Cathédrale Notre-Dame de Constance - Définition

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Introduction

Cathédrale Notre-Dame de Constance
Vue générale de l'édifice

Nom local Konstanzer Münster
Latitude
Longitude
47° 39′ 48″ Nord
       9° 10′ 34″ Est
/ 47.66333, 9.17611
 
Pays Allemagne  Allemagne
Ville Constance
Culte Catholique romain
Type Cathédrale jusqu'en 1821
Rattaché à Archidiocèse de Fribourg-en-Brisgau
Début de la construction VIe siècle
Fin des travaux 1857
Style(s) dominant(s) Roman
Localisation
 

La cathédrale Notre-Dame de Constance est l'ancien siège de l'évêché de Constance, en Allemagne. La première construction de l'édifice remonte aux premiers temps de la création du siège épiscopal, vers l'an 600, et est mentionnée pour la première fois en l'an 780. Elle fut pendant douze siècles le siège de l'évêque de Constance et accueillit les débats du Concile de Constance (1414-1418). Depuis la disparition de l'évêché en 1821, la cathédrale est utilisée comme église paroissiale.

D'un point de vue architectural, il s'agit d'une des plus grandes églises romanes du sud-ouest de l'Allemagne. Cette basilique, construite sur un plan en forme de croix latine (composée d'une nef de neuf travées flanquée de collatéraux, d'un transept saillant et d'une abside à plan carré), fut consacrée en 1089. La construction romane a évolué dans le style gothique avec le large bloc de la tour de l'ouest, comprenant le portail occidental (XIIe siècle), la rangée de chapelles annexes (XVe siècle), et plus particulièrement le sommet néo-gothique de la tour, datant seulement du XIXe siècle.

La rotonde de Saint-Maurice, de style roman, comportant un Saint-Sépulcre du gothique primitif, est un lieu important de pèlerinage sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle (le Schwabenweg, ou route souabe). La cathédrale, plus haut bâtiment de la vieille ville, à la silhouette facilement reconnaissable, se détache comme le symbole de la cité.

L'ameublement des époques gothique et romane subsiste seulement ponctuellement ; à l'intérieur de l'église le mobilier des époques baroque, classique et néo-gothique se superpose. Les saints patrons de la basilique sont la Vierge Marie et les patrons de l'ancien évêché de Constance, saint Pélage et Conrad de Constance.

La cathédrale en 1819
Plan du quartier de la cathédrale datant de 1880, et encore valable en 2008

Histoire

Antiquité et Haut Moyen Âge

Reste d'une tour de garde romaine sur la place de la cathédrale, en 2004

Le tertre de la cathédrale est le point le plus élevé de la partie actuelle de Constance située au sud du Rhin, à environ 7 mètres au-dessus du niveau du lac. Au contraire d'aujourd'hui, cette colline était à l'époque préhistorique une mince langue de terre, accessible seulement depuis le sud, et entourée de plans d'eau, et à l'ouest, de marécages (ce n'est qu'avec les efforts des habitants au Haut Moyen Âge et plus tard que la surface constructible augmenta, par remblais). Les Celtes s'installèrent à cet endroit vers 120 av. J.-C. Aux IIIe et IVe siècles, à leur retour depuis le limes de Haute-Germanie et de Rhétie, les Romains érigèrent sur ce tertre plusieurs fortifications, afin de sécuriser la nouvelle frontière nord de l'empire (le limes Danube-Iller-Rhin). Les découvertes archéologiques montrent qu'au plus tard en l'an 300 apr. J.-C., une place forte romaine maçonnée s'élevait là, appelée « Constantia », d'après l'empereur Constance Chlore (305/306). Le piémont alpin et la région de l'exutoire du Rhin pouvaient également être surveillés depuis ce lieu. Les Romains utilisaient la place comme base pour leur flotte et la relièrent par des routes à d'autres garnisons comme Tagestium (Stein am Rhein), Brigantium (Bregenz) et Vitudurum (Winterthour). On suppose qu'une colonie civile et militaire a existé ici au moins jusqu'au retrait des Romains pendant l'hiver 401/402, et qu'une population christianisée mêlant Romains et Celtes resta sur place, supplantée au cours des 200 années suivantes par les Alamans, pas encore christianisés.

