Shen Kuo - Définition

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Œuvre

Shen Kuo a beaucoup écrit sur de nombreux sujets. Son travail écrit comprend deux types d’atlas géographique, un traité sur la musique avec des harmoniques mathématiques, des études de l’administration gouvernementale, sur l’astronomie mathématique, sur les instruments astronomiques, sur les tactiques défensives militaires et des recherches pour des fortifications, la peinture, le thé, la médecine, ainsi que beaucoup de poésie. Il proposa des versions améliorées de la sphère armillaire, du gnomon et de la clepsydre ainsi que de nombreuses évolutions.

Les écrits scientifiques de Shen Kuo ont reçu de nombreux éloges de sinologues comme Joseph Needham et Nathan Sivin. Son travail a souvent été comparé à celle d’un autre brillant polymathe chinois Su Song (1020-1101). Shen Kuo a également été comparé à de nombreux intellectuels occidentaux comme Gottfried Wilhelm von Leibniz et Mikhaïl Lomonossov.

Cartographie

Le plus grand atlas de Shen incluait vingt-trois cartes de Chine et des régions proches, cartes qui ont été dessinées uniformément à l’échelle de 1:900 000. Shen a également créé une carte en tridimensionnelle à l’aide de sciure de bois, de morceaux de bois, de cire d'abeille et de la pâte faite à partir de céréales.

Météorologie

En météorologie, Shen a écrit plusieurs descriptions de tornades et a donné raison à une théorie de Sun Sikong, expliquant que les arcs-en-ciel qui sont formés par l’ombre du Soleil sous la pluie, se produisent lorsque le Soleil brille sur elle. Shen estima que, bien que les arbres étaient de plus en plus rares en raison de la déforestation pour les besoins de l’industrie du fer locale, « le pétrole était produit continuellement au sein de la Terre ».

Pharmacologie et botanique

En matière de pharmacologie, Shen a décrit les difficultés de donner un diagnostic et une thérapie adéquate, ainsi que le bon choix, la préparation et l’administration de drogues. Il accordait une grande importance aux détails et à l’exactitude philologique dans l’identification, l’utilisation et la culture des différents types de plantes médicinales, comme les mois où elles devaient être récoltées et leur degré précis de mûrissement pour qu’elles soient propres à des fins thérapeutiques. Il écrivit également sur l’horticulture et les plantes communes, leurs époques de plantation et de fertilisation. Shen Kuo prit un soin particulier à décrire des centaines de plantes.

Zoologie et minéralogie

Dans les domaines de la zoologie et la minéralogie, Shen Kuo se documenta et décrivit les animaux et les minéraux présents dans son pays. En outre, il décrivit le phénomène des insectes prédateurs naturels qui assurent le contrôle de la population d’insectes nuisibles au potentiel ravageur pour l'agriculture chinoise.

Médecine

Shen eut également comme centre d'intérêt l’anatomie humaine : il anéantit la théorie selon laquelle la gorge contenait trois canaux, écrivant notamment, « Quand les liquides et les solides sont mêlés les uns aux autres, comment se fait-il que dans la bouche, ils se trient eux-mêmes en deux voies ? ». Shen soutint que le larynx était le début d’un système qui distribuait le « Qi » vital de l’air dans tout le corps et que l’œsophage était un simple tube amenant les aliments à l’estomac. Continuant le raisonnement de Shen et corrigeant les résultats de la dissection de bandits exécutés en 1045, un rapport chinois datant du début du XIIe siècle confirma la présence de deux canaux à la gorge et non trois. En outre, un juge de la dynastie Song et un expert dans ce qu’on l’on appellera bien plus tard médecine légale, Song Ci (宋慈 ; 1186-1249), permirent de promouvoir l’utilisation de l’autopsie comme moyen de résoudre les cas d’homicides, tel qu’il est rédigé dans Xǐyuān Jílù (« Collected Cases of Injustice Rectified »).

