Péano, la définition différentielle n'a pas de sens et celle de Jordan donne l'infini. Si le contenu 1 dimensionnel de Minkowski donne aussi l'infini, il n'est pas très compliqué de l'adapter pour trouver une réponse qui fait sens. Si P désigne l'ensemble d'arrivé de la courbe de Péano :

M_2(C) = \lim_{\epsilon \to 0} \frac {Vol (P_{\epsilon})}{Vol(B_{n-2}(\epsilon))}

Ici, Pε désigne l'ensemble des points à distance inférieure de ε de P. L'astuce a consisté à diviser le rapport, non pas par le volume d'une boule n - 1 dimensionnel, mais n - 2 dimensionnel. Pour une nappe de classe C2 et de dimension 2, le contenu correspond à la mesure de la surface. Pour l'attracteur de Lorenz ou le flocon de Koch, aucun entier k ne permet de définir un contenu n - k dimensionnelle qui ne soit ni 0 ni l'infini. En revanche, il est possible d'utiliser une définition du volume d'une boule de dimension ζ qui fasse sens, même si ζ n'est pas un entier :

Vol (B_{\zeta}(\epsilon)) = \frac{2 \pi^{\zeta / 2}}{\zeta \cdot \Gamma (\zeta / 2)}\epsilon^{\zeta}

Ici Γ désigne la fonction gamma. Le contenu de Minkowski se généralise ainsi à des dimensions non entières. Cette dimension, qui permet de donner un sens à la longueur d'un arc, est appelée dimension de Hausdorff.

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