Sur ce tertre, l'évêché de Constance, fondé entre 585 et 590, fit ériger sa première cathédrale. Le siège épiscopal à l'ouest du lac de Constance servait aux Francs de base arrière pour la christianisation et la soumission des Alamans. L'endroit était vraisemblablement habité à l'époque et l'église consacrée à la Vierge Marie s'élevait sans doute à l'intérieur des murs de la place forte romaine. Une biographie de saint Gall datant de la fin du VIIIe siècle indique que l'église épiscopale devait déjà exister en 615. Mais l'église mariale est mentionnée pour la première fois seulement en 780, et continua sans doute à être utilisée par les Francs comme église paroissiale, mais pas épiscopale. Au nord de la cathédrale, des pêcheurs, des artisans et les membres de la cour de l'évêque s'installèrent au cours du Haut Moyen Âge, et ils fondèrent ainsi le plus ancien quartier de la ville, le Niederburg. C'est ainsi qu'une colonie se développa lentement autour de l'église, mais ce n'est qu'au Haut Moyen Âge qu'elle atteint une taille significative.

Époques carolingienne et ottonienne

Les premières églises de Constance (rouge) et les nouvelles constructions ottoniennes sur les modèles de Rome et de Jérusalem (jaune)

Dans la première moitié du IXe siècle, une reconstruction de l'église fut apparemment entreprise par les carolingiens, sous la forme d'une basilique à trois vaisseaux, sans transept, avec un chœur à trois parties et une abside droite (en supposant que la première église conventuelle de l'abbaye de Saint-Gall servît de modèle à la construction constançoise). Vers le milieu du IXe ou le début du Xe siècle, une crypte fut creusée, et plus tard élargie, sans doute pour accueillir les restes de saint Pélage, de telle sorte que la cathédrale et l'évêché héritèrent d'un deuxième saint patron (des églises consacrées à saint Pélage se trouvent encore aujourd'hui dans l'ancien diocèse). La plus grande partie de la construction de la crypte et du palais épiscopal au sud de l'église, destiné à servir de résidence aux évêques, ainsi qu'aux rois en voyage, fut ordonnée par le puissant évêque Salomon III (évêque de 890 à 919).

Le Xe siècle vit une augmentation importante du pouvoir de l'évêque : Conrad Ier (935-975) fit transformer les églises de Constance sur le modèle des 5 basiliques romaines ; Constance devait apparaître comme une seconde Rome. Autour de la cathédrale consacrée à la Vierge Marie, comme l'église Sainte-Marie-Majeure, on trouvait une ceinture d'églises paroissiales : St. Johann dans le Niederburg (comme Saint-Jean-de-Latran), St. Lorenz (Saint-Laurent-hors-les-Murs), St. Paul vor den Mauern (Saint-Paul-hors-les-Murs), et – similairement à la basilique Saint-Pierre, mais à une moindre échelle – l'église conventuelle de l'abbaye de Reichenau, fondée par son neveu et successeur Gebhard II (979-995). Conrad fit aussi construire la rotonde au nord-est de la cathédrale, une imitation simplifiée de l'église du Saint-Sépulcre de Jérusalem, et la consacra à saint Maurice, saint protecteur de l'empire ottonien (au XIIe siècle Conrad et Gebhard furent canonisés notamment pour les constructions d'églises qu'ils ordonnèrent ; Conrad fut élevé deuxième patron de la cathédrale et de l'évêché).

Les constructions d'églises de Conrad et Gebhard montraient d'une part l'importance du plus grand diocèse de l'empire, qui s'étendait de Stuttgart à Berne, et d'autre part la fidélité aux princes régnant et à leur idée de Translatio imperii : les empereurs ottoniens se revendiquaient héritiers des empereurs romains, et la construction d'églises sur le modèle romain dans la ville en était une preuve supplémentaire. L'évêché de Constance appartenait en plus à l'influente province ecclésiastique de Mayence, dont les archevêques couronnaient les rois allemands au début du Moyen Âge. Le siège épiscopal avait une bibliothèque fournie, ainsi qu'une école et formait avec le cloître de Saint-Gall (érigé entre 612 et 719) et le cloître de Reichenau (724) un important centre spirituel sur le lac de Constance au début du Moyen Âge.

Lambert, vers l'an Mil

Vers l'an mil, les plus hauts éléments actuels de la cathédrale furent mis en chantier. Cette partie de la construction, sous l'évêque Lambert (995 ?-1018), est également le plus important exemple d'architecture sacrée romane dans le sud-ouest de l'Allemagne, et servit entre autres de modèle pour l'église monumentale Saints-Pierre-et-Paul du cloître de Hirsau. La partie orientale de la cathédrale carolingienne fut élargie par un transept et une abside afin de former une croix, tandis que le vaisseau central carolingien demeurait inchangé. Selon le goût ottonien, le transept était environ moitié plus court que la nef. À gauche et à droite de la croisée carrée se trouvaient deux chapelles carrées également (le chœur de Saint-Thomas et le chœur de Sainte-Marie).