Hydraulique et architecture civile et navale

Les écrits de Shen Kuo sont la seule source datant la première utilisation de la cale sèche en Chine. Shen Kuo a écrit que pendant le règne de Xi Ning (1068-1077), le fonctionnaire Huang Huaixin conçut un plan pour la réparation des bateaux du palais, longs de 60 m et vieux d’un siècle. En substance, Huang Huaixin conçut la première cale sèche chinoise pour suspendre les bateaux hors de l’eau. Ces bateaux furent ensuite placés sous une toiture pour les protéger des intempéries.

Shen Kuo a également décrit l’efficacité d’une invention relativement nouvelle, remontant au Xe siècle par l’ingénieur Qiao Weiyo, concernant l’écluse à poids afin de remplacer les anciens pertuis utilisés dans les canaux. Selon Shen Kuo, ce nouveau type d’écluse économisait le travail annuel de cinq cents hommes, diminuait les coûts annuels et permettait d’augmenter la taille maximum des bateaux accueillis de 21 à 113 tonnes.

S’il n’y avait eu Shen Kuo et ses analyses dans Mengxi Bitan, le travail de l’architecte du XIe siècle Yu Hao aurait été perdu. Yu Hao conçut notamment une célèbre pagode en bois qui brûla en 1044 et qui fut remplacée en 1049 par une pagode de briques de même hauteur, surnommée la « Pagode de fer ».

Mathématiques et optique

Dans le vaste domaine des mathématiques, Shen Kuo maîtrisa de nombreux problèmes mathématiques pratiques, y compris de nombreuses formules complexes pour la géométrie, le calcul infinitésimal et les problèmes de trigonométrie. Il écrivit abondamment sur ce qu’il avait appris en travaillant pour la Trésorerie de l’État, y compris des problèmes mathématiques posés par le calcul des taxes foncières, des estimations des besoins, des questions monétaires, de la métrologie. Il calcula aussi, un jour, la surface requise pour une bataille rangée, en vue de s'en servir en stratégie militaire. Il calcula également la plus longue campagne militaire possible, calculée d'après les limites et les capacités de transport, étant entendu que les soldats emporteraient leur propre nourriture et celle d’autres soldats.

Shen Kuo fit des expériences sur le sténopé et les miroirs, comme jadis les chinois mohistes au IVe siècle av. J.-C.. Bien que le scientifique musulman Alhazen (965-1039) ait été le premier à étudier la chambre noire, Shen Kuo fut celui qui appliqua des attributs géométriques et quantitatifs à celle-ci, plusieurs décennies après la mort d’Alhazen.

Shen a écrit sur Yi Xing (一行 ; 672-717), un moine bouddhiste, qui avait appliqué un mécanisme d’échappement à une sphère armillaire hydraulique. De plus, en utilisant les permutations mathématiques, Shen décrivit le calcul de Yi Xing des combinaisons possibles au jeu de go. Shen calcula ce total avec jusqu’à cinq lignes et vingt-cinq pièces du jeu, et obtint 847 288 609 443 possibilités Toutefois, certains de ses plus impressionnants travaux dans le domaine des mathématiques sont ceux qu'il appliqua au domaine de l’astronomie.

Compas à aiguille magnétique

Modèle de Charriot pointant le Sud du Science Museum de Londres.
Boussole chinoise « Si Nan » de la Dynastie Han.

Depuis l’époque de l’ingénieur et inventeur Ma Jun (馬鈞 ; vers 200-265), les Chinois utilisaient un appareil mécanique connu sous le nom de pointage « Chariot pointant le sud » afin de se diriger sur terre (et éventuellement en mer, comme la chanson Song Shu le suggère par allusion). Ce dispositif était particulièrement ingénieux, car il utilisait un différentiel. En 1044, le célèbre Wujing Zongyao (武經總要, « Collection des plus importantes techniques militaires ») rapporte que l'on utilisait pour indiquer le sud un dispositif fait d'un objet de tôle de fer en forme de tête de poisson, magnétisé par thermorémanence (c’est-à-dire par un échauffement qui produit une faible force magnétique), et placé dans un bol d’eau, lui-même placé dans une boîte marquée de points cardinaux.