Effondrement et reconstruction, sous Rumold, à partir de 1054

Vue de la partie romane de la cathédrale avec des plafonds de bois simples, et sans les chapelles gothiques latérales (Dehio/Bezold, Kirchliche Baukunst des Abendlandes, 1887)

La nef de la basilique carolingienne s'écroula en 1052 pour une raison inconnue. La seule mention de cet événement se trouve dans la chronique du moine de Reichenau Hermann des Lahmen, qui note de façon lapidaire «  Constantiae basilica S. Mariae corruit » (« la basilique Sainte-Marie de Constance s'est écroulée »). La cause était peut-être un tremblement de terre ou simplement une faiblesse dans la construction.

La reconstruction commença sans délai : à partir de 1054 fut érigée sous les évêques Rumold (1051-1069) et Otto Ier une nouvelle nef à trois vaisseaux, dans laquelle le transept de l'époque de Lambert, peu endommagé, fut intégré. L'entreprise de reconstruction traîna en longueur, les évêques de Constance passant le plus clair de leur temps et de leur énergie dans les querelles d'investitures. En 1089, l'évêque Gebahrd III de Zähringen (1084-1110) consacra enfin la cathédrale reconstruite.

L'édifice s'inspirait de l'architecture romane des églises monumentales des Francs saliens aussi bien que de la cathédrale de Spire. Mais il ne comportait aucune tour. Les bras du transept furent surélevés par rapport au plan de Lambert et atteignaient désormais le niveau atteint par la nef. Sa rangée de colonnes avec de simples chapiteaux caractérisent encore aujourd'hui la cathédrale. Sa forme est inspirée de la cathédrale de Goslar, dont Rumold fut chanoine. Une rangée de méandres en perspective passe immédiatement sous le plafond, comme dans l'église Saint-Georges de Reichenau et la chapelle Saint-Sylvestre de Goldbach. Entre 1154 et 1236, l'enceinte des murs fut encore relevée et de nouveaux combles, également décorés avec des motifs religieux et un plafond lambrissé furent ajoutés, dont il ne reste aujourd'hui qu'une seule planche.

Le tertre de la cathédrale au Moyen Âge

Constance au Moyen Âge dans la plus ancienne représentation connue de la cathédrale (Chroniques de Gebhard Dacher, 1462)

Au début du Moyen Âge, le tertre de la cathédrale de Constance était déjà le centre spirituel d'une vaste région, cependant que la colonie l'entourant n'était guère davantage qu'un village. Une douzaine de cloîtres s'installèrent autour du siège épiscopal : les bénédictins à Saint-Gall (719) et Reichenau (724), ainsi qu'à Petershausen (983), et le cloître écossais à Paradies (1124), les augustins du cloître de Kreuzlingen (1124), les dominicains (1236), les franciscains (1240), les clarisses (vers 1250), les augustines (1266), les dominicaines (1265) et encore d'autres communautés. En outre, la ville de l'évêque était le siège administratif du domaine séculier, dont la ville se sépara cependant au XIIIe siècle. En 1237, Constance fut élevée au statut de ville libre d'Empire ; en 1308, elle élit pour la première fois un bourgmestre – une expression importante de l'autonomie face aux princes de l'Église. La puissance des évêques se désagrégeait dans la ville, de la même façon que dans l'empire. Les querelles internes secouaient l'évêché, et notamment, après la mort de l'évêque Heinrich von Klingelberg, deux évêques élus furent en concurrence pour la dignité. À partir de 1320 environ jusqu'au moment du concile, les modifications de la cathédrale furent minimes.

Vue du palais épiscopal détruit en 1830 (dessin de Ludwig Leiner, 1886)

Le tertre de la cathédrale était depuis le Xe siècle ceinturé d'un mur fortifié et constituait une petite résidence d'apparat. Au sud de la cathédrale se trouvait la « ville spirituelle » avec le palais épiscopal et la chapelle St. Peter, le bailliage et le tribunal du chapitre de Constance (ces bâtiments furent détruits au XIXe siècle). La place devant l'église servait alors de cimetière paroissial. Au-delà de la place passait également l'axe de transport principal de la ville, dans la direction nord-sud – entre le pont sur le Rhin construit vers 1200 et le quartier bourgeois au sud de la cathédrale avec le marché près de l'église St. Stephan. Les cours inférieure et supérieure de la cathédrale furent aussi jusqu'à la fin du Moyen Âge le lieu des discours de l'évêque, avant que la ville ne soit dirigée par un conseil.

Au nord de la cathédrale se trouvaient la salle capitulaire, la bibliothèque, l'économat (appelé Stauf, qui brûla en 1824), qui servait de débit de boisson et d'entrepôt. Autour de la cathédrale, environ 20 chanoines, des vicaires, le prieur et d'autres clercs vivaient. Il existait aussi une école pour la formation du clergé. Au début du Moyen Âge, le clergé de la cathédrale formait une communauté ressemblant à un cloître, qui partageait un espace réduit et suivait quotidiennement les messes et les prières communes. Au XIIe siècle, la vie en communauté disparut. Les membres du clergé commencèrent à occuper des maisons individuelles autour du cimetière de la cathédrale et au-delà du Niederburg, se mélangeant aux membres des corporations et des patriciens qui cherchaient à se rapprocher de l'élite spirituelle.

Construction de la tour et début de l'influence gothique

Le cloître gothique

La petite colonie qui se trouvait sur l'exutoire du Rhin au XIe siècle était dominée par la puissante cathédrale, bien que celle-ci ne possédât encore aucune tour. Vers 1100, la construction de deux tours de la façade débuta. En 1128, la tour nord, complètement achevée, s'effondra et dut être entièrement reconstruite. Presque 300 ans après le début de la construction de la tour nord, la tour sud fut achevée, en 1378. Toutes deux étaient couronnées de flèches couvertes de plaques de plomb.

Une tour supplémentaire s'éleva au-dessus de la croisée, commencée au plus tôt en 1200, de forme vraisemblablement carrée (sur le plan de la croisée, et sur le modèle de la cathédrale de Spire) et octogonale dans sa partie supérieure. Le 15 septembre 1299, un incendie la détruisit, ainsi que trois cloches, et sans doute les combles, bien qu'aucune preuve des dommages ne subsiste dans les combles. La tour de la croisée fut remplacée par une flèche, rénové plusieurs fois depuis lors.

Une fois que la nef principale et le chœur eurent reçu leur forme définitive et que l'édification de la tour n'avança plus correctement, les évêques suivants concentrèrent leurs efforts sur la modernisation de la cathédrale dans le style gothique qui prévalait autour du lac de Constance à la fin du XIIIe siècle. Le règne du gothique débuta vers 1300 avec la construction du cloître du côté nord de la cathédrale. Le cloître et la rénovation de la chapelle de Saint-Conrad et Saint-Maurice font partie des larges modifications entreprises sous Heinrich II von Klingenberg (1293-1306). Elles eurent lieu après la réforme du chapitre en 1294, qui devait mettre fin à l'indécision et la diminution du pouvoir épiscopal. Les travaux sont notamment une preuve de la concurrence entre l'évêché et l'abbaye de Salem à l'influence grandissante, et qui avait commencé la construction de la cathédrale de Salem. Après de nouvelles querelles autour du siège épiscopal et le choix de deux évêques en 1306, le cloître ne fut terminé qu'en 1320, ce qui se traduit par une rupture de style entre l'aile sud et la nouvelle aile est.

La cathédrale, église du concile de Constance

Réunion des théologiens, évêques, cardinaux et de l'antipape Jean XXIII dans la cathédrale (chroniques du concile d'Ulrich Richental, vers 1456)

De 1414 à 1418, l'évêché fut l'hôte du concile de Constance, le plus grand concile du milieu du Moyen Âge au nord des Alpes. L'antipape Jean XXIII, l'empereur Sigismond, de nombreux cardinaux, archevêques et évêques, ainsi que des milliers de serviteurs, diplomates des nations participantes, de même que des érudits, des théologiens, des marchands et des artisans – sans oublier les prostituées – vinrent de toute l'Europe résider temporairement dans la ville.

La cathédrale était le lieu de réunion officiel pour les 45 réunions plénières du concile et les congrégations, ainsi que pour les grandes fêtes liturgiques (un récit contemporain du déroulement du concile par Ulrich Richental montre les réunions se déroulant sur des bancs de bois). Environ 200 sermons portant partiellement sur la politique intérieure de l'Église furent tenus pendant la durée du concile dans la cathédrale. L'empereur lut à son arrivée en 1414 l'évangile lors de la messe de Noël – il portait la couronne impériale et une épée, comme s'il allait de soi qu'il était le chef du concile. C'est aussi ici que le 6 juillet 1415, au cours de la quinzième réunion plénière, un débat enflammé conduisit à condamner le réformateur tchèque Jan Hus à être brûlé ; le verdict fut appliqué le jour même à l'extérieur de la ville.

Pendant l'élection du nouveau pape Martin V, qui mit fin au grand schisme d'Occident, et qui se tint dans l'entrepôt de la ville (aujourd'hui appelé Konzilgebäude, le bâtiment du concile), les prières des prêtres et des évêques se tenaient dans la cathédrale. L'intronisation du nouveau pape eut lieu sur une tribune devant la cathédrale. Une plaque mortuaire devant les marches du chœur, de facture anglaise rappelle que l'évêque Robert Hallum de Salisbury mourut en 1417 pendant le concile et fut enterré dans la cathédrale.