Toutefois, ce n’est qu’à partir de Shen Kuo que les premiers compas magnétiques seront utilisés pour la navigation. Dans ses écrits, Shen Kuo réalise l’une des premières références historiques au compas à aiguille magnétique, au concept de « Vrai Nord » et à son utilisation pour la navigation en mer. En effet selon lui, « [Les aiguilles magnétiques] sont toujours déplacées légèrement à l’Est au lieu de pointer plein Sud ».

D'après ce qu'il nous dit, les aiguilles étaient magnétisées en les frottant avec de la magnétite ; on les laissait flotter ou on les montait librement. Il affirme que le « compas suspendu » est la meilleure sorte de boussole, et note que l’aiguille du compas magnétique indique soit le Sud, soit le Nord.

Shen Kuo a aussi écrit qu’il était préférable d’utiliser une rose des vents utilisant vingt-quatre points au lieu du vieux compas avec huit points cardinaux. La première utilisation maritime d'une rose de ce type est enregistrée peu de temps après la mort de Shen. La préférence pour ce compas semble liée à sa découverte d’un plan méridien plus précis, déterminé par ses mesures entre l’Étoile polaire et le Vrai Nord. Toutefois, elle pourrait également avoir été inspirée par des croyances et des pratiques tirées de la géomancie.

Le livre de l’auteur chinois Zhu Yu, le Pingzhou Ketan (萍洲可談), publié en 1119 et écrit de 1111 à 1117, contient la première mention de l’utilisation d’un compas par les marins. Cependant, le livre de Zhu Yu relate les évènements remontant à 1086, à l'époque où Shen Kuo écrivait Mengxi Bitan, ce qui signifie qu’au temps de Shen, le compas pouvait déjà être en usage.

Quoi qu'il en soit, les écrits de Shen Kuo sur le compas magnétique sont des indications précieuses sur la façon dont les Chinois s'en servaient alors. En Europe, un tel concept ne devait apparaître qu’un siècle après, par l’intermédiaire d’Alexandre Neckam.

Théorie sur la géologie

Aristote (384 avant J.-C. - 322 avant J.-C.) décrivait dans sa Météorologie la façon dont la Terre peut changer physiquement, et exprimait sa conviction que tous les fleuves et les mers existant à un moment donné n’avaient pas toujours existé, ni qu'ils couleraient toujours car ils finiraient par s'assécher. Son compatriote Xénophane de Colophon (570 avant J.-C. - 480 avant J.-C.) voyait dans les fossiles marins retrouvés à terre la preuve que des inondations périodiques massives étaient survenues jadis, mais il n'a rien écrit sur la formation des bords de mer. Du côté musulman, l’érudit perse Al-Biruni (973-1048) émit l’hypothèse que l’Inde était autrefois couverte par l’océan Indien, tout en observant les formations rocheuses à l’embouchure des rivières.

La montagne Taihang

Ce fut Shen Kuo qui formula une hypothèse sur le processus de formation de la Terre et de ses continents (géomorphologie) en utilisant ses observations comme preuves empiriques. Ainsi, en trouvant des fossiles marins dans une strate géologique d’une montagne de l'intérieur des terres, et en observant d’étranges érosions naturelles dans les montagnes Taihang et Yandang près de Wenzhou, il déduisit que la terre avait été remodelée et formée par l’érosion de la montagne, l’élévation, et les dépôts de vase. Il émit l’hypothèse que les dépôts de limon avaient dû mettre très longtemps à former les terres du continent. En visitant la montagne Taihang en 1074, Shen Kuo remarqua sur une falaise les strates de coquillages de la classe des Bivalvia et des roches de forme ovoïde sur un plan horizontal. Il en conclut que la falaise était autrefois l’emplacement d’un ancien littoral qui se situait alors à des centaines de kilomètres à l’est.