Renouveau gothique 1420-1520

Façade sud et tours dans leur forme gothique tardive (Lithographie) de L. Deroy vers 1820
Le projet abandonné de tour de Lorenz Reder après l'incendie de 1511 (Archives de la ville de Wiesbaden)

Le concile apporta à l'évêché un renouveau économique, de telle sorte qu'à partir de 1423, une activité frénétique dans la construction de l'église commença, qui dura un siècle et fit de la cathédrale ce qu'elle est à peu près aujourd'hui. L'évêque Otto III fut particulièrement enthousiaste : des critiques de l'époque rapportent qu'il avait un si grand désir et une si grande passion à construire qu'il endetta lourdement l'évêché.

Peu après, l'intérieur roman de la cathédrale fut rénové dans le style gothique tardif : les bas-côtés, la sacristie inférieure ; le chœur de Saint-Thomas, le bras sud du transept et le sanctuaire reçurent entre 1423 et 1453 des arcs cintrés et des fenêtres ouvragées. Le mur ouest du chœur principal fut percé de trois hautes fenêtres en ogive, symboles de la Sainte Trinité. La façade sud du transept fut également refaite. Dans le chœur de Saint-Thomas se trouvait le Schnegg, un escalier en colimaçon hexagonal en grès extrêmement travaillé, portant des sculptures figuratives et qui donne une idée des capacités mais aussi des limites des constructeurs constançois de l'époque.

Dès le XIVe siècle, il apparaît qu'il y avait à proximité de l'église un atelier de construction permanente. À l'époque la mieux documentée, vers 1500, l'atelier était constitué de 20 à 30 tailleurs de pierre qui s'échangeaient régulièrement avec les ateliers de Spire, Coblence, Salem, Strasbourg, Bebenhausen, et Maulbronn. Les tailleurs eurent trois maîtres-tailleurs entre 1453 et 1526, mais à cette époque, ces distinctions n'entraînaient pas le pouvoir de diriger directement les travaux – des artisans assumaient cette charge à tour de rôle ; quant au contenu théologique des œuvres, il était choisi par le chapitre.

Le premier de ces trois maîtres fut Vincenz Ensinger (en activité de 1453 à 1489), fils de Matthäus Ensinger. Il fit reconstruire la bibliothèque à l'étage de la salle capitulaire et aménager les chapelles latérales au sud de la nef (1465-1485). Ensinger délégua au sculpteur strasbourgeois renommé Nikolaus Gerhaert van Leyden la redécoration du chœur. Gerhaert ne termina cependant qu'un retable ; les stalles ne furent pas achevées, car le sculpteur quitta le chantier après une dispute au sujet de son salaire. L'artiste local Simon Haider finit le travail. Haider, qui n'était qu'ébéniste, ne put donc que réaliser des sculptures en bois, comme c'est le cas sur le portail occidental. Le retable de Gerhaert fut détruit pendant la Réforme, mais fut jusqu'à ce moment un objet d'admiration accessible pour les sculpteurs du sud de l'Allemagne.

Le maître Lux Böblinger (1490-1502), frère de Matthäus Böblinger, se chargea de la chapelle Welser décorative du côté de la tour nord. D'après la volonté de l'évêque Hugo von Hohenlandenberg, Böblinger posa en 1497 la première pierre de la tour centrale, qui devait prolonger la façade jusqu'au massif monumental de la tour ouest, d'après le modèle de la cathédrale de Strasbourg. Pour supporter le poids de cette façade, deux contreforts monumentaux en forme de flèche furent construits à gauche et à droite du portail. Son successeur Lorenz Reder de Spire (en activité de 1505 à 1526), avant d'être maître d'œuvre de la cathédrale d'Überlingen, termina la tour centrale, qui atteignit la hauteur des deux tours existantes. Comme celles-ci, elle devait recevoir une flèche couverte de plaques de plomb.

Le 21 octobre 1521, un incendie détruisit les toits et les cloches des trois tours, ainsi que l'orgue. La reconstruction fut financée par l'Église au moyen d'indulgences vendues aux habitants de Constance. De 1512 à 1526 on répara les tours restantes et on plaça au sommet des tours nord et sud des coupoles cintrées en maçonnerie. Entre les deux se trouvait l'abri en bois des gardiens. La « maisonnette des gardiens » était continuellement occupée, les frais étant partagés par la ville et l'évêque. Un nouvel orgue imposant fut aussi complètement refait (1515-1523), de même que la galerie de l'orgue (1516-1518) et la voûte du porche. Une rencontre des maîtres-tailleurs de pierre des principales églises de la région avait recommandé après l'incendie la construction d'une tour centrale sur le modèle de la Cathédrale Notre-Dame de Fribourg ; elle ne fut jamais entreprise, car la ville tombait progressivement sous l'influence de la Réforme et tous les travaux de la cathédrale s'arrêtèrent.