Toujours selon Shen, sous le règne de Zhiping (1064-1067) un homme de Zezhou trouva un objet en creusant dans son jardin. Celui-ci ressemblait à un serpent ou à un dragon mais après examen, l’homme conclut que l’animal s’était apparemment pétrifié. Zheng Boshun, le magistrat de Jincheng, examina également la créature et nota la présence de marques d’écailles comme sur d’autres animaux marins. Shen Kuo compara cela aux « crabes de pierre » trouvés en Chine.

Vers 1080, il nota qu’un glissement de terrain sur une rive d’un grand fleuve près de Yanzhou (l’actuelle Yan'an) avait révélé un espace ouvert à plusieurs dizaines de mètres sous le sol, sous la rive effondrée. Cet espace souterrain contenait des centaines de bambous pétrifiés encore intacts avec leurs racines. « Tous se sont changés en pierre » écrivit Shen Kuo. Il précisa que les bambous ne poussent pas près de la ville de Yanzhou, située dans le Nord de la Chine, et s'interrogea sur la dynastie durant laquelle ces bambous avaient poussé. Considérant que les endroits humides et sombres offraient des conditions adéquates pour la croissance du bambou, Shen déduisit que le climat de Yanzhou devait avoir été tel dans des temps très anciens. La paléoclimatologie n’est cependant jamais devenue une discipline établie en Chine médiévale.

Le philosophe Zhu Xi (朱熹 ; 1130-1200), connu pour avoir lu les œuvres de Shen Kuo, a écrit sur ce curieux phénomène naturel. Les descriptions de Shen sur l’érosion des sols, les changements climatiques et les dépôts sédimentaires précédèrent deux ouvrages de référence comme De veteribus et novis metallis par Georgius Agricola en 1546 ou les travaux de James Hutton en 1802. L’historien Joseph Needham compara la trouvaille de Shen à celle du savant écossais Roderick Murchison (1792-1871) qui devint géologue suite à l’observation providentielle d’un glissement de terrain.

Astronomie

Une des cartes astronomiques publiées dans un livre de Su Song datant de 1092, avec la position de l’étoile polaire corrigée par Shen Kuo.

En tant que chef du Bureau de l’astronomie, Shen Kuo était un passionné érudit d’astronomie et améliora plusieurs instruments astronomiques. On lui attribue des modèles améliorés de gnomon, de sphère armillaire, de clepsydre et d’horloge. Il conçut un nouveau type de réservoir pour la clepsydre, et plaida pour une interpolation plus efficace de l’étalonnage de la mesure du temps. Pour améliorer le modèle du Ve siècle du tube astronomique, Shen Kuo en accrut le diamètre afin que le nouveau calibrage puisse observer l’étoile polaire indéfiniment. Ce fut en raison du déplacement de la position de l’étoile polaire depuis l’époque de Zu Geng au Ve siècle, que Shen Kuo observant le mouvement de l’étoile polaire pendant trois mois, conclut qu’elle avait bougé d’un peu plus de trois degrés. Apparemment, cette « trouvaille » astronomique eut un impact sur la communauté intellectuelle de l’époque en Chine. Même le rival politique de Shen, l’astronome Su Song, corrigea la position de l’étoile polaire dans les versions de son atlas céleste. Avec son collègue Wei Pu du Bureau de l’astronomie, Shen Kuo traça les coordonnées exactes des mouvements planétaires et lunaires en enregistrant leurs observations astronomiques trois fois par nuit sur une durée de cinq ans. Bien que les cartes du ciel aient été créées entretemps, cette quantité d’observations astronomiques collectées sur une durée aussi longue ne fut égalée en Europe qu’à l’époque de l’astronome Tycho Brahe (1546-1601).

Les phénomènes astronomiques des éclipses solaire et lunaire étaient connus en Chine depuis au moins l’époque des astronomes Gan De (甘德 ; IVe siècle av. J.-C.) et Shen Shi (石申 ; IVe siècle av. J.-C.), puisque ce fut Shi Shen qui donna des instructions sur la prévision des éclipses fondées sur la position de la Lune par rapport au Soleil. Le philosophe Wang Chong (王充 ; 27-97) avait avancé des arguments contre la théorie de « l’influence rayonnante » des écrits de Jing Fang au Ier siècle av. J.-C., et sur la véracité de l’hypothèse de l’astronome Zhang Heng (張衡 ; 78-139), selon laquelle la Lune ne faisait que refléter la lumière du soleil. Jing Fang disait au Ier siècle av. J.-C. qu’il était depuis longtemps admis en Chine que le Soleil et la Lune avaient une forme sphérique et non plate. Shen Kuo développa également cette théorie, expliquant pourquoi les corps célestes étaient sphériques, allant à l’encontre de la théorie de la « Terre plate » pour les corps célestes. Cependant, il n’y a pas de preuves laissant à penser que Shen Kuo ait soutenu la théorie d’une Terre ronde, laquelle fut introduite dans les sciences chinoises par Matteo Ricci et Xu Guangqi au XVIIe siècle. Lorsque le directeur de l’Observatoire astronomique demanda à Shen Kuo si les formes du Soleil et la Lune étaient comme les balles rondes ou plates, Shen Kuo expliqua que les corps célestes étaient, dans la limite de ses connaissances, sphériques. Tout comme Zhang Heng, Shen Kuo assimilait la Lune à une balle d’argent, qui ne produisait pas de lumière, mais reflétait simplement celle fournie par une autre source (le Soleil). Il expliqua que lorsque la lumière du soleil était « inclinée », la pleine lune apparaissait. Il poursuivit en expliquant que si l’on couvrait n’importe quelle sorte de sphère de poudre blanche et qu’on la regardait sur le côté, elle donnerait l’impression d’être un croissant, et par conséquent, il estimait que les corps célestes étaient sphériques. Il affirma également que, bien que le Soleil et la Lune fussent en conjonction et en opposition entre eux une fois par mois, cela ne signifiait pas que le Soleil serait éclipsé à chaque fois que leurs chemins seraient réunis, en raison de la légère obliquité de leurs chemins orbitaux.

Une réplique moderne d’une sphère armillaire de l’époque Ming, située à l’ancien observatoire de Pékin.

Shen Kuo est aussi réputé pour ses hypothèses cosmologiques expliquant les variations des orbites planétaires, y compris le mouvement rétrograde. Son collègue Wei Pu s'était rendu compte que l’ancienne méthode de calcul du temps solaire moyen était inexacte par rapport à la vision apparente du Soleil, puisque ce dernier est en avance de celle-ci dans la phase accélérée du mouvement et derrière elle dans la phase retardée. Les hypothèses de Shen étaient similaires à la notion d'épicycle dans les traditions gréco-romaines, mais lui seul compara la section latérale des chemins orbitaux des planètes et les variations de leur vitesse à ces points, ce qu'il compara à la forme des feuilles de saule. Les travaux de Shen sur le mouvement planétaire peut aussi être comparés à celui de l’astronome persan Nasir ad-Din at-Tusi (1201-1274), qui écrivit Zij-i Ilkhani.

Les astronomes de la dynastie Song de l’époque de Shen utilisaient encore la théorie de la Lune et les coordonnées de Yi Xing, ce qui après 350 ans était devenu une erreur considérable. Pour résoudre ce problème, Shen et Wei tinrent des archives astronomiques où ils notaient la position de la Lune, à l’instar de ce qu’ils avaient fait pour les planètes, trois fois par nuit pendant cinq années successives. Les fonctionnaires et les astronomes de la cour s'opposèrent violemment à Shen et Wei, s'estimant offensés par leur insistance à démontrer que les calculs du renommé Yi Xing étaient devenus inexacts. Ils diffamèrent aussi Wei Pu, par jalousie envers sa basse extraction. Lorsque Shen et Wei firent une démonstration publique en utilisant le gnomon pour prouver l’erreur, les autres ministres acceptèrent de corriger ces erreurs lunaires et solaires. Malgré ce succès, ils finirent par rejeter les tables des mouvements planétaires de Shen et Wei. De ce fait, seule la pire et la plus évidente des erreurs fut corrigée, tandis que de nombreuses imprécisions demeuraient.