Iconoclasme et contre-réforme

Au début du XVIe siècle, la Réforme commença par se répandre dans les villes libres de l'Empire. À Constance, les premiers prédicateurs réformateurs, à l'image d'Ambrosius Blarer, commencèrent à prêcher en 1518, peu après la publication des 95 thèses de Martin Luther. Le conseil de la ville saisit l'occasion de destituer l'évêque Hugo von Hohenlandenberg après des années de tentatives de sa part d'élargir ses privilèges et son pouvoir sur la ville. Après une vague de protestations, l'évêque quitta la ville en 1526 et s'installa à Meersburg, le chapitre déménagea pour Überlingen, puis en 1542 pour Radolfzell. L'inventaire de la cathédrale et son trésor que le clergé ne put emmener fut placé sous l'administration du conseil de la ville. L'iconoclasme se déroula de façon très ordonnée à Constance : les reliquaires, peintures, statues, tapisseries et les autres œuvres d'art de valeur de l'évêché furent confisqués par la ville et furent revendus ou fondus. Les reliques, dont les restes de saint Conrad et saint Pélage, et les restes de saint Gebhard conservés au monastère de Petershausen furent jetés dans le Rhin. Les autels (plus de 60) et presque tout l'inventaire de la cathédrale furent définitivement perdus. La cathédrale devint une église paroissiale protestante sous gestion de la ville, mais ce système ne resta en place que pendant deux décennies environ.

L'ancienne église jésuite, construite entre 1604 et 1607

En août 1548, l'empereur Charles Quint obligea Constance, en tant que dernière ville du sud de l'Allemagne membre de la ligue de Smalkalde, à la recatholicisation par la force armée. Constance se vit retirer son statut de ville libre et fut rattachée à l'Autriche antérieure. Les chanoines firent leur retour, pour exiger la restitution de leurs possessions. Sur la demande de la ville, le nouvel évêque Christoph Metzler von Andelberg revint le 11 mai 1551 à Constance où il reçut un accueil plutôt froid, et le 13 mai, la cathédrale fut reconsacrée à l'ancien rite. Meersburg devait rester jusqu'à la dissolution de l'évêché la ville de résidence épiscopale.

Par la suite, les ornements de la cathédrale et de ses chapelles furent complètement refaits. Une partie des autels, des cloches et des orgues furent financés par la ville. Les finances de l'évêché n'étaient pas suffisantes pour permettre d'entreprendre des travaux d'envergure. Des dons venaient surtout des habitants riches ou des fortunes personnelles des chanoines d'origine noble. Afin d'assurer le retour durable à la foi catholique, dans le contexte de la Contre-Réforme, les Jésuites s'installèrent vers 1600 près du siège épiscopal. Ils érigèrent à proximité de la cathédrale la Christuskirche (Église du Christ) et ouvrirent près de celle-ci une église, l'actuel Heinrich-Suso-Gymnasium. Sous la poussée des Jésuites, un synode diocésain fut organisé en 1609 dans la cathédrale, afin de réformer l'évêché. Mais la Contre-Réforme était aussi active sur le plan artistique : le plafond en bois peint de la nef centrale, datant du Moyen Âge, disparut sous la voûte dessinée par l'architecte jésuite Heinrich Mayer le Jeune, entre 1679 et 1683 ; les chœurs latéraux accueillirent de monumentaux autels baroques. D'autres modifications dans le style jésuite romain durent au contraire être abandonnées.

Classicisme vers 1775

Dessin pour la réfection du chœur par d'Ixnard

Ce n'est que vers la fin du XVIIIe siècle que les travaux de la cathédrale reprirent, sur le modèle du classicisme français. L'architecte d'églises et de châteaux réputé Pierre Michel d'Ixnard, qui avait reçu peu auparavant la charge de l'aménagement d'une église par l'abbaye de Salem, dessina pour la cathédrale de Constance un maître-autel (1774) et une réorganisation autour de l'autel, de la croisée et des bras du transept dans un style antique.

L'exécution fut confiée à ses compagnons Josef Ferdinand Bickel et Carlo Luca Pozzi, de la famille des stucateurs italiens Pozzi. Le nouveau maître-autel fut adossé au mur est, dont les fenêtres furent murées dans leur tiers inférieur. Les trois parties du chœur et la croisée reçurent un plafond à caissons partiellement doré, les murs furent décorés d'une couche de marbre unie. Ce dessin classique ne remporta pas un succès complet. Au XIXe siècle, les ajouts classiques sur l'architecture gothique furent complètement retirés. Aujourd'hui, on voit plutôt dans ces modifications une réinterprétation de l'espace romano-gothique, de la même façon que dans la cathédrale de Salem.

Sécularisation et dissolution de l'évêché

Avec la sécularisation commença le déclin de l'évêché. Dès 1795, l'Autriche prit possession d'une partie du trésor de la cathédrale pour financer la guerre contre la France. L'abbaye de Constance, possession séculière du prince-évêque, fut confisquée en 1802 au profit du margraviat de Bade, et quelques années plus tard, Constance lui fut également cédée. Ainsi les bâtiments sacrés et le trésor de la cathédrale passèrent dans les mains badoises. Le théologien Ignaz Heinrich von Wessenberg, vicaire général de l'évêché et un partisan du joséphisme fut élu vicaire capitulaire à la mort de l'évêque Karl Theodor Anton Maria von Dalberg. Le pape Pie VII s'opposa aux plans de Wessenberg pour la création d'une Église catholique nationale allemande, et ne reconnut pas le vote. Peu après, l'évêché fut dissous par le pape, qui fonda le diocèse de Fribourg. Sous la protection du gouvernement, Wessenberg accomplit sa tâche jusqu'à l'occupation du nouveau siège épiscopal en 1827. Sa résidence fut construite presque en face de la cathédrale ; en 1860, la ville permit à ses citoyens d'honneur d'être enterrés dans le bas-côté nord.

À partir de 1821, la cathédrale n'était plus qu'une simple église paroissiale catholique. L'ancienne église paroissiale pour le Niederburg, St. Johann fut fermée et un prêtre s'installa. Avec l'église St. Stephan, la cathédrale survécut à la vague de laïcisation qui frappait les autres églises constançoises. Dans le premier tiers du XIXe siècle, une grande partie du quartier de la cathédrale fut la proie d'incendies, ou fut démolie : en 1824 un incendie particulièrement violent détruisit l'ancien complexe résidentiel des chanoines, ainsi que le Stauf et le cloître. Le palais épiscopal, vieux de 900 ans et inoccupé depuis l'époque de la Réforme, au sud de la cathédrale, fut démoli et fut remplacé en 1830 par la maison de la société des musées de Constance, qui sert aujourd'hui de presbytère.

Néogothique et achèvement du clocher vers 1850

En 1853-1854 la nouvelle tour et les « cloches à fromage » du gothique tardif coexistèrent brièvement (esquisse de C. Dyckerhoff), peu après, les coupoles furent rasées

Vers le milieu du XIXe siècle le concept de conservation du patrimoine se répandit dans le Bade et atteignit la cathédrale de Constance — « un des monuments majeurs de l'architecture gothique, parmi les plus beaux de son époque », comme le relate un architecte contemporain. En 1844, Léopold de Bade autorisa la restauration. Sous la direction de Heinrich Hübsch, l'extérieur du bâtiment fut ravalé et certains bâtiments attenants rasés entre 1846 et 1860. Les travaux comprenaient une regothisation de la cathédrale. Au XIXe siècle, le gothique s'imposa comme le style original de la nation allemande, et c'est pourquoi la cathédrale devait être ramenée à son état précédant l'influence baroque, qui était méprisée.

Comme pour de nombreux autres bâtiments, il fallait qu'un idéal patriotique s'impose, même s'il n'avait aucun fondement historique. Lors de la restauration, on simplifia le côté est, les portails nord et sud furent également démolis en 1854 et 1857 respectivement. Le style de la façade, considéré comme « impur » fut refait selon les conceptions du néo-gothique en cours, et la flèche encore présente aujourd'hui fut mise en place. Ce n'est que grâce aux protestations du prêtre de la cathédrale que l'on renonça à la réfection du chœur classique. Les fenêtres murées par d'Ixnard furent repercées.

Le changement le plus important commença : la tour octogonale en maçonnerie modifia substantiellement l'apparence de la façade. Les coupoles ajourées maçonnées du gothique tardif au-dessus des deux tours, tant appréciées par la population, dessinées par Hübsch en forme de « cloches à fromage », ainsi que le toit pyramidal de l'abri des gardes heurtaient la sensibilité du directeur des travaux. Peu après un octogone avec une coupole simple fut projeté ; il ressemblait quelque peu aux coupoles des tours déjà existantes. Le deuxième projet, qui fut finalement mené à bien, augmenta l'octogone de deux étages et le couronna avec une flèche ouvragée ajourée. Le modèle en était la flèche de la Cathédrale Notre-Dame de Fribourg (le dessin de la tour centrale par Lorenz Reder était inconnu de Hübsch). On renonça aux deux tours initialement prévues au Moyen Âge, pour des raisons inconnues, peut-être financières ou esthétiques.