Typographie

Selon Shen Kuo, durant le règne Qingli (1041-1048), sous l’Empereur Renzong des Song (仁宗 ; 1022-1063), un artisan connu sous le nom de Bi Sheng (毕升 ; 990-1051) inventa l’impression typographique à l’aide de caractères mobiles en céramique. Bien que l’assemblage de caractères individuels pour composer un texte ait ses origines dans l’Antiquité, l’innovation de Bi Sheng était totalement révolutionnaire pour l’époque. Shen Kuo note que le processus était fastidieux si l’on ne voulait imprimer que quelques copies d’un livre, mais si l’on désirait en faire des centaines, voire des milliers, il s'avérait incroyablement rapide et efficace. Hors des écrits de Shen Kuo, cependant, on ne sait rien de la vie de Bi Sheng ou de l’influence des caractères mobiles de son vivant.

Il reste quelques livres imprimés à la fin de la dynastie Song en utilisant ce procédé, dont Notes du hall de Jade (玉堂雜記) de Zhou Bida imprimé en 1193 avec les de caractères mobiles d’argile cuite décrits dans Mengxi Bitan. Yao Shu (1201-1278), conseiller auprès de Kubilai Khan, persuada un jour son disciple Yang Gu d’imprimer des manuels de philologie et des textes néo-confucéens à l’aide de ce qu’il appelait « la méthode de Shen Kuo ». Wang Zhen (王祯 ; vers 1290-1333), auteur du traité agricole, scientifique et technologique Nong Shu, mentionne une autre méthode de cuisson de la faïence sur cadres afin de créer des blocs complets.

Wang Zhen améliora également son utilisation en inventant des caractères mobiles en bois dans les années 1297 ou 1298, alors qu’il était magistrat à Jingdezhen. Bi Sheng avait déjà expérimenté cette méthode, mais Wang fut celui qui contribua le plus à augmenter la rapidité d'impression grâce à de simples dispositifs mécaniques, et qui permit l’agencement complexe et systématique de blocs types en bois impliquant l’utilisation de tables de roulement.

Bien plus tard, Wang Zhen fit des tentatives avec de l'étain, mais le trouva inefficace.

Au XVe siècle, l’imprimerie à caractères mobiles en métal fut développée en Chine par la dynastie Ming (et plus tôt vers le milieu XIIIe siècle en Corée pendant la période Chosŏn), et fut largement pratiquée en Chine au moins jusqu’au XVIe siècle. À Jiangsu et Fujian, les riches familles de l’ère Ming sponsorisèrent le métal, le plus souvent du bronze. Cela incluait notamment les travaux de Hua Sui (华燧 ; 1439-1513) qui mit au point la première méthode chinoise utilisant le bronze en 1490.

En 1718, vers le milieu de la dynastie Qing (1644-1912), le savant de Tai'an connu sous le nom de Xu Zhiding développa des caractères mobiles en émail au lieu de la faïence. Il y eut également Zhai Jinsheng (né en 1784), un professeur de Jingxian, qui passa trente années à créer une police d'écriture mobiles en faïence, laquelle en 1844 comptait plus de 100 000 caractères chinois en cinq tailles différentes.

Malgré ces avancées, l’imprimerie à caractères mobiles ne se généralisa jamais en Asie de l'Est, que la gravure sur bois avait atteinte depuis la dynastie Tang au IXe siècle. Avec les sinogrammes, la grande quantité des caractères écrits (morphèmes) entrava l’adoption et l’utilisation des caractères mobiles. En outre, l’imprimerie de Johannes Gutenberg (1398-1468) fut finalement entièrement adoptée comme norme en Chine, malgré une tradition de gravure sur bois toujours populaire en Asie de l’Est.

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