Le 27 juillet 1857 le fleuron qui devait conclure l'ensemble fut mise en place ; les coupoles suivirent dans l'année. La flèche s'élevant à 76 mètres achevait la gothisation de la basilique salique. Les protecteurs du patrimoine, au-delà de la rénovation controversée, donnèrent ainsi à la ville un point de repère remarquable de loin.

Restaurations 1880–1935

La nef et le chœur en 1888 (photographie de German Wolf)

L'intérieur de la cathédrale dut encore attendre pendant plusieurs décennies la restauration néo-gothique. En 1879 August Essenwein, directeur du musée national germanique, recommanda la remise en place du plafond du Moyen Âge, qui avait été remplacé par la voûte baroque. Le projet ne fut pas modifié ; pour y parvenir, les chapelles latérales et la rotonde de Saint-Maurice furent repeintes selon le style du Moyen Âge, sous la direction de l'inspecteur des travaux Bär entre 1881 et 1887. Cette transformation fut critiquée par les contemporains comme étant dépourvue de plan. Le réaménagement néo-gothique de la plupart des chapelles latérales date d'entre 1910 et 1914.

Une autre restauration de l'intérieur suivit entre 1922 et 1923 sous la direction de Paul Motz, pour le jubilé des 800 ans de la canonisation de l'évêque Conrad. Ce n'est qu'alors que le classicisme retrouva ses droits : les fenêtres gothiques du mur du chœur furent complètement fermées, les décorations en stuc et les ornements furent complétés et intégrés à l'espace classique. Les peintures colorées dans la crypte, la chapelle de Saint-Conrad et diverses tombes furent remises en place en fonction des investigations faites au cours des travaux. Dans les années 1930 des travaux de réparation eurent lieu à l'extérieur, où des briques, du béton, du bitume remplacèrent les matériaux originels ; les pierres calcaires de Suisse ne purent plus être utilisées après 1933 pour des raisons politiques. Les méthodes de réparation d'antan (et partiellement expérimentales) se révélèrent problématiques, car elles conduisaient à des dommages, notamment sur les anciens joints d'étanchéité.

De l'après-guerre au présent

Maçonnerie endommagée et rénovée du côté nord du transept

Une nouvelle restauration générale de la cathédrale commença en 1962. En premier lieu, le grès souffrait des gaz d'échappement, à tel point que les pierres de la cathédrale devaient être continuellement rénovées ou remplacées par des copies. Les briques des années 1930 créaient également des dommages supplémentaires. Depuis 1968 il y avait continuellement des ateliers de construction sous la surveillance de l'État. Six à huit tailleurs de pierre travaillaient pratiquement exclusivement à la réfection de la cathédrale. Depuis les années 1960, environ 30 millions d'euros ont été dépensés pour la rénovation et l'entretien de la cathédrale.

De 1979 à 1988 la chapelle Welser dans le coin nord-ouest de la cathédrale fut rénovée dans son état précédant la restauration du XIXe siècle, et là où cela n'était pas possible, des gargouilles modernes furent placées. En 1985, des investigations pour la tenue de travaux sur les tours furent menées. En effet les étages supérieurs nécessitaient de telles rénovations que des travaux superficiels ne suffisaient pas toujours. Au lieu de cela, l'étage des tours de la tour nord fut complètement aplani entre 1991 et 1996 et reconstruit à l'identique avec des pierres de grès saines ; sur la tour sud, des réparations furent suffisantes. Le grès employé provenait comme à l'époque de la construction de Rorschach et depuis peu du lac de Zurich. De 1998 à 2001 l'octogone néo-gothique et la flèche suivirent. En même temps la façade ouest fut complètement remise à neuf. En 2005 les travaux sur la tour se terminèrent ; la rénovation des façades nord et sud devait suivre.

En 1955, le pape Pie XII éleva le sanctuaire au rang de basilique mineure. La paroisse actuelle peut accueillir environ 3 000 croyants. À Constance, il n'y a que le cloître des Dominicaines de Zoffingen de la Brückengasse, fondé en 1257, qui ait été épargné par la Réforme et la sécularisation. La fête annuelle la plus importante de la paroisse est la fête de Saint-Conrad le 26 novembre, à l'occasion de laquelle un évêque ou un abbé de l'archidiocèse de Fribourg-en-Brisgau ou d'un diocèse voisin est invité. Le patronage marial est fêté le 8 septembre (naissance de Marie). La cathédrale est ouverte toute l'année aux visiteurs ; la plate-forme de la tour est accessible de Pâques à fin octobre. En plus des services religieux catholiques, des concerts ont lieu régulièrement dans la cathédrale.

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